• Aucun résultat trouvé

Equation d équilibre des contraintes à l interface

B.4 Résultats expérimentaux

B.4.2 Comportement d une bulle dans le fluide à seuil

B.4.2.3 Equation d équilibre des contraintes à l interface

La présence du seuil de mise en écoulement modifie les conditions de croissance d une bulle ainsi que sa géométrie. Une modification de la loi de Laplace (B. 2) prenant en compte ses deux paramètres est envisagée. L équation de Laplace modifiée prend la forme :

− = � ( ) + � , (B. 15)

Où f, est une fonction dépendante de la contrainte seuil τs et de la sphéricité à identifier (équation (B. 15)). Pour analyser le problème, la solution analytique correspondant au problème développé ci-avant est utilisée et détaillée dans l annexe B.1). Une cavité sphérique de rayon interne a, centrée dans une sphère de rayon externe R, est soumise à une augmentation de pression interne P (Figure B. 25). Le matériau est considéré élasto-plastique parfait. L augmentation de la pression interne entraîne la formation d une zone plastifiée jusqu à r = rp.

Figure B. 25. Géométrie et chargement appliqué à la sphère sous pression (gauche) ; Progression de la zone plastique à partir de la surface intérieure (droite).

Dans le cas d une petite bulle placée dans un gel de Carbopol®, il n y a pas réellement d enveloppe externe, alors R >> a. D après les calculs développés en annexe, la plastification démarre en r = a lorsque la pression interne atteint tel que :

0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0 100 1000 Vb [µl] τs = 40 Pa τs = 27 Pa τs = 16 Pa s = b/a

74

= − � (B. 16)

Dans notre cas, cette pression critique devient égale à :

= � (B. 17)

L augmentation de pression au-delà de voit la zone plastifiée se développer jusqu à r = rp (Annexe B.1) :

= � [ + ln ] (B. 18)

Le rayon de la zone plastifiée augmente avec celui de la bulle, mais n est pas identifiable dans le gel de Carbopol®. Une adaptation de la formule de Laplace (équation (B. 3) est proposée en tenant compte des conclusions des expériences présentées dans la partie B.4.2.2. Les bulles ne conservant pas leur forme sphérique, une différence de pression moyenne liée à la tension de surface correspondant au sommet de la bulle est considérée. Cette équation (B. 19) est valable lors d une phase de croissance de bulle:

= + � (a) + � [ + ln ] (B. 19)

À l inverse, lors d une phase de décroissance de bulle, le seuil de mise en écoulement s oppose au retour à une pression interne plus faible. En phase de contraction l équation (B. 19) est modifiée :

= + � ( a

b²) − � [ + ln ] (B. 20)

La composante plastique des équations précédentes reprend le formalisme de la solution d une

cavité sphérique en expansion dans un matériau élasto-plastique parfait. Il faut intégrer, dans notre cas, le fait que les bulles dans le Carbopol® ne restent pas sphériques. La composante plastique doit donc intégrer une fonction de la sphéricité s. En première approche, une évolution linéaire est proposée en pondérant la composante plastique par le produit K.s, où K est une constante à identifier.

= + � (b ) +a . s. � [ + ln ] (B. 21)

Afin d évaluer simplement la part de chaque monôme de l équation, l application numérique suivante est proposée : une bulle de 2 mm de diamètre dans un gel de Carbopol® de seuil de cisaillement de 30 Pa. La tension de surface du Carbopol® est considéré égale à celle de l eau γ0 = 72,7 mN/m . Le gradient de pression lié à la tension de surface à l interface de la bulle avec le gel est de 72,7 Pa alors que la composante plastique serait supérieure à 20 Pa. Ces deux contributions peuvent assez facilement être de même ordre de grandeur. Par contre si la zone plastifiée devient très grande (rp >> a), la composante liée à la zone plastifiée devient vite prédominante.

Afin d ajuster le paramètre K équations (B. 19) et (B. 20)), une approche expérimentale est mise en œuvre. Une bulle est insérée dans un gel de Carbopol® de seuil connu puis de l air est injecté par pas de pression successifs (2 kPa). Lorsque la pression a atteint la valeur cible

75 consigne en pression est inversée. La pression est abaissée par pas successifs de 2 kPa pour revenir à la pression initiale P0. L expérience est menée sur bulles de tailles diverses insérées dans des gels de Carbopol® de seuils de mise en écoulement différents (26 à 101 Pa). Des bulles de différents volumes sont introduites, induisant des valeurs de sphéricité plus ou moins grandes, dépendant du seuil du gel de Carbopol®. L ensemble des conditions de ces essais est recensé dans le Tableau B. 8.

Tableau B. 8. Equation de Laplace modifiée - Protocole expérimental.

Sphéricité Volume Vb [µl]

Essai Seuil τs [Pa] Initiale Finale Initial Final

1 26 0,87 0,73 103,2 102,3 2 26 0,79 0,53 106,9 109,3 3 26 0,79 0,66 174,1 169,9 4 26 0,76 0,45 151,4 148,9 5 40 0,95 0,89 94,8 90,7 6 40 0,89 0,57 129,6 119,7 7 40 0,88 0,81 156,5 163,3 8 64 0,92 0,88 108,0 106,8 9 64 0,96 0,93 91,4 92,0 10 64 0,93 0,87 133,1 121,9 11 101 0,90 0,83 84,2 80,8 12 101 0,82 0,75 86,0 79,5

L évolution de la sphéricité en fonction du pas de pression, de ces 12 essais, est présentée Figure B. 26. Les phases de croissance de bulles correspondent aux courbes en trait plein. Lorsque la pression cible est atteinte, le retour à la pression de départ aboutit à des géométries de bulles différentes de celles des bulles initiales, cet effet est d autant plus marqué que le seuil du fluide est bas. Cette non réversibilité est en partie liée à l anisotropie de la croissance, visualisée par une large évolution de s, qui est plus importante lorsque le seuil du fluide est faible et/ou que la pression cible est forte. Une différence de pression statique entre le haut et le bas de la bulle peut expliquer le phénomène. La variation de sphéricité est moins importante lors de la phase de décroissance, peut-être en raison de l effet mémoire du fluide à seuil.

Dans les cas où s reste stable en croissance (pression cible faible et/ou bulle très sphérique au départ, seuil de cisaillement du fluide fort) une évolution sensible de s est notée lors de la phase de décroissance. Il est fort probable que la formation de la zone plastifiée autour des bulles soit à l origine de cette évolution puisqu au passage de la pression cible, un incrément de pression est « consommé » pour inverser le sens de plastification. L augmentation de volume lors de la phase de croissance est réalisée tout en conservant une valeur élevée de sphéricité, la zone plastifiée doit sensiblement avoir la même épaisseur tout autour de la bulle. Lors du retour à la pression initiale, le léger gradient de pression statique existant entre les parties haute et basse la bulle explique que le retour à la pression de départ ne permette pas de retrouver la forme initiale de bulle.

En revanche, lorsque la sphéricité a beaucoup évolué lors de la phase de croissance, le retour se fait avec une modification assez faible de la sphéricité. La croissance anisotropique de la bulle lors de la phase de croissance a créé une zone plastifiée de grande épaisseur au-dessus du haut de la bulle. Le retour à la pression cible s effectue principalement par une légère remontée du bas de la bulle où la zone plastifiée est de faible épaisseur, contrairement à la zone supérieure qui est « bloquée » par la zone plastifiée très épaisse développée lors de la phase de croissance. La géométrie de la zone plastifiée est paramétrée par le rayon plastique rp qui reste inconnu. Faut-il considérer que rp correspond à la dimension caractéristique du domaine (bord de la boîte… ou à une distance finie qu il reste à identifier ?

76 La géométrie de cette zone plastifiée dépend vraisemblablement du seuil et il est raisonnable de penser que des bulles au sein d un gel de Carbopol® avec un fort seuil de mise en écoulement créent des zones plastifiées de plus faible volume lors de leurs croissances.

Figure B. 26. Evolution de la sphéricité de bulle en fonction du pas de pression.

Expérimentalement, la mesure de Pext, pression au sein du fluide en dehors de la zone plastifiée n est pas directement accessible. Pour déterminer le paramètre K et évaluer rp, le produit Pint.Vt est analysé (Figure B. 26). Les paramètres K et rp sont ajustés pour rendre minimales les variations de ce produit par rapport à sa valeur moyenne durant toute la durée de l expérience (augmentation de pression interne puis retour à la pression initiale . Pour l ajustement, la tension de surface du Carbopol® est prise égale à celle de l eau. Cette optimisation conduit à obtenir K = 1,1. Cet ajustement est caractéristique de rp/a = 2. Le produit 2/3.K[1+3ln(rp/a)] vaut alors approximativement 7/3. Au final, l équation d équilibre des pressions modifiées proposée pour illustrer la phase de croissance est :

= + � (b ) + � s a (B. 22)

Lors de la phase de décroissance, l équation d équilibre des pressions modifiée devient :

= + � (b ) − � s a (B. 23)

L expérience réalisée permet d émettre une hypothèse quant à l importance du seuil et de la sphéricité sur l évolution de la pression interne d une bulle. )l apparaît que la présence du seuil de mise en écoulement s oppose à la croissance de la bulle lors de l augmentation de pression. À l inverse, lors de la diminution de pression, le seuil s oppose au retour au volume initial. Ce phénomène permet de mieux comprendre la non-réversibilité du phénomène, les bulles ne retrouvant pas leurs formes initiales après le retour à la pression initiale. Ce constat est à rapprocher des effets de rémanence cités par la bibliographie lors d écoulements dans les fluides à seuil qui conduisent à des problèmes de répétabilité des mesures (plastification locale au contact de la bulle ou sphère mentionnée par [108–112,135]

).

0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0 1 1,1 1,2 1,3 1,4 1,5 1,6 1,7 1,8 1,9 . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa . τ = Pa s = b/a Pint / P0

77 Cependant, l importance du terme prenant en compte l effet de seuil dans l équation de Laplace modifiée est relativement faible de l ordre de quelques dizaines de Pascal comparativement aux autres pressions en jeu (par exemple Patm≃ 105Pa . La présence d’un seuil de mise en écoulement au sein du fluide permet donc l’immobilisation de bulles, mais son influence sur les niveaux de pression mis en jeu semble assez faible. La répétition de cette expérience avec un dispositif plus précis (mesure du volume et de pression améliorée) permettrait de quantifier plus précisément l’influence du seuil sur la relation de pression autour d’une bulle. Ce développement constitue une perspective intéressante de ces travaux préliminaires.