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4.4.1 La Loire : évolution amont-aval du faciès hydrochimique

La Loire (Lo) dispose d’un total de 1123 sites pour lesquels un faciès hydrochimique COD-NO

3 est disponible. Parmi ces 1123 sites, 49 sont emboîtés entre la source de la Loire (12,5 km2) et l’océan atlantique (116 798 km2). Ainsi, nous pouvons observer comment le faciès hy-drochimique évolue au travers de la cascade des ordres de Strahler (la topologie et la taille), en incorporant peu à peu des bassins de méso-échelle dont les faciès hydrochimiques sont bien dissociés (figure 4.19). Les sites localisés sur Lo, aussi bien que les affluents principaux drai-nant 5 des 6 bassins versants emblématiques jusqu’à Lo sont représentés à l’aide de leur classe de faciès COD-NO

3. Trois sections de Lo sont identifiées selon le faciès hydrochimique : Lo amont (concentrations moyennes faibles), Lo intermediaire (concentrations moyennes inter-médiaires), et Lo aval (concentrations moyennes fortes). La partie amont inclut notamment l’Allier (Al) avant et après sa confluence avec Lo dans une région homogène cristalline. La partie intermédiaire inclut le Beuvron (Be), la Gartempe (Ga) dont la géographie évolue vers une géologie plus calcaire et une agriculture s’intensifiant. La partie aval inclut le Thouet (Th) et la Mayenne (Ma) et est fortement agricole. Les concentrations moyennes en COD et NO 3 augmentent au sein de la Loire (Lo) à mesure que sa superficie augmente (figure 4.20). La concentration moyenne en COD se stabilise autour de 4-5 mg/L à 4 000 km2, alors qu’elle aug-mente par paliers jusqu’à l’océan pour NO

3. Dans l’ordre amont-aval, Al, Be, Ga, Th, et Ma se jettent dans Lo, soit directement, soit par l’intermédiaire d’une autre rivière. Le premier affluent, Al (12917 km2), est caractérisé par un faciès hydrochimique identique à Lo (18255 km2). En conséquence, la confluence avec Al ne modifie pas le faciès. Le deuxième, Be (1415 km2), à sa confluence avec Lo (38343 km2) a une concentration moyenne en NO

3 similaire, mais bien plus élevée pour COD. La concentration moyenne à la confluence évolue cependant pour les deux paramètres. Le troisième, Ga (3900 km2) se jette tout d’abord dans la Creuse, elle même dans la Vienne. Ce complexe de 21090 km2à la confluence avec Lo (alors de 56523 km2) possède un faciès hydrochimique remarquablement stable et proche de celui de Lo à la confluence. Ce grand bassin versant n’impact pas le faciès de Lo. Th (3271 km2) se déverse ensuite dans Lo (81122 km2) avec un faciès fort, mais l’effet d’augmentation sur la Lo est presque négligeable, bien que visible. Ma (5813 km2), puis sa partie de la Maine (22303 km2) issue de la confluence avec la Sarthe (7864 km2) et le Loir (8294 km2), s’identifie quant à elle par une concentration moyenne en NO

3 très supérieure et une concentration moyenne en COD légèrement supérieure à Lo à la confluence (84617 km2). Cette contribution à Lo est bien plus significative que celle du Thouet et marque une augmentation considérable des concentrations moyennes du faciès.

Les effets de mélange et le seuil synoptique sont bien représentés sur Lo. Le seuil synop-tique est visible entre 1000 et 10000 km2, lorsque les concentrations se stabilisent une première fois. A leur confluence, Al et Lo présentent un faciès identique, archétypal, proche des concen-trations naturelles. La transition vers Lo intermédiaire s’accompagne d’une augmentation des concentrations moyennes du faciès. Cette partie du linéaire de Lo accueille des bassins versants de géographies différentes. Les bassins tels que Be sont sédimentaires et forment de vastes

zones humides et forestières. Ceci explique très probablement le caractère "COD-dominant" des bassins versants situés ici (Aitkenhead et al., 1999, Moore, 1997). Be et ses voisins sont indi-viduellement petits en taille mais leur contribution simultanée peut expliquer l’augmentation progressive des concentrations moyennes de Lo. Il y a un effet géographique qui s’installe pro-gressivement. La seconde partie de la Loire intermédiaire ne change pas significativement, ce qui est cohérent étant donné la similitude du faciès hydrochimique entre Lo et le complexe Gartempe-Creuse-Vienne. A l’inverse, Lo aval est marquée par une augmentation remarquable des concentrations moyennes en COD et NO

3. Il y a un effet lié au changement de géographie. Ce changement est très faiblement révélé par Th car sa taille est infime en comparaison de Lo. Au contraire, la Maine (dont la Mayenne) contribue fortement, indiquant un changement géographique significatif de par la taille de cet affluent.

FIGURE4.19 – Cartographie du linéaire de la Loire et des principaux affluents

FIGURE4.20 – Profil en long du faciès hydrochimique de la Loire (figure centrale) et ses affluents principaux (les encarts). Chaque confluence est identifiée par une flèche bleue. La concentration moyenne résultante est identifiée par une flèche violette. Les lignes grises verticales séparent le profil en trois parties : Loire amont-intermédiaire-aval. Pour chaque encart sont représentés en noir le profil de la Loire, et en bleu le profil du bassin emblématique, puis en vert la connexion jusqu’à la Loire.

4.4.2 Aspect convolutif du faciès hydrochimique

Les résultats précédents relatifs au faciès et aux indices hydrochimiques nous informent de plusieurs points :

• Le faciès hydrochimique, soit le vecteur des concentrations moyennes, varie régionale-ment sous l’effet combiné du climat et de la géographie.

• Le faciès et les indices hydrochimiques convergent vers une valeur synoptique à mesure que la taille des bassins versants augmente.

• La RA[X] (et sa version normalisée RAn,[X]évoluent par effet de seuil, une valeur locale-ment élevée signifie une connexion topologique d’un affluent dont l’apport hydrochimique est significativement différent du cours d’eau principal.

Nous pouvons reconnaître ici trois effets suspectés dans la convolution du faciès hydrochimique le long du réseau hydrographique : la géographie, la taille et la topologie. L’existence de bassins archétypes ou hybrides illustre quant à elle la façon dont cette convolution s’effectue jusqu’au stade a priori final des hybrides stables. Sous le seuil synoptique et au-delà de la REA, le faciès hydrochimique est déterminé par le mélange des eaux issues de différentes géographies, selon la topologie. A mesure que le bassin versant s’agrandit, l’effet topologique diminue, la probabilité de rencontrer "l’affluent critique" susceptible de modifier le faciès étant faible. Dans la figure 4.21, RA[N O3] et RA[COD] sont représentés pour les 2048 sites en fonction de la surface du bassin versant. Les 4 catégories de bassin versant A, H1, H2 et SH y sont distinguées. Nous pouvons retrouver les principaux attributs de ces différentes catégories (voir section 4.3.6) :

• Les archétypes et les hybrides se répartissent dans les bassins de 100 à 10000 km2. • Les hybrides stables apparaissent à partir de 500 km2.

• Les hybrides H1 ont un comportement proche des archétypes selon COD (σ[COD]et RAn,[COD] faibles) mais hybrides selon NO

3[N O3]et RAn,[N O3]élevés)

• Les hybrides H2 ont un comportement proche des archétypes selon NO3[N O3]et RAn,[N O3] faibles) mais hybrides selon COD (σ[COD]et RAn,[COD]élevés).

Plus généralement, la forme de cette relation est de la forme loi puissance. La RA augmente rapidement sur les surfaces comprises entre 100 et 1000 à 2000 km2, puis montre un comporte-ment asymptotique. Cette forme est encore plus marquée pour les archétypes. C’est l’effet taille qui est responsable de cette allure de la courbe, plus le bassin s’agrandit, moins il est sensible et son Aire Représentative tend à se stabiliser. L’augmentation rapide de la RA avant stabilisation au seuil synoptique (approx. 1000 km2) pourrait alors être une preuve que l’hybridation est très forte dans cette gamme de taille (figure 4.21). La figure 4.22 illustre le concept de convolution des effets géographiques, topologiques et de taille impliqués dans l’évolution du type de bassin versant. Pour une gamme de taille allant de la REA à la méso-échelle puis à l’échelle synoptique, la confluence d’affluents dont la géographie est identique ou diffère (et donc le faciès hydrochi-mique) mène à la persistance du caractère archétypal ou au contraire à l’hybridation. L’effet de taille apparaît graduellement alors que le faciès hydrochimique du cours d’eau principal intègre suffisamment de la variabilité amont. L’analogie avec la REA est alors possible dans la mesure

FIGURE4.21 – Évolution synoptique de l’Aire Représentative en fonction de la sur-face du bassin versant avec prise en compte du type de bassin versant (classification effectuée selon COD et NO

3).

où cette dernière est supposée être contrôlée par l’hétérogénéité de versant (géographie) et est atteinte à partir d’une certaine taille. La stabilisation décrite par la RA pourrait être contrô-lée par l’hétérogénéité géographique. L’atteinte d’une Aire Représentative au sein d’un réseau hydrographique donné peut être décrite par la convolution de l’effet géographique (δ), l’effet topologique (τ), l’effet de taille (λ) ainsi que la non-conservation (ϵ). L’équation 4.5 exprime schématiquement cette convolution d’effets.

RA = δ ∗ τ ∗ λ ∗ ϵ (4.5)

4.5 Modulation des concentrations moyennes : convolution des trois