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Chapitre IV. Synthèse de couches minces de Ti2AlN par recuit de systèmes

IV.3- Expériences préliminaires

Afin de mieux comprendre la logique adoptée sur l’ensemble de cette étude, nous repre- nons ici les résultats obtenus sur trois des échantillons synthétisés en début de thèse. Les con- ditions de dépôt sont rappelées dans le tableau ci-dessous :

Nom échantillon Test 1 Test 2 Test 3

Couches Ti+Al Puissance cible Ti 180 180 180

Puissance cible Al 0 0 30

Temps de dépôt 70 70 70

Couches AlN Puissance cible Al 300 300 300

Débit N (sccm) 6.5 6.5 6.5

Temps de dépôt AlN 20 30 20

Nombre de bicouches 10 10 10

Substrat SiC (0001) Al2O3 (0001) SiC (0001)

Tableau IV.1 : Conditions expérimentales utilisées pour synthétiser des multicouches Ti/AlN et Ti+Al/AlN .

Le premier échantillon (Test 1) est ici supposé posséder la stœchiométrie « optimale » avant recuit, c’est-à-dire un ratio Ti:Al:N proche de 2:1:1

Comme indiqué précédemment, une évaporation préférentielle de l’aluminium étant atten- due lors des recuits réalisés à haute température sous vide secondaire, des tests ont été réalisés

113 sur des multicouches possédant volontairement un excès d’aluminium. Cet excès d’aluminium est obtenu selon deux méthodes différentes :

- Par augmentation du temps de dépôt d’AlN (test2).

- Par insertion d’un peu d’aluminium dans les couches de Ti (test3).

Dans la seconde méthode, un excès d’aluminium est donc obtenu en réalisant un co-dépôt Ti- Al. Afin de limiter la quantité d’aluminium introduite dans les couches de Ti, la puissance sur la cible d’Al a été maintenue à sa valeur minimale (pour laquelle un plasma stable est obtenu près de la cible d’Al). Notons également que l’intérêt de la seconde méthode est de ne pas obtenir un rapport Ti/N trop faible qui pourrait conduire à la formation de composés (Ti,Al)Nx

très stables.

Les multicouches ainsi réalisées et déposées sur des substrats d’Alumine monocristalline (Al2O3 (0001)) ou de SiC monocristallin (0001) ont ensuite été recuites dans un four sous vide

secondaire. Afin de mieux comprendre les mécanismes d’interdiffusion permettant la forma- tion de la phase Ti2AlN désirée, des recuits successifs ont été réalisés avec des températures

croissantes, généralement de 200°C à 750°C ou 800°C par palier de 100°C avec des temps de maintien d’environ une heure à chaque palier. Notons dès à présent que les recuits réalisés à des températures intermédiaires ne semblent pas modifier l’état final (i.e. obtenu après le re- cuit à la plus haute température) puisque des diffractogrammes de RX identiques sont obtenus après une montée par palier ou après une montée très rapide à la température maximale (géné- ralement 750°C). Enfin, tandis que certains échantillons ont été recuits dans un four sous vide (10-6 mbar) puis analysés par diffraction des rayons X après chaque recuit, d’autres échantil- lons ont été caractérisés in situ, les échantillons étant alors placés dans un four sous vide se- condaire (2.10-5 mbar) installé dans un diffractomètre. Bien que les conditions de recuit soient différentes, les résultats obtenus sont tout à fait comparables puisque des conclusions stricte- ment similaires sont obtenues.

Les figures IV.3 à IV.5 donnent l’évolution des diffractogrammes de RX obtenus à tempé- rature ambiante après chaque recuit pour les trois échantillons testés. Les domaines angulaires en 2 ont été choisis afin d’observer les pics principaux des phases attendues. Par exemple, seuls les pics de diffraction créés par les plans (0002) et (10-11) respectivement du titane et de l’AlN sont observés directement après dépôt lorsqu’on réalise un scan en 2 entre 5 et 80° ce qui laisse présupposer que ce sont les seules phases formées. Bien entendu, nous ne mention- nons pas ici les pics très intenses attribuables au substrat de SiC ou d’Al2O3. De la même

114 IV.5 sont les principaux pics observables sur une plage angulaire beaucoup plus large (voir figure IV.6).

La gamme angulaire autour de 2 = 13° est particulièrement intéressante à observer. Les phases MAX possèdent en effet un paramètre de maille c très grand et l’observation de pics dans le domaine des bas angles permet souvent de savoir rapidement si une phase MAX s’est formée. Dans le cas de Ti2AlN, le paramètre de maille c est égal à 1.361 nm et on s’attend

donc à une diffraction sur les plans (0002) à un angle 2 = 13° si cette phase se forme avec les plans de base parallèles à la surface du substrat (ce qui est très généralement le cas). La for- mation de la phase Ti2AlN est effectivement observée pour les trois échantillons et ceci pour

une température de 550°C pour les deux échantillons possédant un excès d’aluminium (Test 2a et 2b) tandis que seule une faible quantité de Ti2AlN se forme à partir de 700°C seulement

pour l’échantillon ne possédant pas cet excès d’aluminium (test1).

Figure IV.3 : Diffractogtammes de RX obtenus sur l’échantillon test 1 (après des recuits d’une heure à des tem- pératures variant de 400°C à 750°C).

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Figure IV.4 : Diffractogrammes de RX obtenus in situ sur l’échantillon test 2 lors de paliers en température variant de 200°C à 800°C.

Figure IV.5 : Diffractogrammes de RX obtenus in situ sur l’échantillon test 3 lors de paliers en température variant de 200°C à 800°C.

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Figure IV.6 : Diffractogramme de RX obtenu in situ à 550°C sur l’échantillon test 2.

Une observation attentive des figures IV.3 à IV.5 révèle également que des phases iden- tiques semblent se former au cours des recuits. Les stœchiométries globales des films analysés étant différentes, les quantités de phases formées ainsi que leur stœchiométrie sont vraisem- blablement différentes. Par exemple, directement après le dépôt, nous pouvons observer que l’allure des pics de diffraction est très différente suivant que l’on insère ou pas de l’aluminium dans les couches de Ti. Alors que deux pics, attribuables à la diffraction sur des plans (0002) du Ti et (10-11) de l’AlN, sont observables dans le cas des multicouches Ti/AlN, un seul pic très large est obtenu pour le système multicouches (Ti+Al)/AlN.

Dans les trois cas ici présentés, on observe systématiquement une diminution progressive de l’intensité du pic attribué à la diffraction sur les plans (0002) du Ti de telle sorte que vers 400°C ne subsiste qu’un seul pic dont la position correspond à celle des plans (10-11) de l’AlN. Lorsque la température atteint 500°C, ce dernier pic se déplace vers des valeurs plus élevées de . Il est impossible, sur la seule base des résultats obtenus en DRX en configura- tion (-2) d’indiquer à quelle phase est attribuable ce pic de diffraction. Aussi, sur les 3 der- nières figures, indiquons-nous pour ce pic de diffraction « phase  » dont la nature devra être déterminée par des observations complémentaires. Rappelons que ce système multicouche a déjà été étudié dans la littérature et que la formation d’une phase intermédiaire a bien été ob- servée dans la même gamme de température, les auteurs indiquant qu’elle correspondrait à la

117 phase pérovskite Ti3AlN. Le pic observé serait alors attribuable à une diffraction sur les plans

(111) de cette phase cubique. Nous démontrerons plus en avant dans ce manuscrit que la for- mation d’une telle phase cubique n’est en fait pas vérifiée. Comme précédemment indiqué, à la suite de la formation de cette phase , on observe progressivement la formation de la phase MAX Ti2AlN pour des températures supérieures à 500°C lorsqu’il existe un excès

d’aluminium et 700°C sans excès d’Al. Toutefois, les conditions expérimentales adoptées n’ont jamais permis d’aboutir à la formation d’une couche mince monophasée de Ti2AlN ce

qui démontre clairement qu’une optimisation des conditions de dépôt reste à réaliser.

Enfin, comme cela peut être observé sur la figure IV.4, la température maximale de recuit sous vide pour ce système de multicouches est proche de 750°C. En effet, le diffractogramme représentatif d’une température de 800°C, obtenu après 8 minutes de temps de maintien à cette dernière température, permet d’observer la formation de la phase cubique TiN dont la formation peut être attribuée à une décomposition de la phase Ti2AlN provoquée par une dif-

fusion vers la surface de l’aluminium puis par l’évaporation de ce dernier. Ces résultats con- firment donc l’instabilité des couches minces de Ti2AlN dès 800°C sous vide comme cela

avait déjà été mentionné par Beckers et coll [7].

Nous avons également étudié la texturation des phases formées en réalisant des rocking curve (parfois appelées -curve) qui consistent à suivre l’évolution de l’intensité des rayons X diffractés pour une valeur donnée de 2 en fonction de l’angle d’incidence  avec la sur- face de l’échantillon. La figure IV.7 donne un exemple de l’évolution de ces rocking curves en fonction de la température de recuit tandis que la figure IV.8 résume l’ensemble des lar- geurs à mi-hauteur (FWHM) obtenues pour les différentes phases et pics de diffraction étu- diés. Les principales conclusions que l’on peut dresser en observant ces figures sont les sui- vantes :

- Avant recuit, les couches minces déposées sur les substrats d’alumine (0001) sont plus texturées que celles déposées sur le SiC (0001)

- Il n’existe pas ou peu de réorganisation à l’intérieur des couches d’AlN jusqu’à 500°C et une faible augmentation de la texturation de la phase .

Une forte texturation de la phase Ti2AlN intervient à haute température (T700°C). Cette tex-

turation est très élevée dans le cas de l’échantillon 3(multicouches (Ti+Al)/AlN) puisqu’une largeur à mi-hauteur de l’ordre de 1° est obtenue sur les rocking curves des plans (0002) et (0006) du Ti2AlN sont obtenus lors du recuit à 750°C après un recuit prolongé d’environ 1h20

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Figure IV.7 :Rocking curves obtenus lors du recuit de l’échantillon test 3 sur les pics de diffractions créés par les plans (10-10) d’AlN (300°C et 400°C) et de la phase  à 500°C (a) puis par les plans (002) et (0006) de la phase Ti2AlN (respectivement (b) et (c)) pour les températures supérieures.

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Figure IV.8 : Evolution des largeurs à mi-hauteur des rocking-curves en fonction de la température de recuit pour les échantillons (a) Test1, (b) Test 2 et (c) Test 3.

La série de tests préliminaires qui a été effectuée a donc permis de confirmer la possible formation de la phase Ti2AlN par réaction entre des couches de Ti et AlN mais des résultats

bien plus encourageants sont obtenus en introduisant un excès d’aluminium dans les couches de titane. Cette approche a donc toujours été utilisée pour les expériences réalisées après ces premiers tests. Par ailleurs, cette première étude a permis de montrer qu’un recuit sous vide secondaire à 750°C pendant environ une heure constituait le traitement optimal dans la re- cherche d’une forte texturation des couches obtenues.