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IV. Les polynucléaires neutrophiles : des cellules aux multiples talents

IV.1. Les polynucléaires neutrophiles

IV.1.2. Fonctions effectrices des neutrophiles

Les neutrophiles font parties des toutes premières cellules de l’immunité innée à intervenir lors d’une infection en migrant jusqu’aux tissus (Figure 11). Pour cela les neutrophiles s’attachent fortement à l’endothélium, par le biais de molécules d’adhésion exprimées à leur surface et à celles des cellules endothéliales, puis ils roulent le long de l’endothelium, c’est le « rolling », avant de se faufiler entre les cellules endothéliales par un processus de diapédèse, et d’atteindre la zone d’infection ou d’inflammation guidés par des gradients chimiotactiques (Sundd et al., 2013).

Figure 11 : Migration sur le site de l’infection et phagocytose des pathogènes par les neutrophiles. Les neutrophiles émigrent de la circulation vers le site de l’infection. Pour cela ils adhèrent progressivement à l’endothélium par un processus de « rolling ». Ils détectent ensuite un signal chimiotactique diffusé depuis le site de l’infection qui les activent et traversent l’endothélium par un mécanisme de diapédèse. Une fois sur le site de l’infection ils phagocytent les pathogènes extracellulaires. Les pathogènes phagocytés sont ensuite détruits par la sécrétion de ROS, de granules cytotoxiques et de peptides antimicrobiens à l’intérieur du phagosome.

Une fois sur le site de l’infection, ils peuvent être activés et utilisés ses nombreuses fonctions effectrices pour éliminer les pathogènes (Figure 11). Parmi ces fonctions, la phagocytose, qui est réalisée par la reconnaissance des pathogènes ou PAMPs (pathogen-associated molecular patterns) par des récepteurs exprimés à sa surface, les PRR (pattern-recognition receptors) ou pour le cas de particules opsonisées par les FcγRs, ou le complément, (comme décrit précédemment)(Kolaczkowska and Kubes, 2013). Une fois reconnue ils les emprisonne à l’intérieur d’une vacuole, le phagosome, (Greenberg et al, 1993 ; (Nordenfelt and Tapper, 2011)) qui fusionne avec des granules contenant des enzymes hydrolytiques qui vont dégrader

! &'! les pathogènes. Ce procédé est extrêmement efficace, les particules peuvent être phagocytées en moins de 20s, pour le cas des particules opsonisées par les IgG (Segal et al, 1980).

Les neutrophiles sont également caractérisés par la dégranulation de granules cytotoxiques (Figure 12). Plusieurs types de granules gravitent dans le cytoplasme des neutrophiles, et apparaissent aux différents stades de développement des neutrophiles.(Bardoel et al., 2014; Evrard et al., 2018) Les granules primaires ou azurophiles, représentent 20% des granules totales des neutrophiles, elles sont constituées de myeloperoxidase ainsi que de peptides cationique anti-microbien , qui par interaction avec les charges négatives des membranes vont induire la création de pores à l’intérieur du pathogène. Ces granules sont destinés à être sécrétés dans les phagosomes lors de la phagocytose. Les granules secondaires ou spécifiques, constituent 60 à 80 % des granules totales et sont riches en substances anti-microbiennes et en α-défensines. Elles sont destinées à être larguées dans le milieu extracellulaire, pour dégrader les pathogènes. Les granules gélatinases ou tertiaires sont impliquées dans la migration des neutrophiles car elles sont composées de substances permettant la dégradation de la matrice extracellulaire et facilitent le passage des neutrophiles entre les tissus. Les vésicules sécrétoires sont les premières à être libérées en présence de stimuli inflammatoires et libèrent des phosphatases alcalines. Elles sont formées par endocytose avec la membrane externe des neutrophiles et constituent donc une source de récepteurs, qui peut être rapidement mobilisée en cas de stimulation du neutrophile. Toutes les granules ne sont pas sécrétées en même temps, une petite activation suffit à faire sécréter les vésicules et les granules tertiaires alors que les granules primaires et secondaires, ne seront sécrétées que si la phagocytose n’a pas été suffisante pour éliminer les pathogènes (Mayadas et al., 2009).

Figure 12 : Composition des granules cytoplasmiques des neutrophiles (site Epo Medecine)

Ajouté aux nombreux composés enzymatiques sécrétés par les granules cytotoxiques, les neutrophiles peuvent générer des formes réactives de l’oxygène ou ROS (reactive oxygen species), particulièrement efficace pour lutter contre les infections bactériennes ou fongiques. Elles sont formées à partir d’anions superoxide (O2-) par le complexe NADPH oxidase (Kuijpers and Lutter, 2012), localisé sur la membrane des phagosomes ainsi que sur la membrane externe des neutrophiles, ce qui permet une libération rapide dans le milieu extracellulaire. (Figure 13). L’anion superoxide est le précurseur d’autres espèces réactives de l’oxygène encore plus toxiques, comme le peroxyde d’hydrogène (H2O2) qui peut lui même être transformé en acide hypochloreux (HOCl) par la myéloperoxidase (MPO) (Lambeth, 2004) se trouvant dans les granules cytotoxiques. Ces composés sont certes efficaces pour lutter contre les infections, mais s’ils sont sécrétés en trop grande quantité, ils peuvent aussi créer des

! &(! dommages importants aux niveaux tissulaires et entrainer une réaction inflammatoire exacerbée (Gougerot-Pocidalo et al., 2002).

Figure 13 : Schéma de la génération des formes réactives de l’oxygène (ROS) par les neutrophiles. (Baordel et al, 2014)

Parmi les fonctions effectrices des neutrophiles, la plus décrite est sans doute la formation de NET (Neutrophil extracellular trap), qui est aussi associé à une forme d’apoptose, la NETose (Figure 14). Les NET ont été décrits par Brinkmann et al (Brinkmann et al., 2004) dans le cadre d’une infection bactérienne mais on les retrouve également dans d’autres contextes pathologiques comme les maladies auto-immune, notamment le Lupus érythémateux systémique (LES) (Garcia-Romo et al., 2011) ou le diabète (Wong et al., 2015). Les NET se composent de chromatine décondensée et du contenu des granules cytotoxiques décrites précédemment, telle que la myéloperoxidase. Leur sécrétion dans le milieu extracellulaire, entraine la dissolution des membranes nucléaires et de celles des granules, aboutissant à la mort du neutrophile (Fuchs et al., 2007).

Figure 14 : Schéma du processus de génération de Neutrophil Extracellular Trap (NET) par les neutrophiles lors d’une infection. (Selder et al , 2017)

La formation de NET est régulée par plusieurs signaux, notamment les ROS, les cytokines pro-inflammatoires (TNFα, IL8, IFN) ou est stimulé par la liaison d’IC ou de PAMPs à la surface du neutrophile. Contrairement aux ROS ou aux granules, leur sécrétion n’est pas immédiate et leur formation peut prendre entre 2 et 4h (Clark et al., 2007), mais ils représentent tout de même une arme puissante pour lutter contre les infections. Les NET permettent de piéger littéralement les pathogènes au sein du filet de chromatine et de les neutraliser par le cocktail d’enzymes et de peptides antimicrobiens sécrétés de façon concentrée (Huang, 2006). Tout comme la

! &)! sécrétion de ROS la réaction inflammatoire causée par le relargage de NET peut occasionner des dommages collatéraux importants, comme des vascularites. Ils sont également une source d’auto-antigène.

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