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EXAMEN DES ARTICLES DE LA SECTION I

Dans le document RAPPORT FAIT (Page 48-68)

Dispositions modifiant le titre VII de la Constitution et relatives au Conseil Constitutionnel

Ainsi qu'il a été dit en introduction, le projet de loi constitutionnelle propose deux modifications du Titre VII de la Constitution, concernant:

• le statut des Membres du Conseil Constitutionnel (articles premier et 2) ;

• l'institution d'une procédure d'exception d'inconstitutionnalité (articles 3 à 5), étant entendu que ce volet de la révision constitutionnelle n'entrerait en vigueur qu'à l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date de promulgation de la loi constitutionnelle (article 13 du projet de révision, inclus dans la section IV - Dispositions diverses).

Pour les motifs exposés précédemment, la Commission des Lois propose au Sénat de supprimer l'ensemble des articles de cette section.

Article premier

(article 56 de la Constitution)

Suppression de la qualité

de

Membre de droit et à vie du Conseil Constitutionnel conférée aux anciens Présidents

de la République

Cet article tend à abroger le deuxième alinéa del'article 56 de la Constitution, de façon à ce que les anciens Présidents de la

République ne soient plus Membres de droit et à vie du Conseil Constitutionnel.

Votre Rapporteur a rappelé que les travaux préparatoires de la Constitution montrent qu'en conférant aux anciens Présidents de la République la qualité de Conseiller constitutionnel, le Constituant avait eu pour principal o~jectif le souci de leur imposer une certaine neutralité à l'égard de l'action de leurs successeurs.

La pratique a démontré que les anciens Présidents de la République ont au contraire exprimé des positions publiques à travers leur participation ou leur non participation aux travaux du Conseil Constitutionnel.

C'est ainsi, par exemple, qu'en renonçant publiquement en 1960 à siéger au Conseil Constitutionnel, le Président Vincent Auriol a entendu faire état des relations difficiles qu'il entretenait avec cet organe nouveau, selon lui trop proche du Pouvoir alors en place. Sa participation exceptionnelle aux travaux de la Haute Juridiction, du 3 au 6 novembre 1962, lui offrit en revanche l'occasion et le moyen d'exprimer son hostilité à la révision référendaire du mode de scrutin pour l'élection présidentielle.

Après l'échec du référendum du 27 avril 1969, le Général de Gaulle s'abstint ostensiblement de toute participation aux travaux du Conseil Constitutionnel. Selon François Luchaire, le Président du Conseil Constitutionnel alors en exercice, Gaston Palewski, n'aurait même pas jugé concevable de l'y inviter, encore moins de l'y convoquer.

Quant au Président Giscard d'Estaing, après l'élection présidentielle de mai 1981, il élabora une doctrine de «participation sélective» aux travaux du Conseil qui a achevé d'illustrer de façon manifeste, le caractère aujourd'hui inadéquat du Statut des anciens Chefs de l'Etat: « ••• j'y garde ma place et je vous indique que s H y avait une proposition, quelle qu'elle soit, qui touèhe aux institutions de la République, j'irais siéger au Conseil Constitutionnel pour m

y

opposer». Les mandats électifs incompatibles avec les fonctions de

· membre du Conseil Constitutionnel dont l'intéressé a été investi ultérieurement n'ont en rien clarifié cette situation, puisqu'il lui suffirait d'en démissionner pour retrouver ipso jure sa qualité de Membre de droit du Conseil Constitutionnel.

Comme l'a constaté votre Rapporteur, tous ces épisodes démontrent l'ambiguïté du statut des anciens Présidents de la République, devenu très tôt un instrument discret mais efficace d'expression politique alors qu'il avait été conçu pour garantir leur neutralité.

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-Quoi qu'il en soit et pour les motifs figurant dans l'exposé général du présent rapport, la Commission des Lois n'en propose pas moins au Sénat la suppression de cet article.

Article 2

(article 57 de la Constitution)

Régime des incompatibilités des Membres du Conseil Constitutionnel

En l'état actuel du droit, le régime des incompatibilités des Membres du Conseil Constitutionnel résulte:

• de l'article 57 de la Constitution elle-même, qui rend incompatibles leurs fonctions avec celles de ministre ou de Membre du Parlement;

• de l'article 4 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel, qui étend l'incompatibilité ministérielle prévue par la Constitution aux fonctions des autres Membres du Gouvernement (Secrétaires d'Etat, par exemple), et complète la liste constitutionnelle par· une incompatibilité avec les fonctions de Membre du Conseil économique et social.

• de l'article 5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, qui précise que les Membres du Conseil Constitutionnel ne peuvent être nommés à aucun emploi public.

L'article 2 du projet de révision propose en outre :

• d'instituer une incompatibilité nouvelle avec les fonctions de président de l'assemblée d'une collectivité territoriale;

• de laisser à la loi organique le soin de déterminer les règles d'incompatibilité avec les fonctions de maire ou de président d'un établissement de coopération intercommunale, compte tenu de l'importance de la population ;

• de renvoyer à la loi organique la fixation des incompatibilités avec les fonctions d'adjoint au maire, selon les mêmes références démographiques, ainsi que les incompatibilités avec l'exercice des autres mandats électifs locaux.

L'exposé des motifs du projet de révision ajoute que «les autres incompatibilités, notamment professionnelles, sont, comme à l'heure actuelle, renvoyées à la loi organique, étant entendu qu'elles devront être revues dans un sens plus restrictif».

Ces mesures imposeraient en fait a[.\x Conseillers constitutionnels un régime beaucoup plus restrictif que celui des autres Membres des Hautes juridictions françaises ou étrangères.

On doit en premier lieu remarquer que les Conseillers constitutionnels français se trouveraient ainsi placés' dans un régime d'incompatibilités plus sévère que dans beaucoup de régimes étrangers, alors même que les juges constitutionnels de ces Etats y exercent des missions très variées requérant toutes une grande indépendance. A titre de comparaison, on peut ainsi constater que les juges de la Cour suprême des Etats-Unis ne sont frappés par aucune

incompatibilité particulière.

Plusieurs pays imposent des incompatibilités spécifiques à leurs juges constitutionnels mais souvent, ce régime n'excède pas celui qui est imposé à tous les autres magistrats des hautes juridictions. C'est le cas de l'Espagne, par exemple.

Ces références n'ont toutefois qu'une valeur indicative du fait que le Conseil Constitutionnel diffère beaucoup des cours constitutionnelles de chacun de ces Etats (le statut des Membres du Conseil Constitutionnel français et des cours constitutionnelles de huit Etats étrangers figure en annexe du présent rapport).

Dans une optique nationale, on peut douter de la pertinence de la référence opérée par le projet de loi au caractère juridictionnel du Conseil Constitutionnel dans la mesure où les Membres des hautes juridictions françaises ne sont eux-mêmes pas soumis à un régime d'incompatibilités aussi strict.

Les magistrats de l'ordre judiciaire, régis sur ce point par l'article 9 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, ne peuvent ainsi exercer un mandat parlementaire ou de parlementaire européen ni les fonctions de conseiller économique et social.

Les autres restrictions qui frappent les magistrats sont seulement relatives, en fonction de leur position hiérarchique ou du ressort de leur juridiction.

C'est ainsi que l'exercice des fonctions de magistrat sont incompatibles avec l'exercice d'un mandat de conseiller général ou municipal, mais seulement dans le ressort de la juridiction à laquelle

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-appartient le magistrat (article 9, alinéa 3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958).

Encore convient-il de relever que cette disposition n'est pas applicable aux magistrats de la Cour de cassation.

L'article L.O. 133 du code électoral rend pareillement inéligibles les magistrats des tribunaux et des cours d'appel au mandat de député ou de sénateur dans une circonscription du ressort de leur juridiction. Les magistrats de la Cour de Cassation échappent également à cette inéligibilité, solution logique dès lors que leur compétence juridictionnelle recouvre par définition l'ensemble du territoire de la République.

Les Membres des juridictions administratives sont quant à eux régis par différentes dispositions qui rendent incompatibles leurs fonctions avec l'exercice du mandat parlementaire. C'est le cas, en particulier, des Membres du Conseil d'Etat (article 3 du décret n° 63- 767 du 30 juillet 1963 relatif au statut des Membres du Conseil d'Etat), ainsi que des Membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel (loi n° 86-14 du 6 janvier 1986, modifiée par la loi n° 87-1127 du 31décembre1987).

L'article 4 de la loi du 6 janvier 1986 rend par ailleurs incompatibles les fonctions de Membre des tribunaux administratifs ou des cours administratives d'appel avec les fonctions de Président de conseil régional ou général.

Les inéligibilités frappant les Membres des juridictions administratives demeurent, comme celles des magistrats de la Cour de cassation, relatives en fonction de la nature et du ressort de leur juridiction. Il apparaît en particulier que les Membres du Conseil d'Etat, dont le ressort de juridiction est national, ne sont frappés d'aucune inéligibilité à un mandat électif local.

Un régime analogue est applicable aux Membres des chambres régionales des comptes, conformément à la loi n" 82-595 du 10 juillet 1982 modifiée par la loi n° 83-498 du 17 juin 1983. En revanche, aucune disposition écrite particulière ne limite la compatibilité entre les fonctions de Membre de la Cour des comptes et des mandats publics électifs, ni l'éligibilité des Membres de la Cour des comptes dans ces différents mandats.

En résumé, un conseiller à la Cour de cassation, un Conseiller d'Etat ou un Conseiller à la Cour des comptes peut très bien cumuler ses fonctions avec un mandat de Président de Conseil général, de conseil régional ou de maire.

Quoi qu'il en soit et pour les motifs figurant dans l'exposé général du présent rapport, la Commission des Lois n'en propose pas moins au Sénat la suppression.de cet article.

Article 3

Institution d'une procédure d'exception d'inconstitutionnalité

L'article 3 du projet de révision propose d'introduire dans la Constitution un article 61-1 nouveau instituant la procédure d'exception d'inconstitutionnalité susceptible d'être soulevée par tout justiciable au motif qu'une disposition de loi porterait atteinte aux droits fondamentaux reconnus à toute personne par la Constitution.

Cette question pourrait être renvoyée au Conseil Constitutionnel par le Conseil d'Etat, la Cour de cassation ou toute juridiction ne relevant ni de l'un ni de l'autre.

Cet article doit s'apprécier au regard de l'article 4 qui dispose qu'une disposition déclarée inconstitutionnelle par voie d'exception cesserait d'être applicable et ne pourrait plus être appliquée aux procédures en cours, y compris devant le juge de cassation. Il s'agirait en fait d'un véritable effet abrogatif, et non de la simple inapplication inter partes à laquelle conduisent usuellement les procédures d'exception déjà reconnues par le droit français.

Encore convient-il d'observer que cette appréciation demeure un exercice difficile, puisque rien n'est indiqué sur les modalités pratiques selon lesquelles se déroulerait la procédure d'exception d'inconstitutionnalité instituée par cet article. Ce point fait l'objet d'un simple renvoi à une loi organique, prévu par l'article 5. L'exposé des motifs reste lui-même muet sur cet aspect du problème.

La réforme n'entrerait en vigueur qu'au terme d'un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi constitutionnelle, conformément à son article 13.

L'exposé général du présent rapport dispense d'un long commentaire de cet article et résume les circonstances à la suite desquelles la Commission des Lois vous propose la suppression de cet article.

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-Article 4

Effet des déclarations d'inconstitutionnalité par le Conseil Constitutionnel

L'effet de l'exception d'inconstitutionnalité, telle qu'elle est conçue dans le projet de révision, serait abrogatif puisqu'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution par voie d'exception «Cesserait d etre applicable et ne pourrait plus s'appliquer, y compris aux procédures en cours».

Le présent article précise ce point et procède à cet effet aux réaménagements rédactionnels nécessaires de l'article 62 de la Constitution.

La Commission des Lois vous ayant proposé la suppression de l'article 3 instituant la procédure d'exception d'inconstitutionnalité, le présent article devient sans objet; elle vous propose donc de le supprimer.

Article 5

Renvoi à la loi organique pour définir la procédure d'exception d'inconstitutionnalité

Ainsi qu'il a été dit, les modalités concrètes de mise en oeuvre de la .procédure d'exception d'inconstitutionnalité sont renvoyées par cet article à une loi organique.

On peut noter que contrairement à 1990, le Parlement n'a pas été saisi du projet de loi organique constituant le corollaire indispensable du projet de révision constitutionnelle.

La Commission des Lois vous ayant proposé la suppression de l'article 3 instituant la procédure d'exception d'inconstitutionnalité, le présent article devient sans objet; elle vous propose donc de le supprimer.

Article 13

Dispositions transitoires relatives à l'entrée en vigueur de la procédure d'exception d'inconstitutionnalité (l l

Votre Commission vous ayant proposé la suppression de l'article 3, tendant à insérer dans le titre Vill de la Constitution un article 61-1 relatif à l'exception d'inconstitutionnalité.

La Commission des Lois vous ayant proposé la suppression de l'article 3 instituant la procédure d'exception d'inconstitutionnalité, le présent article devient sans objet ; elle vous propose donc de le supprimer.

Intitulé du projet de loi constitutionnelle

Du fait des amendements de suppression qu'elle vous propose tendant à supprimer les articles premier, 2, 3, 4 et 5 constituant la Section 1 du Projet de Loi Constitutionnelle, relative au Conseil Constitutionnel, il n'y a plus lieu de mentionner dans l'intitulé le Titre VII de la Constitution.

La Commission des Lois demande donc au Sénat d'adopter un amendement répondant à cet objet.

(l) Cet article figure dans la Section IV du projet de loi constitutionnelle. Du fait qu U concerne l'entrée en vigueur des dispo:fitions de la Section 1, son con11nentaire a été inséré à la fin des commentaires des articles de ladite Section 1.

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-TABLEAU COMPARATIF

N.B. 1) Le texte figurant dans chacune des colonnes du tableau comparatif est comparé au texte actuel de la Constitution (et non au texte de la colonne précédente)

2) La commission a décidé de proposer au Sénat la suppression des articles premier à 5 constituant la section 1 relative au Conseil constitutionnel et de l'article 13.

Constitution aux citoyens pour l exercice des libertés publiques ; les fixent les règles concernant les garanties

Constitution commun ou si ce texte n'est pas adopté dans les des lois visées au troisième alinéa del 'article 62.

Constitution

Constitution territoire, ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu1en vertu d'une loi. par le Président de l'une ou l'autre assemblée ou par

Constitution renou-velle par tiers tous les trois ans. Trois des membres

Alinéa sans modifi- Alinéa sans

modifi-cation. cation

Alinéa supprimé. Alinéa supprimé.

(Article premier du PJLC n°23!, 1992-1993)

Après chaque renou- Alinéa sans modifi-uelle me nl le Conseil cation.

constitutionnel élit en son sein son Président. Il en est de même en cas de vacance de la présidence.

Le Président a voix prépondérante en cas de partage.

Constitution l'assemblée d'une collecti-

n

vité territoriale. Toutefois, ~j

en ce qui concerne les concer-nant les fonctions d.'adjoint au maire, selon le même

Les lois organiques, Alinéa sans modifica- Alinéa sans

modifica-avant leur promulgation, tion. tion.

et les règlements des as-semblées parlementaires,

avant leur mise en applica-

n

tion, doivent être soumis

d

au Conseil constitutionnel qui se prononce sur leur

conformité à la

Constitution.

Constitution saisine du Conseil consti-tutionnel suspend le délai incidences sur le fonction-nement des institutions.

Constitution du 4 octobre 1958

Art. 13 (1er al.) Le Président de la République signe les ordonnances et les décrets délibérés en Conseil des Premier Ministre et, le cas échéant, par les ministres

Constitution devant une juridiction, il est soutenu qu'une

modifi-Conseil constitutionnel ne cation. cation. cation ..

sont susceptibles d'aucun

Constitution

Constitution de toute autre juridiction française ne relevant ni de République française de la loi organique mentionnée

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-SECTION II

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