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Région 3 : Circulation du liquide impossibleRégion 2 : Circulation du liquide

I.5 Essais de fissuration à chaud en soudage

I.5.2 Essais auto-contraints

Comme mentionné précédemment, à la différence des essais à chargement extérieur les essais auto-contraints n’impliquent aucune sollicitation mécanique extérieure et le défaut est généré uniquement par les déformations induites par le procédé de soudage et les conditions de bridage.

I.5.2.1 L’essai Houldcroft

En 1955, Houldcroft [76] propose un des premiers essais auto-bridés simples permettant d’évaluer la sensibilité à la FAC de différents alliages, accessoirement en fonction du métal d’apport. Il a été observé que les fissures s’amorcent facilement lorsque l’on commence le cordon de soudure en bord de plaque. Le but de l’essai est donc d’initier une fissure à l’extrémité d’une éprouvette de faible épaisseur à section non constante afin d’en observer la propagation puis l’arrêt. Le fait d’utiliser une section non constante conduit à une diminution des déformations s’exerçant sur l’arrière du bain liquide, ce qui conduit à la fin de la propagation de la fissure. Houldcroft a eu l’idée de concevoir des variations de section d’éprouvette en réalisant des traits de scie de part et d’autre du cordon dans l’optique de ne pas affecter le champ thermique de l’éprouvette (Figure 31).

Figure 31 : Eprouvette pour les essais type Houldcroft

Houldcroft a utilisé cet essai afin de classer des alliages Al-Si en fonction de leur sensibilité à la FAC. Ce test s’est avéré peu reproductible et a généré de nombreuses incertitudes quant aux résultats obtenus.

Garland [77] a repris et amélioré ce test en 1969 dans l’optique d’augmenter significativement sa reproductibilité. L’objectif était de mettre au point un montage qui assure un champ thermique identique d’un essai à l’autre afin d’avoir les mêmes conditions expérimentales de propagation. Il a donc identifié les principales sources de non reproductibilité, ce qui l’a conduit à redéfinir le dispositif expérimental notamment au niveau des échanges thermiques

d’une encoche sur la face d’amorçage de l’arc afin de faciliter l’amorçage de la fissure. Les dimensions et l’espacement des rainures ont été aussi revus. Les résultats obtenus permettent d’obtenir des champs de température ayant une reproductibilité plus acceptable.

I.5.2.2 Essai éventail ou « trapézoïdal »

L’essai Houldcroft est difficilement applicable au procédé de soudage par faisceau d’électrons. Du fait de sa haute densité d’énergie, le faisceau d’électrons crée un cordon de soudure plus pénétrant mais présentant une ZF et une ZAT plus étroites que celles rencontrées dans les procédés de soudage à l’arc. Cela a pour conséquence de rendre plus difficile l’amorçage du défaut lors de la réalisation d’essais auto-bridés avec ce procédé. Matsuda et al. [78] ont donc développé un nouvel essai en 1982 en s’inspirant des travaux d’Houldcroft et al. [76].

Pour effectuer des essais auto-bridés adaptés au soudage par faisceau d’électrons, Matsuda et al. ont constaté qu’il était nécessaire de réduire considérablement la largeur de l’éprouvette dans la zone d’amorçage du cordon. Ils ont également préféré abandonner le principe des rainures, mais garder l’idée de variation de section au cours du soudage. Ils ont choisi d’effectuer des cordons sur des éprouvettes avec une largeur croissante dans l’optique d’observer l’arrêt de propagation de la fissure.

Figure 32 : Eprouvette pour les essais type trapézoïdaux ou « éventail », dimensions utilisées pour des aciers inoxydables [78]

Les dimensions (épaisseur, longueur, largeur minimum (WS) et maximum (WF)) ont été choisies expérimentalement de façon à ce que le défaut de FAC arrête de se propager pour une largeur critique WC donnée telle que WF > WC > WS (Figure 32). Les valeurs trouvées nécessitent la réalisation d’essais dédiés [12]. Il a été remarqué que la diminution de l’épaisseur de l’éprouvette dans la zone d’amorçage permettait d’amorcer plus facilement les fissures, d’où la diminution de celle-ci sur la partie de faible section dans la zone d’amorçage de l’arc (épaisseur passant de 3 à 2mm, à droite, Figure 32).

Matsuda a mis en application ces essais sur des éprouvettes en alliages d’aluminium et sur certains aciers dont l’acier austénitique inoxydable stabilisé Ti (AISI type 321) [78]. Les résultats obtenus sont satisfaisants et montrent une bonne reproductibilité de l’essai. La Figure 33 représente la sensibilité à la FAC (« crack susceptibility » : longueur de la fissure comparée à la longueur totale de l’éprouvette, ici 200mm) en fonction des alliages étudiés. Les essais ont été réalisés avec deux types d’éprouvettes (WF = 30mm ou WF = 50mm). On peut constater que pour les éprouvettes plus larges (WF = 50 mm, rectangles hachurés sur la figure), le défaut se propage moins loin. En revanche, si l’on considère les largeurs d’éprouvettes pour lesquelles s’arrêtent les fissures, on remarque qu’elles sont équivalentes pour les deux géométries (par exemple : ~ 20mm de large pour l’acier 310S).

Figure 33 : Comparaison de la sensibilité à la FAC de différents aciers [78]

Ce type d’essai a été repris dans la thèse de Wisniewski [79] dans l’optique de valider des critères identifiés sur des essais de type JWRI (I.5.2.4).

I.5.2.3 Test de soudage oblique

Ce test a été mis en place par Ploshinkhin et al. [80] dans le but de classer des alliages en fonction de leur sensibilité à la FAC. Il consiste à brider une tôle fine rectangulaire sur une de ses longueurs et à effectuer une ligne de fusion rectiligne le long de l’éprouvette suivant un angle avec sa longueur libre (Figure 34(a)). Plus l’angle est important, moins la fissure amorcée en bordure de plaque se propage. Ceci est dû au fait que les conditions de bridage varient lorsque le cordon de soudure avance. Plus le cordon s’éloigne du bord libre, plus les déformations qui s’exercent en traction à l’arrière du bain seront faibles, avec pour conséquence l’arrêt de propagation de fissure pour une distance au bord libre donnée.

Ploshinkhin a tiré les mêmes conclusions en effectuant le même type d’essai mais en gardant la distance du cordon au bord libre « a » constante ( =0). La fissure ne s’amorce que si cette longueur est inférieure à une distance critique (Figure 34 (b),(c)).

Figure 34 : (a) Schéma d’essais de soudage oblique ; (b) Schéma d’essai de soudage avec un cordon à distance constante du bord libre (b) cas non fissurant a>acr ; (c) cas fissurant a<acr [80]

(a)

I.5.2.4 Essai JWRI

Cet essai a été développé au Japon par le Joining and Welding Research Institute (JWRI) dans l’optique de déterminer un critère de fissuration plus facilement qu’avec l’essai Varestraint [68]. Cet essai présente le double avantage d’être simple à mettre en œuvre et de pouvoir être simulé numériquement de manière bidimensionnelle.

Il consiste à réaliser une ligne de fusion débouchante sur une éprouvette plane encastrée à une extrémité. Le cordon de soudure est amorcé au niveau de l’extrémité libre de l’éprouvette (Figure 35). L’éprouvette est entaillée à une vingtaine de millimètres de cette extrémité de façon à faciliter l’initiation d’une fissure à chaud. La largeur du ligament entre les deux entailles est légèrement inférieure à la largeur du cordon de soudure.

Figure 35 : Schéma de l’essai JWRI [81]

Au cours de l’essai, la partie entaillée de l’éprouvette chute, ce qui conduit à l’apparition de fissuration à chaud. En effet, lorsque le ligament chute, l’arrière du bain liquide présente un bord libre (n’ayant pas ou peu de résistance mécanique) sur lequel s’exercent les déformations (retrait de solidification, contraction thermique) ce qui peut conduire à l’ouverture de l’éprouvette. On observe alors l’initiation d’une fissuration de solidification longitudinale au centre du cordon qui se propage à l’arrière du bain de fusion.

Figure 36 : Exemple de propagation de fissure au sein d’une éprouvette JWRI, vue face du dessous[82]

La présence de fissuration de solidification dépend des paramètres de soudage et de la géométrie de l’éprouvette. Ils mettent en évidence qu’une largeur d’éprouvette plus importante réduit la probabilité d’apparition du défaut et qu’une forte intensité de soudage l’augmente. La vitesse de soudage a également une influence : son augmentation favorise la fissuration.

Cependant quelques doutes subsistent sur une éventuelle perturbation du bain lors de la chute du ligament. Cette chute n’est pas observée systématiquement, ce qui a généralement pour conséquence l’absence de fissure dans l’éprouvette. En supposant que le bain est parfaitement débouchant et que l’éprouvette reste plane, cet essai offre la possibilité d’effectuer des modélisations bidimensionnelles simples, pouvant ainsi rapidement conduire à un critère de fissuration via un calcul thermomécanique.

I.5.2.5 Essai CPT

L’essai CPT (« Circular Patch Test ») consiste à faire une soudure circulaire entre deux pièces bridées : un disque (ou « inner piece ») au sein d’une plaque (« outer piece ») présentant un trou de la forme du disque (Figure 37).

Figure 37 : (a) Schéma d’un essai CPT [83] ; (b) fissures de solidification et de liquation Au cours du refroidissement du cordon, le retrait de solidification et la dilatation thermique génèrent d’importantes contraintes en traction au niveau de la soudure. En effet, les deux

entraîner l’apparition de FAC de solidification voire parfois de liquation (Figure 37 (b)). Les dimensions des éprouvettes varient grandement selon les auteurs. Teng et al. [84]ont utilisé des « circular patchs » de 300 à 600 mm de diamètre pour 5 mm d’épaisseur alors que les travaux de Huang et al. [83] ont été effectués avec des disques de seulement quelques dizaines de millimètres de diamètre et 3.2 mm d’épaisseur. Il ressort de ces études que les conditions de bridages varient avec le diamètre du disque central. Plus celui-ci est faible, plus le bridage est important et les contraintes élevées et donc le défaut susceptible d’apparaître. Plus récemment, David et al. [85] ont développé cet essai pour l’adapter aux tôles fines. Ils proposent de partir d’un seul et unique disque fin qui serait bridé en son centre et sur ses bords (Figure 38). L’idée est d’effectuer deux cordons de soudure concentriques de diamètres différents, puis de retourner le disque, le brider de nouveau et effectuer les mêmes soudures sur l’autre face. La susceptibilité du matériau à fissurer est évaluée par l’étape à laquelle apparaît la fissure. Il est possible que le matériau étudié ne fissure pas du tout.

Les résultats obtenus pour ce nouvel essai sont qualitatifs et permettent de classer différents alliages suivant leur sensibilité à la FAC. La procédure est cependant relativement complexe à mettre en œuvre et peu compatible avec une étude visant l’établissement d’un critère de fissuration.