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Environnement et ressources naturelles

CHAPITRE 3 – GOUVERNANCE DU GOLFE DU SAINT-LAURENT : CONTEXTE NATIONAL

3.1 Fédéralisme canadien

3.1.1 Environnement et ressources naturelles

La protection de l’environnement et la gestion des ressources naturelles sont aujourd’hui deux domaines d’action publique importants au Canada. Toutefois, la répartition historique des pouvoirs et l’évolution de ce partage au fil du temps se sont faites de façon bien différente selon le domaine.

Les préoccupations environnementales contemporaines ont fait leur entrée dans la sphère publique et la scène internationale à partir des années 70. Les enjeux environnementaux, tels qu’ils sont aujourd’hui construits, n’étaient donc pas conceptualisés comme étant des problèmes de politiques publiques lors de l’élaboration de la constitution en 1867 (Brown et autres, 2009; Inwood et autres, 2011). Par conséquent, les pouvoirs législatifs en matière d’environnement n’ont pas été explicitement répartis par la constitution. C’est plutôt la pratique des parlements provinciaux et du parlement fédéral ainsi que les jugements des cours qui ont peu à peu permis de définir la place des deux ordres de gouvernements dans la résolution des problèmes environnementaux (Morton, 1996).

Au début des années 70, la problématique environnementale était principalement conceptualisée comme étant un problème de pollution (Dryzek, 2005). Dans l’arène politique, la problématique a été construite comme étant un enjeu de santé publique, une compétence provinciale (Morton, 1996). Bien qu’aucune province n’ait eu de ministère de l’Environnement avant 1970, plusieurs d’entre elles ont adopté des lois et des règlements visant à s’attaquer à des problèmes

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environnementaux locaux dès les débuts de la fédération (Ibid.). Les gouvernements provinciaux ont par conséquent été les premiers à réguler la protection environnementale. Ils ont donc eu prééminence de façon générale dans le domaine environnemental. Les compétences qui leur sont constitutionnellement dévolues leur ont permis d’étendre la régulation environnementale pour s’attaquer à de nombreux problèmes tels que la pollution de l’eau, de l’air et la gestion des matières résiduelles. Voici une courte liste des compétences relevant des provinces canadiennes et qui touchent l’environnement : les institutions municipales, les matières d’une nature purement locale ou privée, les droits civils, le droit de propriété ainsi que l’aménagement, la conservation et la gestion de la production d’énergie électrique (Brun et autres, 2008).

En outre, il faut spécifier que les gouvernements provinciaux ont souvent délégué certains pouvoirs et certaines responsabilités à des gouvernements locaux ou régionaux, notamment en matière de traitement des eaux usées, d’aménagement du territoire ou de gestion des matières résiduelles. Ces entités légalement distinctes n’ont pas de pouvoirs reconnus par la constitution et donc les pouvoirs qui leur sont délégués peuvent varier selon la province (Brown et autres, 2009). Comme ils ont une certaine autonomie relativement aux domaines de politiques publiques qui leur sont confiés, ils doivent être considérés comme un palier supplémentaire dans la gouvernance environnementale canadienne (Sancton, 2012).

À l’opposé des provinces, la capacité du fédéral à légiférer dans le domaine de la protection de l’environnement a été limitée entre autres par son intérêt tardif pour la problématique (Morton, 1996). Les provinces ayant déjà pour la plupart investi le domaine, le fédéral a dû s’en accommoder et occuper une place plus restreinte. En outre, deux des principales compétences fédérales en matière d’environnement, la réglementation du trafic et du commerce ainsi que le principe de paix, l’ordre et le bon gouvernement (POBG), ont d’abord été interprétés par les cours de justice de façon restrictive (Ibid.). Le jugement de la Cour suprême du Canada en 1988 dans l’affaire Reine contre Crown Zellerbach Canada Ltd a cependant considérablement élargi la portée de la compétence de POBG. À la suite de ce jugement, cette compétence, d’abord applicable aux situations d’urgence, a été étendue pour s’appliquer aux enjeux d’intérêt national. Dans les années qui ont suivi, le fédéral a adopté plusieurs lois à large spectre dans le domaine de la protection de l’environnement tel que la Loi canadienne sur la protection de l’environnement et la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Il en résulte que ce domaine d’action publique

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est caractérisé par un niveau élevé de chevauchement dans les compétences provinciales- fédérales. Par conséquent, les politiques publiques dans ce domaine nécessitent une coopération intergouvernementale (Morton, 1996). En ce qui a trait à la protection de l’environnement marin, cette problématique plus spécifique a été abordée particulièrement par le fédéral comme il sera expliqué plus loin.

Alors que les problèmes environnementaux contemporains n’étaient pas encore construits comme des enjeux publics à la fin du 19e siècle, la gestion des ressources naturelles était déjà une préoccupation qui prenait de l’ampleur (Dryzek, 2005). Le partage constitutionnel des pouvoirs a donc abordé cet enjeu et réparti les compétences sur celui-ci entre le fédéral et le provincial. La lecture des articles 91, 92 et 92A de la loi constitutionnelle de 1982 permet ainsi de constater que la majorité des pouvoirs en ce qui a trait à ce domaine de compétence ont été réservés aux provinces. L’article 92A précise ainsi que les ressources naturelles non renouvelables et les ressources forestières sont des compétences exclusives des provinces sur leur territoire. La seule exception notable étant les pêcheries des côtes de la mer et de l’intérieur qui sont suivant l’article 91, la compétence exclusive du gouvernement fédéral. Cependant, le fédéral, comme il a déjà été mentionné, détient la compétence ayant trait au trafic et au commerce. Dès lors que les ressources sont exportées, celui-ci obtient donc un certain pouvoir de régulation et de taxation sur les ressources (Romanow, 1985). Comme c’est le cas pour de nombreuses ressources naturelles au Canada, il n’est pas étonnant de voir que le gouvernement fédéral est relativement présent dans ce domaine.

En somme, il faut comprendre que la protection de l’environnement et la gestion des ressources naturelles sont de façon générale des domaines où la présence des gouvernements provinciaux est plus forte que celle du fédéral. Ce dernier a toutefois su se tailler une place dans ces deux matières au fil du temps. En ce qui concerne l’environnement marin, la situation est par contre très différente comme permet de le constater la sous-section suivante.

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