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Chapitre 1 : Contexte et notions

5. Fibrose

La fibrose est caractérisée par un excès d’accumulation de matrice extracellulaire, elle aboutit le plus souvent à une perte de fonction lorsque le tissu normal est remplacé par du tissu cicatriciel. Les reins fibrosés sont souvent plus petits que ceux ne présentant pas de fibrose. La surface irrégulière de ces reins indique la présence de tissu cicatriciel. La fibrose n’est pas due uniquement à l’augmentation de synthèse de matrice extracellulaire mais aussi à l’effondrement du parenchyme rénal. Les études morphométriques montrent que c’est cet effet, combiné à une augmentation de l’expression du collagène et plus tard à l’effondrement du parenchyme rénal, qui compose la fibrose (Hewitson 2012).

Différents mécanismes complémentaires sont responsables de la fibrose. Histologiquement les reins en stade terminal manifestent des lésions fibrotiques qui affectent chacun des compartiments du rein : glomérulosclérose, sclérose vasculaire et fibrose tubulo-interstitiel (figure 9). Tous les patients ayant une maladie rénale chronique, peu importe l’étiologie, montrent un déclin de la fonction rénale au cours du temps. Le processus est irréversible, menant inévitablement au stade terminal de l’insuffisance rénale, condition qui requiert la dialyse du patient et par la suite une transplantation rénale (Hewitson 2012; Cho 2010).

Figure 9 : Coupe histologique présentant les 3 types de fibrose. Coloration Methenamine Silver / Masson trichrome. Barre d’échelle = 50 µm (Hewitson 2012).

5.1. Développement de la fibrose

Les stimuli inflammatoires provoqués suite aux lésions d’ischémie et de reperfusion provoquent l’activation des fibroblastes, des cellules mésangiales et la transition épithélio-mésenchymateuse. Ces cellules produisent une grande quantité de composants de la matrice extracellulaire. Il n’y a pas de véritable consensus sur les origines possibles des fibroblastes rénaux. Il existe plusieurs hypothèses : cellules hématopoïétiques migrantes, cellules souches provenant de la moelle, activation de fibroblastes résidants interstitiels ou transition épithélio-mésenchymateuse des cellules épithéliales tubulaires (Cho 2010).

Dans un tissu rénal à l’état normal, il y a toujours un équilibre entre production et dégradation de la matrice extracellulaire, tandis que l’accumulation et la déposition excessive de composants de la matrice extracellulaire sont les résultats terminaux pathologiques de la fibrose rénale et des maladies rénales chroniques. L’apparition de la fibrose peut être induite à la fois par une surproduction de matrice et par une réduction de sa dégradation (cf. figure 10, page 55). En effet, un rein normal produit habituellement de nombreuses protéases incluant les MMP, plasminogen activator et lysosomal cathepsins. Ces protéases permettent de maintenir la balance entre production et dégradation de la matrice (Cho 2010).

L’apparition de fibrose glomérulaire autour des tubules et vaisseaux sanguins est associée à l’activité des cellules dérivées du mésenchyme. Les fibroblastes interstitiels, les cellules mésangiales glomérulaires et les cellules musculaires lisses des vaisseaux ont un phénotype similaire lorsqu’ils sont activés, acquérant des propriétés de cellules musculaires lisses. Dans chaque compartiment, les cellules résidantes mésenchymateuses produisent de la matrice extracellulaire mais réalisent aussi une contraction et une réorganisation de cette matrice qui aboutit à une augmentation de sa densité. Les fibroblastes une fois activés sont appelés myofibroblastes (les myofibroblastes sont probablement dérivés de plusieurs autres sources incluant en plus des fibroblastes, des péricytes, des cellules adjacentes épithéliales et endothéliales). De la même façon, les myofibroblastes vont proliférer localement, synthétiser la matrice extracellulaire

constituant la fibrose interstitielle, contracter et réorganiser la matrice pour augmenter sa densité. Des modifications épigénétiques amènent à une activation permanente provoquant une fibrose et une prolifération perpétuelle des fibroblastes. Ces modifications sont considérées comme stables et peuvent être héritées au cours de multiples divisions cellulaires. Cela devient un cercle vicieux lorsque la fibrose interstitielle devient la cause probable de lésions mécaniques et qu’à travers une réduction de la vascularisation elle entraîne une hypoxie (Hewitson 2012).

5.2. Influences profibrotiques

La différenciation et le fonctionnement des fibroblastes interstitiels sont régulés par de nombreux facteurs. La différenciation des myofibroblastes, leur prolifération et la synthèse de collagène sont stimulées par une variété de cytokines et de facteurs de croissance dérivés de cellules adjacentes stimulées telles que les cellules épithéliales tubulaires, les cellules endothéliales, les leucocytes et les fibroblastes eux-mêmes. D’autres influences incluent des forces mécaniques et la matrice extracellulaire elle- même. Il existe une hiérarchie à travers les facteurs de croissance profibrotiques : TGF-β (Transforming Growth Factor β) est considéré comme le médiateur clé de la fibrose rénale, tandis que l’angiotensine II, le CTGF, le PDGF (Platelet Derived Growth Factor), l’endothelin 1 sont d’autres facteurs profibrosants (et parfois pro inflammatoires) (Cho 2010; Hewitson 2012).

TGF-β peut être produit à la fois par les cellules rénales résidantes et les leucocytes infiltrés, il peut aussi filtrer depuis le plasma durant une protéinurie. TGF-β stimule l’activation des myofibroblastes et la transition des cellules mésangiales, des fibroblastes interstitiels et des cellules épithéliales tubulaires, les différenciant en cellules fibrogéniques. Les effets fibrotiques de TGF-β peuvent être résumés par deux événements cellulaires : l’apoptose et la transition épithélio-mésenchymateuse (EMT). D’une part, l’apoptose induite par TGF-β aboutit habituellement à une déplétion des podocytes, la glomérulosclérose, la perte du glomérule et des capillaires péritubulaires et

l’atrophie tubulaire. D’autre part, l’EMT induite par TGF-β peut jouer un rôle critique dans l’atrophie tubulaire et la génération des myofibroblastes interstitiels (Cho 2010).

5.3. Facteurs endogènes antifibrotiques

Il existe une balance entre les facteurs profibrosants et antifibrosants. Nombre de ces facteurs ont été identifiés (Hewitson 2012; Cho 2010) :

- certains facteurs vont limiter la synthèse de matrice extracellulaire : Hepatocyte Growth Factor (HGF), Bone Morphogenetic Protein-7 (BMP-7), l’hormone relaxine, IFN-γ (Interferon gamma)…

- d’autres vont la dégrader : MMP, plasiminogen activator, lysosomal cathepsins…

Figure 10 : Mécanismes principaux de la fibrose rénale (Cho 2010).

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