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Feindre l’envie

Dans le document Fendre la réalité : schizo-réalia (Page 84-87)

Imitation, mimétisme, faire semblant en quelque sorte. Utiliser nos compétences passées et nos réflexions sur le monde pour comprendre les situations et feindre ce qu’il faut représenter. De la manière la plus exacte que l’on conçoit pour rendre compte d’un certain sens. Avec l’œuvre plastique par exemple comme envie qu’elle procure au spectateur. Comme autant de chemin de réflexion possible quand à la réalisation d’un idéal, relatif à une personnification qui se vit alors de la manière la plus utopique possible pour le champ de l’entendement humain. On conçoit ce que l’on entreprend dans la mesure où l’artiste est soumis à ces envies personnelles. Et les retranscriptions sont alors dans ce cas presque jouées comme passées par l’intermédiaire d’une narration. Car l’artiste instaure son cadre, son décor et choisit une multitude de procédés et de gestes. L’envie comme « Désir soudain et vif d’avoir, et de faire quelque chose, comme besoin que l’on désir satisfaire. »1. C’est alors de l’ordre de l’affectif et du

sentiment ainsi l’homme communique et fait alors l’éloge de l’état du monde, il procède alors de la communication en rapport avec l’actualité de l’existence et de la civilisation, l’époque vécue. Selon Deleuze, le désir est constitué comme un agencement, comme constructivisme. C'est-à-dire que l’on ne peut désirer qu’un ensemble de choses, d’évènements ou de faits mais que l’on ne peut dissocier un désir de telle sorte que celui-ci soit une unité. En effet le désir ne concerne plus qu’une unique chose mais un lot d’actions, un contenant, ce que l’on nomme le désir.

L’artiste se doit de feindre l’envie dans son rapport à la matière. Comme pour rendre réel ce que l’on ne ressent pas comme pour simuler, pour affecter en quelque sorte. Feindre la joie par exemple ou encore feindre d’attendrir sur un sujet selon la manière dont il sera prêté artistiquement. L’expression artistique rejoint en effet quelque chose qui est de la feinte. Comme ériger une narration et faire en sorte de l’instaurer dans le cadre du monde réel. C’est de l’ordre du détail, de cette réalité et de la mise en pratique d’un artefact en contexte contemporain. Comme un certain regard sur la société et l’ère sociétale de notre civilisation à un instant donné. Comme des narrations données entreprises par les différents auteurs, artistes. C’est ainsi autant de voie et de point de vue nécessaire quand au besoin de l’inscription d’une œuvre comme stigmate dans le champ de la vie. Stigmate puisqu’elle s’incère comme une controverse comme une résistance dans le champ de l’existence.

La question du faux en art et de faire en sorte que le faux à l’air vrai. Ne pas plagier la vie en la copiant bêtement. Comme une simulation au devant de l’enjeu de la scène contemporaine. Ne pas tenter de copier la nature mais sans détourner au contraire. Créer de nouvelles conceptions et de nouvelles valeurs qui mènent ainsi à l’envie que l’œuvre procurera. Dans son contexte propre et émergent d’après l’environnement déjà présent. Environnement qui se situe donc comme le cadre de l’œuvre, on parle ainsi de contexte pour expliciter le mode sémantique et ainsi la démarche de l’artiste en vue de sa réalisation. Le faux en art est une source d’inspiration majeure qui permet l’intervention de l’homme sur l’état naturel des choses. L’homme n’imite pas la nature il crée tout autre choses. La pratique du faux comme

II. Morceler le visible 1. La méditation par ablation B. Feindre l’envie

représentation cognitive de l’être au sein du monde. Comme ce qu’il advient en lui en quelque sorte, par son raisonnement. Le faux comme un état de persuasion. En effet l’art a toujours constitué une sorte de complaisance au niveau politique et commerciale. Sa représentation a été mainte fois utilisée comme ressource de propagande. Son caractère noble est ainsi détourné pour diffuser un message, expliciter une politique et tromper un peuple. Il y a donc bien un détournement de la figuration de l’expression artistique à des fins de manipulation. En effet il s’agit là de manipulation des sens par l’art. La question de la manipulation par rapport à l’art, puisque l’artiste trompe les sens. L’artiste utilise sa réflexion afin de fendre la réalité, il manipule les sens en érigeant des artefacts qui font appel au champ du sensible. Tout l’art de l’homme ne raisonne pas dans un syllogisme permanent mais dans le degré de feinte et de suite logique. L’homme convainc, guidé par ses envies. Convaincre le monde, voilà le propre de l’homme. L’art est manipulation, singulier partage du monde. Je souhaiterais évincer quelconque quiproquo à votre esprit. L’on parle généralement de manipulation pour expliciter des techniques de persuasion ou machinerie efficace, perspicace et affligeante. L’art échappe selon moi en quelque sorte à cette thématique. Cependant il me semble très approprié de parler de génie du faux en art. C’est somme toute une technique anoblie de titre élogieux gracieux, érigée à la composition du faux tendant à faire croire au vrai. L’expression est chez l’homme une persuasion à elle seule. Mais l’être aussi singulier, aussi démembré soit-il correspond toujours à un versant de l’humanité, à ce qu’il confère, à ce qu’il conçoit. Le monde est bizarrement abrupt, hors sens. Et l’être est alors sur terre comme déjà au paradis. L’être profondément calculateur mitigé entre raisonner ses pulsions et au besoin de répondre à celles-ci. Toujours tendancieux. Comment dominer le monde, en convertissant chaque sujet au croisement, sur sa route, à sa cause. De convaincre, toujours convaincre. De ramener à sa cause pour se défaire de la causalité. L’art comme manipulation du perceptible.

L’envie comme une représentation d’une norme de gout d’une recherche alors esthétique sur l’époque même. Question de la mise en jeux. Etablir un contexte pour l’expression d’artefact, de mémoire induit à des objets alors. Etablir un contexte pour le spectateur et pour la mise en scène de ce que l’on nomme communément mode scénique pour parler d’une œuvre et de la représentation aussi bien théâtrale que de présentation. La feinte comme réalisme de représentation comme ce qui pourra donner touche de vie ou en tout cas de dissonance à la vie au sein de représentation plastique évoquée. Changer de point de vue. Comme en substituant l’œuvre à plusieurs ordres de réalité cognitive. L’œuvre fait lien au point de vue de l’intersubjectivité qu’elle comprend. C’est ce que donne à voir la multitude de représentations de la réalité. Qui est donné par autant de courant artistique au travers du temps et de la chronologie. Comme autant de mouvement d’expressions et de partages.

Figure 35 : Peinture A cheval, portrait à l’huile sur papier, Camille Leboë

La question de la lumière sur ce corps et sur les reflets, les teintes d’une multitude de couleur, la chair traitée comme paysage avec des niveaux d’ombres représentées par des teintes sombres. La présence des veines et la cohérence entre les membres du corps, l’échelle et la représentation de la mise en perspective. En effet le corps représenté dans ces lignes de fuite qui font de ce portrait comme à cheval sur le spectateur, il domine en quelque sorte le spectateur. Le corps fait irruption du cadre, il surplombe le spectateur. Il domine ce dernier. Les teintes de la chair forment alors comme un paysage, la nudité mise en exergue, la peau rugueuse, lisse et coloré. Les teintes du corps sont ainsi représentées comme un paysage au dessus du spectateur, en confrontation avec les bords de la feuille. Comme si le corps été ainsi figé entre la réalité et l’imaginaire. Comme si le sujet traité pouvait sortir du cadre pour s’instaurer dans le champ de l’existence.

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