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B. Analyse de l’expression des gènes MtRTL1 chez M truncatula

3. Etude de l’expression de MtRTL1b dans des nodosités formées avec des mutants

L’expression de MtRTL1b débutant vers 4 jours post-inoculation d’après les données de MtGEA et plus précocement que les marqueurs de différenciation testés, on peut se demander comment s’effectue la régulation de ce gène.

Outre les études dans les organes, le site MtGEA recense des données transcriptomiques obtenues lors de divers traitements (y compris des Facteurs NODs-LCO) et chez certains mutants de M. truncatula affectés dans diverses étapes de la symbiose (Figure 45b). Ces données indiquent que l’activation de l’expression de MtRTL1b serait indépendante de la voie des FNs. En effet, il ne s’exprime pas suite à un traitement par les facteurs Nod-LCO chez des plantes sauvages et son expression n’est pas activée dans les premiers jours post-inoculation aussi bien chez des plantes sauvages que chez les mutants

nfp-2 et dmi3, affectés dans la perception et la transduction du signal des FNs (Figure 45b). Par contre, l’expression de MtRTL1b, 6 jours post-inoculation, est maintenue chez un mutant

nfya1/hap2, dont les nodosités ne possèdent pas de méristème fonctionnel (Xiao et al.,

2014) et le mutant NOOT affecté dans l’identité des nodosités (Couzigou et al., 2016). Il en est de même chez le mutant efd (ETHYLENE RESPONSE FACTOR REQUIRED FOR NODULE DIFFERENTIATION) qui produit plus de nodosités et de cordons d’infection que la lignée sauvage et dont les nodosités sont moins allongées, multi-lobées et non-fixatrices (Vernie et

al., 2008). Ces données suggèrent que l’activation de l’expression de MtRTL1b ne nécessite

pas la mise en place, le maintien ou l’identité du méristème nodulaire ni l’activation du FT

EFD, qui est impliqué dans les étapes précoces d’infection ainsi que dans les étapes plus

tardives de différenciation cellulaire (Vernie et al., 2008).

Afin de compléter ces études, des expériences de RT-qPCR ont été réalisées à partir de racines du génotype A17 inoculées à l’aide de mutants symbiotiques bactériens issus du fond génétique Sm1021 (expériences réalisées par Carine Satgé, LIPM, Toulouse) (Figure 49). Le mutant exoA est déficient dans la formation d’exopolysaccharides pariétaux (EPS). Il est affecté dans l’étape d’infection mais est capable de provoquer les divisions corticales à l’origine du primordium nodulaire (Dickstein et al., 1991).

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Figure 49 : Expression de MtRTL1b durant la nodulation avec différents mutants bactériens.

L’expression de MtRTL1b a été mesurée par RT-qPCR au cours de 3 cinétiques de nodulation (T0 : racines avant inoculation puis nodosités à 9, 15, et 21 jours post-infection) réalisées en utilisant des souches bactériennes sauvage Sm1021 ou mutantes exoA (a), bacA et fixJ (b). Les résultats ont été obtenus avec 3 expériences indépendantes regroupant les nodosités de 10 plantes pour chaque point de cinétique. L’expression relative de MtRTL1b a été obtenue à l’aide de la méthode du 2^-∆∆Ct et les valeurs sont représentées sous forme de moyenne avec écart type et normalisées par le gène MtActin11. c, Tableau récapitulatif des caractéristiques des 3 mutants bactériens et les processus dans lesquels ils sont défectueux.

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méristème transitoire, « vides » de bactéries et par conséquent non fixatrices (phénotype Fix-). Les deux autres mutants testés, bacA et fixJ, ne sont pas perturbés dans l’étape d’infection mais dans des étapes plus tardives, respectivement la différenciation/maintenance des bactéroïdes et la fixation de l’azote par ceux-ci (Glazebrook, Ichige et Walker, 1993; Bobik, Meilhoc et Batut, 2006). Le gène bacA code un transporteur de type ABC, impliqué notamment dans le transport de peptides NCRs à travers la membrane des bactéries. L’infection de plantes de M. truncatula avec le mutant correspondant aboutit à la formation de nodosités non-fonctionnelles, dans lesquelles les bactéries ne se différencient pas en bactéroïdes et meurent dès la formation des symbiosomes. D’après les auteurs, cette mortalité serait liée à l’activité anti-microbienne des peptides NCRs s’accumulant dans l’espace péribactéroïdien (Haag et al., 2011). Le gène

FixJ code un régulateur de transcription ayant un rôle dans le contrôle de l’expression de

gènes fix et nif essentiels pour la mise en place de la fixation du diazote (Bobik, Meilhoc et Batut, 2006). Plus précisément, il induit l’expression de nifA, requise pour l’activation de nombreux gènes nif et fix et celle de fixK qui permet l’activation de FixN. Le mutant fixJ provoque la formation de nodosiés non-fixatrices (phénotype Fix-) mais les étapes précédant la fixation ne sont pas affectées. Les inoculations avec ces deux souches ont été réalisées sur des plantes cultivées en tubes et, dans ces conditions, les nodosités prélevées correspondaient à de jeunes nodules en cours de différenciation (à 9 dpi) ou à des stades matures (à 15 et 21 dpi).

Dans des plantes A17 inoculées par la souche mutante exoA (Figure 49a), les transcrits de MtRTL1b sont détectés dans les jeunes nodules mais à un très faible niveau (induction de 3x par rapport à des racines avant inoculation) par rapport à la souche sauvage (induction de 20x par rapport à des racines avant inoculation). Ceci suggère que la forte activation de l’expression de MtRTL1b requiert que l’étape d’infection ait lieu correctement. Nous avons de ce fait cherché à savoir si MtRTL1b pouvait être régulé par un signal d’origine biotique ou bien par un signal développemental conséquent à l’infection. Dans un premier temps, on peut constater dans les données de transcriptome (MtGEA) qu’en dehors de la bactérie symbiotique S. meliloti, aucune activation de MtRTL1b n’est observée dans des racines de M. truncatula en interaction avec d’autres microorganismes symbiotiques

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(Glomus intraradices ou Glomus mosseae : champignons mycorhiziens) ou avec des agents pathogènes bactériens ou fongiques, comme Ralstonia solanacearum, Gigaspora margarita ou Macrophomina phaseolina (Figure 45b). Dans un deuxième temps, des lignées NAR (Nodule in Absence of Rhizobium) de luzerne qui produisent des nodosités non fixatrices lors d’une carence en azote et ce, en l’absence de Rhizobium (Truchet et al., 1989), ont été utilisées pour des expériences de RT-qPCR (expériences réalisées par C. Satgé, LIPM). L’absence d’infection par la bactérie S. meliloti a été vérifiée par PCR (données non montrées). Ces expériences montrent que l’homologue du gène MtRTL1 chez M. sativa est très fortement activé dans les nodosités spontanées, prélevées 10 jours ou 18 jours après carence azotée (Figure 50). Ainsi, l’activation nodule-spécifique du gène MsRTL1, serait liée au moins en partie à un ou plusieurs signaux développementaux et ne nécessite pas l’étape d’infection bactérienne.

Les plantes inoculées avec les mutants bactériens bacA et fixJ forment, elles, des nodosités infectées mais non fixatrices, suite à des défauts dans la différenciation/viabilité des bactéroïdes ou la fixation de l’azote respectivement. Lors de la cinétique d’infection par ces deux souches, les niveaux d’ARNm du gène MtRTL1b augmentent fortement dès le premier temps testé (9 dpi), avec des ratios de 10 environ par rapport aux racines non inoculées (Figure 49b). Ils sont globalement maintenus aux temps 15 et 21 dpi (Figure 49b). Cependant, les niveaux de transcrits sont légèrement inférieurs à ceux observés avec la souche sauvage (WT), en particulier aux temps tardifs (ratios d’accumulation de 5 à 8 environ au lieu de 20 pour la souche sauvage). Il semblerait par conséquent que la fixation de l’azote (processus affecté chez ces deux mutants pour des raisons différentes) puisse participer au maintien de l’expression de MtRTL1b.

En conclusion, l’ensemble de ces expériences montrent que, lors de la nodulation, l’expression de MtRTL1b serait activée suite à la mise en place de l’étape d’infection et précèderait la différenciation associée aux NCRs (en tout cas NCR084). L’étape de fixation pourrait ensuite participer au maintien de son expression à un niveau élevé. Ces résultats sont cohérents avec les données de RNASeq qui montrent un niveau de transcrits croissant à partir de la zone d’infection (début de la différenciation) jusqu’à la zone de fixation.

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Figure 50 : Expression du gène homologue de MtRTL1b dans les nodosités spontanées de M.sativa.

Les plantes de la lignée NAR (Nodulation in absence of rhizobium) de M.sativa ont été cultivées en hydroponie et mise en condition de carence azotée. Les nodosités spontanées formées dans ces conditions (en absence de bactéries) ont été récoltées au cours de 3 expériences biologiques sur des pools de 2 ou 3 plantes par stade développemental, à 10 et 18 jours après carence (dps). Les moyennes obtenues pour les RT-qPCRs sont calculées selon la méthode du 2^-∆∆Ct avec le gène MsUbiquitine comme référence. Les barres d’erreur correspondent aux écart-types. Une photographie des nodosités spontanées est fournie (prise par C. Satgé). Barre d’échelle 1 mm.

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