• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 : La mobilité ionique

B. Calcul des sections efficaces de collision

Le calcul d’une section efficace pour une structure candidate n’est pas un problème trivial. Il s’agit de calculer la section efficace moyenne (ߗ௠௢௬) de transfert d’impulsion lors des collisions ion-gaz en prenant en compte la distribution des vitesses relatives accessibles à la température de l’expérience, ainsi que l’ensemble des paramètres d’impact et des orientations possibles de l’ion :

ߗ௠௢௬ͳ Ͷߨන ݀ߠ න ݀߮ݏ݅݊߮ ଶగ න ݀ߛߨ ͺ ଶగ כ ൬ Ɋ ݇ܶ න ݀݃݁ ିஜ௚మΤଶ௞்௚ఱ כ න ܾ݀ʹܾ൫ͳ െ ܿ݋ݏ߯ሺߠǡ ߮ǡ ߛǡ ݃ǡ ܾሻ൯ Eq. IV 1

Avec ߠ, ߮ et ߛ les paramètres définissant la géométrie de collision ; ߯ሺߠǡ ߮ǡ ߛǡ ݃ǡ ܾሻ l’angle de déflection ; ݃ la vitesse relative ; Ɋ la masse réduite et ܾ le paramètre d’impact.

Ce calcul n’est pas possible analytiquement dans le cas général et demande donc une intégration numérique.

Différentes méthodes, donnant des descriptions des collisions différentes, ont été développées. Afin de moyenner les orientations, toutes ces méthodes sont basées sur des intégrations de Monte-Carlo. L’approche la plus simple consiste à faire l’approximation que la CCS est égale à la surface moyenne projetée de la structure (PA) [55], la plus complexe se base sur un calcul de diffusion sur une surface d’isodensité électronique [56]. Nous ne décrirons ici que les méthodes les plus utilisées.

32 Projection de sphères dures (PA) [55].

Dans le modèle de projection de sphères dures, chaque atome est assimilé à une sphère dure dont le rayon dépend du type d’atome. L’approximation faite consiste à assimiler la section efficace de collision à une surface géométrique obtenue par projection de l’ion subissant une rotation dans toutes les directions de l’espace (voir figure 9.b) . En effet, en première approximation, pour qu’une collision ait lieu, l’ion et la molécule de gaz doivent se trouver dans un cylindre (noté cylindre de collision sur la figure 9.a) dont le rayon est égal à la somme du rayon de l’ion et du gaz. La base du cylindre correspond alors à la section efficace de collision (notée CCS sur la figure). Ce modèle ne prend en compte ni les interactions à longue distance entre l’ion et le gaz, ni l’influence de la surface de la molécule (concavité) sur les collisions. Les CCS sont donc sous-estimées.

Figure 9. Modèle de projection de sphères dures.

Modèle de calcul des trajectoires de diffusion exacte avec modèle des sphères dures (EHSS) [57]. Dans ce modèle, les atomes de l’ion moléculaire et du gaz sont également assimilés à des sphères dures. On cherche ici à déterminer l’angle de déflection χ d’une molécule de gaz lors d’une collision (voir figure 10.b). La trajectoire du projectile est calculée en considérant des collisions élastiques entre sphères dures. La simulation est répétée pour toutes les orientations possibles dans l’espace de l’ion moléculaire.

La forme de la surface de l’ion moléculaire est cette fois prise en compte à travers la possibilité pour un projectile de subir plusieurs collisions avec différents atomes de la surface de l’ion. Plus un

33

ion moléculaire comporte de concavités à sa surface, plus il y a des collisions multiples, ce qui modifie les transferts d’impulsion. La CCS est plus exacte que par le modèle PA. Cependant ce modèle ne tient pas compte des interactions à longues distances.

Figure 10. Trajectoires de diffusion exactes avec mode des sphères dures.

Modèle de calcul des trajectoires en utilisant un potentiel plus réaliste [58].

Dans ce modèle, on s’intéresse également aux trajectoires de diffusion du gaz après collision avec l’ion moléculaire. Mais cette fois, la trajectoire du gaz est propagée dans une potentiel créé par l’ensemble des atomes. L’interaction entre les atomes de l’ion et le gaz tampon est modélisée par une énergie potentielle, notée Epot sur la figure 11.a, combinant les interactions ion-dipôle induit et le potentiel de paire entre le gaz et chaque atome de l’ion, de la forme Lennard-Jones, paramétrisé pour quelques atomes seulement. Ce modèle permet donc de prendre en compte les interactions longue distance. En effet, cette énergie dépend de la distance entre l’ion et la molécule de gaz, notée r sur la figure. Le potentiel de Lennard-Jones entre deux atomes s’exprime de la manière suivante :

ܧ௅ି௃ሺݎሻ ൌ Ͷߝ ቈ൬݀ ݎ ଵଶ െ ൬݀ ݎ ቉ Eq. IV 2

Avec ݎ la distance entre les noyaux atomiques ; ݀ la distance entre les noyaux atomiques pour laquelle le potentiel est nul (ܧ௅ି௃ሺ݀ሻ ൌ Ͳ) ; et ߝ la profondeur du puit de potentiel.

Le potentiel considéré dans le modèle des trajectoires est la somme des interactions de Lennard-Jones et des interactions ion-dipôle induit, qui prend en compte la répartition des charges.

34

Pour un ion moléculaire composé de ݊ atomes, le potentiel entre un atome de gaz et l’ensemble des atomes de l‘ion moléculaire peut s’écrire comme suit :

ܧ௣௢௧ൌ Ͷߝ ෍ ቈ൬݀ ݎ ଵଶ െ ൬݀ ݎ ߙ ʹ ݖ݁ ݊ ቎൭෍ݔ ݎ ൅ ൭෍ݕ ݎ ൅ ൭෍ݖ ݎ ቏ Eq. IV 3

Avec ݔ; ݕ; et ݖ les coordonnées définissant les positions relatives du gaz et des atomes de l’ion moléculaire ; ݎ la distance entre les noyaux atomiques du gaz et des atomes de l’ion. ݖ݁ est la charge de l’ion et ߙ est la polarisabilité du gaz tampon.

Comme indiqué sur le diagramme de la figure 11.a, l’énergie potentielle est répulsive à très courte distance, attractive à distance moyenne et nulle à très longue distance. Les trajectoires des molécules de gaz environnant un ion moléculaire sont représentées sur la figure 11.b. La valeur de la section efficace de collision calculée avec ce modèle est donc plus précise qu’avec le modèle des sphères dures. Le modèle des trajectoires est valable quelle que soit la taille de l’ion. Cependant les calculs sont longs : il faut calculer les trajectoires pour l’ensemble des orientations possibles de l’ion. C’est pourquoi on privilégiera le modèle des sphères dures pour les petits ions, et on utilisera davantage le modèle des trajectoires pour les ions de taille moyenne (200 à 1000 atomes). De même, ce modèle, qui prend en compte les interactions ion-dipôle induit, est le seul avec lequel on peut reproduire l’effet de gaz de polarisabilités différentes.

Figure 11. Modèle des trajectoires de diffusion en utilisant un potentiel intermoléculaire. a) potentiel de Lennard-Jones. b) trajectoires des molécules de gaz environnant l’ion moléculaire.

35

V. Couplage laser : la spectroscopie d’action

Les spectroscopies d’absorption et de fluorescence sont des outils largement utilisés pour la caractérisation de biomolécules en solution. Leurs applications sont diverses : détermination de la concentration d’analytes en solution via la loi de Beer-Lambert ou étude de la structure de molécules telles que les protéines. Néanmoins, en solution, les interactions entre l’analyte et le solvant ou entre deux molécules d’analyte peuvent générer des interférences. L’étude spectroscopique de ces mêmes systèmes en phase gazeuse permet d’éviter les effets de solvatation, d’étudier les propriétés optiques intrinsèques de la molécule isolée et de déterminer l’influence de l’environnement sur les propriétés optiques du système. Cependant la principale difficulté de la spectroscopie d’ions en phase gazeuse vient de la faible densité des ions qui rend les mesures d’absorption [59, 60] ou de fluorescence [61-63] difficiles. Il est possible de contourner cette difficulté dans le cadre de la spectroscopie d’action qui consiste à mesurer l’effet de l’absorption d’une onde lumineuse sur les ions, essentiellement à travers la fragmentation ou le détachement d’électrons, au lieu de mesurer directement l’atténuation du flux lumineux.