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540. Le cadre et les conditions dans lesquels les « trusts exprès » des deux modèles se mettent en place et fonctionnent, sont définis au moment de leur constitution. Le patrimoine du trust est géré par la suite, dans les deux modèles de trusts, comme un « fonds fiduciaire » (trust fund), séparé des biens personnels du fiduciaire.580 Les opérations fiduciaires fonctionnent de manière identique grâce à deux éléments que les deux modèles de trust ont en commun : un transfert de biens ayant une finalité déterminée et la création du patrimoine fiduciaire.

541. Dans les deux modèles de trust, le constituant transfère la propriété des biens au fiduciaire.581 Les éléments de l'actif et du passif transférés dans le cadre de l'opération fiduciaire forment le fonds fiduciaire (trust fund), qui, en droit civil, est un patrimoine d'affectation.582 Le fonds fiduciaire est composé de biens meubles, immeubles et de droits. Les biens, objet du trust, sont séparés et ne font pas partie de la garantie générale à l’égard des créanciers du fiduciaire. Ils garantissent seulement les obligations qui découlent du trust.

542. Le fonctionnement des trusts des deux modèles est semblable seulement entre « trusts exprès » créés par la volonté explicite du constituant car la caractéristique des trusts « non-exprès » anglo-américains est précisément l’absence de volonté du constituant. En effet, contrairement aux trusts de droit civil, les trusts du modèle anglo-américain sont créés par la volonté expresse du constituant (trusts exprès) mais l’intention de celui-ci peut être aussi implicite ou présumée (trusts non-exprès). 543. Les trusts du modèle contractuel de droit civil sont exclusivement des « trusts exprès »583 : l’intention, la volonté et le consentement de créer une fiducie ou un fidéicommis sont expressément consignés. Les fidéicommis ou fiducies implicites ou présumés ne sont pas reconnus par la loi et par conséquent n’existent pas. Ils étaient

580 Article 1410 du Code de commerce bolivien ; article 14 de de la loi argentine n° 24.441 ; article 2025 du Code Civil

français; article 15 de la loi n° 1 au Panama.

581 A l’article 2011 du Code Civil , créé par loi n°2007-211 du 19 février 2007 - art. 1 JORF 21 février 2007. 582Article 12 de la loi 2007-211 du 19 février 2007.

583 J. A. TEJADA MORA, « Adaptation du trust et des fondations d’intérêt privé du Panama au service de l’Amérique Latine

acceptés jadis au Panama, avant la promulgation en 1984 de la loi panaméenne n° 1 sur les fidéicommis.584

544. Lorsque les trusts du modèle anglo-américain sont créés de façon expresse, aucune formalité substantielle n’est nécessaire ; le transfert des biens est prouvé librement aussi bien par des témoignages oraux que par des écrits.585 La Cour est satisfaite dès lors qu’une déclaration irrévocable du trust est exprimée.586 Les trusts du modèle anglo-américain de propriété respectent des règles jurisprudentielles de validité sur les « certitudes ». L’intention de créer un trust, le caractère déterminable des biens et des bénéficiaires doivent être « certains » et sont soumis au contrôle du juge en cas de doute. Il n’y a pas de registre de trusts exprès privés du modèle anglo- américain de propriété, sauf pour les trusts exprès publics ou charitables.587

545. Le droit civil écrit énumère dans la loi les formalités à accomplir pour qu’un trust du modèle contractuel soit valide. Les tribunaux de droit civil considèrent que toute fiducie ou fidéicommis est par principe valide, effectif et légalement constitué lorsque les éléments formels et les mentions obligatoires décrits dans la loi ont été respectés au moment de sa constitution.588 La propriété fiduciaire est enregistrée selon la nature des biens. En France, il est aussi nécessaire d’enregistrer le contrat de fiducie et ses avenants au Registre national des fiducies. Au Panama, les fondations d’intérêt privé sont aussi soumises à registre. L’enregistrement leur donne la personnalité morale.

546. Les spécificités du fonctionnement des trusts de la République de Panama proviennent de sa qualité de « centre financier et corporatif off-shore »589 ou « paradis fiscal », caractérisé par son niveau nul d’imposition. En tant que centre « offshore », le Panama offre des services de gestion du patrimoine, des successions, de planification fiscale, de protection d’actifs et garantit le secret bancaire absolu. Les secrets fiduciaires et bancaires sont spécifiques au fonctionnement des trusts des

584 Loi du 5 janvier 1984 ( Gaceta Oficial N°19.971 du 10 janvier 1984 ). 585 Justice Neville dans Re Cozens, 1913, 2 Ch. 478.

586 Paul v. Constance, 1977, 1, All E.R. 195.

587 D. J. HAYTON, loc. cit., p. 16. Ce registre sert principalement à des fins fiscales pour délivrer les crédits d’impôts. Le

nombre total de trusts de charité enregistrés au premier trimestre 2010 est de 180.714. Source : Charity Commission Website

http://www.charity-commission.gov.uk.

588 RAMSES OWENS, MOSSACK FONSECA & Co. /Mossfon Trust Corporation, “Panama”, in Trust & Trustees, 2007, Vol.

13, N° 8, Oxford University Press, London, p. 481.

paradis fiscaux. Selon Juan A. Tejada Mora, « la meilleure protection dont bénéficie

le trust panaméen est sa rigoureuse confidentialité. »590

547. Les règles de registre, au Panama, sont particulières : à l’exception des immeubles localisés sur le territoire panaméen, il n’existe pas de registre public des biens immeubles étrangers consignés dans les actes de fidéicommis.591 Le notaire qui authentifie les signatures, ne conserve aucune copie du document de constitution du fidéicommis et ne tient aucun registre des parties dont les signatures ont été authentifiées.592

548. Le Panama est l’unique pays d’Amérique Latine qui compte une législation sur les fondations d’intérêt privé pour accompagner le fidéicommis. Les fondations, privées ou familiales, ont été créées, dans des juridictions mixtes telles que Jersey ou le Lichtenstein, comme moyen alternatif aux trusts du modèle anglo-américain de propriété en cherchant à produire les mêmes effets pour la protection et la transmission d’actifs. Les fondations d’intérêt privé panaméennes sont des trusts appartenant au modèle contractuel de droit civil. La transmission intergénérationnelle et la protection de patrimoine obtenues avec des trusts panaméens donnent un résultat équivalent à celui des trusts du modèle anglo-américain de propriété.

549. Les normes de droit international privé panaméen, confirmées par la jurisprudence de ce pays, sont fondées sur la doctrine de « l’autonomie de la volonté » et sur le « régime de la libre disposition des biens ». Elles ne reconnaissent pas les lois du domicile du constituant étranger d’un trust au Panama, lorsque celles-ci feraient échouer le but pour lequel le trust panaméen a été constitué. La loi prévoit une période courte de prescription de 3 ans pour demander la nullité des transferts en trust, le transfert de celui-ci vers d‘autres juridictions et des règles d’élection de la loi applicable au trust.

550. Il convient d’étudier, dans un premier temps, le régime juridique des trusts du modèle anglo-américain comparé à celui des trusts de droit civil et d’analyser ensuite

590 J. A. TEJADA MORA, ibid., p. 8. 591 R. OWENS, ibid., p.6

les spécificités du régime des fidéicommis et des fondations d’intérêt privé au Panama.

CHAPITRE 1. Régime juridique général des trusts anglo-américains et de droit civil CHAPITRE 2. Spécificités des trusts de droit civil au Panama

CHAPITRE I. Régime juridique général des trusts anglo-

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