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Etude de la montée des dislocations sans contrainte appliquée

Chapitre V. Etude expérimentale des mécanismes du fluage d’irradiation

III. Etude de la montée des dislocations sans contrainte appliquée

III.1.1. Montée hélicoïdale des dislocations

Lors des irradiations in-situ aux électrons de 1 MeV des lames minces contenant des dislocations de vecteur de Burgers <a>, le comportement des dislocations a pu être suivi au cours de l’irradiation à 400°C et 450°C. Comme illustré en Figure V-8, il est observé, sur les dislocations initialement rectilignes, la formation et la croissance de sinuosités le long des lignes de dislocations, dont l’amplitude augmente avec la dose. Ces sinuosités sont la preuve de la montée hélicoïdale des dislocations <a> sous irradiation, engendrée par la montée des parties coins des dislocations.

Figure V-8. Montée hélicoïdale des dislocations de vecteur de Burgers <a> sous irradiation aux électrons à a) 400°C et 3,6.1021 ions.m-2.s-1 et b) 450°C et 6.1021 ions.m-2.s-1.

L’évolution de l’amplitude et du pas moyen des hélices a été relevée pour les différentes dislocations à 400°C et 450°C. Bien qu’un même comportement ait été observé pour ces deux températures, seule l’étude réalisée sur la dislocation observée à 450°C est considérée comme valide, les doses atteintes dans les autres cas étant trop faibles pour conclure de façon certaine sur une évolution des dislocations. La Figure V-9 illustre l’évolution de l’amplitude et du pas moyen des hélices observées,

III. Etude de la montée des dislocations sans contrainte appliquée

Figure V-9. Evolution de l’amplitude des hélices et du pas moyen de dislocations observées à a) 400°C et b) 450°C sous irradiation aux électrons de 1 MeV.

Une augmentation de l’amplitude des hélices au cours de l’irradiation ainsi qu’une diminution du pas est observée aux deux températures. De plus, lors de l’irradiation à 450°C où les doses obtenues sont plus importantes, il est observé que l’amplitude des hélices et le pas moyen atteignent un plateau dès environ 0,04 dpa pour l’amplitude des hélices et dès 0,03 dpa pour le pas moyen. Ces doses n’étant pas atteintes pour les irradiations réalisées à 400°C, l’effet de saturation n’est pas observé. Il est également important de noter que l’amplitude des hélices est plus importante à 400°C qu’à 450°C pour de mêmes doses, ce qui est incohérent avec les résultats précédents (chapitre II) qui montrent qu’une augmentation de la température entraîne une augmentation du diamètre des boucles. Bien qu’il soit difficile d’interpréter ces résultats, une explication basée sur la présence d’autres puits de la microstructure pourrait expliquer ces différences. En effet, les concentrations de puits de la microstructure (joints de grains, boucles de dislocation) peuvent varier autour des dislocations et donc influer sur les caractéristiques de leur montée hélicoïdale. De plus, les dislocations sont connectées aux surfaces libres de la lame mince, ce qui peut mener à une élimination en surface des défauts de cœur des dislocations et donc influer sur leur montée hélicoïdale.

III.1.2. Discussion sur la montée hélicoïdale des dislocations sous irradiation aux électrons

Bien que la montée hélicoïdale des dislocations ait précédemment été observée sous irradiation [5], [6], aucune étude détaillée de la cinétique de montée n’est actuellement connue. Une comparaison de l’évolution du diamètre moyen des boucles avec l’évolution de l’amplitude des hélices a été réalisée pour la dislocation suivie lors de l’irradiation aux électrons effectuée à 450°C, où un plateau de saturation est atteint. La Figure V-10 démontre qu’au début de l’irradiation, l’amplitude des hélices semble évoluer de la même manière que le diamètre des boucles. Cependant le plateau de saturation est atteint pour des doses faibles de 0,04 dpa, quand le diamètre des boucles continue de croître.

0 50 100 150 200 250 300 350 400 0 5 10 15 20 25 30 0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06 0,07 P as m o yen d es h élices Ampli tud e d es h elices (nm ) dose (dpa) Amplitude Pas moyen 0 50 100 150 200 250 300 350 400 0 10 20 30 40 50 0 0,001 0,002 0,003 0,004 P as m o yen d es h élices Ampli tud e d es h élices (nm ) dose (dpa) Amplitude Pas moyen a) b) 0,01 0,02 0,03 0,04 0

Figure V-10. Evolution de l'amplitude des hélices et du diamètre moyen des boucles lors d'une irradiation aux électrons de 1 MeV à 450°C.

La géométrie des hélices a également été analysée au cours de l’irradiation. L’angle Ψ, angle entre la ligne de dislocation et le vecteur de Burgers de la dislocation [7], a été déterminé à partir du pas des hélices Λ et de leur amplitude D (Figure V-10) : tan(Ψ)= D/(Λ/2). L’angle Ψ augmente au début de l’irradiation, et les hélices atteignent une configuration d’équilibre, avec un angle Ψ compris entre 45° et 50°. Cette observation est en accord avec l’analyse de Friedel [7] et Grihlé [8], qui montrent que du fait de l’interaction répulsive entre les différents brins des hélices, la dislocation atteint, par glissement sur son cylindre, une configuration avec un angle d’équilibre Ψ de 45°.

Figure V-11. Méthode de détermination et évolution de l’angle Ψ entre la ligne de dislocation et son vecteur de Burgers lors de la montée hélicoïdale sous irradiation aux électrons de 1 MeV.

0 10 20 30 40 50 60 70 0 0,02 0,04 0,06 0,08 D iamè tre d es b o u cles et am p litud e d es to u rs d ’h élice(nm ) dose (dpa)

Amplitude des hélices Diamètre moyen des boucles

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III.2. Montée des dislocations sous irradiation aux ions

III.2.1. Montée des dislocations <a>

Des irradiations in-situ aux ions Zr2+ d’énergie 300 keV ont également été effectuées pour des

températures similaires, afin d’observer la montée des dislocations de vecteur de Burgers <a>. Cependant, l’irradiation entraîne l’apparition de black-dots en densité très importante qui rend difficile l’analyse des dislocations (Figure V-12). Dans le laps de temps où les dislocations étaient visibles, aucune preuve de la montée des dislocations <a> n’a cependant été observée. Pour cette raison, les dislocations de vecteur de Burgers <a> ont été étudiées également après des irradiations conventionnelles aux ions Zr+ 600 keV à 450°C.

Figure V-12. Irradiation in-situ aux ions Zr2+ 300 keV à 450°C d'une lame contenant des dislocations <a> pour un flux de 5.1014 ions.m-2.s-1 a) après 0,03 dpa (2 min) b) 0,7 dpa (après 47 min).

L’analyse des dislocations après irradiation aux ions à 450°C et pour une fluence de 24.1017 ions.m-2 a

montré la présence de dislocations <a> de forme très sinueuse (Figure V-13). Aucune trace de glissement n’ayant été identifiée, cette forme particulière des dislocations n’est pas induite par des interactions dislocation-boucle lors du glissement des dislocations. Un phénomène de montée pure hélicoïdale est donc fortement probable pour expliquer la présence de ces dislocations sinueuses au sein de la microstructure.

Figure V-13. Dislocation <a> sinueuse observée après irradiation aux ions Zr+ 600 keV à 450°C pour une fluence de 24.1017 ions.m-2.

III.2.2. Montée des dislocations <c+a>

La montée des dislocations présentant un vecteur de Burgers <c+a> a pu être étudiée lors d’irradiation in-situ aux ions Zr2+ 300 keV à 400°C. Les conditions de diffraction optimales pour imager ces

dislocations sont obtenues avec un vecteur de diffraction 𝑔 = 0002. Lors des irradiations in-situ aux ions, l’utilisation de ces conditions de diffraction a également pour avantage de mettre hors contraste les boucles de dislocation <a> (𝑔 .𝑏⃗ =0), ce qui facilite l’observation de l’évolution des dislocations <c+a> dans le temps.

La Figure V-14 illustre le suivi de certaines dislocations au cours de l’irradiation à 400°C. Le mouvement des dislocations est très lent contrairement à ce qui est observé lors des irradiations aux électrons de 1 MeV. Il est cependant observé localement un changement de la forme initiale des dislocations comme indiqué par les flèches colorées pour trois brins de dislocation. Ce mouvement très lent des dislocations, activé sous l’effet de l’irradiation, montre l’apparition locale de sinuosités, ce qui laisse à penser qu’il pourrait s’agir d’un phénomène de montée sous irradiation aux ions.

Figure V-14. Montée des dislocations de vecteur de Burgers <c+a> sous irradiation aux ions Zr+ 300 keV à 400°C et pour un flux de 4,4.1014 ions.m-2.s-1.

III.3. Conclusion sur les essais d’irradiation sans contrainte appliquée

Les essais d’irradiation sans contrainte appliquée aux électrons et aux ions ont permis d’étudier l’effet direct de l’irradiation sur le mouvement des dislocations. La présence de sinuosités le long des lignes de dislocation a été observée, et est la preuve d’un mécanisme de montée hélicoïdale. Bien que ce mécanisme ne soit visible de façon précise que lors des essais d’irradiation in-situ aux électrons, des preuves indirectes ont également été observées lors des irradiations aux ions. La montée pure des dislocations a donc bien lieu sous irradiation. Il est ainsi tout à fait envisageable de considérer que la montée peut intervenir dans les mécanismes microscopiques du fluage d’irradiation. L’application d’une contrainte lors des essais pourrait donc mener à l’observation de mécanismes de type SIPA, où une montée préférentielle des dislocations serait observée en fonction de leur orientation par rapport à la contrainte, ou de mécanismes de glissement assisté par la montée, où cette dernière aiderait au désancrage des dislocations sur les boucles.

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