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CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

II. Les biofilms, description et rôle dans le colmatage des bassins d’infiltration

II.3 Facteurs influençant les biofilms phototrophes

Le développement des biofilms est un processus séquentiel complexe qui fait intervenir de nombreux mécanismes physiques, chimiques et biologiques. La première étape est le conditionnement du substrat à coloniser par les organismes « pionniers », qui s’attachent à la surface à l’aide d’appendices générateurs de mouvements. D’autres organismes viennent ensuite s’associer jusqu’à former un assemblage stable (O'Toole et Kolter, 1998; Filloux et Vallet, 2003). Je ne détaillerai pas plus longuement les étapes de la formation d’un biofilm, mais retiendrai simplement qu’elles sont gouvernées par de nombreux facteurs (Ahimou et al., 2007), recensés dans le Tableau 3 ci-après.

Traits biologiques des

espèces composant le

biofilm

Génotype et phénotype spécifiques de l'organisme

Expression des gènes codant pour les propriétés de surface Formation des EPS

Dynamique de développement des organismes (taux de croissance spécifique, période de latence, affinité avec le substrat, etc.)

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Tableau 3 : Facteurs influençant le développement des biofilms, d’après Wimpenny et al. (2000) Dans le cas des biofilms phototrophes, les principaux facteurs environnementaux conditionnant le développement des organismes sont la lumière, la disponibilité des nutriments et la température, auxquels s’ajoutent des interactions avec les autres organismes telles que la prédation ou la compétition (Stevenson et al., 1996). Ces interactions seront plus longuement évoquées dans la partie suivante concernant les macro-organismes. La stabilité du substrat est ici secondaire puisque le support de colonisation est stable, et les forces de cisaillement liées au courant sont quasi inexistantes dans les systèmes lotiques.

II.3.1 La lumière

Certainement le facteur le plus important dans le cas des biofilms phototrophes, elle constitue une ressource indispensable qui permet la présence du compartiment algal au sein du biofilm. Hill (1996) parle d’ailleurs de variable fondamentale pour les

Facteurs physico-chimiques

Type d'interface de colonisation Composition et rugosité du substrat Disponibilité des nutriments

Température, pH, Taux d'humidité, Pression Demande et disponibilité en oxygène

Processus stochastiques

Colonisation initiale : attachement/détachement

Changement aléatoires dans les facteurs biotiques et abiotiques Phénomènes

déterministes

Interactions spécifiques entre les organismes : Compétition, neutralisme, coopération et prédation

Procédés

mécaniques Cisaillement dû aux conditions d'écoulement, abrasion, etc.

Import-export

Ajout ou retrait d'un composant dans la structure du biofilm, comme des particules minérales de sable ou d'argile, des composés détritiques, etc. Décollement de la biomasse

Libération de cellules individuelles Changements

temporels

Changement périodique de l'environnement biotique, diurne ou annuel (implique des changements de lumière, température, pH)

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phototrophes benthiques. L’augmentation de l’éclairement entraîne une stimulation de la production primaire. Cette relation entre l’intensité lumineuse et la photosynthèse ne suit pas une relation linéaire mais se caractérise par une corrélation positive pour des gammes d’intensité lumineuse comprises entre 40 et 400 µmol m-2 s-1PAR5, et par un effet inhibiteur dans le cas d’une trop forte intensité lumineuse, généralement pour des valeurs > 600 µmol m-2 s-1PAR (Hill, 1996).

Les changements quantitatifs ou qualitatifs de lumière dus aux variations environnementales représentent les variables les plus déterminantes dans la croissance, la physiologie et la structure des communautés algales benthiques. Ces variations peuvent avoir des causes multiples (Hill, 1996; Findlay et Watling, 1998) :

- « l’auto-ombrage » dû aux communautés elles-mêmes, compressées entre-elles, - le couvert végétal, et notamment les macrophytes, terrestres ou aquatiques,

- l’atténuation lumineuse et l’effet filtre (changement de longueur d’onde) par la colonne d’eau, liés à la profondeur d’immersion du substrat colonisé,

- l’atténuation lumineuse au sein de la colonne d’eau, liée au phytoplancton et aux particules solides en suspension (turbidité),

- les variations saisonnières.

La lumière est donc une composante clé dans la structuration des communautés benthiques et dans les interactions entre les différents phototrophes. Elle conditionne le caractère de producteur primaire des biofilms phototrophes et confère ainsi des impacts sur l’ensemble du réseau trophique (Dodds et al., 1996a; Hill, 1996). Par ailleurs, Roeselers et al. (2007) ont suggéré que l’influence de l’intensité lumineuse était plus importante durant la phase initiale du développement du biofilm. Ils ont en effet observé, que sous de fortes intensités lumineuses, les espèces colonisatrices sont majoritairement des algues. Enfin, il faut noter que dans le cas des biofilms benthiques, la lumière doit être considérée à deux échelles : le gradient lumineux décroissant avec la profondeur de la colonne d’eau, et au sein du sédiment (Goldsborough et Robinson, 1996). En effet l’auto-ombrage dû à la stratification verticale des biofilms phototrophes semble jouer un rôle important dans la répartition des espèces algales. A titre d’exemple,

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dans la partie superficielle recevant le plus fort taux de lumière, ce sont généralement les algues vertes filamenteuses qui prospèrent (Hill, 1996).

II.3.2 Les nutriments

Les nutriments organiques et inorganiques (C, N, P) sont indispensables au développement des biofilms mixtes, c’est-à-dire des biofilms comprenant non seulement une composante autotrophe vis-à-vis du carbone mais également une composante hétérotrophe vis-à-vis de ce même élément. Ainsi, si le biofilm peut exister même en l’absence de lumière, en adaptant sa composition à un comportement hétérotrophe, les éléments nutritifs sont eux indispensables à son développement.

Le carbone est l’élément majeur de tous les constituants du vivant : glucides, lipides, protides, acides nucléiques, etc. Si la composante autotrophe du biofilm peut utiliser le carbone inorganique présent dans l’eau (CO2 dissous), la disponibilité en carbone sous forme organique est un facteur clé pour la croissance de sa composante hétérotrophe. Stoodley et al. (1999) ont par exemple montré qu’en augmentant d’un facteur 10 les apports en carbone organique sous forme de glucose chez un biofilm déjà établi, les micro-communautés passaient d’une structure de fines « bandelettes » à de larges monticules.

Les éléments nutritifs inorganiques comme l’ammonium, les nitrates, phosphates et silicates sont nécessaires à l’ensemble des micro-organismes du biofilm (autotrophes et hétérotrophes) et servent à leur croissance et au bon fonctionnement des mécanismes cellulaires. Les principales composantes de ces mécanismes sont les protéines, en particulier les enzymes, composées en grande partie d’azote (issu des nitrates). Ainsi, une limitation de cet élément peut affecter un certain nombre de processus cellulaires comme la photosynthèse ou la synthèse des protéines (Berges et al., 1996). Le phosphore (issu des phosphates) est essentiel à la croissance cellulaire puisqu’il est l'un des principaux constituants de diverses molécules comme les lipides, composantes essentielles des membranes cellulaires. Il est également impliqué dans le transfert de l'énergie et le métabolisme cellulaire, ainsi que dans la photosynthèse (Iglesias et al., 1993). Enfin, les silicates sont utilisés par les diatomées pour la construction de leur squelette externe siliceux (Lippemeier et al., 1999). Ainsi, dans un environnement

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caractérisé par de fortes concentrations en nutriments et en l’absence d’autres contraintes, le biofilm tend à devenir plus épais et plus dense par rapport à un environnement pauvre en nutriments (Characklis et Marshall, 1990).

II.3.3 La température

Concernant les différences verticales de température dans la colonne d’eau, ces effets sur la croissance microbiennes peuvent être importants, notamment dans les lacs, mais dans le cadre des ouvrages d’infiltration, généralement peu profonds (< 2m), ces effets sont considérés comme négligeables (Goldsborough et Robinson, 1996). En revanche, les bassins sont sujets aux variations journalières et saisonnières de température pour les mêmes raisons. Ce paramètre va principalement influencer la croissance du biofilm puisqu’il agit sur les cinétiques des réactions biochimiques, notamment les activités enzymatiques incluant la dégradation de la matière organique (Stevenson et al., 1996). Il peut aussi influer sur la richesse spécifique des communautés : il a été montré que la richesse spécifique du biofilm était réduite pour des températures supérieures à 30°C. (DeNicola, 1996).