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Evolutions des stocks de carbone des sols sous l’effet des systèmes de grande culture actuels et leurs déterminants

4. Potentiel technico-économique de stockage additionnel de carbone dans les sols français : résultats

4.1.2. Evolutions des stocks de carbone des sols sous l’effet des systèmes de grande culture actuels et leurs déterminants

4.1.2.1. Variation du stock de carbone sous l’effet des systèmes de grande culture actuels

Les variations sur 30 ans des stocks de C sous les systèmes actuels de grandes cultures et prairies temporaires ont été simulées à l’échelle de l’UPC (Figures 4-3 et 4-4). Elles sont exprimées en variation moyenne annuelle. La répartition des valeurs obtenues pour les 62 557 systèmes simulés (Figure 4-4) montre que 95% des situations sont comprises entre -351 et +710 kgC/ha/an, correspondant à un intervalle de -5,8 à +13,0‰/an, avec une classe modale comprise entre -200 et 0 kgC/ha/an. En pondérant la valeur estimée pour chaque système de culture par sa surface, on estime un stockage national moyen de +47 kgC/ha/an sur l’horizon 0-30 cm pour les systèmes de grandes cultures et prairies temporaires. Si ce stockage moyen est légèrement positif, plus de la moitié de la surface simulée (55%) présente un déstockage, la moyenne étant tirée par quelques valeurs de stockage très fortes. Cette estimation de la variation de stock en moyenne nationale apparait très sensible à l’incertitude sur le stock de C initial : -514 kgC/ha/an pour les valeurs maximales de la fourchette des stocks initiaux, et +283 kgC/ha/an pour les valeurs minimales de la fourchette des stocks initiaux (Tableau 4-2).

Stockage absolu (kgC/ha/an)

Stockage relatif au stock initial (‰/an)

Figure 4-3. Stockage de carbone annuel absolu (kgC/ha/an)

sur l’horizon 0-30 cm pour les systèmes de grandes cultures et prairies temporaires simulés sur 30 ans avec STICS

Figure 4-4. Variation moyenne annuelle du stock de C (absolu et

relatif au stock initial) dans l’horizon 0-30 cm pour les 62 557 systèmes de grandes cultures simulés sur 30 ans avec STICS

moyenne = 47 kgC/ha/an

4‰

Tableau 4-2. Incertitude sur la variation annuelle du stock de C (moyenne nationale pondérée par la surface de chaque unité étudiée)

considérant l’incertitude associée à l’estimation initiale du stock de C initial dans l’horizon 0-30 cm Les estimations minimale et maximale du stock de C initial représentent l’intervalle de confiance à 95%.

Estimation du stock initial

minimale médiane maximale Variation moyenne annuelle absolue du stock de C (kgC/ha/an) 283±232 47±263 -514±380 Variation moyenne annuelle relative du stock de C (‰/an) 11 0,9 -4,1

En Bretagne et Pays-de-la-Loire, le stockage moyen est positif malgré des stocks initiaux déjà élevés (Figures 4-1 et 4-3) : ce stockage s'explique par l’importance des prairies temporaires (Figure 4-5). Le même effet s'observe dans les zones de prairies temporaires du Sud-ouest. A l’inverse, dans le croissant allant de la Lorraine au nord de la Bourgogne, ainsi qu’en Poitou- Charentes, les stocks initiaux élevés sont associés à un déstockage : les systèmes actuels de grandes cultures (qui comportent très peu de prairies temporaires et de cultures intermédiaires) ne permettent pas de maintenir le stock hérité des systèmes de culture et prairies passés. Dans le Bassin Parisien, le Nord et l’Alsace, un stockage ou un déstockage faibles traduisent des situations proches de l’équilibre, associées à des stocks initiaux bas et à des systèmes de culture sans prairie temporaire, mais avec une forte présence de cultures intermédiaires en interculture longue d’hiver dans le Bassin Parisien et le Nord, et un retour des pailles et des cannes de maïs grain.

4.1.2.2. Facteurs de variation du stockage de carbone dans les systèmes de culture actuels

 Influence du stock de C initial

Comme attendu (cf. section 2.1), le stock de C initial a un impact important sur le stock de C final : plus le stock initial est élevé, plus les cas de déstockage sont fréquents. Cet effet est dû aux pertes de C par minéralisation qui sont d’autant plus importantes que le stock de COS est élevé. Cette tendance est nettement moins visible sur les séquences avec prairie temporaire du fait des entrées de C importantes liées à la prairie.

 Influence de la composition de la séquence de culture

Le facteur le plus déterminant est la présence de prairie temporaire dans la séquence : les systèmes en comportant stockent en moyenne 259 kgC/ha/an, alors que ceux qui n’en comportent pas déstockent en moyenne -91 kgC/ha/an (Figure 4-6). Cet écart n’est pas dû à un effet du stock initial, puisque les stocks initiaux sont distribués quasiment de la même façon entre les deux types de séquences. Il est donc bien lié à l’effet de la présence d’une prairie dans la rotation, et ce alors même que la plupart des prairies temporaires simulées sont situées dans le nord-ouest en climat océanique, plus favorable au déstockage.

Séquences de grandes cultures pures

Séquences comportant des prairies temporaires (luzerne comprise)

Figure 4-5. Types de séquences simulées par UPC pour

les systèmes de grandes cultures (GC) et prairies temporaires

Figure 4-6. Effet du type de séquence sur la variation moyenne

annuelle du stock de C (kgC/ha/an) dans l’horizon 0-30 cm pour les 62 557 systèmes de grandes cultures simulés sur 30 ans Alors que les systèmes de culture avec luzerne sont réputés stockants, les simulations indiquent en moyenne un déstockage dans le bassin de production de luzerne de Champagne-Ardenne. Cependant, ces résultats sont à prendre avec beaucoup de précaution étant donné les fortes incertitudes qui subsistent dans la simulation du cycle du C sous luzerne avec STICS. De ce fait, seuls les résultats des prairies temporaires de graminées sont analysés par la suite.

moyenne = 259 kgC/ha/an moyenne = -91 kgC/ha/an

L’effet de la prairie temporaire sur le stockage de C est d’autant plus fort que sa fréquence dans la rotation est élevée (Figure 4-7). Plus précisément, cet effet est très important lorsque le ratio "nombre d’années de prairie sur nombre d’années de la rotation" passe de zéro à presque un tiers. Ensuite, accroître ce ratio jusqu’à environ 60% augmente légèrement le stockage de C. Au-delà de cette valeur, l’effet sur le stockage a tendance à se stabiliser.

Alors que le mode d’exploitation des prairies, fauche, pâturage ou mixte, a un impact reconnu sur le stockage de C, cet effet n’est pas visible dans les résultats des simulations, probablement en raison des simplifications faites dans le modèle pour représenter ces modes de gestion. En revanche, l’effet positif de la fertilisation azotée des prairies sur le stockage de C apparaît très clairement (Figure 4-8) ; l'augmentation de l'apport annuel d'azote accroit le stockage de C annuel moyen à l’échelle de toute la rotation, par l’augmentation de la production de la prairie et de ses retours au sol.

Figure 4-7. Variation moyenne annuelle du stock de C

dans l’horizon 0-30 cm (kgC/ha/an) des systèmes de grandes cultures simulés en fonction de la fréquence

de la prairie temporaire dans la rotation18

Figure 4-8. Variation annuelle du stock de C dans l’horizon 0-30 cm

(kgC/ha/an) des séquences incluant des prairies temporaires de graminées, en fonction de la quantité de fertilisation azotée

(kgN/ha) apportée chaque année sur la prairie

Influence des entrées de carbone. Les entrées de C dans le

système, liées aux restitutions racinaires et aériennes et aux apports d’effluents organiques, sont majoritairement plus élevées dans les séquences incluant des prairies temporaires (Figure 4- 9). La corrélation entre le stockage de C et les entrées de carbone est positive, mais faible, avec une très forte dispersion. Ce résultat confirme le rôle important du volume des entrées de C sur le stockage de carbone dans le sol, mais aussi l’influence d’un ensemble d’autres facteurs (stock initial, climat, type de sol…) (cf. section 2.1).

 Influence de la texture et du pH du sol

En accord avec les connaissances sur les facteurs biophysiques qui contrôlent la dynamique du C du sol, le stockage de C est plus élevé en sol argileux qu’en sol sableux (Figure 4-10). Le stockage de C est également plus élevé en sol acide que basique (Figure 4-11). L’effet du pH apparaît plus marqué que celui de la texture du sol.

18 Dans cette représentation graphique dite en "boxplot" ou "boîte à moustache", le trait central représente la médiane de la population étudiée, les

rectangles de part et d’autre de la médiane contiennent la moitié des "individus" de la population (entre le 1er et le 3e quartile) ; les traits au-delà des

rectangles délimitent 95,3 ou 99,7% de la population selon l’option choisie ; les points isolés sont des individus situés en dehors de ces bornes. Dans ces

boxplots, un "individu" est une séquence de culture avec une conduite donnée, sur un type de sol, un stock de C initial et un climat, ce qui correspond à

une unité de simulation sur 30 ans.

Stockag e ab sol u ( kgC /ha /an )

Figure 4-9. Variation annuelle du stock de C dans l’horizon 0-30 cm

(kgC/ha/an) pour les séquences de grandes cultures pures (GC) et les séquences incluant des prairies temporaires (mixte) en fonction de la quantité de C retournant au sol annuellement

Codage sol : 1. <18% argile et >65% sable 2. 18%<argile<35% et sable>15% ou argile<18% et 15%<sable<65% 3. argile<35% et sable<15% 4. 35%<argile<60% 5. argile>60%

Figure 4-10. Effet de la texture du sol sur le stockage de C (kgC/ha/an) Figure 4-11. Effet du pH du sol

sur le stockage de C (kgC/ha/an)

 Influence du climat

En matière de stockage de C, les climats montagnards et méditerranéen franc ressortent négativement par rapport aux autres (Figure 4-12). A l’inverse, les climats océaniques et toulousain ressortent positivement, surtout sur les séquences comportant des prairies temporaires. Ces résultats doivent être interprétés avec prudence car à chaque climat sont associés des systèmes de culture et des types de sol très différents.

 1. Montagne

 2. Semi-continental et marges montagnardes

 3. Océanique dégradé  4. Océanique altéré  5. Océanique franc  6. Méditerranéen altéré  7. Bassin du Sud-Ouest

 8. Méditerranéen franc (a) Stockage des séquences de GC pures (b) Stockage des séquences mixtes

Figure 4-12. Effet du climat sur le stockage de C (kgC/ha/an) des séquences sans ou avec prairie temporaire

4.1.3. Evolutions des stocks de carbone des sols sous l’effet des systèmes actuels de prairies