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Evolution des traits racinaires en réponse au pâturage et à la fertilisation

5. Discussion

5.3. Evolution des traits racinaires en réponse au pâturage et à la fertilisation

Les valeurs des traits racinaires résultent de l’adaptation des plantes à leur environnement. Au cours de leur développement celles-ci mettent en place des stratégies d’acquisition des ressources variables dépendant de leur environnement.

La comparaison entre FP_F et FP_NF fait ressortir l’impact d’un apport d’azote sur les traits racinaires. Une fertilisation du milieu se traduit par des valeurs de SRL plus élevées associées à un faible diamètre des plantes. Ce syndrome de traits correspond à une stratégie d’exploitation rapide des ressources. Elle est particulièrement présente chez des espèces vivant dans un habitat riche en eau et en nutriments, fournissant donc les conditions nécessaires à une croissance rapide et un turn-over des organes élevé. A l’inverse, les plantes présentes sur la parcelle F_P_NF doivent faire face à une plus faible disponibilité d’azote. Elles adoptent donc une stratégie de conservation des ressources que l’on retrouve dans les habitats plus pauvres en eau et en nutriments.

La faible variation entre pâturage et abandon pourrait s’expliquer par le fait que les grosses et les fines racines ont été séparées. L’analyse révèle que le traitement abandon a favorisé les espèces développant, dans un premier temps, des racines fines relativement denses (diamètre assez faible mais RTD élevé). De plus, en s’intéressant aux résultats des analyses des grosses racines, le traitement Ab présente le plus important RTD ainsi qu’un faible SRL (Annexe 4). La morphologie de ces racines indique qu’elles sont propices au stockage des ressources, et permet d’affirmer que les espèces suivent une stratégie de conservation.

Les variations de valeur de trait résultent à la fois de la plasticité des plantes (qui leur permet de mieux s’adapter à leur environnement) et des changements dans la composition botanique du milieu (le mode de gestion ayant sélectionné les espèces les plus aptes à survivre).

Il semblerait que la stratégie exploitative soit liée à une plus faible production racinaire étant donné que la plante investie moins de carbone pour le développement de son système racinaire (notamment en cas de fertilisation azotée). L’une des solutions pour favoriser le stockage du carbone serait d’accroitre les entrées de matière organique. Pour cela, il faut limiter à la fois les apports d’azote et les perturbations du milieu (surpâturage) afin de maintenir le couvert végétal et éviter le déstockage du carbone.

Conclusion

Grâce à la méthode IGC nous avons pu étudier la dynamique de la biomasse racinaire en prairie permanente soumise à différents modes de gestion durant les années 2016 et 2017. Cette dynamique est dépendante de plusieurs facteurs : la diversité du couvert végétal, la gestion ainsi que les conditions climatiques. En premier lieu, les variations saisonnières sont la résultante des conditions climatiques. Les pics de production apparaissent au printemps, suite à une augmentation des températures. En été, les plantes développent leur système reproductif ce qui ralentie la croissance racinaire. Ensuite, il y a une baisse de la production en automne et en hiver lorsque les températures chutent. Le niveau de précipitation et de P-ETP a également joué un rôle dans cette dynamique étant donné qu’ils reflètent la disponibilité en eau pour le couvert.

Selon les pratiques de gestion adoptées, la production racinaire fluctue. Les résultats des traitements Bo+ et Bo- n’ont pas permis de mettre en évidence l’effet d’un pâturage rotatif sur la production. Cependant, il y un effet observé en pâturage continu. Concernant les traitements Intensif et Extensif en 2016, les résultats confirment qu’un faible chargement animal et une absence d’apport d’azote sont favorable à une hausse de la production racinaire. Cependant, ce schéma ne semble pas se répéter l’année suivante. Enfin, en prairie fauchée, un apport d’azote s’est traduit par une croissance racinaire plus faible que pour les traitements Fnul et Fpk. A l’inverse, une fertilisation au phosphore et au potassium a permis une hausse de la production racinaire.

Parallèlement, les analyses morphologiques des racines confirment l’hypothèse selon laquelle les plantes présentent des stratégies végétales variables en réponse au pâturage et à la fertilisation. En effet, dans le cas d’un apport d’azote, les valeurs de traits correspondent à ceux d’une stratégie d’acquisition rapide des ressources. A l’inverse, en cas d’abandon de la prairie, les plantes mettent en place une stratégie de conservation des ressources.

L’un des services environnementaux essentiels fournis par les prairies est le stockage du carbone dans les sols. Ce stockage étant effectué via le système racinaire, il s’avère donc fondamental de mieux comprendre les dynamiques de ce dernier, influencé par la gestion. L’étude démontre que la production est plus importante pour les traitements Fpk et Extensif, on en déduit donc que le potentiel de stockage de ces parcelles est plus élevé. Mettre en relation la production racinaire avec la production aérienne ne sera cependant pas à négliger afin d’adopter un mode de gestion favorisant le potentiel de stockage tout en maintenant une

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Table des figures

N° Titre Source

1 Diversité morphologique des systèmes racinaires rencontrés dans les prairies

R. Pilon, 2001. Dynamique du système racinaire de l’écosystème prairial et contribution au bilan carbone du sol sous changement climatique 2 Schéma explicatif du « root economics spectrum »

permettant de définir les liens entre traits racinaires et les syndromes de traits permettant de définir les stratégies végétales. Roumet et al. 2016. Root structure– function relationships in 74 species: evidence of a root economics spectrum related to carbon economy. 3 a. Schéma du site expérimental de Theix

(Saint-Genès-Champanelle, Puy de Dôme), avec deux blocs, bloc 1 : Blatière ; bloc 2 : Moine.

b. Schéma du domaine expérimental de Laqueuille (Puy de Dôme). a. Source personelle b. L. Duhaze, 2017. Dynamique de la croissance racinaire en prairie permanente en réponse au pâturage et à la fertilisation 4 Mise en place du dispositif in-growth core Source personnelle

5 Lavage des racines. Photo de Paul

Moreau 6 Cuve contenant les racines colorées, étalées et fixées par

le film plastique permettant de faire un scan

Photo de Catherine Picon-Cochard 7 Images de racines scannées (a) et analysées par le

logiciel WhinRhizo (b), chaque couleur est associée à une classe de diamètre.

**

8 Sommes des précipitations (mm), P-ETP (en mm) et moyenne des températures (°C), en fonction des dates de prélèvement pour les sites de Theix (a) et de Laqueuille (b)

**

9 Masse sèche racinaire cumulée sur l’année pour les différents traitements (moyenne en g/m2 ± erreur standard).

10 Masse sèche des racines de chaque traitement en fonction des dates de prélèvement (moyenne en g/m2 ± erreur standard).

**

11 Masse sèche de rhizomes des quatre emplacements de chaque traitement en fonction des dates de prélèvement (moyenne en g/m2 ± erreur standard).

**

12 Masse sèche de rhizomes cumulée sur l’année pour les différents traitements (en g/m2 ± erreur standard).

**

13 Proportion de longueurs par classe de diamètre. **

14 Diamètre moyen en fonction des quatre traitements (en mm).

**

15 SRL en fonction des quatre traitements (en g.m-1). ** 16 Moyenne des températures à 20 cm de profondeur pour

les parcelles de Theix (a) et de Laqueuille (b) pour l’année 2016 et début 2017

**

17 Corrélation entre les masses racinaires et les températures moyennes de l’air de chaque date de prélèvement.

**

18 RTD en fonction des quatre traitements (en g cm-3). ** 19 SRL en fonction des quatre traitements (en g.m-1). ** 20 Proportion de longueurs par classe de diamètre selon les

traitements.

**

Table des annexes

Annexe 1 : Descriptif des traitements sur les parcelles de Theix et Laqueuille en 2017

Annexe 2 : Moyenne des températures à 20 cm de profondeur des parcelles de Theix et de Laqueuille pour l’année 2016 et début 2017

Annexe 3 : Corrélations entre les masses racinaires et les températures moyennes de l’air

Annexe 1 : Descriptif des traitements sur les parcelles de Theix et

Laqueuille en 2017

PATURAGE 2017 FAUCHE 2017 Du 14/04 au 21/04 23/05 Du 19/05 au 29/05 26/07 Du28/06 au 06/07 17/10 Du 07/09 au 15/09

Traitement Unité de N Unité de P2O5 Unité de K2O

13/03/2017 F_PK 0 33 100 F_NPK 96 40 133 02/06/2017 F_PK 0 17 50 F_NPK 72 20 67 10/08/2017 F_PK 0 0 0 F_NPK 72 0 0

Unité de N Unité de P2O5 Unité de K2O

10/04/2017 71 50 75

26/06/2017 71 0 0

08/08/2017 71 0 0

Tableau II. Date de pâturage et de fauche sur les parcelles de Theix pour l’année 2017

Tableau III. Apport en fertilisant sur les parcelles F_PK et F_NPK de Theix pour l’année 2017 (P : Phosphate ; K : Potassium ; N : Nitrate d’ammonium)

Tableau IV. Apport en fertilisant sur les parcelles F_PK et F_NPK de Laqueuille pour l’année 2017 (P : Phosphate ; K : Potassium ; N : Nitrate d’ammonium)

Annexe 2 : Moyenne des températures à 20 cm de profondeur des parcelles de Theix

et de Laqueuille pour l’année 2016 et début 2017

Figure 16. Moyenne des températures à 20 cm de profondeur pour les parcelles de Theix (a) et de Laqueuille (b) pour l’année 2016 et début 2017

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 1 2 2016 2017 Te m p éra tu re s C)

Moyenne de Intensif Moyenne de Extensif

b

Te m p éra tu re s (°C ) 0 5 10 15 20 25 Titre du graphique

Annexe 3 : Corrélations entre les masses racinaires et les températures

moyennes de l’air

R² = 0,8513 0 50 100 150 200 250 300 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 m ass es ra cina ire (g/m 2) températures (°C)

Figure 17. Corrélation entre les masses racinaires et les températures moyennes de l’air de chaque date de prélèvement. Chaque symbole est associé à un type de traitement. La courbe est une polynomiale de degrés 3, avec un r2 de 0.8513

Annexe 4 : Résultats des traits racinaires pour les « grosses » racines

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 FP_F F_P_NF P Ab 0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 FP_F F_P_NF P Ab classe 0-0.1 classe 0.1-0.3 classe > 0.3 0 5 10 15 20 25 30 FP_F F_P_NF P Ab

Figure 20. Proportion de longueurs par classe de diamètre selon les traitements.

Figure 18. RTD en fonction des quatre traitements (en g cm-3).

Figure 19. SRL en fonction des quatre traitements (en g.m-1).

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