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La littérature regorge d’articles évoquant les problèmes de cicatrisation ainsi que leurs origines. C’est un phénomène complexe faisant intervenir des facteurs généraux tels que les déficits d’apport en nutriments et en oxygène, mais aussi locaux tels que l’hyperacidité gastrique, l’infection ou la poursuite évolutive.

Le cancer entraîne un hypercatabolisme protidique responsable d’une perte de poids qui se traduit à terme par la maigreur des patients. Selon l’étude multicentrique de Lansaat, la maigreur, définie par un IMC<18,5kg/m2, serait un facteur favorisant la survenue des pharyngostomes (16). Cependant tout comme Timmermans (17), nous n’avons pas retrouvé de lien statistique entre un IMC<18,5kg/ m2 et la survenue d’un pharyngostome. Cela est probablement dû au manque de puissance de notre étude en lien avec notre faible effectif de patients maigres (13,3%).

Une bonne oxygénothérapie tissulaire est indispensable à la cicatrisation. Plus le taux d’hémoglobine est bas, moins bon est le transport en oxygène et donc moins bonne est la cicatrisation. Certains auteurs retrouvaient une influence statistiquement significative d’un taux d’Hb<12,5g/dL en pré et/ou en post-opératoire comme facteur de risque de survenue d’un pharyngostome (1, 2, 11). Cette hypothèse reste discutable car, tout comme nous, de multiples auteurs n’ont pas retrouvé l’hémoglobine avec un taux identique pré-opératoire et/ou post-opératoire comme facteur de risque statistiquement significatif de pharyngostome (8, 16, 18). Un taux d’Hb<12,5g/dL n’est probablement pas assez bas pour être identifié comme facteur de risque. La variation du taux d’hémoglobine reste un facteur qu’il serait probablement intéressant d’étudier. La radiothérapie est également un facteur pourvoyeur d’hypo-oxygénation tissulaire. En effet, par la fibrose tissulaire et la sclérose vasculaire qu’elle engendre, elle provoque des troubles de la cicatrisation même longtemps après l’irradiation. De nombreuses études ont rapporté un lien significatif entre l’antécédent de radiothérapie et la survenue d’un pharyngostome (1, 2, 4, 5, 7, 11, 12, 16, 18, 19, 20).

Boscolo-Rizzo retrouvait deux fois plus de pharyngostomes dans sa population de patients

16 post-radiques que dans sa population non post-radique (41,4% contre 18,5%, p=0,005) (4).

Malgré 31,3% de pharyngostomes parmi nos patients post-radiques contre 29,0% chez les non post-radiques, nous n’avons pas retrouvé un tel impact de la radiothérapie sur la survenue du pharyngostome (p=0,752), tout comme Mattioli (8) ou Timmermans (17). Ceci pourrait éventuellement s’expliquer par les mesures particulières plus fréquemment mises en place dans notre service chez les patients post radiques telles que la fermeture par LGP (p=0,036*), la pose d’une gastrostomie per opératoire (p<0,001*), la réalisation de la chirurgie par un opérateur plus expérimenté (p=0,061) et la pose moins fréquente d’un IP (p=0,011*). Cependant, le faible effectif de notre population post-radique n’a pas permis de montrer un impact statistiquement significatif du caractère protecteur de ces mesures sur la survenue des pharyngostomes.

L’hyperacidité gastrique par l’inflammation locale qu’elle engendre peut être responsable d’un défaut de cicatrisation sur les sutures du néo-pharynx. Dans une étude monocentrique prospective randomisée contre placebo, Stephenson retrouvait une prévalence statistiquement inférieure des pharyngostomes chez les patients ayant reçu un traitement par IPP en post-opératoire (9). L’ensemble de nos patients recevant en systématique un traitement par IPP dans la période post-opératoire, il ne nous a pas été possible de dégager un éventuel facteur protecteur de ce type de traitement. Cependant 13,3% de nos patients, présentaient une hyperacidité gastrique pré-opératoire traitée par IPP sans que ce traitement n’ait montré une diminution du taux de pharyngostome alors que le reflux acide était contrôlé (p=0,372). Par ailleurs, alors que la SNG et la gastrostomie favorisent le reflux acide, aucun article n’a étudié l’impact de ces procédés sur la survenue du pharyngostome.

Dans notre étude, nous n’avons pas retrouvé d’influence de ces dispositifs sur la survenue des pharyngostomes. De la même manière, le taux de pharyngostome n’était pas modifié que l’on mette en place une SNG ou une gastrostomie. L’interprétation de ce résultat doit rester prudente car le nombre de patients ayant bénéficié d’une gastrostomie était faible (9,5%). Comme l’a montré Boscolo-Rizzo, l’ensemble de ces éléments pourrait laisser supposer l’absence de relation entre hyperacidité gastrique et apparition d’un pharyngostome (4).

17 L’inflammation locale peut aussi être provoquée par une infection. La méta-analyse réalisée en 2006 par Paydarfar sur 26 articles rapportait qu’une antibioprophylaxie par Métronidazole avait une influence significative sur la réduction du taux de survenue du pharyngostome (2).

Actuellement, les recommandations de 2017 OMEDIT Pays de la Loire préconisent la réalisation d’une antibioprophylaxie par Augmentin® en alternance avec l’Amoxicilline pendant 24h dans un contexte non post radique et d’une antibiothérapie curative de 5 jours par Augmentin® en cas d’antécédent de radiothérapie. Dans notre étude l’antibioprophylaxie était réalisée par Augmentin® chez tous les patients, son impact n’a donc pas pu être testé.

Dans l’étude de Boscolo-Rizzo, tous les patients recevaient une antibioprophylaxie par Cefazoline (4). Il retrouvait que la survenue d’une température corporelle >37,5°C dans les 48 premières heures était un facteur prédictif significativement associé à la survenue d’un pharyngostome. Cette augmentation de la température corporelle est un signe d’alerte de l’inflammation voire de l’infection sous-jacente prédisposant à la survenue d’un pharyngostome. Dans notre étude, une température corporelle >37,5°C dans les 48 premières heures n’était pas associée à une majoration du taux de pharyngostome (p=0,512).

La présence de cellules tumorales favorise l’inflammation locale et empêche la cicatrisation.

Cependant, l’influence de la qualité des marges d’exérèse sur la survenue des pharyngostomes reste discutée. En effet, certains auteurs retrouvaient une association statistiquement significative entre une exérèse incomplète et la survenue d’un pharyngostome (1, 2, 7, 11) alors que d’autres non (5 ,19, 21). La présence de marges de résection positive chez 10,5% de nos patients n’était pas non plus associée à un risque accru de pharyngostome (p=0,426), possiblement en raison du faible nombre de patients dans ce groupe.

Enfin, il nous paraissait important de citer certains facteurs influençant la cicatrisation retrouvés dans la littérature bien que nous ne les ayons pas étudiés : la nécessité de transfusion de culots globulaires péri-opératoire (2) ; l’hypothyroïdie (10) ; un taux d’albuminémie pré-opératoire <40g/L ou post-opératoire <35g/L (4, 8, 17, 18) ; les antécédents tels que le diabète (4, 8, 19).

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