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117Favoriser des diagnostics plus précoces

Pour certains cancers (col de l’utérus, côlon), il est possible d’intervenir sur l’évolution naturelle de la maladie en détectant des lésions précancéreuses dont le traitement permettra de faire diminuer l’incidence.

Pour d’autres, un diagnostic précoce permet généralement un traitement plus efficace et moins lourd.

Ce diagnostic précoce peut se faire :

 par le dépistage qui permet de mettre en évidence une anomalie liée à la présence possible d’un cancer, avant l’apparition de symptôme ou de signe clinique ;

 par une détection précoce de symptômes ou de signes cliniques qui peuvent suggérer un cancer (par exemple un mélanome malin, un cancer de la cavité orale).

Des programmes de dépistage organisés existent pour les femmes (cancers du sein et du côlon-rectum) et hommes (cancer colorectal) âgé(e)s de 50 à 74 ans. Leur évaluation montre que des efforts restent à faire pour favoriser la participation des personnes socialement les plus fragiles à ces programmes de dépistage et atteindre les recommandations européennes. En effet, en 2012, le taux de participation au dépistage organisé du cancer du sein était de 52,7 % (recommandations européennes : au moins 70 %) ; celui du dépistage du cancer colorectal de 31,7 % (recommandations européennes : au moins 45 %).

Un programme national160de dépistage organisé du cancer du col de l’utérus est inscrit dans le Plan cancer 2014/2019.

Les dépistages organisés des cancers du sein et du côlon-rectum sont actuellement mis en œuvre à budgets constants par les structures de gestion départementales (ou régionales). Les budgets accordés aux différentes actions du Plan cancer 2014/2019 ne sont pas encore connus. Mais on ne peut envisager que le développement d’un 3ème programme de dépistage organisé se fasse sans moyens financiers complémentaires, faute de quoi une idée qui en soi est bonne pourrait se révéler délétère.

FAIRE RECULER LES INÉGALITÉS FACE AU CANCER DU COL DE LUTÉRUS Le cancer du col de l’utérus est l’un des rares cancers

qui peut être évité grâce à une prise en charge précoce des lésions précancéreuses et à une vaccination qui permet de lutter contre les principaux Papilloma Virus Humains (HPV 16 et 18), responsables d’environ 70 % des cancers du col utérin161.

Dans les pays développés, l’incidence du cancer du col utérin, et sa mortalité, ont diminué de moitié en 30 ans.

Ainsi, en France, on a observé, de 1980 à 2012, une diminution moyenne de - 2,5 % par an du nombre de nouveaux cas et de - 3,2 % du nombre de décès. Mais on dénombre encore en France plus de 3 000 nouveaux cas, et plus de 1 100 décès, alors que ce cancer pourrait quasiment être éliminé grâce au dépistage et à la l’oropharynx, des berges anales et du pénis.

Recommandations pour la prévention et le dépistage du cancer du col utérin

Vaccination anti-HPV pour les jeunes filles de 11 à 14 ans, avec un rattrapage possible, avant tout contact sexuel, chez celles âgées de 15 à 19 ans, non encore vaccinées

Un frottis tous les 3 ans (après 2 premiers frottis normaux effectués à 1 an d’intervalle), à partir de 25 ans et jusqu’à 65 ans, pour toutes les femmes, vaccinées ou non

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Seul le dépistage permet de détecter et de traiter localement des lésions superficielles du col, avant qu’elles ne se transforment en cancer. En France, on dénombre chaque année environ 90 000 traitements et 25 000 conisations, chez des femmes de plus en plus jeunes.

Actuellement, ce dépistage est fait à l’initiative des femmes ou des professionnels de santé (gynécologues, médecins généralistes, sages-femmes). Cet examen de dépistage (frottis) peut être réalisé à l’hôpital, dans un centre de santé, un centre mutualiste, un centre de planification familiale, voire même dans certains laboratoires d’analyse médicale (sur prescription).

Le nombre de frottis réalisés en France correspondrait à une couverture du dépistage de près de 90 % si toutes les femmes de 25 à 65 ans ne faisaient qu’un seul frottis, tous les 3 ans162. En réalité, on estime que seulement 60 % des femmes de 25 à 65 ans réalisent ce dépistage, et parmi elles :

 moins de 10 % suivent les recommandations ;

 40,6 % sont dans une situation de sur dépistage (frottis tous les ans ou tous les 2 ans, non justifiés)

 et 51,6 % dans une situation de sous dépistage (intervalle entre 2 frottis supérieur à 3 ans).

50 à 70 % des cancers invasifs du col utérin sont diagnostiqués chez des femmes qui ont eu un dépistage insuffisant ou inexistant.

Il existe de fortes disparités de participation selon les territoires et selon l’âge.

Source : Haute autorité de santé

La différence entre les départements serait liée aux variations du nombre de femmes bénéficiant de la CMU-C et de la densité de gynécologues, les départements ayant un taux de couverture163 < 50 %, cumulant une faible densité de gynécologues et un nombre élevé de bénéficiaires de la CMU-C.

162 HAS (HAUTE AUTORITÉ DE SANTE). État des lieux et recommandations pour le dépistage du cancer du col de l’utérus en France.

07/2010. (Recommandations en santé publique).

163 Proportion de personnes appartenant au groupe d’âge cible, dépistées selon les intervalles conseillés, pendant une période de temps donnée.

Taux de couverture du dépistage du cancer du col de l’utérus pour la période 2006/2008

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Source : Haute autorité de santé

Les freins à la participation, d’ordre culturel et économique, sont plus importants chez les femmes d’origine migrante et de groupes sociaux à faibles revenus. On a pu noter ainsi une participation au dépistage nettement moins élevée (43 %) chez les femmes âgées de moins de 50 ans bénéficiaires de la CMU-C. Le taux de couverture est également plus bas pour les femmes affiliées au Régime social des indépendants ou à la Mutualité sociale agricole (respectivement 54 % et 51 % sur la période 2007-2009).

Les obstacles à la participation se cumulent souvent et sont particulièrement difficiles à lever chez les femmes isolées culturellement et géographiquement.

Obstacles à la participation au dépistage du cancer du col utérin 59 61,5 61,8 60,9

25-29 30-34 35-39 40-44 45-49 50-54 55-59 60-64 65-69

Taux de couverture en %

Taux de couverture du dépistage du cancer du col de l'utérus en France, selon l'âge, pour la période 2006-2008

• notamment chez les femmes ménopausées

une absence de suivi gynécologique régulier

• les plus jeunes ne se sentent pas concernées par la maladie (absence de symptôme)

• les plus âgées, passée la ménopause, se font moins dépister, estimant à tort qu'il n'y a plus de risque

• les femmes ne connaissent pas le frottis, personne ne leur en a jamais parlé

une méconnaissance de la maladie, de sa prévention et de son dépistage

• les femmes ne savent pas où aller pour faire cet examen

une méconnaissance des modalités du dépistage

• examen considéré comme gênant, embarrassant, angoissant, inconfortable, voire douloureux

une peur, une réticence vis-à-vis du frottis

un examen non pratiqué dans le pays d'origine

• faible densité de gynécologues et de généralistes dans certains départements ; délai d'attente de plusieurs mois pour un rendez-vous, etc.

des difficultés d'accès aux professionnels pouvant réaliser l'examen

• 9 frottis sur 10 sont réalisés par des gynécologues, dont la majorité exerce en secteur 2. Contrairement au dépistage du cancer du sein, le dépistage du cancer du col utérin n’est pas remboursé à 100 % par l’Assurance maladie ==> freins majeurs pour les femmes sans complémentaire santé, ou bénéficiaires de la CMU-C, certains médecins refusant de les prendre en charge

le coût

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Selon la Haute autorité de santé164 la mise en place d’un dépistage organisé du cancer du col de l’utérus pour l’ensemble des femmes de 25 à 65 ans permettrait, par rapport à la situation actuelle :

 de réduire l’incidence du cancer du col utérin de - 14,2 % (- 20,3 % pour les stades supérieurs à 1) et le nombre de décès à 5 ans de - 18,1 % ;

 d’augmenter de 27,5 % le nombre de lésions dépistées, dont près de la moitié de lésions précancéreuses.

La mise en œuvre d’un tel programme permettrait en outre d’améliorer les conditions et les modalités du dépistage (formation des professionnels de santé, amélioration de la qualité des prélèvements, nouveaux tests plus sensibles, recherche systématique d’HPV à partir de 35 ans), la prise en charge et le suivi des femmes (surveillance des anomalies, des traitements ; suivi de l’évolution des lésions).

Mais, pour faire reculer les inégalités face au cancer du col de l’utérus, d’autres actions seront nécessaires pour :

 améliorer l’information des femmes à tous les âges de la vie, pour leur permettre de mieux comprendre les enjeux du dépistage et de la vaccination ;

 favoriser l’éducation à la santé ;

 permettre un égal accès au dépistage et à la vaccination (diversification des structures de dépistage/vaccination ; implication de nouveaux professionnels de santé ; accès gratuit, etc.) Dans le cadre du Plan cancer 2014/2019, un programme de santé publique sera mis en œuvre, qui s’inscrira également dans la Stratégie nationale de santé, comprenant des actions en faveur de la vaccination et du dépistage.

Objectif 1

Favoriser des diagnostics plus précoces

Faire reculer les inégalités face au cancer du col utérin et réduire son incidence

Réduire de 30 % l’incidence et le nombre de décès par cancer du col de l’utérus à l’échéance de 10 ans ;

Atteindre un taux de couverture du dépistage de 80 % chez les femmes de 25 à 65 ans ;

Atteindre un taux de couverture de la vaccination par le vaccin anti-HPV de 60 % à l’échéance 2019.

Action 1.1 : Permettre à chaque femme de 25 à 65 ans l’accès à un dépistage régulier du cancer du col utérin via un programme national de dépistage

Encadrer le dispositif de dépistage organisé du cancer du col utérin en définissant un cahier des charges qui prendra en compte les enseignements tirés des expérimentations, en ciblant les femmes ne réalisant pas de dépistage et les populations les plus vulnérables ;

Déployer le dispositif, son suivi et son évaluation en confortant le rôle du médecin généraliste et en s’appuyant sur les structures de gestion du dépistage des cancers ;

Garantir aux personnes concernées une prise en charge totale des actes de dépistage […] ;

Assurer, sous la responsabilité des ARS, la diversification des effecteurs et lieux de réalisation des frottis […] ;

Positionner dans le dispositif l’alternative par auto-prélèvement pour les femmes qui ne font pas de frottis ;

Développer des actions d’information et de sensibilisation de la population et cibler […] les départements dont les taux de couverture sont inférieurs à 50 % de la population cible […].

Action 1. 2 : Améliorer le taux de couverture de la vaccination par le vaccin anti HPV en renforçant la mobilisation des médecins traitants et en diversifiant les accès, notamment avec gratuité, pour les jeunes filles concernées

Renforcer la communication vers les jeunes filles et les parents sur l’enjeu de la vaccination […] ;

Autoriser la vaccination par les infirmier(e)s diplômé(e) d’État ;

Promouvoir des études en sciences humaines et sociales et en épidémiologie descriptive sur l’acceptabilité de la vaccination en milieu scolaire pour les jeunes filles de 11 à 14 ans.

164 HAS (HAUTE AUTORITÉ DE SANTÉ). État des lieux et recommandations pour le dépistage du cancer du col de l’utérus en France.

07/2010. (Recommandations en santé publique).

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Action 1. 3 : Assurer aux femmes chez lesquelles une anomalie a été détectée une prise en charge adaptée

Actualiser et diffuser les recommandations de prise en charge des lésions précancéreuses et cancéreuses […] ;

S’assurer de leur application par les professionnels concernés.

Action 1. 4 : Mettre en place une évaluation de la stratégie de lutte contre le cancer du col de l’utérus pour guide et réajuster les dispositifs

Des actions sont également inscrites dans le Plan cancer 2014/2019 pour parvenir aux objectifs de participation aux dépistages des cancers du sein et du côlon-rectum, grâce à des programmes rendus plus efficients et accompagnés d’une information sur les avantages et les inconvénients du dépistage permettant à chacun d’en mesurer les enjeux.

Réduire la mortalité et la lourdeur des traitements du cancer du sein et du cancer colorectal grâce aux dépistages

Action 1.5 : Proposer, par le médecin traitant, à chaque personne la modalité de dépistage et de suivi adaptée à son niveau de risque de cancer du sein ou de cancer colorectal, en intégrant les personnes à risque aggravé dans les programmes de dépistage, avec l’appui des structures de gestion et de l’Assurance maladie

Action 1.6 : Accroître l’efficacité des programmes de dépistage organisé du cancer du sein et du cancer colorectal

Action 1.7 : Lutter contre les inégalités d’accès et de recours aux programmes de dépistage

Action 1.8 : Encourager la mise en place d’organisations territoriales, de coopération entre les différents acteurs et d’approches de dépistage réduisant les inégalités d’accès

Action 1.9 : Améliorer l’information des populations concernées par les dépistages pour leur permettre de faire des choix éclairés

Action 1.10 : Veiller à la pertinence des pratiques en matière de dépistage individuel ; encadrer et limiter les pratiques dont l’efficacité n’est pas avérée voire délétère

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