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Etude de l’efficacité de FRET sur les différents états de charge du peptide greffé

Chapitre 5 : FRET d’action sur un conformère spécifique

B. Etude de l’efficacité de FRET sur les différents états de charge du peptide greffé

La solution de peptide greffé est injectée dans l’appareil. Le spectre de masse global obtenu est donné en figure 8. Les espèces qui y sont indiquées sont les chromophores seuls, notés QSY 7 et Rh, et les peptides greffés. Ces derniers sont désignés par les chromophores qu’ils portent. Par exemple, l’espèce R-CAAKAAC-Q, indiscernable de Q-CAAKAAC-R, sera notée [RQ].

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Figure 8. Spectre de masse global de la solution de peptide greffé.

On s’intéresse à présent au peptide greffé avec chacun des deux chromophores : [RQ]n+. On observe sur le spectre de masse trois états de charge : 2+, 3+ et 4+. Dans une étude préalable, les spectres du taux de fragmentation spécifiques de l’accepteur ont été mesurés pour chaque état de charge sur l’appareil LTQ avec le laser nano-seconde. Les résultats sont présentés en figure 9.

Les spectres présentent tous deux pics d’absorption, marqués par des gaussiennes. Le pic vers les grandes longueurs d’onde correspond à l’absorption directe du QSY 7. Le premier pic, quant à lui, correspond à la gamme de longueur d’onde d’absorption de la rhodamine, et est donc caractéristique du FRET.

Sur les spectres présentés en figure 9, on remarque que l’intensité du pic de droite est constante quel que soit l’état de charge. Cela correspond à ce qui était attendu : l’absorption directe du QSY 7 ne varie pas avec l’état de charge du peptide. En revanche, le pic de gauche, spécifique du FRET, est d’intensité variable. L’intensité de ce pic est importante pour l’état de charge 2+ et diminue progressivement quand l’état de charge augmente, jusqu’à être très faible pour l’état de charge 4+.

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Figure 9. Spectre optique du système [RQ] pour a) l’état de charge 2+, b) l’état de charge 3+ et c), l’état de charge 4+, mesurés sur l’appareil LTQ avec le laser nano-seconde.

Ces spectres ne sont pas reproductibles sur l’appareil laser-IMS avec le laser pico-seconde en raison de l’élargissement vers le bleu de la gamme d’absorption du QSY 7 : le pic de gauche n’est donc pas seulement représentatif du FRET. Sur l’appareil laser-IMS, les expériences de FRET sont menées avec le laser continu à 488 nm, dont la longueur d’onde est marquée en bleu sur la figure 9. On voit ainsi que les expériences de FRET présentées par la suite sont faite à une longueur d’onde située assez loin du maximum d’absorption du chromophore donneur (505 nm). On attend donc pour ces expériences une intensité de signal qui ne sera pas optimale.

Malgré cela, le taux de fragmentation de chaque état de charge est mesuré sur l’appareil laser-IMS, utilisé comme décrit précédemment. Les résultats sont donnés en figure 10. On constate que le taux de fragmentation spécifique du FRET diminue considérablement lorsque l’état de charge du système augmente, passant de 0.04827 pour le 2+ à 0.00134 et 0.0001733 respectivement pour le 3+ et 4+. Ces résultats sont en accord avec la tendance observée sur les spectres optiques du même système, mesurés sur LTQ (voir figure 9).

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Figure 10. Taux de fragmentation spécifique du FRET pour les différents états de charge.

Afin d’interpréter ces résultats, nous nous intéressons à la répartition des charges dans le système. Ce dernier possède quatre groupements basiques principaux et deux groupements acides (voir figure 3). On considèrera que chacun des chromophores possède toujours une charge positive, les autres charges positives se répartissent donc potentiellement sur le groupement N-terminal porté par la cystéine et la chaine latérale de la lysine. Deux charges négatives peuvent être portées par le groupement C-terminal du peptide et par la rhodamine (sous sa forme zwitterion).

Ainsi, pour l’état de charge 4+, on attend une seule distribution de charge : deux charges positives portées par les chromophores et deux charges positives portées par le groupement N-terminal et la chaîne latérale de la lysine. Pour l’état de charge 3+, la distribution la plus probable, compte tenu des pKa des différents groupements, est de deux charges positives portées par les chromophores et une troisième charge portée par la lysine ou le groupement N-terminal. Une autre possibilité est que les quatre charges positives soient réparties comme pour l’état de charge 4+, et qu’une charge négative soit portée par le groupement C-terminal du peptide, ou alors, de manière moins probable, par la rhodamine qui peut dans ce cas se présenter sous sa forme zwitterion ou sa forme lactone. Enfin, pour l’état de charge 2+, la distribution la plus probable est de deux charges positives portées par les chromophores, le peptide restant neutre. Il est également possible que le peptide soit présent sous forme zwitterion, ajoutant à la distribution précédente une charge positive portée par la lysine ou le groupement N-terminal, et une charge négative portée par le groupement C-terminal. La forme zwitterion ou lactone de la rhodamine est également possible (RL.

Ces distributions de charge attendues pour chaque état de charge du système est en accord avec les résultats expérimentaux. En effet, pour l’état de charge 4+, les répulsions coulombiennes entre les charges portées par les chromophores et celles portées par le peptide, et en particulier par la lysine située au milieu de la chaîne peptidique, tendent à allonger le peptide et à éloigner les chromophores l’un de l’autre. L’efficacité de FRET est donc diminuée. C’est ce que l’on observe sur la

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figure 9.c. Les répulsions coulombiennes deviennent moins importantes lorsque l’on passe de l’état de charge 4+ à l’état de charge 3+, ce qui permet aux chromophores d’être situés plus près l’un de l’autre. Ainsi, le taux de fragmentation de QSY 7 spécifique du FRET mesuré sur la figure 9.b est plus important. Enfin, pour l’état de charge 2+, les seules répulsions coulombiennes en jeu sont celles entre les chromophores eux-mêmes. Le peptide peut alors être plus compact, et les chromophores plus proches : le pic d’absorption typique du FRET est alors le plus intense (figure 9.a).