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CHAPITRE I : LE CHANVRE (CANNABIS SATIVA) SOURCE DE COMPOSES A

I.1.2. Utilisation du chanvre et de ses coproduits en Europe et en France

I.1.2.2. Les fibres

Le chanvre industriel comprend trois types de fibres : - les fibres du bois qui constituent la chènevotte,

- les fibres primaires situées en dehors du système vasculaire,

- les fibres secondaires extra- xylémiennes issues du cambium (Bouloc 2006). Les fibres primaires sont l’enjeu principal de l’exploitation industrielle.

a. Procédés de défibrage

Transformer le chanvre, c’est « décortiquer une plante complexe en autant de composantes

que possible. Le métier va donc consister à séparer tous les composants puis à les récupérer pour

en tirer le meilleur usage ou plus simplement, séparer la fibre de la chènevotte, plus ou moins l’affiner et récupérer la poudre de chanvre qui résulte du processus » (Bouloc 2006).

Selon l’usage final des fibres (textiles, papier ou à usage technique) les technologies de préparation des fibres c'est-à-dire les processus industriels, vont être totalement différents : rouissage, défibrage (au champ ou en usine) et décorticage. Les principes de base sont toujours les mêmes (Bouloc 2006).

Le rouissage est l’une des plus vieilles biotechnologies connues. C’est une étape qui consiste à laisser le chanvre sur le lieu de la récolte entre quinze jours et un mois selon les conditions météorologiques et d’effectuer un fanage (retournement) des andains. En effet, l'alternance de rosée, de pluie et d'ensoleillement provoque le rouissage. Ce dernier favorise le développement de micro-organismes (bactéries et champignons) sur les pailles qui vont synthétiser des enzymes capables de dégrader la pectine qui lie les fibres à la partie non fibreuse de la tige. Il permet de séparer les fibres qui deviennent imputrescibles et sans pectine, et n'attireront donc pas les rongeurs ou les mites. Quand la paille atteint un taux d'humidité de 14 à 18 % environ, elle est ramassée, pressée et stockée. Le rouissage entraîne une coloration grisée des pailles mais sans les abimer. Plus on les laisse longtemps au champs, plus leur couleur devient foncée (Botineau 2010 ; Duthon 2014).

La transformation « classique » de la tige de chanvre se fait par défibrage mécanique ou décorticage. Cette opération consiste à battre et broyer la tige pour en extraire des fibres. Il en résulte deux autres coproduits : la chènevotte et la poussière de chanvre dite poudre organique.

Figure I.11 : Les différents composants de la paille de chanvre et leurs proportions moyennes (Bouloc 2006)

La chènevotte récupérée après défibrage et formée essentiellement de biomasse a été utilisée par (Moxley, Zhu, et Zhang 2008) pour produire par fermentation du carburant à faible teneur en carbone tel que le bioéthanol ou le biobutanol. Ils ont réussi à transformer 96 % du glucose présent dans les résidus (Moxley, Zhu, et Zhang 2008).

A rappeler que le moment et la procédure de récolte diffèrent diamétralement si on vise la production de graines ou de fibres. La récolte uniquement pour la production de fibre s’effectue entre le début et la fin de la floraison, et obligatoirement avant le début du développement du grain. La qualité de la fibre diminue avec le stade de maturité de la plante : les fibres deviennent plus dures et grossières.

b. Utilisation de la fibre

La fibre, appelée aussi filasse, est la composante trouvée dans la périphérie de la tige et représente (selon la source de la plante) 30 à 35 % voire 40 % de la masse sèche totale de la tige (Girouard, Mehdi, et Samson, 1999). La filasse est la fibre longue, de haute qualité du chanvre industriel (Vignon, Garcia-Jaldon, et Dupeyre 1995).

Autrefois utilisées pour la fabrication des cordages et des toiles, les fibres de chanvre sont aujourd’hui utilisées, selon leur qualité, pour la production de vêtements, de tissus résistants et de papiers spéciaux.

Paille

Fibre : 22-32 %

22-24 % Fibres techniques 4-5% Fibres courtes 3% Fibres très courtes

Chènevotte : 55 %

Déchets :

cailloux, bois, métal, ... : 2-5 %

Pertes :

vapeur d'eau, poussières : 2%

Poudre organique :

10- 20%

Les fibres de qualité inférieure dites « papetières » utilisées sous forme d’étoupes, servent à la fabrication de pâtes à papiers spéciaux. Elles sont valorisées pour papiers fins et résistants, et papiers hauts de gamme (papier extra fin pour faire des livres épais, papiers médicaux, papiers cigarettes, billet de banque...) (Moore 1996 ; Callaway 2004). Les fibres de meilleure qualité dites « techniques » sont utilisées dans la plasturgie et dans la transformation de la laine de chanvre pour les isolations thermique et phonique afin de remplacer la laine minérale ou le polystyrène. Elles sont donc employées pour l’isolation de combles, de planchers, de cloisons, de toitures,...

La production chanvrière spécifiquement à des fins textiles s’est avérée marginale au cours des dernières décennies (Girouard, Mehdi, et Samson, 1999).

Les fibres de chanvre sont aussi employées pour la fabrication de panneaux pour la construction et le mobilier (Papadopoulou et al. 2014).

Bien que le chanvre entre aujourd’hui dans de nouvelles applications, l’industrie papetière occupe toujours la majeure partie du marché européen (55 % en 2014 contre 95 % avant les années 1990), les fibres étant fournies principalement par les producteurs français (Figure I.12). Leur application comme matériaux d’isolation occupe la deuxième plus importante partie du marché (26 %). Les biocomposites occupent 15 % du marché dont 96 % pour les applications automobiles d'intérieur. Ceci correspond à plus de 3 700 tonnes de fibres de chanvre ou environ 7 500 tonnes de biocomposites (le contenu en fibres naturelles varie entre 30 et 70 %). Le marché des biocomposites pour des applications d’habitacle automobile est en croissance. Ces biocomposites sont utilisés entre autres pour la fabrication de tableaux de bord, d’intérieurs de portières, ou de garnitures de coffres.

Figure I.12 : Applications des fibres de chanvre dans le marché européen en 2014 (EIHA 2015) 55% 15% 26% 4% Pâte à papiers Biocomposite Isolation Textile technique

c. Coproduits

Chènevotte

La chènevotte (« woody hemp » en anglais) est le cœur de la tige et se situe sous l’écorce. Elle représente 50 à 55 % de la masse sèche de la tige selon les références (Vignon, Garcia-Jaldon, et Dupeyre 1995 ; Girouard, Mehdi, et Samson, 1999) et peut atteindre 70 % (Bag et al. 2011). La chènevotte a une capacité d’absorption et de rétention d’eau importante. Elle peut absorber jusqu’à quatre fois son poids en eau. Elle est employée en litière à la fois pour les animaux domestiques (chats, lapins) et pour les chevaux ; pour le paillage des sols ; et dans la construction (Shea, Lawrence, et Walker 2012) grâce à sa légèreté et son caractère isolant. Le béton de chanvre qui est un mélange de chènevotte, d’un liant à base de chaux et d’eau, trouve ses applications dans les dallages isolants, les chapes d’égalisation sur plancher, l’isolation des toitures, le remplissage des murs, les murs banchés et les blocs préfabriqués (Nguyen 2010). La chènevotte peut être transformée en briquettes ou pellets et utilisée comme matière première pour la production d'énergie.

La combinaison de composés lignocellulosiques comme la chènevotte, le lin ou le kenaf aux polymères thermoplastiques tel que le polypropylène permet non seulement d’augmenter leur biodégradabilité mais modifie également leur inflammabilité. Ces composites sont de plus en plus utilisés dans l’industrie automobile et dans la construction pour leurs propriétés de résistance au feu (Papadopoulou et al. 2014).

Dans des études visant à l’usage de biocarburant, la chènevotte a également été étudiée pour la production d’éthanol (González-García et al. 2012).

L’utilisation de la chènevotte comme litière pour animaux occupe 67 % du marché (Figure I.13). Le béton de chanvre est en constante croissance. Ce matériau est facile à manipuler : il a un prix compétitif, il montre de bonnes propriétés d'isolation comme matériau de construction. Il semble avoir un grand potentiel pour l’éco-construction. Le béton de chanvre occupe aujourd’hui 15 % du marché. Ses applications se trouvent surtout en France, au Royaume-Uni et en Irlande. La chènevotte est aussi utilisée pour la fabrication des panneaux de faible densité ou comme combustible, … (EIHA 2015).

Figure I.13 : Marchés européens de la chènevotte sur la récolte 2010 (44 000 tonnes) (EIHA 2015)

Poudre organique

Sous forme de poudre, elle est extraite par aspiration tout au long de la ligne de défibrage du chanvre. Elle représente environ 20 % du poids de la paille (www.chanvre.oxatis.com, 2015). Elle correspond pour partie à toutes les matières qui ne composent ni la fibre ni la chènevotte, c'est-à-dire aux liants végétaux, comme la pectine, qui assurent la cohésion de la tige, et pour partie aux particules de fibre et de chènevotte issues du défibrage.

La poudre est ainsi constituée de produits organiques et minéraux pulvérulents et de micro fibrilles (Bouloc 2006).

Vu son fort pouvoir absorbant, elle présente une excellente matière pour la litière. Elle trouve aussi son application dans le séchage de la tourbe.

La poudre organique est un combustible. Elle est employée dans l’alimentation de poêles et de chaudières. Elle est aussi utilisée comme un amendement organique et comme un auxiliaire technique pour le traitement de déchets i.e. traitement des boues des stations d’épuration et fabrication de compost en le mélangeant respectivement avec les boues et les déchets verts (www.chanvre.oxatis.com, 2015). 45% 22% 17% 15% Litière (chevaux)

Litière (autres animaux) Bâtiment

I.1.3.

Les coproduits du chanvre : une source potentielle de composés

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