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CHAPITRE 2 Vers l’apparition d’un cadre d’interprétation managérial

IV. Résultats

1. Evolution des régimes de gouvernement des accidents du travail 1907-2007

L’analyse standard opérée par le logiciel ALCESTE identifie six thèmes dominants dans le

corpus des articles du Moniteur des BTP entre 1907 et 2007

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. La figure ci-dessous est une

représentation graphique synthétique de ces six classes et pour chacune des 24 formes lexicales

qui leur sont le plus significativement associées (selon la distance du Chi2).

Figure 10 - Six classes thématiques identifiées par la classification descendante hiérarchique d'ALCESTE

Nous voyons dans cette figure que certaines années (variables signalétiques identifiées

par une étoile) sont liées de manière significative aux classes identifiées par ALCESTE. Dans les

paragraphes qui suivent, nous retraçons la constitution de ces thèmes dans le temps et

construisons les logiques institutionnelles correspondantes.

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a. 1906-1939 - Règlement juridique et assurance privée

La classe 1 est significativement associée aux années 1906, 1927 et 1937 (Chi2 respectifs de

152, 296 et 61), ce qui délimite les frontières d’une première période dans notre chronologie.

L’analyse ascendante hiérarchique (CAH

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) de cette classe permet de repérer les formes lexicales

qui sont au centre du discours (voir résultats en annexe 7) et de saisir ainsi l’esprit général de la

classe :

Formes lexicales centrales dans la classe 1 Titre de la classe 1

Loi, faute, article, cour, juge, inexcusable, droit victime Règlement juridique

Tableau 14 – Formes lexicales centrales et titre de la classe 1

Nous pouvons alors reconstruire la logique institutionnelle dominante dans cette

période en répartissant les formes lexicales significativement associées à la classe 1 dans la grille

d’analyse générique définie dans la section méthodologique :

Formes significatives associées à la classe

Libellé de l’enjeu social Infraction, faute, faute inexcusable, responsabilité, sécurité

Figure du responsable Patron

Figure de l’accidenté Victimes, employés, ouvriers

Autres parties prenantes Cour, juge, chambre, tribunal, député, inspection

Répertoire d’actions Jugements, indemnités, décision, contester, paiement, saisir, réparation, imposer, condamner

Dispositifs matériels Textes, loi, arrêts, circulaires, règlements, amendes, contravention, preuves

Principe général Règlement juridique des accidents du travail

Tableau 15 - Logique institutionnelle dominante de traitement de l’enjeu sécurité entre 1900 et 1939

Il est ainsi frappant de noter à quel point le vocabulaire juridique est caractéristique de

cette période, même jusque dans les répertoires d’actions et les dispositifs matériels visibles

dans le discours. La sécurité au travail est avant tout un enjeu de « faute individuelle » qui

engage la « responsabilité » des personnes. L’entreprise est représentée par la figure du

« patron » et l’accidenté apparaît sous les traits de la « victime ». Le cadre d’interprétation reflète

un système de relations interindividuelles où la dimension organisationnelle est absente.

L’analyse détaillée des formes significatives associées fait également émerger un thème

mineur lié { cette classe, celui de l’assurance. Ce thème est repérable { travers les termes de

« police », « compagnie », « garantir » et « bénéficiaires ».

L’exploitation de données secondaires décrivant le cadre de régulation des accidents du

travail { cette époque va nous permettre de reconstituer les origines de ce cadre d’interprétation

juridique et assurantiel. De manière surprenante, il semble que ce dernier serait plus

caractéristique du régime institutionnel antérieur à loi de 1898 qui a défini la politique française

« moderne » en matière d’accidents du travail. Le discours sur la sécurité au travail durant la

première moitié du XXème siècle porterait donc les traces des cadrages passés. Dans les pages

suivantes, nous explicitons notre propos en décrivant les cadres institutionnels de la sécurité au

travail avant et après 1898. Pour cela, nous sommes partis de données secondaires,

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essentiellement des thèses de doctorat en droit de la sécurité sociale (Pichon 2003 ; Gacia 2005)

et des ouvrages historiques de chercheurs reconnus dans le domaine (Ewald 1986 ; Le Goff 2004

[1985]).

1804-1898 - Régime du code civil : faute individuelle et assurances privées

Ces travaux convergent pour souligner le rôle joué par le code civil des Français dans

l’établissement de ce régime de gouvernement des accidents du travail. Nous faisons donc

démarrer cette période en 1804, date de la promulgation du code Napoléon, tout en

reconnaissant que c’est sa lecture juridique { partir des années 1830-1840 qui va définitivement

asseoir la logique du traitement des accidents. Cette époque est en effet marquée par une

augmentation brutale des accidents du travail, due { l’industrialisation, et à une phase de

tâtonnement pour déterminer une règle de jugement qui corresponde { l’esprit de modernité

qui souffle alors. Nicolas Gacia, dans sa thèse sur « Les métamorphoses contemporaines du droit

des accidents du travail », remonte à l’année 1841, où un arrêt de la cour de cassation rappelle

l’obligation de sécurité d’ordre public contenue dans les articles 1382 et suivant du code civil.

Selon lui, cet arrêt ancre définitivement les accidents du travail dans la référence au code civil.

Pour François Ewald, c’est une jurisprudence de la Cour impériale de Lyon en 1855 qui est

représentative de l’interprétation des responsabilités en matière d’accident du travail. Dans sa

décision, la Cour rappelle qu’ « il est du devoir des chefs d’établissement industriels de pourvoir

complément à la sûreté des ouvriers qu’ils emploient. » (Ewald 1986 : 233).

La faute individuelle est au cœur de cette logique institutionnelle. Le code civil de 1804,

héritier de l’esprit des Lumières, associe la responsabilité { la volonté, qui, capable de se

déterminer de façon autonome, nous rend maître de nos conduites. Il reconnait deux situations

où la responsabilité d’une personne peut être engagée : en cas de non respect d’une obligation

contractuelle (responsabilité contractuelle) et en cas de dommage causé par une faute

(responsabilité délictuelle). Or, l’accident du travail, par définition aléatoire, échappe à ces

catégorisations et la jurisprudence va s’efforcer progressivement de lever les ambigüités { son

égard. Pour qu’un accident donne lieu { réparation il doit perdre son statut d’accident pour

résulter d’une causalité humaine. Si l’ouvrier et/ou sa famille sont dans la capacité de prouver la

faute du patron, ils peuvent intenter un procès en responsabilité civile. Ce dernier est alors jugé

pleinement responsable de la réparation des conséquences de l’accident. Si au contraire,

l’ouvrier est en faute, alors lui et sa famille peuvent éventuellement bénéficier soit d’une

assurance collective { laquelle aurait souscrit l’employeur « éclairé », soit d’une assurance

individuelle privée si l’ouvrier avait été suffisamment avisé

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. La justice n’était donc pas

partisane au XIXème siècle, elle respectait l’esprit du code civil. Pour François Ewald, la doctrine

des tribunaux et plus généralement la doctrine politique étaient profondément optimistes quant

aux conséquences du développement économique : imputer l’accident et le mal social { une

responsabilité individuelle du patron ou de l’ouvrier permettait de penser que le développement

industriel n’impliquait pas en lui-même dénaturation, désordre et dysharmonie et que seule

était en cause la qualité des hommes qui en étaient responsables (1986 : 525). Le savoir

juridique participe de l’objectivation de la vie en entreprise. Le bon patron, maître des choses et

des hommes, apparaît en miroir du bon père de famille qui sert de référence en cas de

responsabilité délictuelle.

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Dans les faits, ce système génère un grand nombre de frustrations et des tensions

sociales. Les ouvriers souffrent de la difficulté à administrer la preuve de la responsabilité

patronale et des lourdeurs administratives des procès. Ewald, analysant les résultats des procès

intentés alors, montre que 88% des accidents restent à la charge des ouvriers (1986 : 530). Mais

les employeurs ne sont pas plus satisfaits. Ils dénoncent l’évolution de la jurisprudence qui les

juge de plus en plus responsables d’accidents sans faute réelle, l’arbitraire du montant des

indemnisations et le caractère infamant du processus juridique. Cette introduction du regard

public dans la sphère privée de la gestion industrielle (Gomez 2001) est mal vécue par les

entrepreneurs. Ce mécontentement général alimente à partir des années 1880 un grand nombre

de débats et un travail juridique qui aboutit à la promulgation de nombreuses lois sociales dont

la réforme fondatrice de 1898.

1898-1939 - Régime de la loi de 1898 : responsabilité limitée et assurances

privées obligatoires

La loi du 9 avril 1898 introduit une rupture institutionnelle forte dans la mesure où elle

modifie en profondeur le principe de règlement juridique des accidents du travail. Elle établit le

principe de la responsabilité civile systématique de l'employeur pour les accidents survenus

dans son entreprise

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et crée ainsi un régime d’exception en matière de responsabilité, en marge

des principes définis par le code civil. Le salarié victime d'un accident du travail peut alors

demander une réparation, sans avoir à prouver la faute de son employeur. En revanche,

l'indemnisation est forfaitaire, ce qui est une limite au principe de réparation intégrale du

dommage. En échange de l’indemnisation forfaitaire systématique, l’employeur bénéficie lui

d’une immunité civile, sauf en cas de faute inexcusable. Il est ainsi apparu qu’il pouvait être juste

de penser la responsabilité en dehors de la notion de faute. La notion de risque prend

progressivement la place de la faute et l’accident est conceptualisé comme le résultat

exceptionnel mais inéluctable de processus complexes dans lesquels les responsabilités

individuelles sont difficiles à déterminer. Se développent alors les assurances mutuelles privées

et les syndicats de garantie qui permettent de lisser ce risque systémique. Pour François Ewald,

c’est une pause dans l’expression du schéma de pensée libérale : le remplacement du principe

général de responsabilité par l’assurance mutuelle.

La logique institutionnelle dominante dans la première moitié du XXème siècle en

matière d’accident du travail dans le BTP est donc surprenante. Il semble que la loi de 1898 a eu

moins d’impact que ne le laissent prévoir les experts du droit. Les discours restent fortement

marqués par la notion de faute, et le terme « risque » apparait peu. Le règlement juridique est la

norme.

94 En cela, elle s’appuie sur l'arrêt Teffaine de 1896, qui avait décidé que l'article 1384, al. 1er du Code civil français pouvait s'appliquer aux accidents du travail, créant un lourd régime de responsabilité civile.

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b. 1947 & 1977 – Règlement bureaucratique des accidents du travail

Nous abordons ensuite la classe de vocabulaire 4 qui est significativement associée aux

années 1947 et 1977.

L’analyse ascendante hiérarchique (CAH) de cette classe permet de repérer les formes

lexicales qui sont au centre du discours (voir annexe 7) et de saisir ainsi l’esprit général de la

classe :

Formes lexicales centrales dans la classe 4 Titre de la classe 4

Caisses, comités, décrets, hygiène, régional, arrêté,

recommandation, application, mesurer Règlement bureaucratique

Tableau 16 - Formes lexicales centrales et titre de la classe 4

Nous pouvons alors reconstruire la logique institutionnelle dominante à cette période en

répartissant les formes lexicales significativement associées { la classe 4 dans la grille d’analyse

ci-dessous :

Formes significatives associées à classe 4

Libellé de l’enjeu social Sécurité sociale, prévention

Figure du responsable X

Figure de l’accidenté X

Autres parties prenantes Comités, ministres, inspection, sécurité sociale, maitre d’œuvre. caisses, interentreprise, sous-traitants,

Répertoire d’actions

Recommandation, mesurer, intervention, adopter,

instituer, communiquer, conformer, coordonner,

demander, approuver

Dispositifs matériels Décret, arrêté, homologation, plans, cahiers

Principe général Règlement bureaucratique des accidents du travail

Tableau 17 – Logique institutionnelle dominante de traitement de l’enjeu sécurité en 1947 et 1977

Cette logique correspond donc à un règlement bureaucratique des accidents du travail.

L’enjeu principal est celui d’une sécurité sociale dans son sens premier, c'est-à-dire un régime

assurantiel mutualiste. Il n’est donc pas étonnant de constater l’absence { la fois des figures de

responsable et de victime dans le cadre d’interprétation. L’accident est perçu comme un

évènement aléatoire dans un système complexe, et non plus comme le fait d’une personne

individuelle. La perception et le règlement du risque sont ainsi collectivisés. Il est également

intéressant de constater l’apparition du terme de « prévention », qui dénote un changement de

logique dans le règlement des accidents du travail. Si le régime juridique précédent avait pour

vocation à traiter les conséquences des accidents, c'est-à-dire principalement leurs réparations,

le régime bureaucratique a, dès sa mise en place, la volonté de réduire les risques à leur source.

Une partie du dispositif institutionnel mis en place en 1947 et toujours d’actualité fait alors son

entrée dans le cadre d’interprétation des entreprises du BTP. Les organes administratifs publics

sont très visibles : comités techniques nationaux et régionaux du bâtiment et des travaux

publics, caisses régionales et nationales d’assurance maladie, inspection du travail, et de manière

plus générale la sécurité sociale. Apparaissent également des acteurs en dehors du périmètre

organisationnel de l’entreprise : sous-traitants, maîtres d’œuvre… Nous pouvons alors mettre en

correspondance les parties prenantes, le répertoire d’actions disponibles et les dispositifs

matériels visibles avec le cadre institutionnel mis en place après la seconde guerre mondiale.

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1947-2007- Régime de la sécurité sociale : assurances publiques universelles

L’année 1946 marque la naissance du dispositif actuel d’administration publique des

accidents du travail (voir le schéma ci-dessous). Le 11 octobre 1946 est décrétée l’obligation de

la médecine du travail et la loi du 30 octobre donne le jour à la sécurité sociale et à ses

obligations afférentes. Les entreprises se voient imposer des taux de cotisation en pourcentage

de leur masse salariale. Les règles de calcul de ces cotisations toujours en vigueur sont exposées

dans le Glossaire de la construction en annexe 1).

Cette date ne correspond pas à un bouleversement total des logiques passées. En

témoigne la conservation de la loi de 1898, qui est intégrée dans les principes de fonctionnement

de la sécurité sociale (Code de la Sécurité Sociale, L452-5 et L454-1). La responsabilité des

employeurs reste limitée, sauf en cas de faute inexcusable, et l’indemnisation des accidents se

fait sur une base forfaitaire. Mais le régime assurantiel passe du privé au public et devient

universel.

Néanmoins, apparaissent certains principes nouveaux, notamment la prévention. En

1947 est créée l’OPPBTP, l’organisme professionnel de prévention du BTP. Sa mission principale

est de conseiller et former les entreprises { l’anticipation des risques que pourraient générer

leurs activités. Cette volonté d’impliquer tous les acteurs se reflète dans la création des Comités

d’Hygiène et de Sécurité en 1947, qui deviennent obligatoires pour les entreprises de plus de

500 salariés.

Ministère du Travail et des Affaires Sociales (1906)

Secteur Travail Secteur Sécurité sociale

DIRECTION DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (1947) •Élaboration de la politique et de la législation en matière d’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles

DIRECTION DES RELATIONS DU TRAVAIL

Sous-direction des conditions de travail

•Élaboration et coordination de la politique publique de prévention de la législation française et européenne en matière de santé et sécurité sur les lieux de travail SERVICES DÉCONCENTRÉS •23 directions régionales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle •102 directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle •441 sections d’inspection du travail (1290 agents de contrôle) (créées en 1892)

CAISSE NATIONALE DE L’ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS

(CNAMTS) (1947) Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles assistée de 11 Comités Techniques Nationaux (CNT)

Direction des Risques Professionnels •Gestion assurantielle du risque AT/MP •Politique de prévention du régime général de la Sécurité Sociale

CAISSES REGIONALES D’ASSURANCE MALADIE (CRAM)

(1947) 16 caisses régionales (+ 4 outremer) assistées de comités techniques régionaux (CTR). •centres de mesures physiques •laboratoires •centres de formation à la prévention Organisme Professionnel de Prévention du BTP (OPPBTP) (1947) Comité national et 11 comités régionaux •Conseiller •Former •Informer

Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT) (1973) Réseau de 24 agences régionales •Études et expérimentation •Diagnostic d’entreprise •Information, transfert INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE ET DE SECURITÉ (INRS) (1947) •Conduire des études et des recherches

•Publier des rapports en vue d'améliorer la santé et la sécurité de l'homme au travail

•Former des techniciens de prévention

SANTÉ AU TRAVAIL (1946)

1327 services de santé au travail

dont: 927 propres a une entreprise et 400 interentreprises, 6492 médecins du travail

: lien hiérarchique -- - - : avis consultatif (1947) : date de création

87

La logique institutionnelle bureaucratique est particulièrement présente en 1947 et

1977, mais pas en 1957 ni en 1967. Comment expliquer cela ?

La fin des années 40 et le début des années 50 correspondent à la mise en place du système

d’assurance publique obligatoire et de tout un ensemble de règles que les acteurs du champ

organisationnel vont discuter. Les entrepreneurs sont obnubilés par la définition progressive

des taux de cotisation. Le vocable « prévention » fait également son apparition. Outre les caisses

nationales et régionales d’assurance maladie (CNAM et CRAM) et les comités techniques

nationaux, qui sont les organes exécutifs de la sécurité sociale, apparaissent dans les mots clefs

de la logique institutionnelle des acteurs économiques proche des entreprises : maîtres d’œuvre,

sous-traitants… Il semble donc que le nouveau cadre institutionnel impacte les relations

économiques entre les acteurs de la chaîne de valeur de la construction. La sécurité au travail est

alors appréhendée comme un phénomène systémique dont le traitement doit impliquer des

parties prenantes élargies.

Nous supposons que ce nouveau système de règles est progressivement assimilé par les

acteurs du champ dont les discussions vont progressivement se structurer autour d’enjeux

techniques et professionnels (normatifs) à la fin des années 50 et dans les années 60.

1977 se caractérise par le retour de la logique bureaucratique car cette décennie est

marquée par une réforme du cadre institutionnel qui renforce le dispositif de 1947. La loi du 6

décembre 1976 pose le principe de l'intégration de la prévention des risques professionnels à

l'ensemble des situations de travail : locaux de travail, machines et appareils, produits utilisés,

mais également formation pratique à la sécurité de chaque salarié à son poste de travail. Ces

orientations se trouvent complétées par des mesures visant à développer la concertation sur la

prévention et les conditions de travail. S’imposent alors les concepts de sécurité intégrée des

moyens de travail et de prévention des risques professionnels au sens large (création de

l’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail, ANACT en 1973).

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c. 1957 & 1967 – Traitement normatif de la sécurité au travail

Les années 57 et 67 sont toutes deux associées { la classe 3. L’analyse ascendante

hiérarchique (CAH) de cette classe permet de repérer les formes lexicales qui sont au centre du

discours (voir annexe 7) et de saisir ainsi l’esprit général de la classe :

Formes lexicales centrales dans la classe 3 Titre de la classe 3

International, fédération, national, médecin,

professionnel, colloque, pays, président,

Association internationale de la sécurité sociale

(AISS)

Règlement normatif

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(professionnel)

Tableau 18 - Formes lexicales centrales et titre de la classe 3

Nous pouvons alors reconstruire la logique institutionnelle dominante correspondant à

cette période en répartissant les formes lexicales significativement associées à la classe 3 dans la

grille d’analyse ci-dessous :

Formes significatives associées à la classe 3

Libellé de l’enjeu social Prévention, technologique, sécurité

Figure du responsable X

Figure de l’accidenté X

Autres parties prenantes Fédérations, internationale de sécurité sociale, institut, institut médecins, associations, association

national de sécurité, OPPBTP, bureaux, spécialistes

Répertoire d’actions Présider, communiquer, organiser, influencer, rassembler, coopérer, documenter, souligner,

insister, exposer

Dispositifs matériels Colloques, conférences, congrès, enquêtes, science, propagande, manifestation, rapports, traités

Principe général Règlement normatif des accidents du travail

Tableau 19 - Logique institutionnelle dominante de traitement de l’enjeu sécurité dans les années 50 et 60

La prévention, mise en avant par le cadre institutionnel de 1946, reste le premier enjeu

lié à la sécurité. Les responsables et les victimes sont toujours absents de ce cadre

d’interprétation. En revanche, le champ de vision des entreprises se peuple d’une myriade de

nouvelles parties prenantes : fédérations, médecins, associations, instituts, bureaux… Elles ont

en commun de mener des activités intellectuelles, d’information et de lobbying qui se reflètent {

la fois à travers leurs actions : « documenter, communiquer, exposer, influencer, coopérer,

présider » et les supports matériels à leur disposition : « colloques, conférences, congrès,

enquêtes, rapports, traités ». Les années 50 et 60 sont donc marquées par d’intenses échanges et