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à leurs collaborateurs, aux directeurs des services fonctionnels ou aux cadres mis à disposition d’autres administrations, et à les situer obligatoirement au sein de l’établissement de santé. Sur les logements attribués par utilité de service, une réflexion devrait être menée sans délais en cohérence avec les orientations décidées pour la fonction publique d’Etat pour définir strictement et réduire le champ des bénéficiaires et déterminer une politique tarifaire fonction de l’évolution du marché immobilier.

C - Les logements attribués sur critères

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logements restent peu lisibles (pas de commission d’attribution associant la direction des ressources humaines, critères de revenus et de priorité non affichés…). 15 % des logements sont occupés par des personnes qui ne sont pas des salariés des HCL et 23 % sont vacants (essentiellement pour travaux ou projets de cessions).

Toutefois, la problématique des logements des personnels soignants est essentiellement parisienne. A Paris, l’AP-HP mais également le CHNO des Quinze-Vingts mènent une politique active de logement de leur personnel. Le CHNO possède un peu plus de 150 logements à la fois dans son domaine privé et sous forme de bail emphytéotique avec un bailleur social et loge ainsi près d’un tiers de son personnel non médical. Tous les logements sont à proximité immédiate de l’établissement et occupés par des agents du CHNO. Les loyers sont 50 % inférieurs au prix du marché et une clause de fonction dans l’établissement est prévue depuis peu dans les contrats de location.

La politique de logement de l’AP-HP est plus complexe. Cet établissement dispose pour ses 90 000 agents de plus de 11 000 logements (une fraction d’environ 10 % concerne les logements de fonction pour nécessité absolue ou utilité de service, cf supra), dont le nombre s’est accru régulièrement ces dernières années. Ce patrimoine, constitué pour une part de logements situés à l’intérieur des sites hospitaliers (« domaine public »), comprend surtout un important parc privé et un nombre plus élevé encore de logements réservés à ses agents chez différents bailleurs sociaux par le biais de droits de réservation et du fait des baux emphytéotiques qu’elle a pu consentir sur des terrains lui appartenant.

Le parc de logements de l’AP-HP en 2010

Type de logement Nombre

Domaine Public 1 251

Domaine Privé 2 764

Bail emphytéotique (auprès de bailleurs sociaux) 4 118 Droit de réservation (auprès de bailleurs sociaux) 2 455

Logements dans cités du personnel 386

Foyers IFSI (chambres) 454

Total général des logements de l'AP-HP (avec les IFSI) 11 428 Source : AP-HP

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La politique de logement du personnel sur critères sociaux ou professionnels (hors logement de fonction) que développe l’AP-HP a une double finalité :

− un objectif d’attractivité de professionnels de santé dont le recrutement connaît des tensions récurrentes : certains programmes sont clairement établis et fléchés en ce sens comme l'opération

« Infirmières capitale » lancée en 2004 avec un volet relatif au logement des jeunes infirmières36. De façon plus générale, l'AP-HP a décidé de rééquilibrer sa politique d'attribution de logement en faveur de plusieurs professions en tension (non seulement les infirmières mais également les manipulateurs radio, masseurs kinésithérapeutes et infirmiers spécialisés en puériculture). Sur le 1er semestre 2011, 23 % des nouvelles attributions ont ainsi été effectuées à leur bénéfice.

− un objectif social avec l’idée de remédier à la cherté des loyers dans la région parisienne37 et de faciliter le logement à proximité des établissements employeurs.

Cette politique dont les objectifs principaux n’apparaissent pas contradictoires appelle deux observations principales :

− Son coût global n’est pas connu : pour l’appréhender, il conviendrait en effet d’analyser non seulement les coûts de maintenance et de rénovation du domaine privé mais aussi la charge représentée par les loyers impayés, les montants versés au titre des droits de réservation (montant moyen par logement de 60 000 € à 100 000 € sur Paris, 45 000 € en grande banlieue38), les subventions directes à des constructeurs sociaux outre la charge que représente les baux emphytéotiques consenties à conditions avantageuses, ou encore le coût des travaux à réaliser à l’expiration des baux emphytéotiques lorsque les bailleurs n'ont pas entretenu le patrimoine.

− Il n'est pas certain qu'elle remplisse son objectif social pour différentes raisons. Ainsi, les coûts des projets immobiliers sont tels, non seulement à Paris et en petite couronne, mais également dans

36. Il est regrettable qu’aucune étude n’ait été réalisée à ce jour sur les causes réelles de la désaffection des hôpitaux parisiens par ces professionnels. Le fait que l’AP-HP, pour des raisons de gestion, ouvre moins de places dans ses instituts de formation des infirmières que les quotas qui lui sont attribués pourrait par exemple jouer un rôle.

37. Dans son parc privé, les tarifs AP-HP sont de 40 à 50 % inférieurs aux loyers libres hors charges.

38. Alors même qu’une centaine de ces droits était perdue chaque année jusqu’à récemment, faute pour l’AP-HP de suivre correctement les mouvements de ses agents.

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toutes les zones attractives d’Ile-de-France, que le type de logements que les bailleurs sociaux peuvent proposer dans le cadre de baux emphytéotiques ou de droits de réservation dépasse de plus en plus fréquemment les capacités financières des agents qui ont le plus de difficultés à se loger. Par ailleurs, 1/3 des locataires de l'AP-HP (soit 2 846 personnes) ne sont pas ou plus ses agents, l’AP-HP ayant tardivement introduit des clauses de fonction dans ses contrats de location - avec des variations en fonction du type de biens et selon la plus ou moins grande maîtrise que l'AP-HP a sur leur occupation (28 % du total des locataires dans le domaine privé, 31 % dans les bâtiments sous baux emphytéotiques et 42 % dans les logements de bailleurs sociaux pour lesquels elle a acheté des droits de réservation). En dépit des efforts poursuivis ces dernières années, l’AP-HP reste confrontée non seulement aux difficultés de gestion de ces situations mais aussi à des obstacles juridiques liés au régime de protection des locataires, en particulier ceux qui sont soumis à la loi de 1948.

L’utilisation du patrimoine immobilier d’un établissement pour une politique de logement de ses agents n’est pas en soi anormale dès lors qu’elle permet effectivement de répondre à des problématiques de ressources humaines (difficultés de recrutement de certains professionnels, cherté des loyers par rapport au niveau des rémunérations) qui ne peuvent être résolues par ailleurs compte tenu des règles de rémunération dans la fonction publique. Toutefois cette politique doit être clairement définie, lisible dans ses objectifs, rigoureuse dans ses critères et évaluée dans ses coûts comme dans ses résultats. Elle perd sa cohérence et toute pertinence si le patrimoine privé loge des agents qui ne travaillent pas ou plus dans l’établissement de santé.

III - La reconversion du patrimoine non affecté