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Fonctions harmoniques

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FONCTIONS HARMONIQUES DANS LE PLAN

10.1. Fonctions harmoniques

Une fonction harmonique sur un ouvert Ω de IRn est une fonction u∈C2(Ω) qui v´erifie l’´equation aux d´eriv´ees partielles :

x∈Ω,

n k=1

2u

∂x2k(x) = 0.

Sin = 2, il existe une relation tr`es simple entre les fonctions holomorphes et les fonctions harmoniques. Cette relation permet d’obtenir facilement les propri´et´es fondamentales de celles-ci. Beaucoup de ces propri´et´es sont vraies en dimension plus grande, mais leurs d´emonstrations dans ce cas exigent des m´ethodes diff´erentes.

D´efinition 10.1.1. — Soit Ω un ouvert de C . Une fonction harmo-nique sur Ω est une fonctionu∈C2(Ω) qui v´erifie l’´equation :

(63) ∀z Ω, 2u

∂x2(z) + 2u

∂y2(z) = 0.

On note H(Ω) l’espace des fonctions harmoniques sur Ω et H(Ω,IR) le sous-espace des fonctions harmoniques sur Ω `a valeurs r´eelles.

L’op´erateur :

(64) ∆ :C2(Ω)→C0(Ω), ∆ := 2

∂x2 + 2

∂y2 est appel´e le Laplacien. C’est un op´erateur lin´eaire :

∀u, v∈C2(Ω), ∀a, b∈C, ∆(au+bv) =a∆u+b∆v.

136 CHAPITRE 10. FONCTIONS HARMONIQUES DANS LE PLAN

C’est aussi un «op´erateur r´eel» i.e. ∆u est une fonction r´eelle si u est une fonction r´eelle. Si f = u+iv C2(Ω) (forme canonique), ∆f =

∆u+i∆v est l’´ecriture de ∆f sous forme canonique. On a obtenu : Lemme 10.1.2. — Siest un ouvert de C, H(Ω) est un espace vec-toriel sur C. Une fonction u∈ C2(Ω) est harmonique si et seulement si sa partie r´eelle et sa partie imaginaire le sont.

D’apr`es le th´eor`eme de Schwarz, on a :

siuest une fonction de classeC2. On en d´eduit la d´ecomposition suivante du Laplacien

comme produit (de composition) de deux op´erateurs diff´erentiels du pre-mier ordre. Aucune d´ecomposition de ce type n’existe en dimension plus grande. En notation complexe, la formule pr´ec´edente s’´ecrit :

(65) ∆ = 4 2

∂z∂z.

On notera que les op´erateurs ∂/∂z et ∂/∂z commutent (quand on les fait agir sur une fonction de classeC2), en raison encore du th´eor`eme de Schwarz.

Th´eor`eme 10.1.3. — Soitun ouvert de C et f ∈ O(Ω). Les fonc-tions f, Ref et Imf sont harmoniques sur Ω. Si de plus Ω est sim-plement connexe, toute u H(Ω,IR) est la partie r´eelle d’une fonction holomorphe sur Ω. f est harmonique et aussi Ref et Imf.

Pour la r´eciproque, remarquons d’abord que

∂u

10.1. FONCTIONS HARMONIQUES 137

et que si f =u+iv ∈ O(Ω) (forme canonique) :

∂u

∂z +i∂v

∂z = 0, ∂u

∂z +i∂v

∂z =f(z).

En prenant la conjugu´ee dela premi`ere ´equation, on obtient ∂v/∂z =

−i∂u/∂z, d’o`u :

f(z) = 2∂u

∂z. Soit maintenant u∈H(Ω,IR). On a :

∂z ∂u

∂z

= 0, donc 2∂u

∂z ∈ O(Ω).

Siest simplement connexe,la fonction holomorphe 2∂u/∂z admet une primitive (holomorphe) f ∈ O(Ω). Soit f =u1+iv1 (forme canonique) ; on a :

f = 2∂u1

∂z = 2∂u

∂z, donc ∂(u−u1)

∂z = 0.

Maisu−u1 est r´eelle :∂(u−u1)/∂x=∂(u−u1)/∂y = 0. Comme Ω est connexe,u−u1 ≡c∈IR :uest la partie r´eelle de la fonction holomorphe f +c.

Le deuxi`eme r´esultat est faux si l’on ne suppose pas Ω simplement connexe :

Exemple 10.1.4. — Montrer que la fonctionz ln|z|est harmonique sur C mais n’est pas la partie r´eelle d’une fonction holomorphe sur C. Montrer qu’une fonction r´eelle u C2(C) est harmonique si et seulement s’il existef ∈ O(C) etc∈IR, tels queu(z) = Ref(z)+cln|z|.

Comme tout disque ouvert est simplement connexe, on a :

Corollaire 10.1.5. — Une fonction r´eelle u sur l’ouvert C est harmonique si et seulement si, pour tout D(a, r)⊂ Ω, u est sur D(a, r) la partie r´eelle d’une fonction holomorphe sur D(a, r).

Les trois th´eor`emes suivants sont des cons´equences presque imm´ediates de la relation qu’on vient d’´etablir entre les fonctions harmoniques r´eelles et les fonctions holomorphes.

Th´eor`eme 10.1.6. — Soitun ouvert de C. Toute u∈H(Ω) est de classe C et mˆeme IR-analytique : pour tout x0 +iy0 Ω, il existe un

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voisinage de x0 +iy0 sur lequel u est la somme d’une s´erie enti`ere de x−x0, y−y0.

D´emonstration. — Par lin´earit´e, il suffit de le d´emontrer quand u est r´eelle. Notons a=x0+iy0. Sur D(a, r)⊂Ω, u est la partie r´eelle d’une fonction holomorphe, donc de la somme d’une s´erie enti`ere convergente :

+∞

n=0

an((x−x0) +i(y−y0))n.

On sait qu’on peut r´e´ecrire cette s´erie comme une s´erie enti`ere conver-gente de x−x0, y−y0, sur le voisinage de a d´efini par :

|x−x0|+|y−y0|< r.

En prenant sa partie r´eelle, on obtient le r´esultat.

Th´eor`eme 10.1.7 (Propri´et´e de la moyenne)

Soitun ouvert de C et u∈H(Ω). Si D(a, r)⊂Ω, on a : u(a) = 1

2π

0

u(a+reit)dt= 1

πr2 D(a,r) u(x+iy)dx dy.

D´emonstration. — Par lin´earit´e, il suffit de d´emontrer ces formules quand u est r´eelle. Soit D(a, r) D(a, s) Ω. Sur D(a, s), u est la partie r´eelle d’une fonction f ∈ O(D(a, s)) etf(a) est ´egal `a la moyenne de f sur ∂D(a, r) ou surD(a, r). En prenant la partie r´eelle, on obtient les mˆemes propri´et´es pour u.

Th´eor`eme 10.1.8 (Principe du maximum). — SoitC un ou-vert connexe et u H(Ω,IR). Si la fonction u a un maximum local (ou un minimum local) en a∈Ω, u est constante sur Ω.

D´emonstration. — Siuest harmonique, −uaussi ; il suffit donc de prou-ver la propri´et´e du maximum. Supposons que u a un maximum local en a∈Ω. On a donc, pour r >0 assez petit :

|z−a| ≤r u(z)−u(a)≤0.

D’autre part, si 0< s≤r, la propri´et´e de la moyenne donne : 2π

0

(u(a+seit)−u(a))dt= 0.

Comme la fonction int´egr´ee est 0 et continue, ce n’est possible que si elle est nulle sur le segment [0,2π]. On en d´eduit queuest constante sur le

10.2. LE PROBL`EME DE DIRICHLET SUR UN DISQUE 139

disqueD(0, r). On peut conclure (par exemple) en appliquant le principe de prolongement analytique, qui est vrai pour les fonctions IR-analytiques de deux variables.

On a la variante suivante du principe du maximum :

Corollaire 10.1.9. — Soitun ouvert connexe born´e de C et u une fonction r´eelle continue sur Ω, harmonique sur Ω. Alors :

sup

D´emonstration. — Il suffit de d´emontrer la premi`ere propri´et´e. Comme Ω est born´e, Ω est un compact et u atteint son maximum en un point a Ω. Si a ∂Ω, il n’y a rien `a d´emontrer. Si a Ω, u est constante d’apr`es le principe du maximum, donc u atteint son maximum en tout point de Ω, donc en n’importe quel point de ∂Ω, qui est non vide ! 10.2. Le probl`eme de Dirichlet sur un disque

Soit Ω un ouvert born´e de C . Le probl`eme de Dirichlet sur Ω est le probl`eme suivant :

Etant donn´´ e u0 ∈C0(∂Ω), trouver une fonction u∈C0(Ω), telle que : 1. u est harmonique sur Ω,

2. u(z) =u0(z) pour tout z ∈∂Ω.

Le probl`eme de Dirichlet n’a pas toujours de solution, par exemple si Ω est un disque ´epoint´e. On peut montrer qu’il a toujours une solution si Ω est un ouvert born´e dont la fronti`ere est la r´eunion d’une famille finie de courbes ferm´ees simples disjointes. Plus modestement, on va ´etudier le probl`eme de Dirichlet quand Ω est un disque.

On note D le disque unit´e. Soit d’abord r > 1 et u une fonction harmonique r´eelle sur D(0, r). Sur D(0, r), u est la partie r´eelle d’une fonction holomorphe f :

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avec convergence normale sur tout D(0, s) D(0, r). En particulier, puisque r >1, on a :

t∈IR, u(eit) =a0+ +∞

k=1

(akeikt+akeikt),

avec convergence normale. En multipliant les deux membres par eint et en int´egrant entre 0 et 2π, on obtient :

converge normalement sur [0,2π]. On peut donc ´ecrire : z ∈D, u(z) =

Th´eor`eme 10.2.1 (Formule de Poisson). — Soit u une fonction continue sur D et harmonique sur D. On a :

(67) z ∈D, u(z) = 1

10.2. LE PROBL`EME DE DIRICHLET SUR UN DISQUE 141

D´emonstration. — Par lin´earit´e, il suffit de d´emontrer la formule de Pois-son quand uest r´eelle.

Avant l’´enonc´e du th´eor`eme, on a d´emontr´e cette formule sous l’hy-poth`ese que u est harmonique sur D(0, r), r > 1. Si u est seulement harmonique sur Det n >1, on remarque que la fonction

un(z) =u((1−1/n)z)

est harmonique sur D(0,1/(11/n)). La formule de Poisson est vraie pour cette fonction :

(68) un(z) = 1

2π

0

un(eit) 1− |z|2

|eit−z|2 dt.

Si de plus u est continue sur D, elle est uniform´ement continue. On en d´eduit queun−−−−→

n→+∞ uuniform´ement sur∂Dpuis, que z∈D´etant fix´e, la suite de fonctions :

un(eit)

|eit−z|2

converge uniform´ement sur [0,2π] vers la fonction u(eit)/|z−eit|2 quand n +. On peut donc «passer `a la limite» dans (68), ce qui termine la d´emonstration.

La fonction :

(69) P(z, z) := 1− |z|2

|z−z|2,

qui est d´efinie et continue sur C2\{(z, z), z=z}estle noyau de Poisson pour le disque unit´e. Il permet de r´esoudre le probl`eme de Dirichlet sur le disque unit´e :

Th´eor`eme 10.2.2. — Pour toute fonction u0 ∈C0(∂D), il existe une et une seule fonction u, continue sur D et harmonique sur D, telle que u=u0 sur ∂D. Elle est donn´ee par :

(70) u(z) = 1

2π

0 u0(eit)|z−e1−|zit|2|2 dt, si z ∈D,

u0(z) si z ∈∂D.

D´emonstration. — D’apr`es le th´eor`eme pr´ec´edent, si le probl`eme de Di-richlet a une solution u, elle est bien donn´ee par les formules (70). Ceci d´emontre en particulier l’unicit´e de la solution. Il reste `a montrer qu’en

142 CHAPITRE 10. FONCTIONS HARMONIQUES DANS LE PLAN

d´efinissantu par (70), on obtient bien une solution du probl`eme de Diri-chlet.

D’abord, pour t∈[0,2π] fix´e, la fonction z∈D, Q(z, t) =−1

2+ Re 1 1−eitz

est de classe C et ses d´eriv´ees sont continues en (z, t) [0,2π].

On peut donc, si l’on d´efinit u comme ci-dessus, d´eriver sous le signe d’int´egration. Comme z Q(z, t), la partie r´eele d’une fonction holo-morphe, est harmonique sur D, on en d´eduit que u est harmonique sur D (en particulier, u est continue sur D).

Par d´efinition,u=u0 sur le cercle ∂D, mais il reste `a montrer, et c’est le point d´elicat, que la fonction u est continue en tout point de ∂D.

Sia ∈∂D, on ´ecrit :

|u(z)−u(a)| ≤ |u(z)−u0(z/|z|)|+|u0(z/|z|)−u0(a)|.

Le second terme du membre de droite tend vers 0 quandz ∈Dtend vers a, puisque u0 est continue. Le th´eor`eme r´esulte du lemme suivant.

Lemme 10.2.3. — Si u est d´efinie par (70) et

0< r <1, z ∈∂D, ur(z) :=u(rz), alors ||ur−u0||∂D −−−→

r→1 0.

D´emonstration. — On r´e´ecrit ur(e) sous la forme suivante : u(re) =

2π 0

u0(eit)Pr(t−θ)dt= 2π

0

u0(ei(t+θ))Pr(t)dt, o`u 0≤r <1 et les fonctions Pr ∈C0(IR) sont donn´ees par :

Pr(t) = 1 2π

1−r2

|1−reit|2.

Les propri´et´es cruciales des fonctions Pr sont les suivantes : 1. Pr est positive et 2π-p´eriodique pour tout 0≤r <1.

2. 2π

0 Pr(t)dt= 1 pour tout 0≤r <1.

3. Pour tout ]0,2π[,Pr r−→→1 0 uniform´ement sur [,2π−].

10.2. LE PROBL`EME DE DIRICHLET SUR UN DISQUE 143

Noter le «conflit» entre les propri´et´es 2) et 3). Les propri´et´es 1) et 3) se lisent sur la d´efinition de Pr; la propri´et´e 2) r´esulte de la formule de Poisson, appliqu´ee `a la fonction constante 1 :

Pour tout r∈]0,1[ et tout θ∈IR, on a, compte tenu de 2) : u(re)−u0(e) =

2π 0

(u0(ei(θ+t))−u0(e))Pr(t)dt, et compte tenu de 1) :

|u(re)−u0(e)| ≤ 2π

0 |u0(ei(θ+t))−u0(e)|Pr(t)dt.

Etant donn´´ e ]0,2π[, on d´ecompose l’int´egrale du second membre en int´egrales sur [0, ], [,2π ] et [2π ,2π]. Compte tenu de la 2π-p´eriodicit´e de la fonction int´egr´ee, la somme des int´egrales sur [0, ] et [2π−,2π] est ´egale `a l’int´egrale sur [−,+], et compte tenu de 2), on a : +

|u0(ei(θ+t))−u0(e)|Pr(t)dt≤ sup

|tt|≤

|u0(eit)−u0(eit)|. D’autre part, en notant M =||u0||∂D :

2π

|u0(ei(θ+t))−u0(e)|Pr(t)dt≤4πM sup

t∈[,2π]Pr(t).

En r´esum´e, on a :

||ur−u0||∂D sup

|tt|≤

|u0(eit)−u0(eit)|+ 4πM sup

t≤2π

Pr(t).

Etant donn´´ eη >0, le premier terme du second membre est < η si >0 est assez petit, compte tenu de la continuit´e uniforme de la fonction u0; un tel >0 ´etant fix´e, le second terme est < η quand r est assez voisin de 1, d’apr`es 3). D’o`u le lemme.

On en d´eduit le r´esultat suivant :

Th´eor`eme 10.2.4. — Le probl`eme de Dirichlet sur un disque D(a, r) a une et une seule solution pour tout u0 ∈C0(∂D(a, r)).

D´emonstration. — On se ram`ene au cas du disque unit´e par une simili-tude convenable : la fonction

v0(z) =u0(a+rz)

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est continue sur le cercle unit´e ; soitvla solution du probl`eme de Dirichlet relatif `a D(0,1), avec donn´ee v0; on v´erifie sans difficult´e que

u(z) =v(z−a r ) est la solution cherch´ee.

En guise d’application, on va montrer que la propri´et´e de la moyenne est une propri´et´e caract´eristique des fonctions harmoniques :

Th´eor`eme 10.2.5. — Une fonction continue sur un ouvertC est harmonique si et seulement si elle a la propri´et´e de la moyenne, par exemple suivant les cercles.

D´emonstration. — On sait d´ej`a qu’une fonction harmonique a la pro-pri´et´e de la moyenne. Par lin´earit´e, il suffit de montrer que si une fonction r´eelle u∈C0(Ω) v´erifie :

u(a) = 1 2π

2π 0

u(a+reit)dt pour tout D(a, r)⊂Ω, u est harmonique.

Soit D(a, r) Ω et soit ua la solution du probl`eme de Dirichlet sur D(a, r), avec u|∂D(a,r) comme donn´ee sur ∂D(a, r). On va montrer que u=ua sur le disque, ce qui implique le th´eor`eme.

La fonction va=u−ua est continue sur D(a, r) et nulle sur ∂D(a, r).

Elle a la propri´et´e de la moyenne surD(a, r), car une combinaison lin´eaire de fonctions qui ont cette propri´et´e l’a aussi. Soit

M = sup

D(a,r)

va, et K :={z ∈D(a, r), va(z) =M}.

L’ensemble K est un compact non vide contenu dans D(a, r). Soitb ∈K un point tel que :

d(K, ∂D(a, r)) =d(b, ∂D(a, r)).

Si b∈D(a, r), en ´ecrivant : va(b) = 1

2π

0

va(b+seit)dt,

pour 0 < s < r− |b−a|, on montre comme dans la d´emonstration du principe du maximum que va est constante, ´egale `a M, sur D(b, s). Ceci contredit le choix qu’on a fait de b. Doncb∈∂D(a, r) et M = 0.

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