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Evolution de la morphologie du fil au sein du cocon

On observe que le grand côté évolue peu, mais que c’est principalement le petit côté qui diminue. Ceci s’explique par la méthode de filage et la constitution du ver. Le grand côté est en effet parallèle au plan frontal, or la largeur des glandes dans ce plan est constante. Par contre, dans le plan médian, les plaques de chitine peuvent se rapprocher provoquant une diminution du petit côté. La diminution de la section peut s’expliquer par la diminution en continu de la réserve de polymère produite, dans sa totalité, avant le début du filage.

Il est donc observé une diminution de la section depuis le début du fil (extérieur du cocon) vers la fin du fil (intérieur du cocon) ce qui confirme les résultats présentés dans le littérature, mais cette tendance n’est pas vraiment significative d’un point de vue statistique.

La présence de défauts

Les variations et défauts sont très importants pour la caractérisation mécanique d’un matériau. Des varia- tions de structure ou de microstructure peuvent modifier le comportement, et la présence de défauts initie la rupture. On constate tout d’abord une variabilité importante de la morphologie puisque le rapport de l’écart type sur la moyenne, dans le cas des mesures de section est de 15% [Zhao 07a]. Ceci s’explique par des variabi- lités individuelles entre cocons et des variabilités locales le long de la fibre. En effet, on constate de nombreuses variations le long de la fibre, de forme de la section notamment, comme nous pouvons le constater sur les sections du fil industriel qui représentent une coupe prise aléatoirement le long de chaque fil de cocon, voir figure3.4. De plus, il semble que la microstructure soit également modifiée, notamment l’orientation interne, puisque la lumière polarisée est modifiée, voir figure3.8(a). Une alternance des zones colorées est observable, ce qui se justifie par une rotation locale du brin ou des contraintes locales apportées par l’alignement de la fibre, initialement ondulée. Par contre, les zones blanches ne peuvent être provoquées que par une modification microstructurale importante. Il semble qu’il y ait une longueur caractéristique séparant ces zones de l’ordre de 6mm, période du ’huit’ caractéristique de la méthode de filage. Mais, ceci n’a pu être prouvé statistiquement puisque parfois ces zones n’apparaissent que très légèrement pour certains brins. La figure3.8(b)montre que ces zones sont caractérisées par des déformations plastiques de la fibre de soie. Cet aspect, avec deux motifs similaires proches, s’apparente à l’écrasement dû à un fil de soie posé sur une matière pas encore complètement sèche. Il semblerait que la cause de ces imperfections soit donc la méthode de filage où le ver dépose régulière- ment son fil pour le fixer sur le cocon en cours de production induisant des déformations irréversibles des fibres précédemment déposées et pas encore parfaitement solidifiées. De même, cette soie fraichement déposée est certainement déformée par la pression de fixation. Or, cette déformation doit résulter en des contraintes locales menant à une microstructure et un comportement mécanique modifiées. De plus, entre chacune de ces zones, la fibre semble bien régulière et orientée ce qui validerait un étirement du fil lors du filage.

3.1.3.2 Pour le fil industriel

Le fil industriel subit la même variabilité que le fil de cocon de soie à l’échelle du brin. En plus, il faut y ajouter la variation due au nombre de fils de cocon utilisés qui peut varier le long du fil industriel pour maintenir la section moyenne. Enfin, il s’ajoute des problèmes de cohésion qui peuvent mener à la présence de porosités à

3.1.4 Fractographie

Les faciès de rupture peuvent apporter des informations sur le comportement mécanique du polymère. On peut constater tout abord qu’il existe une variété de faciès de rupture pour le brin de fibroïne, voir figure3.10. La rupture peut être relativement conventionnelle d’un polymère semi-cristallin tels que certains polymères synthétiques (Polyamide ou Poly(éthylène) téréphtalate). Elle peut également être plus complexe voire plus caractéristique d’un matériau fragile. On observe donc la variabilité de microstructure et la présence de défauts le long de la fibre par la variété des faciès. Cette variété peut être due à des défauts internes comme sur la photographie3.11(a) ou externe par le procédé de filage comme vu précédemment, voir la photographie 3.11(b).

Le faciès de rupture indique également la manière dont s’est produite la rupture, comme schématisé sur la figure 3.13. On constate que la rupture débute au niveau d’un point d’initiation, généralement induit par la présence d’un défaut, puis celle-ci se propage ductilement jusqu’à un certain point où la charge ne peut être supportée par la section résiduelle et se produit une rupture fragile.

Mais la fibroïne n’est pas le seul polymère à avoir de l’importance dans la compréhension du comportement de la soie, du moins non décreusée. Le grès a longtemps été négligé mais est resté finalement peu étudié. Sur la figure3.12, le grès présente un faciès de rupture plutôt de type fragile, bien net. De plus, on peut observer que l’interaction entre les brins et la gaine de séricines est relativement faible. La rupture du grès précède celle de la fibroïne qui va alors s’extraire de la gaine tel un fil que l’on dénude. Cette même observation peut être faite sur le fil industriel présenté en figure 3.14(a)où l’on constate que le grès s’écaille en morceau rectilignes. La rupture du grès peut s’observer sur des fils sollicités en relaxation comme sur des fils pré-cyclés3.14.

3.2 La caractérisation mécanique des soies utilisées

La caractérisation mécanique a été effectuée pour les différents types de soie, elle donne ainsi des valeurs caractéristiques pour chaque matériau. Elle permet également de mettre en évidence l’importance de l’ensemble des composants et l’effet composite visible pour le fil industriel. Elle prouve enfin notre capacité à modifier les propriétés mécaniques grâce à la biotechnologie, ce qui est une voie extrêmement prometteuse pour l’avenir.

3.2.1 La caractérisation mécanique du fil de soie de Bombyx mori

Etude d’une traction simple

Des essais mécaniques ont été effectués sur des cocons fournis par l’UNS. Ces essais ont été effectués sur les cocons dévidés, c’est à dire déroulés dans de l’eau distillée portée à ébullition pour en extraire le fil. Pour chaque cocon, différentes portions ont été analysées, premièrement pour étudier leur morphologie décrite précédem- ment, ensuite pour étudier leur comportement mécanique. On peut observer qu’il existe une allure typique de courbe de traction de la fibre de Bombyx mori. Celle-ci est présentée en figure3.15(a). On constate que la courbe peut être divisée en deux régimes. La limite d’élasticité, séparant les 2 régimes, peut être approximativement visualisée sur courbe par la position de la flèche sur la figure.

0 50 100 150 0 0,1 0,2 0,3 Déformation For ce ( mN ) (a) 0 50 100 150 0 0,1 0,2 0,3 Déformation For ce ( mN ) (b) 0 50 100 150 0 0,1 0,2 0,3 Déformation For ce ( mN ) (c) ❄ ✻

Dans la majorité des cas, les deux brins rompent en même temps, c’est-à-dire que la rupture d’un des deux brins entraine la rupture du deuxième. Parfois, ce mécanisme de rupture ne se produit pas et l’on peut observer une rupture successive des deux brins, voir figure3.15(b). On voit alors que les capacités à rupture des brins peuvent être différentes selon la présence de défaut. Cependant, le comportement est similaire pour les deux brins puisque la valeur en force diminue de moitié systématiquement à la rupture du premier brin. Les brins produits dans les deux glandes séparément ont une structure, et un comportement associé, similaires. C’est l’instant de la production qui va justifier du comportement local de la fibre, les facteurs du procédé de filage sont donc essentiels pour justifier le comportement mécanique. La composition du polymère est en effet identique dans les deux glandes. C’est au passage de la filière que les variations le long de la fibre se font.

Variation des propriétés le long de la fibre

On peut en effet observer une variation des propriétés le long de la fibre du cocon. On découvre dans la littérature qu’une étude statistique a pu montrer que les propriétés évoluent le long de la fibre sans trouver de corrélation par rapport à la position sur le fil [Zhao 07a]. Il y a, par contre, une corrélation négative entre le module initial (Ei), et la contrainte à rupture (σr), avec le diamètre des fibres. Or, il a pu être observé que

ce diamètre diminue vers l’intérieur du cocon. On pourrait donc s’attendre à observer de telles évolutions le long de la fibre. Cependant, la dispersion des valeurs ne permet pas d’observer une telle corrélation. On peut constater que les propriétés sont relativement homogènes mis à part quelques sections, voir figure3.3(σr et

�r : respectivement contrainte et déformation à rupture). Dans le cas de notre étude, la première section du

cocon présente en effet des propriétés globalement inférieures au reste du cocon, et la dernière section présente la particularité d’avoir une section plus importante, les propriétés intrinsèques étant conservées. On n’observe donc pas d’évolution des propriétés mais des variations locales qui peuvent être significatives. Ceci ramène au procédé de filage qui peut être discontinu du fait que l’activité du ver n’est pas toujours régulière (ce qui ne mène pas à une discontinuité des propriétés de la fibre).

Ei(GPa) σr(MPa) �r 1(Ext.) 12,7 (0,1) 333 (66) 0,12 (0,05) 2 12,9 (0,5) 540 (31) 0,32 (0,02) 3 15,2 (0,3) 589 (64) 0,29 (0,07) 4 14,7 (0,6) 543 (19) 0,28 (0,02) 5(Int.) 11,6 (1,0) 561 (15) 0,34 (0,01) (a) 0 0,25 0,5 0,75 1

Section 1 Section 2 Section 3 Section 4 Section 5 Position des mesures le long du fil

Co n tr ain te (G P a) et d éfo rm atio n à r u p tu re 0 4,5 9 13,5 18 Mod u le i n it ial ( G P a) (b) ✲

TAB. 3.3 – Evolution des propriétés le long de la fibre depuis l’extérieur (ext.) du cocon vers l’intérieur (int.) ; la