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L ES EFFETS EXTERNES COMME EXPRESSION DU PROBLEME DE LA COORDINATION Pigou a été l’un des tout premiers économistes à mettre en évidence les difficultés

L A PERSPECTIVE DE L ’ ECONOMIE STANDARD

4.1.1. L ES EFFETS EXTERNES COMME EXPRESSION DU PROBLEME DE LA COORDINATION Pigou a été l’un des tout premiers économistes à mettre en évidence les difficultés

d’organisation de certaines activités par le marché.

Dans The economics of welfare (1920), Pigou s’intéresse fondamentalement aux conséquences de l’activité économique privée sur le bien-être social. L’analyse pigouvienne conçoit une économie où le marché est le mécanisme « naturel » d’organisation des transactions et où les agents économiques sont rationnels.En même temps, elle se base sur des observations de la réalité qui mettent en évidence l’existence de situations qui ne peuvent pas être expliquées à partir de cette perspective du marché.

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Pigou a observé des cas nombreux28 où le résultat de la décision privée par rapport à une activité économique n’est pas celui attendu par la société. Ce décalage correspond à la notion d’effet externe ou externalité, introduite par Pigou. Une externalité est l’effet de l’action d’un agent économique qui s’exercesur un autre agent, en dehors du marché. L’idée d’effet externe dévoile ainsi l’incapacité du marché à aboutir à l’utilisation optimale de ressources dans un grand nombre de cas. L’externalité apparaît dès lors que la décision d’un agent économique affecte le bien-être d’un autre agent – son utilité ou son profit – sans qu’il n’y ait de négociation entre les parties concernées, ni de compensation monétaire.En conséquence, en présence d’externalités, la production d’un bien, qui dépend des calculs privés d’utilité, se trouvera en dessus ou en dessous - dans le cas d’une externalité négative ou positive, respectivement- de l’optimum social.

L’idée d’optimalité que sous-tend ce raisonnement correspond à celle d’optimum parétien. Le concept élaboré par Pigou est né ainsi de sa tentative d’accorder ses observations de la réalité historique aux hypothèses d’individualisme méthodologique, de rationalité substantielle, d’utilitéet d’équilibre sur lesquels se base l’économie du bien-être. Il s’agit par conséquent d’un concept éclectique issu de l’opposition entre les circonstances d’un moment historique donné et celles du monde idéal définies par la théorie néo-classique. Étant donné l’impossibilité de faire rentrer la réalité dans le cadre des hypothèses, la situation est perçue comme une anomalie, et le marché n’est plus synonyme d’efficience.

Comme Pigou l’explicite(1920), l’objectif des études économiques est d’aider à l’amélioration du bien-être social29, en proposant des mesures de politique économique: « The

goal soughtis to make more easypracticalmeasures to promotewelfare— practicalmeasureswhichstatesmenmaybuildupon the work of the economist » (p. 31).

Quand le « libre jeu de l’intérêt individuel » produit une allocation de ressources différente de celle qui correspondrait à la meilleure situation pour l’intérêt collectif, il y a un cas prima facie d’intervention publique, affirmait Pigou.

S’il existe des externalités, la solution passe par leur internalisation. C’est-à-dire par la création de dispositifs capables d’égaler les coûts ou bénéfices marginaux privés aux coûts ou bénéfices marginaux sociaux. Pigou croyait que l’État - ou le gouvernement - avait la capacité

28Même si Pigou tente de s’éloigner de l’économie pure “it must be the realistic, and not the pure, type

of science thatconstitutes the object of oursearch” (Pigou 1920, p. 29), nous soutenons que le concept

d’externalité n’a de sens que si l’on interprète la réalité qu’avec des outils de l’économie néo-classique (ou pure).

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d’intervenir dans les activités génératrices d’effets externes pour améliorer l’assignation de ressources qui garantissait l’intérêt collectif.

En d’autres termes, la réponse pigouvienne aux défaillances de marché – ce qui est le cas en présence d’externalités - correspond au mode de coordination centralisée. L’intervention de l’État se justifie lorsque la coordination des actions individuelles conduit à une situation socialement indésirable.

L

A CONNAISSANCE D

APRES

P

IGOU

Dès le début, l’économie du bien-être reconnaît dans la connaissance des caractéristiques qui la placent parmi les biens gérés de manière inefficiente par le marché concurrentiel.

Pigou (1920), en citant divers exemples d’effets externes positifs, mentionne le cas de la recherche scientifique :

« it is true of resources devoted alike to the fundamental problems of scientific research […there] are often of such a nature that they can neither be patented nor kept secret, and, therefore, the whole of the extra reward, which they at first bring to their inventor, is very quickly transferred from him to the general public in the form of reduced prices. The patent laws aim, in effect, at bringing marginal private net product and marginal social net product more closely together. By offering the prospect of reward for certain types of invention they do not, indeed, appreciably stimulate inventive activity, which is, for the most part, spontaneous, but they do direct it into channels of general usefulness» (ibid., p. 139).

Dans l’interprétation de Pigou, la connaissance est considérée comme un bien produit de manière exogène et qui est introduit dans l’économie en permettant d’améliorer le bien-être collectif grâce à une réduction des prix des produits.

La loi sur les brevets est le mécanisme d’intervention qui permet de récompenser ces inventions qui produisent des améliorations dans les conditions de vie. Dans cette interprétation, nous trouvons déjà des éléments qui permettent d’identifier les difficultés que pose la connaissance à l’interprétation standard. Cependant, dans le cas de Pigou, la connaissance est une externalité très particulière, car dissociée de la production des biens. Les inventions sont, dans sa vision, spontanées, c’est-à-dire que la génération de connaissance se produit de manière indépendante des relations économiques fondamentales.

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4.1.2.L

A CRITIQUE DE

C

OASE ET LA REFORMULATION A PARTIR DES DROITS DE