4.6 Vers l’existence de nappes de tourbillon-courant analytiques
4.6.1 Estimation “lipschitzienne” de la pression
ζ J∇ 0ψ ρ,2,σ + ρ kζkρ,2,σkAkρ,2,σkAke ρ,3,σ ! kQ±k±,Kρ,3,σ ≤ 3 C0C1σ kQ±k±,Kρ,3,σ ≤ 1 2kQ ±k±,Kρ,3,σ.
Par conséquent, on obtient l’estimation suivante pour la norme kQ±k±,Kρ,3,σ : kQ±k±,Kρ,3,σ ≤ C1 kQ±k0,±ρ,3 + kζkρ,2,σkF±k±ρ,1,σ
. (4.5.64)
Pour conclure, en utilisant (4.5.62) et le résultat (4.5.4), on simplifie (4.5.64) pour aboutir à l’estimation : kQ±k±,Kρ,3,σ ≤ C2kF±k±ρ,1,σ + kGkρ,3
2
,
où C2>0 est une constante numérique. En prenant le supremum sur K, on en déduit la même estimation pour la norme kQ±k±ρ,3,σ, ce qui achève la démonstration du Théorème 4.5.1.
4.6 Vers l’existence de solutions analytiques au problème des nappes
de tourbillon-courant et pistes de recherche future
Revenons à la définition de l’application Υ établie à la Section 4.3. L’objectif de cette partie est de fournir plusieurs pistes de recherche future, plus ou moins approfondies, qui permettront de démontrer que Υ sera contractante sur un espace métrique complet à déterminer. L’idée sera d’adapter les ou-tils de la preuve du théorème de Cauchy-Kowalevskaya donnée par Baouendi et Goulaouic [BG78]. Cette preuve repose avant tout sur l’estimation “lipschitzienne” (3.2.10) dans les hypothèses du Théorème 3.2.2. Une telle estimation peut aisément s’obtenir pour les termes convectifs apparaissant dans les équations (4.2.15), comme nous l’avons mis en évidence sur le cas simple étudié au Chapitre 3 (on renvoie no-tamment à la Proposition 3.2.3). Néanmoins, il reste à estimer les termes de pression dans les équations (4.2.15a) et (4.2.15b), afin d’obtenir une estimation du même type que (3.2.10). Ce point fera l’objet du Paragraphe 4.6.1 ci-dessous, et découlera essentiellement du résultat fourni par le Théorème 4.5.1.
4.6.1 Estimation “lipschitzienne” de la pression
Reprenons les équations (4.2.15a), (4.2.15b) sur la vitesse u±(on se place dans la formulation en terme des inconnues (u±, b±, f) établie au Paragraphe 4.2.2). La composante associée à la pression Q± est donnée par : J ∂1Q± − ∂1ψ ∂3Q± J ∂2Q± − ∂2ψ ∂3Q± − ∂1ψ ∂1Q± − ∂2ψ ∂2Q± + 1+|∇0ψ|2 J ∂3Q± = a AT ∇Q±,
où l’on rappelle la définition (4.2.2) des matrices A et a. Dans toute la suite, on se donne deux triplets (u±, b±, f) et (u±, b±, f) tels que :
(u±, b±, f), (u±, b±, f) ∈ Bρ,3,σ(Ω±)3× Bρ,3,σ(Ω±)3× Bρ,7
4.6. VERS L’EXISTENCE DE NAPPES DE TOURBILLON-COURANT ANALYTIQUES 97
satisfaisant en outre les conditions (4.3.1). On notera Q± (resp. Q±) la solution du problème de Laplace (4.2.16) dont les termes sources F± et G (resp. F± et G) ainsi que les coefficients de l’opérateur elliptique sont donnés en fonction de (u±, b±, f) (resp. à (u±, b±, f)) via les expressions (4.2.17) et (4.2.2). De même, toutes les quantités annexes définies à partir de (u±, b±, f) seront notées avec une barre soulignée. Le but de ce paragraphe est d’établir une estimation du terme de pression a AT∇Q±−a AT ∇Q±dans les espaces
Bρ0,3,σ(Ω±), pour tout ρ0 ∈(0, ρ) ; cette estimation est résumée dans la proposition ci-dessous. Proposition 4.6.1
Soient ρ ∈ (0, ρ0] et σ ∈ (0, σ0], où ρ0 et σ0 sont donnés par le Théorème 4.5.1. On se donne R > 0, puis (u±, b±, f) et (u±, b±, f) vérifiant (4.6.1), (4.3.1) et contrôlés comme suit :
ku±, b±, u±, b±k±ρ,3,σ < R et kf, f kρ,7
2 < η1, (4.6.2)
où η1 est donné par le Théorème 4.5.1. Alors pour tout 0 < ρ0 < ρ, on a l’estimation “lipschitzienne” : ka AT∇Q±− a AT∇Q±k±ρ0,3,σ ≤ C ρ − ρ0 ku± − u±k±ρ,3,σ + kb± − b±k±ρ,3,σ + kf − fkρ,7 2 , (4.6.3)
où C > 0 ne dépend que de R et η1, mais pas de ρ ni de ρ0.
Démonstration. Notons αij (resp. αij) les coefficients de la matrice a AT (resp. a AT). À i fixé, on écrit :
αij∂jQ± − αij∂jQ± = αij − αij
∂jQ± + αij∂j Q± − Q±
=: E1 + E2.
Traitement de E1. Pour estimer le terme E1, on utilise la propriété d’algèbre de l’espace Bρ0,3,σ(Ω±) : kE1k±ρ0,3,σ ≤ C0kαij − αijkρ0,3,σk∂jQ±k±ρ0,3,σ.
En utilisant la Proposition 4.4.1 et le Corollaire 4.4.3, il est clair qu’on peut écrire la majoration : kαij − αijkρ0,3,σ ≤ C kf − f kρ,7
2, (4.6.4)
où C > 0 est une constante ne dépendant que de η1. Enfin, à l’aide de la propriété (2.3.10) et du Théorème 4.5.1, on en déduit que
kE1k±ρ0,3,σ ≤ C ρ − ρ0 kF±k±ρ,1,σ + kGkρ,3 2 , (4.6.5)
où C > 0 ne dépend que de η1 et ε0.
Il nous faut à présenter estimer les termes sources F± et G donnés en fonction de (u±, b±, f) via les expressions (4.2.17). Pour estimer F± dans Bρ,1,σ(Ω±), on pourra se permettre d’utiliser directement la majoration plus “forte” k · k±
ρ,1,σ ≤ k · k±ρ,2,σ, car F± ne comprend que des produits de termes d’ordre de dérivation au plus 1 pour u± et b±, et au plus 2 pour ψ. En effet, estimons par exemple le dernier terme intervenant dans F±, qui est donné par
2 ∂jJ
J3 u±i ∂ju±j − bi±∂jb±j = 2 ∂j∂3ψ
J3 u±i ∂juj± − b±i ∂jb±j .
Par propriété d’algèbre de l’espace Bρ,2,σ(Ω±) et en vertu du Corollaire 4.4.3, on a :
2 ∂j∂3ψ J3 u±i ∂juj± − b±i ∂jb±j ± ρ0,2,σ ≤ C kψkρ,4,σku±i kρ,2,σ± ku±j k±ρ,3,σ + kb± i k±ρ,2,σkb±j k±ρ,3,σ,
98 CHAPITRE 4. NAPPES DE TOURBILLON-COURANT INCOMPRESSIBLES ANALYTIQUES
où C > 0 ne dépend que de η1. Ainsi, la Proposition 4.4.1 et l’hypothèse (4.6.2) permettent d’en déduire que 2 ∂j∂3ψ J3 u±i ∂juj± − b±i ∂jb±j ± ρ0,2,σ ≤ C,
où C > 0 ne dépend que de R et η1. Tous les autres termes apparaissant dans (4.2.17a) s’estiment de façon analogue ; on en conclut alors que kF±k±ρ,1,σ ≤ C.
Le cas de G est similaire, car à l’aide de la continuité de l’application trace de H2(Ω±) dans H3 2(Γ), tous les termes d’ordre 1 contenus dans G seront estimés dans Bρ,2,σ(Ω±), exactement comme ci-dessus pour F±.
Finalement, si l’on revient à (4.6.5), on aboutit à une estimation de la forme souhaitée ; c’est-à-dire, il existe une constante C > 0, ne dépendant que de R et η1, telle que :
kE1kρ0,3,σ ≤ C ρ − ρ0kf − f kρ,7 2 ≤ C ρ − ρ0 ku± − u±k±ρ,3,σ + kb± − b±k±ρ,3,σ + kf − fkρ,7 2 . (4.6.6)
Traitement de E2. Expliquons succinctement comment traiter le cas de E2. On commence par écrire la majoration :
kE2kρ0,3,σ = kαij∂j Q± − Q±
k±ρ0,3,σ ≤ C
ρ − ρ0 kαijkρ0,3,σkQ±− Q±kρ,3,σ. (4.6.7) Les mêmes arguments que ceux ayant abouti à (4.6.4) permettent d’écrire :
kαijkρ0,3,σ ≤ kαijkρ,3,σ ≤ C, où C > 0 ne dépend que de η1.
Posons ensuite P±:= Q±− Q± et g := f − f ; afin d’estimer P±dans Bρ,3,σ(Ω±), nous allons exhiber un problème elliptique satisfait par (P+, P−), de la même forme que le problème (4.5.1) étudié à la Section 4.5. Comme l’opérateur elliptique dans (4.5.1) est à coefficients variables, nous allons devoir gérer l’apparition de commutateurs. On obtient le problème elliptique suivant, dans lequel les termes sources F± et G seront explicités ci-dessous par (4.6.11) :
− Aji∂j Aki∂kP± = F±, dans [0, T ] × Ω±, [P ] = 0, sur [0, T ] × Γ, 1 + |∇0f |2 ∂3P = G, sur [0, T ] × Γ, ∂3P± = 0, sur [0, T ] × Γ±. (4.6.8)
On peut appliquer le Théorème 4.5.1 et on obtient l’estimation : kP±k±ρ,3,σ ≤ CkF±k±ρ,1,σ + kGkρ,3
2
. (4.6.9)
Il reste maintenant à expliciter les termes sources F± et G dans (4.6.8). Pour cela, nous faisons le lien avec les problèmes elliptiques satisfaits par (Q+, Q−) d’une part (i.e. avec les coefficients de la matrice
A), et celui satisfait par (Q+, Q−) d’autre part (i.e. avec les coefficients de la matrice A). On écrit alors :
A= A + R, (4.6.10)
où la matrice R est un terme de “reste” défini par
R := A − A = 0 0 0 0 0 0 R31 R32 R33 ,
4.6. VERS L’EXISTENCE DE NAPPES DE TOURBILLON-COURANT ANALYTIQUES 99
et les coefficients R3j sont définis comme suit : ∀ j= 1, 2, 3, R3j := 1 J ∂j ψ − ψ − ∂jψ J J ∂3 ψ − ψ .
En injectant l’égalité (4.6.10) dans la première équation du système (4.6.8), on obtient l’expression des termes sources F± :
F± := F± − F± + Aji∂j R3i∂3Q± + R3i∂3 Aki∂kQ±
. (4.6.11a)
Le terme source G s’obtient en écrivant ∇0f = ∇0f + ∇0gdans la troisième équation du système (4.6.8) :
G := G − G − 2 ∇0f · ∇0g + |∇0g|2 ∂3Q
. (4.6.11b)
Il reste ensuite à estimer les termes sources F±et G. Par souci de clarté, on choisit de ne pas détailler ces calculs, dont la méthode est rigoureusement identique à celle employée précédemment pour le traitement de E1. On aboutit à une estimation de la forme :
kF±k±ρ,1,σ+ kGkρ,3 2 ≤ Cku± − u±k±ρ,3,σ + kb± − b±k±ρ,3,σ + kf − fkρ,7 2 ,
avec C > 0 dépendant de R et η1, mais pas de ρ ni de ρ0. Revenant à (4.6.7), on peut donc achever l’estimation de E2, et on obtient : kE2kρ0,3,σ ≤ C ρ − ρ0 ku± − u±k±ρ,3,σ + kb± − b±k±ρ,3,σ + kf − fkρ,7 2 . (4.6.12)
En combinant les résultats (4.6.6) et (4.6.12), on a bien l’estimation (4.6.3) souhaitée.