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Exemples d’initiatives réussies d’intégration de la prévention dans la formation professionnelle

Chapitre 1 : Recension des écrits

1.3 Exemples d’initiatives réussies d’intégration de la prévention dans la formation professionnelle

Bien qu’il semble s’agir, pour la plupart, d’initiatives isolées, certaines expériences d’intégration réussies de la prévention dans la FP méritent d’être présentées. Premièrement, des initiatives de milieux d’enseignement provenant de divers endroits à travers le monde sont exposées et, ensuite, des initiatives de recherche scientifique sont présentées.

Tout d’abord, la Suisse a constaté, au début des années 2000, que le risque d’accidents du travail était significativement plus élevé chez les apprentis (équivalent des élèves à la FP au Québec) que chez les autres types de travailleurs, qu’un faible pourcentage d’écoles de formation avait intégré la prévention à ses enseignements et que la formation des enseignants par rapport à la prévention

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était insuffisante (Tison, 2004). Pour remédier à la situation, un plan d’action a été proposé par le Ministère de l’Éducation. Un cadre juridique pour l’enseignement de la prévention a été élaboré ainsi qu’un règlement sur la FP. Ce dernier vise l’intégration obligatoire et systématique de la prévention dans la formation des enseignants, des élèves ainsi que dans les évaluations. Ce plan vise de plus l’élaboration de matériel pédagogique répondant aux besoins des élèves et enseignants des divers métiers ainsi qu’un travail de collaboration entre les différentes parties, soit les organismes de prévention, les milieux de formation et d’enseignement, les associations professionnelles et l’industrie.

En France, c’est le constat que l’enseignement de la prévention à la FP est beaucoup trop théorique et pas assez pratique qui a mené à l’élaboration d’une initiative prometteuse. Mis sur pied par une organisation faisant la promotion de la prévention en milieu de travail, le projet Synergie offre des outils (p. ex. fiches présentant des familles de risques liés au métier, grille d’observation d’une situation de travail) permettant d’aider l’enseignant et l’élève dans l’identification des risques présents dans une situation de travail (Conseil national pour l'enseignement de la santé et de la sécurité au travail, 2006). Pendant son stage en entreprise, l’élève doit analyser des situations de travail, y identifier les risques à la santé ou à la sécurité, compiler le tout dans un rapport et proposer des pistes de solutions aux problèmes soulevés. L’élève doit ensuite partager le résultat de sa démarche avec un responsable de l’entreprise dans laquelle se déroule le stage. Ainsi, cette initiative offre des avantages pour tous : l’enseignant reçoit du matériel pédagogique lui permettant d’outiller l’élève dans l’identification des risques; l’élève construit ses apprentissages de prévention en situation réelle; et l’entreprise y voit une occasion d’améliorer ses pratiques de prévention.

Inspiré du projet Synergie, un projet pilote a été mené au Québec avec un programme d’ébénisterie de la Commission scolaire Beauce-Etchemin (INSPQ, 2004). Après deux années d’utilisation des outils pédagogiques (p. ex. : fiches de présentation des risques et grille d’analyse des risques), ces derniers sont devenus un prérequis au travail en atelier. Les résultats du projet suggèrent que les élèves présentent davantage de comportements de prévention et qu’ils rapportent les manquements à la prévention qu’ils observent dans leurs situations de travail. Les résultats indiquent de plus une baisse du nombre d’incidents chez les élèves et suggèrent que les interventions ont engendré une modification des pratiques de prévention dans les milieux de stage accueillant les élèves. Enfin, l’un des résultats intéressants de ce projet est qu’il a permis aux enseignants de sentir qu’ils n’étaient plus seuls à porter la responsabilité de l’enseignement

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de la prévention, qu’ils pouvaient compter sur la collaboration d’autres acteurs, comme les superviseurs de stage.

Toujours au Québec, un projet mené dans la région de Montréal a été réalisé afin de diminuer l’exposition aux poussières de bois des élèves en apprentissage d’un métier dans le domaine de l’ébénisterie (Lesage, Cyr, & Duguay, 2012). Un comité formé de représentants de la santé publique, de la CSST ainsi que d’un conseiller pédagogique a permis d’élaborer une formation destinée aux enseignants et de concevoir des outils pédagogiques spécifiques à ce besoin. Il en a résulté en une uniformisation des enseignements reçus par les élèves des différentes écoles de la région de Montréal, de ressources disponibles pour les enseignants, d’un port accru des équipements de protection individuelle de la part des élèves ainsi que d’un meilleur entretien de l’environnement physique en atelier.

Sur le plan de la recherche, aux États-Unis, une étude a été menée afin de rehausser le niveau de formation des apprentis charpentiers en ce qui concerne l’ergonomie (Albers et al., 1997). Un groupe de 18 apprentis charpentiers a suivi une formation de 16 heures, étalées sur quatre semestres visant à améliorer leurs compétences dans le champ de l’ergonomie. La formation a été animée par les auteurs de l’étude et un formateur de l’école. Elle a impliqué des activités en classe, en atelier, des discussions et des tests écrits. À la fin de la formation, les élèves devaient identifier un problème lié à l’ergonomie qu’ils vivaient dans leur travail pratique et élaborer un plan d’action pour le résoudre. Les résultats de l’étude suggèrent que 57 % des participants utilisent les méthodes de prévention apprises dans leur travail et que 43 % ont modifié leurs méthodes de travail à la suite de la formation. Ce serait les apprentissages faits en atelier qui auraient été les mieux intégrés par les élèves.

Toujours aux États-Unis avec les apprentis charpentiers, une autre étude a démontré des effets positifs d’une formation visant la réduction des chutes sur les chantiers de construction (Evanoff et al., 2012). Les activités de formation visant la réduction des chutes ont eu lieu en atelier afin de reproduire le plus possible une situation de travail réelle. Les résultats suggèrent une diminution du nombre de chutes chez les apprentis et une amélioration des pratiques de prévention dans les ateliers et en stage en entreprise. De façon intéressante, les auteurs rapportent que des effets ont également été notés sur les pratiques de prévention des gens de métier des entreprises dans lesquelles les apprentis réalisaient leurs stages. Les auteurs notent que la collaboration entre les acteurs du programme d’études, de la société de la construction et du syndicat des charpentiers a été un élément important dans le succès du projet.

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Bien qu’il puisse exister d’autres initiatives de réussite en matière d’intégration de la prévention à la FP, un élément important à retenir des expériences présentées dans cette section est qu’elles ont un point en commun : le partenariat. En effet, chacune des expériences présentées implique la collaboration de plusieurs acteurs impliqués soit dans l’enseignement ou dans la promotion de la prévention en emploi, que ce soit les élèves, les enseignants, les autres membres des CFP, l’industrie ou les organisations syndicales et gouvernementales. Il semble qu’une action concertée par les différents acteurs soit un gage de succès dans le développement du comportement préventif au travail des élèves.

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