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CHAPITRE 5 SIMULATIONS NUMÉRIQUES DE LA CONSOLIDATION DES

5.1 Simulations préliminaires et vérifications

5.1.2 Essai de compression en colonne instrumentée sur résidus non-saturés

Les résultats présentés dans cette section visent à évaluer l’applicabilité du code SIGMA/W (Géostudio 2016) pour représenter le comportement des résidus miniers de la mine CM lors d’un essai de compression en conditions non-saturées (i.e. avec des pressions d’eau interstitielles négatives). Les résultats d’un essai de compression en colonne réalisé par Essayad (2015) ont été simulés numériquement avec le modèle constitutif élasto-plastique (EP).

5.1.2.1 Essai en colonne (Essayad, 2015)

Essayad (2015) (aussi Essayad et al., 2016) présente plusieurs essais de compression en colonne réalisés sur des résidus miniers de la mine CM (échantillonnage réalisé en 2012). L’essai 13 est simulé dans le cadre de cette étude. Cet essai comprend trois phases successives : une phase de chargement axial (contrainte appliquée au sommet de l’éprouvette, P, de 0 à 70 kPa), puis une phase avec une succion croissante appliquée à la base (ψ de 0 à 73 kPa; degré de saturation Sr de 100% à 62%) et enfin une phase de compression sous une succion constante ψ = 73 kPa (P de 70 à 368 kPa) (figure 5.11).

Figure 5.11 : (a) Contrainte verticale appliquée au sommet de l’éprouvette, P, et (b) succion appliquée à la base de l’éprouvette, ψ, pour l’essai de compression 13 de Essayad (2015).

5.1.2.2 Modèle numérique (simulation SP2)

Les phases de chargement axial (phase I), d’augmentation de la succion (phase II) et de compression sous succion contrôlée (phase III) ont été simulées à l’aide du logiciel SIGMA/W et du modèle élasto-plastique, EP. Les équations du modèle EP sont plus simples que celles du modèle Cam-Clay modifié, CCM, qui s’appliquent difficilement pour des conditions non-saturées; le modèle EP a donc été choisi pour la simulation de cet essai en conditions non-saturées. La phase de transition entre la sédimentation et la consolidation n’a pas été simulée; la simulation a débuté au palier 1 : contrainte appliquée au sommet de l’éprouvette P0 = 7 kPa, hauteur h0 = 19,9 cm et indice des vides e0 = 0,76. La colonne de résidus miniers a été modélisée en conditions axisymétriques avec une largeur de 5 cm et une hauteur de 19,9 cm (figure 5.12). Le modèle est composé de 2000 éléments de 0,05 cm de largeur et de 0,1 cm de hauteur (figure 5.12). La simulation des étapes de chacune des trois phases analysées (chargement axial (phase I), succion ψ croissante (phase II) et compression sous succion constante (phase III)) durent entre 3h pour les paliers où ψ = 0 kPa et 300 heures pour les paliers où ψ = 73 kPa de manière à laisser le temps aux pressions interstitielles et aux TEV de se stabiliser. Les deux parois verticales ont été fixées en x (déplacements horizontaux nuls). La base a été fixée en x et en y (déplacements horizontaux et

verticaux nuls). Une contrainte normale a été appliquée au sommet de l’échantillon pour simuler le chargement par palier (figure 5.11a). Une pression hydraulique a été imposée à la base de l’éprouvette de manière à permettre le drainage pendant la phase de chargement axial et d’imposer la succion pendant les phases de succion croissante et de compression sous succion constante (figure 5.11b). Les conditions frontières imposées dans le modèle sont illustrées à la figure 5.12c.

Figure 5.12: (a) Géométrie, (b) maillage et (c) conditions frontières pour la simulation de l’essai de compression de résidus miniers non saturés dans une colonne instrumentée (essai 13 de Essayad, 2015) (simulation SP2 avec le modèle EP).

La cohésion effective, c’, est nulle, car les résidus étudiés sont pulvérulents et non-plastiques; le code SIGMA/W calcule la cohésion apparente en conditions non saturées en fonction de la succion et de la CRE (équation 2.66, section 2.4.2.4). L’angle de frottement interne des résidus miniers, ϕ’, est fixé à 38° (Grimard, 2018). Le poids spécifique saturé, γsat, est de 19,6 kN/m3 (calculé à partir de l’indice des vides initial (e0=0,76) et de la densité relative des grains (Dr=2,755) des grains (Essayad, 2015). Trois relations ont été considérées dans les simulations pour le module de Young, E1, E2 et E3 (figure 5.13). La première, E1, présente les valeurs de E calculées ici selon les équations 2.24 et 2.25 pour chacun des paliers de l’essai de compression 13. Les déformations verticales ont été calculées avec les propriétés du palier 1 comme propriétés initiales (H0 = 19,9

cm). La fonction E2 présente une régression linéaire des différentes valeurs de E associées à la fonction E1. La fonction E3 est obtenue à partir de la relation 4.2 qui est une régression linéaire des valeurs de E des 3 essais de compression A, B et C présentés à la section 4.2.4). Le tableau 5.5 résume les paramètres utilisés dans l’analyse numérique.

Figure 5.13: Fonctions E1, E2 et E3 utilisées pour définir le module de Young selon la contrainte verticale effective, σ’v, pour les simulations de l’essai de compression sur des résidus miniers non saturés dans une colonne instrumentée (essai 13 (Essayad, 2015); modèle EP).

Tableau 5.5: Paramètres utilisés pour la simulation de l’essai de consolidation de résidus non- saturés dans une colonne (modèle constitutif élasto-plastique) (simulation SP2).

R és idu s m inie rs

Propriété Valeur Source

Modèle de comportement Élasto-Plastique, EP -

Module de Young, E Selon la fonction E1, E2 ou E3

Essai de compression 13 (Essayad, 2015)

Cohésion effective, c’(kPa) 0 -

Angle de frottement, φ' (°) 38 Grimard 2017

Coefficient de poisson, ν 0,275 (ν=(1-sinϕ’)/(2-sinϕ’))

Poids volumique saturé,

γsat (kN/m3) 19,6

Essai de compression 13 (Essayad, 2015) Conductivité hydraulique

saturée initiale, ksat 0 (m/s) 3×10

-7 Essai de compression 13

La courbe de rétention d’eau a été déterminée à l’aide des données expérimentales mesurées pendant l’essai 13 (Essayad, 2015) et du modèle descriptif de van Genuchten (1980) (figure 5.14; voir aussi section 2.2.3.1). Les données de l’essai 13 ne représentent pas la teneur en eau volumique à haute succion, mais comme la succion maximale a été imposée à 73 kPa il n’est pas nécessaire d’avoir une grande précision à des succions plus élevées. La conductivité hydraulique saturée initiale, ksat 0, est de 3×10-7m/s (Essayad, 2015). La fonction de conductivité hydraulique a été estimée au moyen du modèle de Fredlund et al. (1994) (section 2.2.4) dans le logiciel SIGMA/W (figure 5.15). La conductivité hydraulique minimale a été imposée à 10-14 m/s pour des raisons physiques (Fredlund, 2006) et de manière à minimiser les anomalies numériques (i.e. Bréard Lanoix (2017), Pabst (2011)).

Figure 5.14: Courbe de rétention d'eau des résidus miniers CM évaluée à partir des mesures pendant l’essai 13 de Essayad (2015).

Figure 5.15: Fonction de perméabilité des résidus CM, estimée à partir de la CRE mesurée pendant l’essai 13 et au moyen du modèle de Fredlund et al. (1994), mais avec une valeur minimale imposée (Fredlund, 2006).

5.1.2.3 Résultats numériques (simulation SP2)

La déformation verticale moyenne (εv=ΔH/H0) en fonction de la contrainte effective verticale, σ’v, simulée avec les fonctions E1, E2 et E3 est présentée à la figure 5.16. La simulation avec la fonction E1 reproduit bien les résultats expérimentaux de l’essai de compression 13 (usuellement moins de 1% d’écart). La simulation avec la fonction E2 donne également une bonne estimation des déformations mesurées (moins de 5% d’écart). La simulation avec la fonction E3 basée sur les résultats des essais de compression sur des résidus échantillonnés plus récemment (2016) induit des déformations significativement plus faibles (environ 30%) que ce qui a été observé au laboratoire lors de l’essai 13 de Essayad (2015). Il est à noter que la fonction E3 a été calculée pour des résidus saturés et plus grossiers que ceux utilisés par Essayad (2015). Le tableau 5.6 présente la déformation finale de l’éprouvette simulée dans chacune des analyses ainsi que la différence associée avec les résultats expérimentaux.

Figure 5.16: Déformation verticale moyenne, εv, expérimentale et simulée en fonction de la contrainte effective verticale, σ’v, pendant les phases I, II et III pour des résidus miniers de la mine CM soumis à des essais de compression dans une colonne instrumentée, avec succion contrôlée (essai Essayad, 2015; modèle EP).

Tableau 5.6: Déformation finale de l’éprouvette obtenue expérimentalement et numériquement pour l’essai 13 sur des résidus miniers CM dans une colonne instrumentée (essai de Essayad (2015); modèle EP). Essai de compression 13 Analyse numérique (EP) E1 Analyse numérique (EP) E2 Analyse numérique (EP) E3 Déformation totale de l’éprouvette 0,090 0,090 0,094 0,066 Différence* - 0,46% 4,38% 29,73%

*Différence = (|Exp – Num|/Exp) ×100%

La teneur en eau volumique, θ, simulée varie entre 0,39 et 0,25 entre le début et la fin de l’essai 13 et la teneur en eau volumique expérimentale varie entre 0,40 et 0,25. La teneur en eau volumique simulée reproduit donc bien les résultats expérimentaux de l’essai de compression 13 (figure 5.17). Les teneurs en eau volumiques obtenues au cours des simulations avec les fonctions E1, E2 et E3

sont identiques. Les petites déformations simulées et enregistrées au cours de la phase III entraînent des variations de teneur en eau volumique très faible (< 0,01).

Figure 5.17 : Teneur en eau volumique, θ, expérimentale et simulée en fonction de la contrainte effective verticale, σ’v, pendant les phases I, II et III de l’essai 13 sur des résidus miniers CM (essai de Essayad, 2015 ; modèle EP).

Dans les simulations numériques, l’augmentation des contraintes appliquées, Δσv, a été initialement entièrement reprise par la pression interstitielle, Δu, suite au chargement axial (phase I, paliers 2 à 5) (figure 5.18), tel qu’attendu selon la théorie de la consolidation en conditions saturées (section 2.3.1). Les surpressions se sont ensuite progressivement dissipées; le temps de dissipation correspondant à 90% de Δu simulé était d’environ 0,45 heure pour le palier 2 et de 0,14 heure pour le palier 5 (figure 5.18a). Le temps de dissipation des surpressions interstitielles mesuré au laboratoire n’a pas été rapporté par Essayad (2015) pour la phase de chargement initial.

Figure 5.18: (a) Pression interstitielle, u, et (b) contrainte effective verticale, σ’v, simulées en fonction du temps durant la phase I de chargement axial (essai de 13; paliers 2 à 5, Essayad, 2015; modèle EP).

La durée des paliers de la phase II avec augmentation de la succion pour P = 70 kPa ( paliers 6 à 15) a été allongée dans les simulations (et durant l’essai) à mesure que la succion simulée augmentait afin que les pressions interstitielles et les teneurs en eau volumiques, θ, aient le temps de se stabiliser (figure 5.19). Les pressions interstitielles simulées se sont stabilisées en un peu plus de 3 heures pour le palier 7 (ψ = 5 kPa), environ 8 heures pour le palier 13 (ψ = 60 kPa) et environ 55 heures pour le palier 15 (ψ = 73 kPa); les temps correspondants mesurés sont respectivement de 7 h, 110 h et 180 h durant l’essai (Essayad, 2015). La stabilisation des pressions interstitielles semble donc plus rapide dans les simulations que ce qui a été mesuré et enregistré au laboratoire (entre 2 et 13 fois plus rapide). Il est à noter qu’un certain temps est généralement requis au laboratoire pour équilibrer la pression autour des capteurs de mesure.

Figure 5.19: Pression interstitielle, u, simulée en fonction du temps durant l’augmentation de la succion (phase II de l’essai de compression 13; (a) paliers 6 à 12 et (b) paliers 13 à 15) (Essayad, 2015); modèle EP).

Les surpressions maximales Δu simulées numériquement (maximum 0,8 kPa) au cours de la phase III de chargement sous succion constante (ψ = 73 kPa; figure 5.20) ne correspondent pas directement à la différence de contrainte appliquée, Δσv (entre 27 et 68 kPa pour les paliers 16 à 21). Les surpressions d’eau maximales Δu mesurées au laboratoire variaient entre 0,7 et 3,5 kPa (Essayad, 2015) et ne correspondaient pas non plus à la différence de contrainte appliquée Δσv. Comme les résidus n’étaient pas saturés (Sr ≈ 62% ) au cours de la phase III, on peut anticiper que l’application d’une contrainte Δσ entraîne une génération de surpression d’eau Δu et de surpression d’air Δua (Δσ = Δu + Δua) (Fredlund et al. (2012) section 2.3.4). Le modèle et la loi de comportement utilisés ne tiennent pas compte directement de ces deux aspects, ce qui pourrait expliquer que les surpressions d’eau simulées sont inférieures à la surcharge (le logiciel SIGMA/W ne permet pas de simuler les surpressions d’air). Les surpressions simulées qui ont augmenté quasi- instantanément après le chargement et se sont dissipées en environ 80 heures (figure 5.20). Les surpressions mesurées au laboratoire ont commencé à augmenter après environ 0,8 heure et elles étaient entièrement dissipées après 14 à 44 heures, donc plus rapidement que dans les simulations (figure 5.20a).

Figure 5.20: (a) Pression interstitielle, u, simulée et mesurée en laboratoire et (b) contrainte effective verticale, σ’v, simulées en fonction du temps durant le chargement sous succions constantes (Phase III, paliers 16 à 21) de l’essai 13 (Essayad, 2015; modèle EP).

Le logiciel SIGMA/W (Geo-Slope Int., 2016; avec le modèle de comportement EP) permet de reproduire assez bien la déformation de l’éprouvette lors d’un essai de compression en condition non-saturés (figure 5.16). Il permet aussi de reproduire les variations de teneur en eau volumiques associées à l’application d’une succion à la base de l’échantillon (figure 5.17). Les surpressions simulées sont du même ordre que celles observées au laboratoire (dont la précision est limitée), en conditions saturées et non saturées. Les simulations n’ont pas donné les mêmes vitesses de dissipation des surpressions interstitielles que celles observées au laboratoire. La précision des mesures et les limitations du modèle peuvent expliquer (en partie) ces écarts.

Le code Sigma constitue néanmoins un logiciel utile pour simuler et analyser le comportement de résidus miniers soumis à un chargement vertical progressif, en conditions saturées et (avec réserves) non saturées.

5.2 Simulations numériques de la consolidation de résidus saturés à