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Facteurs influençant la thermodégradation

La dégradation thermique d’un polymère est régie par de nombreux paramètres (figure2.1). Toute variation de ces paramètres pourra a priori modifier la nature des produits émis, la vitesse de dégradation, ainsi que les mécanismes mis en jeu.

2.3.1 Influence des paramètres caractérisant l’échantillon

Les matériaux polymères sont caractérisés par la nature des motifs constituant les chaînes cromoléculaires. Cependant, lors de sa synthèse, de nombreux additifs sont incorporés dans le ma-tériau dans le but de modifier les propriétés physiques ou chimiques, améliorant le plus souvent la résistance à la chaleur. D’autre part, lors de sa mise en forme ou de sa synthèse, des défauts peuvent apparaître dans le polymère.

2.3 Facteurs influençant la thermodégradation

Nature du polymère

Le principal paramètre influençant la thermodégradation d’un polymère est bien évidemment sa nature chimique, c’est-à-dire la nature des monomères utilisés pour synthétiser les polymères. En effet, un polymère comme le polypropylène (PP) (ne contenant pas d’oxygène dans sa compo-sition) n’émettra pas les mêmes composés que le poly(tétrafluoroéthylène) qui ne contient que des atomes de carbone et de fluor.

Pour un type de polymère, il est possible d’obtenir des longueurs de chaînes différentes, ce qui aura une incidence certaine sur la thermodégradation du polymère en question. La dégradation des polymères tend aussi, avant même l’émission de composés, à diminuer la longueur des chaînes et à modifier sa répartition statistique [31–33]. D’autres paramètres concernant l’agencement des monomères entre eux, comme l’enchaînement tête-queue ou tête-tête [34] ou bien la tacticité [11,

35–38], modifient la résistance des polymères au vieillissement, mais aussi la nature des composés émis lors de leur dégradation thermique.

Aussi, afin d’affiner les propriétés des polymères en fonction de leur application, de nombreux mélanges de polymère sont synthétisés : les co-polymères. Ils ne se dégradent pas de la même ma-nière que les polymères non mélangés [39–43]. La proportion de chacun des polymères entrant dans la composition du copolymère, leur agencement, par blocs ou aléatoire, modifieront leur ré-sistance à la chaleur et à la dégradation.

La voie de synthèse [44–48] influe sur de nombreux paramètres : la présence d’impuretés (mo-nomère résiduel, initiateur de polymérisation), mais aussi des paramètres structuraux du poly-mère : la cristallinité, la longueur des chaînes, la tacticité, l’enchaînement des monopoly-mères ou en-core la structure chimique des extrémités des chaînes. Ce dernier paramètre a une grande influence sur la dégradation thermique [44,49–51], notamment sur la vitesse de dégradation ainsi que sur les mécanismes de dégradation.

Dans le cas d’une polyaddition radicalaire effectuée à l’aide d’un initiateur, l’extrémité de la chaîne est constituée par un fragment de l’initiateur. L’influence des conditions de polymérisation sur la vitesse de thermodégradation a été mise en évidence sur des échantillons de PMMA préparés par polymérisation soit anionique, soit radicalaire en présence d’AIBN ou de peroxyde de benzoyle (C6H5COO−)2[10,47] : la thermodégradation des échantillons obtenus par voie radicalaire montre une dépendance en température plus complexe.

Présence d’additifs

Lors de leur synthèse, de nombreux ajouts peuvent être incorporés à la formulation du poly-mère pour différentes raisons, notamment pour améliorer leurs propriétés vis-à-vis du vieillisse-ment ou de la température. On peut citer parmi les additifs ayant un rôle diminuant la dégra-dation thermique des polymères : les stabilisants thermiques ou UV [49,52] , les retardateurs de flamme [53,54] , les antioxydants [55,56].

Un autre type d’additif est constitué de « charges » de types variés, mélangées au polymère : charge solide [57], nanoparticule [58,59], charge métallique [60]. Ces charges forment un composite avec le polymère. Elles modifient ses propriétés physiques mais aussi thermiques.

D’autres additifs courants sont les plastifiants. Ces petites molécules dissoutes dans le polymère sont en général des phtalates d’alkyle, incorporés dans de très nombreux objets comme les

bou-CHAPITRE2 : La dégradation des polymères

teilles en plastique. Sous l’effet de la dégradation du polymère, ces molécules sont libérées lente-ment tout au long de la durée de vie du matériau. Les conséquences sanitaires sont préoccupantes car les phtalates sont des perturbateurs endocriniens [12,13].

Défauts

Les défauts éventuels au sein de la chaîne polymère peuvent être nombreux [61]. Ces défauts peuvent se former au cours de la synthèse ou provenir d’un vieillissement déjà établi ou bien lors de contraintes mécaniques ayant entraîné une déformation. Ils consistent souvent en liaisons plus faibles que celles de la chaîne ou en insaturations. Ils peuvent alors servir d’initiateurs de rupture de chaîne permettant une initiation précoce de la dégradation, ce qui accélère la thermodégradation.

Présence d’impuretés

Elles consistent souvent en molécules de monomères ou oligomères liées le plus souvent à des synthèses mal maîtrisées [22,62] mais aussi à des impuretés dans le produit de base. Ces impure-tés sont des molécules petites par rapport au polymère. Tous ces composés, ou leurs produits de dégradation, feront donc partie des produits détectés lors d’une thermodégradation.

Facteurs géométriques

La taille [63–66], la masse [67] et la forme de l’échantillon ont aussi une influence sur la thermo-dégradation. En effet, sur un échantillon de l’ordre du milligramme, la température est considérée comme homogène dans le matériau alors que pour un échantillon de l’ordre du kilogramme ou plus, des équations de diffusion de la température sont à prendre en compte. Ainsi, une plus forte perte de masse relative est observée sur des échantillons de petite taille que sur ceux de plus grande taille.

2.3.2 Influence des paramètres liés aux conditions de thermodégradation

Les principaux paramètres liés aux conditions de dégradation sont d’une part la composition chimique de l’atmosphère de dégradation, d’autre part la température et la vitesse de chauffe. Leur influence sur la dégradation du PMMA, étudiée avec notre dispositif expérimental, sera détaillée dans la partie consacrée aux résultats. L’influence générale de ces facteurs sur la dégradation de la majorité des polymères est résumée ci-dessous.

Composition chimique de l’atmosphère de dégradation

Selon l’utilisation qui est faite du polymère considéré, on peut chercher à minimiser sa thermo-dégradation dans des conditions d’atmosphère très variées. Certains polymères sont spécialement conçus pour résister sous atmosphère « hostile », par exemple dans des milieux très corrosifs, le PTFE (Téflon) résiste, entre autres, à l’acide fluorhydrique, à l’acide nitrique concentré et à la soude chaude. Mais les conditions usuelles de dégradation des matériaux correspondent à deux grandes catégories : atmosphère inerte ou atmosphère oxydante.

2.3 Facteurs influençant la thermodégradation

L’étude de la thermodégradation d’un matériau sous atmosphère inerte est intéressante soit si ce polymère est réellement mis en œuvre à l’abri de l’air dans ses conditions habituelles d’utili-sation, soit si l’on souhaite isoler le phénomène de dégradation thermique proprement dit pour mieux comprendre son déroulement. Il s’agit alors d’exclure le dioxygène de l’air ; on procède en général sous azote.

L’atmosphère oxydante correspond aux conditions habituelles d’utilisation de la plupart des matériaux, c’est-à-dire dans l’air. La thermodégradation s’accompagne alors en général de réac-tions d’oxydation, par exemple au niveau des ruptures de chaîne qui se produisent par dégrada-tion des macromolécules. Pour comprendre ces processus, il est souvent intéressant de faire varier la proportion de dioxygène dans l’atmosphère de thermodégradation, en procédant avec des mé-langes N2-O2en toutes proportions.

Selon la nature du polymère d’autres constituants de l’atmosphère peuvent également influer sur sa vitesse de dégradation [68]. Notamment l’eau qui est l’agent du principal processus de dégra-dation chimique de certains polymères : polyesters, polycarbonates, polyamides sont dégradables par hydrolyse. Enfin, précisons que la composition de l’atmosphère à la surface du polymère, donc sur le lieu exact de la thermodégradation, est fortement conditionnée par le renouvellement du gaz à proximité immédiate de la surface, puisque des produits volatils s’en dégagent. Ce renouvelle-ment peut être assuré par exemple par un courant de gaz au voisinage de la surface du matériau. On peut s’attendre à ce que de telles conditions accélèrent la thermodégradation contrairement au cas où l’atmosphère n’est pas renouvelée. Ce phénomène est d’autant plus probable s’il s’agit d’une dégradation sous atmosphère oxydante, dont un constituant intervient directement dans les réactions chimiques de thermo-oxydation.

Température et vitesse de chauffe

Comme toute réaction chimique, la dégradation d’un matériau est d’autant plus rapide que la température est plus élevée. La gamme de température concernée dépend beaucoup de la nature du polymère. Certains matériaux polymères sont conçus pour résister à des températures très éle-vées comme par exemple la résine phtalonitrile qui résiste à des températures de 500 °C.

Pour étudier l’influence de la température sur la vitesse de thermodégradation d’un polymère, on peut procéder en conditions isothermes, c’est-à-dire placer l’échantillon à température fixée et suivre l’évolution de sa dégradation en fonction du temps. L’expérience doit être réitérée à d’autres températures.

Une autre possibilité consiste à utiliser une « rampe de température » : on impose à l’échantillon une croissance linéaire de température entre une température initiale, en général la température ambiante, et une température maximale à laquelle le chauffage est stoppé. Si cette température est suffisamment élevée pour que l’échantillon soit totalement dégradé au cours du chauffage, le facteur à prendre en compte est ici la vitesse de chauffe. Si celle-ci est très élevée, la dégradation est observée à plus haute température qu’avec un chauffage lent, ce « retard » étant lié à la cinétique des réactions de thermodégradation. Ce point sera illustré par nos résultats.

CHAPITRE2 : La dégradation des polymères