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LA FENÊTRE DE LA VIE DU CHRIST DE LA CATHÉDRALE DE COLOGNE

La chapelle du Saint-Sacrement, ancienne sacristie construite vers 1260-1275 et renommée en 1946, est située du côté nord du chœur de la cathédrale3. La fenêtre nord XV ou Christus-

Fenster est particulièrement intéressante ici puisqu'elle présente les épisodes de l'enfance du Christ de l'Annonciation en bas à gauche au Baptême du Christ dans la partie supérieure, en une progression de quatorze panneaux de haut en bas et de gauche à droite : Annonciation, Visitation, Nativité, Adoration des rois mages, Marie et les rois, Circoncision, Présentation de Jésus au Temple, Fuite en Egypte, Massacre des saints innocents à Bethléem, Jésus à douze ans, Tempête, Noces de Cana, Crucifixion, Baptême du Christ [Fig. 125, 126, 127 et 128]. Les fenêtres nord XV et XVI, dites Christologischer Zyklus, proviennent du cloître de l'ancienne église Sainte-Cécile de Cologne, abritant aujourd'hui le pôle médiéval du Musée Schnütgen. Ils ont ensuite été déplacés au collège des Jésuites en 1803 après la sécularisation puis à la cathédrale de Cologne en 1823 avec d'autres vitraux4. Ces fenêtres ne sont attribuées à aucun atelier particulier, mais on peut y déceler deux

peintres-verriers différents (mais probablement issus du même atelier5) et l'appartenance à la

tradition colonaise. Elles sont effectivement faites d'emprunts aux grands noms de Cologne et des anciens Pays-Bas que sont Stefan Lochner et Rogier van der Weyden6, plus particulièrement à

l'Annonciation et à la Présentation au Temple de Lochner (pour les panneaux éponymes) et au Retable de Saint-Colomban de van der Weyden. La datation de cet ensemble, qui a fait l'objet de plusieurs hypothèses, n'est pas évidente : l'Annonciation comportant l'inscription 1581 – probablement une date de restauration –, on a voulu situer la fenêtre à cette date. Néanmoins, Herbert Rode, s'appuyant sur le style et l'iconographie du cycle, sur l'inscription « 146(.) » présente sur le panneau de la Nativité, ainsi que sur la présence de donateurs identifiés et connus, propose de

3 RODE, 1974, p. 149 4 RODE, 1974, p. 149-150 5 RODE, 1974, p. 155 6 RODE, 1974, p. 154

le situer dans les années 1460-14707. Il parvient également à recontextualiser la commande des

fenêtres, au moment du mandat de l'abbesse Elisabeth von Reichenstein, liée à Stefan Lochner, qui fut forcée de quitter ses fonctions dans les années 14758.

Lorsque l'on compare cet ensemble et nos deux panneaux, on constate que la plupart des scènes sont situées dans des intérieurs similaires, encadrés par des colonnes et un plafond. Les deux Annonciations sont particulièrement intéressantes et révélatrices. L'Annonciation de la Christus- Fenster est plus élaborée et décorée de multiples fenêtres et d'un grand banc [Fig. 126 et 131]9, le

tout est semblable aux scènes que l'on trouve chez Rogier van der Weyden, comme nous l'avons vu plus haut avec Hébert Rode. Néanmoins, les deux scènes sont similaires et les visages des deux anges, tous deux de trois quarts, sont d'une proximité frappante [Fig. 131 et 132, 135 et 136]. En effet, le style est le même dans les traits des yeux, en amande et grand ouverts, à l'iris marqué, cernés de noir, soulignés au-dessus et au-dessous par un tracé marquant la paupière et la poche des cernes. Les sourcils sont également très fins et leur trait se prolonge pour former un long nez blanc rectiligne. Les lèvres inférieures sont charnues, le menton bien arrondi, formant des plis au niveau de la gorge. Les zones de lumière du visage se situent au niveau de la pommette gauche et du front, le reste étant assombri en grisaille par des points. Les cheveux et les vêtements ne sont quant à eux pas tout à fait comparables. De même, la figure de la Vierge de l'Annonciation est proche de l'image de la Vierge dans le panneau de la Circoncision [Fig. 128 et 133 et 134]10. En effet, elles ont toutes

deux la même coiffure, les cheveux écartés au milieu et soigneusement coiffés de chaque côté de la tête derrière un petit diadème sur le haut d'un large front et leur nimbe doré est parsemé de fins rayons. À hauteur des tempes, des mèches de cheveux fins et raides sont superposées au diadème et repositionnées derrière les oreilles. Les cheveux lâchés tombent sur les épaules de la Vierge dans les deux panneaux. De même que pour l'ange précédemment, les yeux sont surlignés et soulignés par des traits noirs, mais ici les yeux, foncés, ne sont pas totalement grand ouverts. De très fins sourcils se prolongent également pour former l'arête du nez. La lèvre supérieure est foncée et vient renforcer le contraste avec la lèvre inférieure, lumineuse et épaisse. Le visage de notre Vierge est certes plus arrondi mais tous les traits que nous avons énumérés se retrouvent également sur les visages des autres personnages masculins de la scène de la Circoncision. On retrouve notamment chez eux des yeux foncés au regard pénétrant comme la Vierge. Les physionomies sont assez simples dans la fenêtre nord XV mais plus détaillées et exagérées dans la fenêtre XVI, comme en témoignent les nez plus gros, les bouches beaucoup plus épaisses, les yeux plus perçants, les cheveux et les barbes

7 RODE, 1974, p. 155 8 RODE, 1974, p. 155 9 RODE, 1974, pl. 160, cat.

plus développés [Fig. 129 et 130]. Si les types des visages sont proches, les drapés de nos personnages sont beaucoup plus compliqués et élaborés que ceux de la Christus-Fenster.

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