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68 développement-spécifique pour promouvoir spécifiquement la différentiation des cellules cardiaques (MOREY et al. 2015).

La dynamique du complexe PRC2 lors du développement est relativement plus simple puisque seules les sous-unités EZH1 et EZH2 sont interverties lors de la différenciation (SHEN et al. 2008). C’est plutôt l’association du PRC2 avec les protéines accessoires qui

permet un recrutement différentiel du PRC2 (GRIJZENHOUT et al. 2016; HAURI et al. 2016;

KLOET et al. 2016; OLIVIERO et al. 2016). JARID2 est en effet plus fortement exprimé dans

les cellules ES alors AEBP2 est plus présent dans les cellules différenciées.

Figure 20 : Rôle des protéines du PcG lors de la différentiation cellulaire

La figure illustre le rôle des complexes du PcG dans la spéciation cellulaire. Les cellules souches ont la capacité de se différencier en tous les types cellulaires formant un organisme (simplifié ici par les types cellulaires A et B). Avant la différentiation, les gènes impliqués dans le maintien de la pluripotence sont activés alors que ceux spécifiques de lignées développementales sont inactifs. Durant la différentiation, les complexes du PcG sont expulsés d’un set de gènes propre à une lignée développementale. Illustration de (DI CROCE and HELIN 2013).

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II. La dérégulation des gènes cibles du PcG mène à l’apparition de

cancers

Le rôle des protéines du PRC1 dans les cancers reflète leur activité in vivo et en particulier dans les cellules ES. En effet, CBX7 joue un rôle important dans la prolifération des cellules souches. De façon corrélée, la surexpression de CBX7 dans les cellules différenciées est impliquée dans le développement de divers cancers dont la leucémie. CBX7 agit comme oncogène en réprimant le locus INK4A/ARF prévenant ainsi la sénescence et l’apoptose cellulaire. De façon similaire, BMI1 est hautement exprimée dans les cellules souches hématopoïétiques et est ensuite remplacée par son homologue Mel18 lors de la différenciation (MOREY et al. 2015). BMI1 agit également

comme oncogène en réprimant CDKN2a et PTEN et en régulant la cascade de signalisation AKT (JACOBS et al. 1999). A contrario, Mel18 agit comme suppresseur de

tumeur en régulant l’expression de nombreux oncogènes comme c-myc (GUO et al.

2007). Chez la Drosophile, PRC1 semble agir comme suppresseur de tumeur. En effet, la délétion de PRC1 conduit en l’apparition de tumeur alors que ce n’est pas le cas pour PRC2 (LOUBIERE et al. 2016).

Le rôle de PRC2 dans la formation des cancers est plutôt ambigu. En effet, EZH2 a été initialement décrit comme oncogène. En effet, la surexpression de EZH2 associée à une augmentation de H3K27me3 a été décrit comme marqueur de cancer de la prostate métastatique dont le diagnostic est défavorable pour la vie des patients (VARAMBALLY et al. 2002). De la même manière, des mutations du domaine catalytique de EZH2 sont

impliquées dans l’apparition de lymphomes (MORIN et al. 2010; SNEERINGER et al. 2010).

Basés sur ces observations, plusieurs molécules visant à inhiber l’activité de EZH2 ont été développées et sont testées cliniquement ou déjà utilisées (MORERA et al. 2016).

Cependant, d’autres études montrent que PRC2 agit également comme suppresseur de tumeur. En effet, les mutations perte de fonction de EZH2, EED ou SUZ12 sont impliquées dans la formation de tumeurs cérébrales et corrèlent avec une forte diminution de H3K27me3 (LEE et al. 2014). Par ailleurs, une mutation hétérozygote

ponctuelle de l’histone H3 substituant la lysine 27 en méthionine suffit à diminuer de manière globale le taux de H3K27me3 en expulsant PRC2 de ses gènes cibles (LEWIS et al. 2013; PIUNTI et al. 2017). Cette mutation est impliquée dans 80% de cancers

cérébraux caractérisés par leur importante agressivité.

Comme nous l’avons vu dans ce chapitre, le rôle des complexes du PcG est extrêmement spécifique et dépend fortement du type cellulaire. Une fine balance de leurs activités est requise pour maintenir l’homéostasie des cellules. Il n’est donc pas surprenant de voir que d’une part la dérégulation/mutation d’une des sous-unités conduit en la formation de cancers, et d’autre part qu’un déséquilibre cellulaire en H3K27me3 peut avoir des effets dévastateurs conduisant en la perte de l’identité des

70 cellules. La compréhension des mécanismes de recrutement et d’action de ces complexes est donc cruciale pour permettre la mise en place de thérapies adaptées à chaque type de cancers liés aux complexes PcG.

71 Dans la partie précédente, nous avons vu l’importance fonctionnelle des complexes du PcG. Notamment, leur dérégulation, celle de leurs protéines recruteuses ou celle de leurs gènes cibles conduit en l’apparition de cancers agressifs chez l’Homme. Ainsi, il est crucial de comprendre comment ces complexes sont recrutés à la chromatine ainsi que leurs différents modes d’actions.

Chez la Drosophile comme chez les mammifères, les complexes PRC1 et PRC2 ne possèdent pas de sites de fixation à l’ADN. Ces complexes sont donc recrutés à la chromatine via leur interaction avec des protéines recruteuses. Il peut s’agir de facteurs de transcription (ou TF) ou de protéines accessoires (comme c’est le cas pour PRC2). Toutes ces protéines recruteuses sont relativement bien conservées. Cependant, les sites de fixations des complexes du PcG diffèrent entre la Drosophile et les mammifères. En effet, chez la Drosophile, les complexes du PcG sont recrutés au niveau de régions nommées PRE (Polycomb Response Elements). Chez les mammifères, seulement cinq PRE ont été identifiés à ce jour, les protéines du PcG étant majoritairement retrouvées aux ilots CpG (décrit plus bas ; il s’agit de séquences d’ADN enrichies en C (Cytosines) et G (Guanines) tous deux séparés par un groupement phosphate). Cependant, malgré une divergence de la nature des sites de fixation des complexes entre la Drosophile et les mammifères, la complexité du recrutement de ces complexes semble être conservée.

I. Les PRE/TRE et leurs caractéristiques

Chez la Drosophile, les protéines du PcG sont recrutées au niveau de régions génomiques nommées PRE (Polycomb Response Elements), identifiées en 1993 (SIMON

et al. 1993). Les PRE sont nécessaires au maintien de la marque H3K27me3 lors de la

réplication. En effet, la tri-méthylation de H3K27 des nucléosomes nouvellement incorporés se fait de manière séquence spécifique par le recrutement du PRC2 aux PRE (COLEMAN and STRUHL 2017; LAPRELL et al. 2017).

La fonctionnalité de ces séquences peut être testée par une analyse transgénique dont le but est l’introduction, dans le génome de la Drosophile, d’un vecteur contenant le PRE en amont d’un gène rapporteur comme le gène white donnant la couleur rouge aux yeux de mouches (dans un fond génétique mutant pour le gène white endogène) (Figure 22 ; (KASSIS and BROWN 2013)). Un PRE est validité comme tel quand il peut