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6-Evaluer et partager un livre (figure 13)

Les deux dernières sections de la grille recensent les fonctions d’évaluation des contenus disponibles sur les plates-formes, ainsi que celles de partage et de diffusion de ces contenus à l’extérieur du site. Deux plates-formes web ont très peu développé ces deux types de fonctions : il s’agit de Gibert Jeune, qui n’intègre aucune d’entre elles, et de Feedbooks, qui propose uniquement la fonction de commentaire sur les fiches des livres. S’agissant des terminaux mobiles de lecture, Bookeen et Kobo ne permettent pas non plus d’évaluer les ouvrages disponibles sur leur plate-forme de vente de livres.

Toutes les autres plates-formes web intègrent une fonction qui permet d’évaluer un livre à partir des fonctions telles que les « like », les « tweet » ou encore le « +1 » issues des réseaux sociaux que sont les Facebook, Twitter ou encore G+ (fonction 288). Si la plate-forme Izneo n’intègre que cette fonctionnalité, les autres sites web proposent également un système de notation interne à la plate-forme (notes ou étoiles – fonction 289) utilisé par les utilisateurs pour donner leur appréciation sur les livres disponibles dans les catalogues. Enfin, les sites web de Bookeen, Immateriel, Virgin, Dialogues, Fnac et Kindle, ainsi que les plates-formes sur terminal mobile Ibookstore et Kindle offrent, en plus de cette fonction de notation, la possibilité aux utilisateurs de poster des commentaires sur la fiche d’un livre (fonction 290). La plate-forme Kindle sur le web permet également des espaces de discussion et la possibilité utilisateurs de poster des tags (fonctions 291 et 292). Enfin, le site Dialogues se distingue également par la possibilité qu’il offre aux utilisateurs de publier des notes de lecture à partir de leur profil lecteur sur le site ; celles-ci viennent alors enrichir la présentation des ouvrages (fonction 293).

Les sites Gibert Jeune et Feedbooks n’ont pas intégré de fonctions de partage. L’intégration d’une fonction permettant d’offrir un livre (fonction 294) n’est utilisée que sur la plate-forme Chapitre et la fonction de partage de citations (fonction 295) sur les liseuses Kobo et Kindle.

Les sites de réseaux sociaux externes sont également utilisés afin de diffuser les fiches relatives à un livre sur le web, par l’intégration de boutons de partage (fonction 298). Cette fonction de partage par les réseaux sociaux est largement plus utilisée que celle qui consiste à envoyer la référence d’un ouvrage par mail (fonction 296), qui n’est elle utilisée que par 5 plates-formes sur les 20 observées.

Si ces liens créés en s’appuyant sur les réseaux sociaux les plus communément utilisés sont aujourd’hui très répandus sur le web, sans parler d’une véritable dimension sociale et communautaire, l’intégration des fonctions de partage et d’évaluation montre une certaine volonté de produire du lien avec des plates-formes externes et de proposer des fonctions participatives aux utilisateurs afin qu’ils puissent enrichir le catalogue et guider les autres utilisateurs dans l’évaluation des livres mis en vente. Ces fonctions sont également un moyen de promouvoir les livres et les plates-formes sur le web. Dans cette même logique de diffusion au reste du web, les sites Dialogues, Fnac et Kindle proposent également des programmes d’affiliation rémunérés pour des sites ou blogs externes qui utiliseraient leur plate-forme comme référence (fonction 297).

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Conclusion

Les plates-formes de vente de livres numériques apparaissent avant tout comme des sites de commerce classiques sur le web, non seulement parce qu’elles reprennent toutes les fonctionnalités indispensables à la vente mais surtout parce que la spécificité du livre n’apparaît finalement pas comme décisive dans l’offre et dans sa présentation sur un plan fonctionnel. Les conventions issues des sites marchands du web et des grandes plates-formes de vente en ligne de livres comme Amazon servent encore majoritairement de référence. Cette forte homogénéité des fonctions proposées et leur inscription dans les conventions des sites marchands ont comme avantage de permettre aux internautes de conserver leurs repères en leur garantissant les fonctions de base de tout site de vente et ainsi s’assurer qu’il n’y ait pas de décrochage ou de frein pouvant empêcher l’acte d’achat.

Pourtant, il semble qu’au-delà de ce socle commun, diverses orientations des plates-formes se dégagent, permettant de saisir en partie les modèles d’innovation qui pourraient émerger. Si l’analyse comparative des différentes fonctionnalités sur les 20 plates-formes ne permet pas de définir clairement des politiques de développement très marquées pour chacun des sites, on constate que certaines d’entre elles se distinguent sur certains sous-ensembles de fonctionnalités. En plus de la figure d’un utilisateur modèle « acheteur/client » qui oriente le développement vers des fonctionnalités marchandes, deux tendances émergent :

-la figure de l’utilisateur « lecteur », pour lequel des fonctionnalités spécifiques sont parfois proposées (gestionnaire de bibliothèque en ligne, production d’avis et de notes de lecture, partage et évaluation des lectures, avis et sélection des libraires, moteur de recherche basé sur les métadonnées spécifiques au livre, etc.). Il faut noter que malgré certaines tentatives, la relation personnalisée du libraire avec l’utilisateur semble encore difficile à traduire sur le web et qu’elle n’a pas encore trouvé de format technique stable.

-la figure de l’utilisateur « internaute » pour lequel on observe des efforts de développement permettant de ne plus considérer la plate-forme de vente comme un espace isolé du reste du web, mais au contraire comme un espace connecté à d’autres services en ligne fréquentés par l’utilisateur (intégration au site de flux d’actualité littéraire issus des blogs ou des médias, liens avec les blogs et comptes des réseaux sociaux animés par les libraires, partage et diffusion des fiches de livre via les réseaux sociaux personnels des utilisateurs, etc.)

On peut se demander si la deuxième phase de développement des plates-formes de vente de livres numériques ne serait pas celle des communautés et des contributions d’utilisateurs, qui seraient alors considérés comme lecteurs et comme internautes et non seulement comme clients. Certaines plates-formes évoluent clairement vers cela, mais des grands opérateurs comme Amazon sont déjà leaders sur ces façons de faire qui constituent il est vrai la base du web 2.0 depuis près de dix ans.

On aurait pu penser que les terminaux mobiles auraient permis d’accéder à ce type d’innovation dans la mesure où l’activité de lecture s’y déroule et peut donc être relayée directement avec l’ensemble de la plate-forme. Or, leurs propriétés techniques ou ergonomiques, ainsi que l’offre de fonctionnalités qui est adoptée, semblent plutôt entériner une division du travail entre l’exploration et l’achat sur le web (et donc sur un PC) et la lecture sur un terminal dédié, sans confusion des fonctions. Sur ce point, l’analyse des fonctionnalités est largement renforcée par notre analyse des usages du livre numérique basée sur la passation d’entretiens et de questionnaires auprès de lecteurs de livres numériques qui déclarent majoritairement accéder à ces plates-formes à partir d’un ordinateur plutôt que par les terminaux de lecture mobiles dont ils sont équipés (cf. parties 2 et 3 de la présente étude). Alors que les terminaux mobiles seraient susceptibles de permettre tous les accès et toutes les fonctions, associant activité de navigation, d’achat, de lecture et de partage communautaire, ils semblent pourtant encore limités à un usage uniquement dédié à l’activité de lecture.

médialab/MOTif : Pratiques de lecture et d’achat de livres numériques. Février 2013

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PARTIE 2

Etude quali-quantitative descriptive