• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 6 DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS

6.1.3 Facteurs de succès

6.1.3.1 Implication des employés de production et soutien de la direction

La présente recherche a permis d’identifier plusieurs facteurs clés de réussite exposés dans la littérature. Une des clés de réussite du projet Lean est l’implication des employés de production dans toutes les étapes du projet. La participation des employés de production a facilité la gestion de changement et a permis de réduire la résistance au changement des employés qui n’ont pas été impliqués. Il est important de rappeler, conformément aux résultats rapportés dans cette recherche, que certains des employés et même des gestionnaires étaient peu motivés au début du projet par le manque de confiance dans les résultats attendus par le projet.

L’entretien avec le directeur de production nous a permis de comprendre davantage l’origine de cette résistance aux changements. Il faut rappeler qu’avant le projet, les opérateurs de production assignés aux stations de montage avaient un statut informel supérieur à celui des opérateurs des postes secondaires. Ce statut date de l’ancienne définition du machiniste (opérateur assigné aux machines) qui n’existe plus depuis plusieurs années déjà. Ce statut a créé un sentiment de supériorité informel qui amenait certains opérateurs de la station de montage à refuser d’effectuer des opérations secondaires (Guenard, 2014).

Les résultats obtenus dans la section consacrée à la polyvalence des employés ainsi que l’évolution du niveau de motivation des employés témoignent de l’intégration adéquate de la gestion de changement dans le cadre du projet.

Par ailleurs, suivant les commentaires du directeur de production, la résistance aux changements est due au fait que plusieurs projets dans l’usine n’ont pas connu beaucoup de succès. C’est par la mise en place d’une équipe dédiée, le leadership des gestionnaires et leur implication, sans oublier le coaching des employés que le projet du centre d’usinage est une réussite. Ce constat rejoint celui fait par Boeing. En effet, un des défis majeurs auxquels a fait face Boeing lors de l’implantation de l’approche Lean Manufacturing était la résistance aux changements par ses employés. Ayant assisté à des échecs de l’entreprise lors de plusieurs

tentatives d’implantation d’outils Lean, les employés ont été sceptiques à adhérer de nouveau à ce concept (Subhadra, 2003). Notre recherche l’a montré.

De plus, une étude effectuée par Capgemini Consulting auprès de 150 cadres dirigeants en charge des initiatives Lean dans leur entreprise a mis en évidence les défis d’une implantation d’une démarche Lean. L’enquête a montré que près de la moitié des cadres de l’entreprise interrogés ont placé la résistance aux changements comme défi numéro un d’une implantation Lean

Figure 6.1 : Défis du Lean selon l’enquête de Capgemini (Capgemini, 2010).

Par ailleurs, l’analyse des programmes Lean dans le cadre de cette étude a permis d’identifier quatre principales caractéristiques pour contrer la résistance au changement (Capgemini, 2010) :

leadership : implique l’implication des leaders de tout niveau

reconnaissance : consiste à mettre en place des ressources ayant une bonne connaissance du Lean afin de développer la culture de l’entreprise et d’envoyer un message positif sur l’importance du Lean. Ces ressources agissent en tant qu’acteurs du changement et sont dédiés au projet.

alignement stratégique : consiste à associer les objectifs de la démarche à la vision et la stratégie de l’entreprise.

management des performances : consiste à rendre viables à long terme la démarche et les gains de la démarche.

L’enquête a montré que le défi principal pour réussir une démarche Lean est de garantir sa longévité (Capgemini, 2010). Selon le directeur de production du centre d’usinage, tout projet qui requiert du maintien humain, comme par exemple des procédures de travail, comporte des risques de non-longévité. Toutefois, dans le cadre du projet du centre d’usinage, le dispositif technique mis en place force le comportement humain, par conséquent, le comportement humain attendu va se produire de façon systématique étant donné que c’est le dispositif qui le demande (Guenard, 2014). Finalement, ce constat vient appuyer les résultats obtenus lors des entretiens avec les opérateurs de production. Ces derniers rapportaient que depuis la mise en place du projet, l’ordonnancement des pièces était respecté par l’ensemble des employés.

Dans la littérature, nous avons fait le lien avec la mise en place des lignes en mouvement, en particulier dans l’industrie aéronautique, dans notre revue de littérature (Bombardier, Airbus, Boeing). En effet, la ligne en mouvement force à créer le sentiment d’urgence auprès des employés. En revanche, il y a clairement un manque de données concernant le lien entre la longévité du Lean et les lignes en mouvement ou les infrastructures rigides.

L’entretien avec le chef d’équipe de soir vient en outre confirmer que les employés du quart de soir et de nuit n’étaient pas autant impliqués que ceux du quart de jour. Par ailleurs, les gestionnaires reconnaissent ce constat et s’entendent pour dire qu’il y a eu une forte communication à tous les employés de production afin de contrer ce frein. L’implication de l’ensemble des employés est une des clés de réussite d’une démarche Lean (Baglin & Capraro, 1999; Liker, 2004; Womack & Jones, 2005).

L’autre grande réussite du projet repose sur le leadership des gestionnaires et des directeurs. Ce constat vient appuyer les points de vue de plusieurs chercheurs (Alarçon, Calderon, Diethelm & Rojo, 2008; Baglin & Capraro, 1999; Womack & Jones, 2005). Les résultats de l’évolution du niveau de motivation obtenus à partir des entretiens viennent appuyer ce constat.

Enfin, les prinicpaux facteurs de succés de l’implantation Lean du centre d’usinage sont résumés dans la Figure 6.2.

Figure 6.2 : Facteurs de succès du projet Lean du centre d’usinage