1.7. Le diagnostic
1.7.1. Outils de diagnostic de la maladie utilisés actuellement
1.7.1.2 Examen parasitologique (détection du parasite)
En cas de suspicions de THA à T. b. gambiense révélée par une détection sérologique, le
diagnostic doit obligatoirement être confirmé par un examen parasitologique direct pour
confirmer la présence du trypanosome dans l’organisme du patient. De plus, seul l’observation
du trypanosome dans le LCR permet de faire la distinction entre un patient en stade 1 et un
patient en stade 2. La détection du parasite est donc, à l’heure actuelle, une étape obligatoire
du diagnostic de la THA. L’observation de trypanosomes est complexe sur le terrain car il faut
que le prélèvement soit examiné dans un délai très court n’excédant pas une heure pour éviter
la stabilisation et la lyse du parasite. Il faut donc prévoir la logistique pour installer un
microscope dans le village prospecté. A ceci s’ajoute la difficulté de détection du parasite due
à la faible charge parasitaire dans le cas d’infection à T. b. gambiense. Différentes techniques
ont été développées pour tenter d’augmenter cette limite de détection.
1.7.1.2.1. Observation directe du parasite par microscopie optique
La mise en évidence du parasite dans le cadre du diagnostic de la maladie peut être effectuée
par microscopie optique dans le cas d’une observation d’une goutte épaisse ou de suc
ganglionnaire. L’examen de base est la technique de la goutte épaisse suivi d’une coloration
au Giemsa. A la suite de cette coloration, le corps cellulaire du trypanosome apparaît en bleu
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et le noyau et le kinétoplaste sont colorés en rouge. Pour qu’un test en goutte épaisse soit
considéré comme positif il faut que l’observateur soit capable d’identifier un parasite dont le
noyau, le kinétoplaste et le flagelle sont colorés et ayant une morphométrie semblable à celle
du trypanosome (Laveissière and Penchenier, 2000). La sensibilité de ce test est faible ; sur
le terrain la limite de détection de ce test est estimée entre 5 000 et 10 000 parasites par mL
de sang (WHO, 2013). Pour mieux distinguer le parasite, et donc augmenter la sensibilité de
ce test, il est possible de réaliser une lyse des hématies avant la coloration à l’aide d’un tampon
lytique (Biéler et al., 2012).
En présence d’adénopathies cervicales palpables, un symptôme évocateur de la THA en zone
d’endémie, il est possible de ponctionner le ganglion et d’observer le suc ganglionnaire entre
lame et lamelle directement à l’état frais. La sensibilité et d’environ 60% (IC = 43-77%) car
comme nous l’avons évoqué précédemment, la charge parasitaire d’un patient peut être très
faible, le nombre de faux négatifs est donc élevé (WHO, 2013). De plus, la présence des
ganglions cervicaux hypertrophiés n’est pas systématique, ce test ne peut donc pas être
pratiqué. Il est aussi possible d’observer l’exsudat du chancre d’inoculation lorsque celui-ci est
visible. Dans le cas de la THA à T. b. gambiense où la parasitémie peut être très faible,
l’ensemble de ces tests basé sur l’observation directe du trypanosome dans différents fluides
biologiques souffrent d’une faible sensibilité. L’une des solutions pour augmenter cette
sensibilité est de passer par une étape de concentration du parasite.
1.7.1.2.2. La Centrifugation en Tube Capillaire (CTC)
La CTC est aussi connue sous le nom de technique de centrifugation en tube à
micro-hématocrite (mHCT) ou technique de Woo (Woo, 1969). Cette technique est réalisée en
centrifugeant 50 µL de sang mélangé à un anticoagulant dans un tube capillaire. Les
trypanosomes ayant une densité similaire à celle des leucocytes, seront localisés après
centrifugation au niveau de la phase leucocytaire. Ce test présente une sensibilité de 56% (IC
= 48,3-64,5%) et permet d’abaisser le seuil de détection à 500 trypanosomes par mL de sang
(Lutumba et al., 2006). Cette technique, bien que simple et rapide à réaliser, présente
quelques limites. Tout d’abord, une centrifugeuse à micro-hématocrite est nécessaire et
l’interprétation de ce test nécessite un personnel qualifié et expérimenté. Par ailleurs, les zones
où sévit la THA sont souvent soumisses à de nombreuses autres infections parasitaires, ce
qui peut rendre l’interprétation du test difficile si des microfilaires mobiles sont présentes dans
le sang (WHO, 2013).
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1.7.1.2.3. La mini-colonne échangeuse d’anions (mAECT)
Ce test est basé sur la différence de potentiel de charge existante entre les trypanosomes et
les autres cellules sanguines. Les cellules sanguines sont chargées négativement à pH
physiologique (pH 8) alors que les parasites sont neutres de toute charge. La technique de la
mini-colonne échangeuse d’anions ou mAECT (Lanham and Godfrey, 1970), pour mini Anion
Exchange Centrifugation Technique, consiste à séparer ces deux éléments par
chromatographie d’échange d’anions. Pour cette technique, un volume de sang compris entre
350 et 500 µL est filtré sur une colonne remplie de diéthylaminoéthylcellulose (DEAE
cellulose). Après filtration, les cellules sanguines sont retenues par la DEAE cellulose en raison
de leurs charges électriques alors que les parasites la traversent et sont récupérés dans l’éluât.
L’éluât est récupéré dans un tube et centrifugé à faible vitesse. Les tubes d’éluât sont effilés à
leurs extrémités pour pouvoir être placés sur un portoir spécial et examinés au microscope
(Figure 14).
Figure 14 : Mini Colonne échangeuse d'anions à gauche et le portoir pour l'observation au
microscope de l'éluât.
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Cette technique de séparation permet de déceler des parasites lorsque la parasitémie est très
faible (environ 30 trypanosomes par mL de sang) avec une sensibilité diagnostic atteignant
les 75% (IC = 67,7-81,9%). La technique comporte quelques points négatifs qui la rende
difficile à utiliser sur le terrain : elle est longue (environ 30 minutes), coûteuse et nécessite des
moyens logistiques (centrifugeuse, microscope) (Lutumba et al., 2006). De plus, elle est
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