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3.4 Théorie du pluri-potentiel

4.1.1 Estimée d’ordre 0

Preuve du théorème de

Calabi-Yau sur X\D

C

omme nous l’avons souligné dans notre commentaire suivant l’énoncé du théorème 3.2, ce qui est nouveau dans notre résultat se décompose en deux parties : des estimées non-pondérées uniformes sur les solutions approchées, auxquelles est consacrée la prochaine section, et le fait que les solutions approchées soient dans des Hölder à poids, auquel est consacrée la section 4.2. De plus, une observation facile concernant l’énoncé du théorème 3.2 consiste à dire qu’il suffit d’avoir les contrôles uniformes annoncés sur les ϕε pour obtenir ϕ via une extraction diagonale. Cela dit, on cherche à obtenir de telles estimées, et pas d’éventuelles estimées à poids ; pour un résultat allant néanmoins dans ce sens, voir l’appendice.

4.1 Bornes uniformes

Avant de commencer, notons que quand X est une surface de Riemann, le théorème se déduit immédiatement du lemme 3.6 et de la proposition 3.5. Dans cette section et la suivante, on suppose donc m ≥ 2 (bien sûr, le lemme 4.4 reste vrai si néanmoins m = 1).

4.1.1 Estimée d’ordre 0

Pour obtenir une estimation C0, on suit un schéma d’itération de Moser. Toutefois, il sera également pratique de travailler sur des potentiels normalisés ψε := ϕε− aε avec

aε:= 1 Vol

R

X\Dϕεvolω′

. Dans ce qui suit, toutes les normes Lp sont prises par rapport à la mesure volω′

, sauf si une autre mesure est explicitement mentionnée. De même, g se réfère à la métrique riemannienne fixe ω(·, J·), ∇ à sa connexion de Levi-Civita, et les normes höldériennes des fonctions et des tenseurs sont calculées par rapport à ω.

Proposition 4.1. Dans les conditions du théorème 3.2, il existe des constantes C et A dépendant seulement de ω et f telles que pour tout ε ∈ (0, 1], kψεkL2 ≤ C et |aε| ≤ A. En particulier, kϕεkL2 ≤ C= C + A Vol.

Démonstration. On commence par l’estimée L2. On fixe ε ∈ (0, 1], et on pose ω

ε = ω +

i∂∂ϕε et

Tε:= (ω)m−1+ (ω)m−2∧ (ωε) + · · · + (ω ε)m−1,

74 Chapitre 4. Preuve du théorème de Calabi-Yau sur X\D

de sorte que Tε est fermé, minoré par (ω)m−1 au sens des (m − 1, m − 1)-formes, et

i∂∂ϕε∧ Tε = (ω

ε)m− (ω)m = (ef +εϕε − 1)(ω)m. Or, comme

i∂∂ ϕ2εTε= 2i∂ϕε∧ ∂ϕε∧ Tε+ 2ϕεi∂∂ϕε∧ Tε,

et queRX\Di∂∂ ϕ2εTε= 0 (théorème de Stokes pour les variétés complètes), on a :

Z

X\Di∂ϕε∧ ∂ϕε∧ Tε+Z

X\Dϕε(ef +εϕε − 1)(ω)m = 0.

En remarquant que i∂ϕε ∧ ∂ϕε∧ Tε ≥ i∂ϕε ∧ ∂ϕε∧ (ω)m−1, et que (ef +εϕε − 1)ϕε =

ef(eεϕε − 1)ϕε+ (ef − 1)ϕε ≥ (ef − 1)ϕε (car eεϕε− 1 a le signe ϕε), il vient :

Z

X\Di∂ϕε∧ ∂ϕε∧ (ω)m−1

Z

X\Dϕε(1 − ef)(ω)m.

CommeRX\D(1 − ef)(ω)m = 0 et ∂ϕε= ∂ψε, on en réécrit ceci sous la forme :

Z

X\Di∂ψε∧ ∂ψε∧ (ω)m−1

Z

X\D(1 − efε)m.

Le membre de gauche de cette inégalité n’est autre que (m−1)! 2 kdψεk2

L2

ω′

. Or ψε est de moyenne nulle ; d’après l’inégalité de Poincaré non pondérée (IP), et l’inégalité de Cauchy-Schwarz, on en déduit : kψεkL2 ≤ 2mCPk1 − efkL2 = C(ω, f ), ce qui ne dépend pas de ε.

On estime à présent aε; on commence par une majoration. En intégrant les deux membres de l’équation ω+ i∂∂ϕεm = ef +εϕε)m, on obtientRX\Def +εϕεvolω′

= Vol. L’inégalité de Jensen dit alors que RX\Dεϕεefvolω′

≤ 0, i.e. RX\Dϕεefvolω′

≤ 0. Or aεVol =RX\Defε− ψε) volω′

≤ −RX\Defψεvolω′

, donc par Cauchy-Schwarz,

aε εkL2ke

fkL2

Vol

CkefkL2

Vol , ce qui est encore indépendant de ε.

Pour obtenir d’autre part une minoration de aε, on pose bε := 1 Vol

R

X\Dϕεvolω′ ε; en d’autres termes, bε est la moyenne de ϕε par rapport à la métrique dont elle est un potentiel. Ainsi, Vol = RX\Defvolω′

= RX\De−εϕεvolω′

ε RX\D(1 − εϕε) volω′

ε = (1 −

εbε) Vol, donc bε≥ 0. Par suite, aε≥ aε− bε= 1 Vol R X\Dϕε(volω′ − volωε) = 1 Vol R X\D 1 − ef +εϕε ψεvolω′ ≥ −k1−ef +εϕεkL2kψεkL2

Vol . Pour conclure, on répète l’estimation kψεkL2 ≤ C,

et on utilise |εϕε| ≤ |f|C0 pour obtenir aε≥ −2CkfkC0e2kf kC0

Vol1/2 , ce qui est bien indépendant

de ε. 

La proposition suivante est centrale dans le schéma d’itération à venir :

Proposition 4.2. Sous les hypothèses du théorème 3.2, pour tout ε ∈ (0, 1] et tout p ≥ 2 on a : Z X\Di∂ ε|p/2∧ ∂ |ϕε|p/2∧ (ω)m−1 p 2 4(p − 1) Z X\Dε|p−2ϕε(1 − ef)(ω)m. (4.1)

Démonstration. On fixe p ≥ 2 et ε ∈ (0, 1]. D’après les inégalités Tε ≥ (ω)m−1 et (1 −

ef +εϕε)|ϕε|p−2ϕε = (1 − ef)|ϕε|p−2ϕε + ef(1 − eεϕε)|ϕε|p−2ϕε ≤ (1 − ef)|ϕε|p−2ϕε, la proposition est démontrée si l’on établit l’identité

Z

X\Di∂ ε|p/2∧ ∂ |ϕε|p/2∧ Tε= p2 4(p − 1)

Z

X\Dε|p−2ϕε(1 − ef +εϕε)(ω)m.

Mais ceci provient simplement du calcul direct

i∂∂ ε|p−1ϕεTε

= p|ϕε|p−2ϕεi∂∂ϕε∧ Tε+ p(p − 1)|ϕε|p−2i∂ϕε∧ ∂ϕε∧ Tε,

grâce aux identités i∂∂ϕε∧ Tε= (ef +εϕε− 1)(ω)m et |ϕε|p−2i∂ϕε∧ ∂ϕε= 4

p2i∂ ε|p/2

ε|p/2, ainsi que RX\Di∂∂ ε|p−1ϕεTε= 0 venant du théorème de Stokes.  Avant de tirer de cette proposition des contrôles récursifs dans notre schéma itératif, on précise quel injection de Sobolev on utilise, et en particulier les espaces de Sobolev (à poids) concernés :

Définition 4.3. Soit q ∈ [1, +∞). On pose : Lq,00 =nv∈ Lqloc|

Z

X\D|v|qρ volω < +∞o= Lqρ volω′

et si k ≥ N, on appelle Lq,k0 l’espace des fonctions v ∈ Lq,kloc telles que jv

∈ Lq,00 pour tout j = 0, . . . , k.

Lemme 4.4. Soit q2 ≥ q1. On a l’injection continue Lq1,1

0 ֒→ Lq2,0

0 dès que 1

q1 q12 +2m1 . Démonstration. Il suffit de regarder ce qui se passe près du diviseur, et même près des

croisements, car le cas d’un diviseur lisse est traité dans [Biq97], lemme 4.4. On suppose pour simplifier que les croisements sont de codimension 2 dans X. On considère un petit polydisque U autour d’un point dans un tel croisement, et on recouvre U\D par une union (avec les notations de 1.1.2)

[ k,ℓ≥0 Φδk,ℓ(P), P = 3 42× ∆m−2, où les δk,ℓ = (δ1 k, δ2

) ∈ (0, 1)2 sont choisis de sorte que 1 − δ1

k 21k (resp. 1 − δ1 21) lorsque k (resp. l) tend vers +∞ (on les choisit donc de la même manière que les δk de la preuve du lemme 1.13). De cette manière, Φδk,ℓ∗ρ1 (resp. Φδk,ℓ∗ρ2) est mutuellement borné avec 2k (resp. 2l), i.e. Φδk,ℓρ est mutuellement borné avec 2k+l. On suppose également que la métrique sur U\D est le produit gU de deux métriques cusp standard et d’une métrique euclidienne, de sorte que tous les Φδk,lgU donnent la même métrique sur P. On a aussi |w|p

Lp(U\D)Pk,l≥02k+l1

Φδk,lw p

Lp(P) pour tout p ≥ 1. Or on sait qu’il existe une constante C > 0 telle que pour toute w ∈ Lq1,1(P), kwkLq2,0(P)≤ CkwkLq1,1(P).

On prend v ∈ Lq1,1 0 ; on a alors : |v|q2 Lq2,00 (U\D) X k,l≥0 1 2k+l Φδk,l(vρ1/q2) q2 Lq2(P) X k,l≥0 1 2k+l2k+l Φδk,lv q2 Lq2(P) ≤ C X k,l≥0 Φδk,lv q2 Lq1,1(P)≤ C X k,l≥0 Φδk,lv q1 Lq1,1(P) q2 q1 car q2≥ q1 ∼ C X k,l≥0 1 2k+l Φδk,l(vρ1/q1) q2 Lq1,1(P) q2 q1 ∼ C|v|q2 Lq1,10 (U\D). 

76 Chapitre 4. Preuve du théorème de Calabi-Yau sur X\D

Revenons à notre schéma itératif. On pose ǫ = min3

2,mm−1, 1 + ν

> 1 (on fera

attention à ne pas confondre ǫ et ε), de sorte que l’on ait une injection continue L2,1

0 ֒→

L2ǫ,00 , de norme CSob disons, d’après le dernier lemme. Soit dµ la mesure ρ1−ǫvolω′

. On a la formule suivante de contrôle récursif :

Proposition 4.5. Sous les hypothèses du théorème 3.2, il existe deux constantes C telles que C pour tout ε ∈ (0, 1] et tout p ≥ 2,

εkpL

≤ CkϕεkpLp

+ CpkϕεkpL−1 .

Démonstration. On va utiliser les inégalités de la proposition 4.2, mais tout d’abord, si B

désigne la quantité supX\D ρ

ω′, un calcul simple donne (p et ε sont fixés) :

Z X\D d(ρ−1/2ε|p/2) 2 ω′ρ volω ≤ 2 Z X\D dε|p/2 2ωvolω′ +1 2B Z X\Dε|pvolω′ de sorte que ρ−1/2ε|p/2 L2,10 ≤ 2RX\D d|ϕε|p/2ω 2volω′ +(1 2B + 1)R X\Dε|pvolω. Or R X\Dε|p/2volω′2 RX\Dε|pρ1−ǫvolω′ R

X\Dρǫ−1volω′, et cette dernière inté-grale est finie puisque ǫ−1 ≤ 1

2 < 1. On sait aussi d’après (4.1) queR

X\D d|ϕε|p/2 2ωvolω′ cp2 4(p−1) R X\D|1 − ef||ϕε|p−1volω′

, et d’après l’inégalité de Hölder ceci est majoré par la quantité cp2 4(p−1) R X\Dε|pρ1−ǫvolω′(p−1)/p R X\D(|1 − efǫ−1)pρ1−ǫvolω′1/p ; le dernier facteur est de plus toujours majoré par RX\Dρ1−ǫvolω′1/p

k1 − efkC0

ν ≤ C pour une

constante C ne dépendant que de ω, ρ et ǫ (les « paramètres »).

Pour résumer, on dit qu’il existe des constantes C1 et C2 ne dépendant que des para-mètres telles que pour tout p > 2 (et pour p = 2, par des arguments similaires),

ρ−1/2ε|p/2 L2,1

0 ≤ CkϕεkpLp

+ CpkϕεkpL−1p .

On applique l’injection de Sobolev précisée au début de cette démonstration à ρ−1/2ε|p/2; on obtient exactement que kϕεkpL

est majoré par C2

Sob fois le membre de gauche de la dernière inégalité. Finalement, quitte à renommer les constantes, il existe C et C ne dépendant que des paramètres telles que p ≥ 2 et ε ∈ (0, 1],

εkpL

≤ CkϕεkpLp

+ CpkϕεkpL−1p

. 

Puisque dans les conditions du théorème 3.2 on a une estimation initiale sur kϕεkL2, et donc sur kϕεkL2

(volω′

domine dµ) indépendantes de ε, c’est un exercice facile de démontrer qu’il existe deux constantes positive Q et C1 ne dépendant que des paramètres telles que :

εkLp ≤ Q C1p−m/p

pour tout p ≥ 2 et ε ∈ (0, 1]. En faisant tendre p vers ∞, on a donc prouvé :

Proposition 4.6 (Estimée C0 uniforme). Sous les hypothèses du théorème 3.2, il existe

Q = Q(ν, ω,kfkC0