• Aucun résultat trouvé

Le premier emploi est défini comme la première occupation de l´enquêté, indépendamment du nombre d´heures de travail, de la rémunération ou du fait d´être déclaré ou non. Pour observer comment se passe cet événement, en termes de protection du travailleur, nous avons séparé les résultats en trois catégories : premier emploi quel qu´il soit (total des deux : formel plus informel), premier emploi formel, premier emploi informel. Cette section prend aussi en considération le sexe, les trois générations étudiées et la situation quant à l´émigration. Dans le but de rendre la population plus homogène, trois groupes ont été formés en fonction de la situation migratoire: 1) les gens qui sont nés à Manaus et les émigrés qui y sont revenus, si le premier emploi de ce migrant a été obtenu avant la première migration; 2) les immigrants présents à Manaus avant l´âge de 12 ans qui représentent les immigrants qui ont fait leurs études à Manaus et auraient des caractéristiques très proches de celles de la population de Manaus; et 3) les immigrés âgés de plus de 12 ans, ceux que sont arrivés à Manaus après l´âge de 12 ans et les émigrés revenus, si le premier emploi a été obtenu après le retour à la ville de Manaus.

On note que la proportion de migrants enquêtés qui ont eu un premier emploi à Manaus est bien inférieure à celles des habitants de la ville ; c´est-à-dire que les immigrants qui arrivent ont déjà travaillé en dehors de Manaus. La proportion d´hommes est inférieure à celle de femmes, et la génération ayant le plus grand nombre de personnes enquêtées qui sont entrés dans la vie active à Manaus est plus jeune (née entre 1974 et 1983). On observe également que les hommes obtiennent leur premier emploi avant les femmes, à un âge qui varie entre 13 et 17 ans, tandis que pour les femmes, l´âge varie de 16 à 23 ans. Par rapport à la situation migratoire, on observe que les femmes immigrantes qui sont arrivées à Manaus après l´âge de 12 ans ont un âge moyen d´entrée dans la vie active supérieur à celui des femmes des autres catégories migratoires. Il se passe la même chose avec les hommes de cette catégorie.

Quant à l´insertion dans les secteurs de travail formel et informel, on peut remarquer que l´informalité prévaut pour le premier emploi des personnes enquêtées : 53,7% des premiers emplois pour les habitants originaires de Manaus appartiennent au secteur informel. Mais les immigrants ont présenté un pourcentage encore plus élevé dans le secteur informel : 62,3%. Quant au sexe, les hommes se sont révélés comme étant du

secteur informel en proportion supérieure à celle des femmes, avec 60%, tandis les femmes ont présenté un taux de 50,9%. Selon le groupe générationnel, on observe une grande différence par rapport à la génération la plus jeune (1974 - 1983) qui a présenté un taux de 70,2% d´informalité, tandis que la génération avancée (1951-1963) a présenté un taux de 50,9%. On en déduit que l´accès au premier emploi formel a chuté avec le temps, quand on compare la première génération étudiée avec la dernière.

Quant aux caractéristiques de niveau scolaire des personnes enquêtées au moment de l´obtention du premier emploi, on peut observer le faible niveau de scolarité à l´entrée dans le premier emploi. Beaucoup sont entrés dans la vie active avant de conclure leur trajectoire scolaire et ont continué leurs études en partageant leur temps entre travail et études. Les plus grandes proportions de personnes enquêtées ayant 8 années d´études ou plus ont été présentées par le groupe de personnes qui avaient immigré après l´âge de 12 ans (34,3%) ; les habitants originaires de Manaus et ceux revenus, d´une part, et les personnes ayant immigré avant l´âge de 12 ans, d´autre part, ont présenté des pourcentages de 32,5 et 31,0%, respectivement.

En ce qui concerne la situation familiale des personnes enquêtées à l´occasion du premier emploi, on constate que 85,4% des habitants originaires de Manaus vivaient avec leurs parents au moment de l´obtention du premier emploi. Cette proportion s´est montrée bien inférieure pour les immigrants arrivés après l´âge de 12 ans (60%), comme on pouvait l´imaginer, étant donné que de nombreux immigrants adultes arrivent et vivent seuls, sans être accompagnés par leurs parents. La proportion de pères décédés s´est révélée supérieure à celle des mères décédées, au moment de l´obtention du premier emploi, ce qui est pertinent, étant donné que la mortalité masculine est plus élevée. La proportion de personnes enquêtées qui, à l´occasion du premier emploi à Manaus, étaient le principal pourvoyeur économique de leur ménage, a été supérieure pour les immigrants arrivés après l´âge de 12 ans : 23,7% pourvoyaient aux dépenses du foyer avec le revenu du premier emploi à Manaus, contre 11,2% pour les habitants originaires de Manaus, et 4,7% pour les immigrants arrivés avant l´âge de 12 ans . Ce fait peut être mis en rapport avec l´entrée en union, le décès du père ou de la mère, ou, pour les habitants originaires de Manaus, l´entrée dans la vie active, en vertu du fait que beaucoup d´entre eux ont de la famille à Manaus et que, pour cette raison, ils seraient peut-être moins sujets à être les principaux pourvoyeurs de la famille.

Quant à la situation matrimoniale, les immigrants arrivés après l´âge de 12 ans ont présenté une plus grande proportion de personnes enquêtées qui étaient en union ou avaient déjà eu au moins une union (31,4%), tandis que les habitants originaires de Manaus ont présenté une proportion de 15,5% et les immigrants arrivés avant l´âge de 12 ans ont présenté une proportion de 7,1%. En ce qui concerne la présence d´enfants, une grande partie des personnes enquêtées n´avaient jamais eu d´enfant quand ils commencèrent à travailler : 88% des habitants originaires de Manaus, 90,7% des immigrants arrivés avant l´âge de 12 ans et 76,3% des immigrants arrivés après l´âge de 12 ans. La plus grande proportion de personnes enquêtées ayant un ou plusieurs enfants a été celle des immigrants arrivés après l´âge de 12 ans, avec 23,7%.

À propos de l´intensité de l´entrée dans la vie active, la fonction de survie estimée pour la population enquêtée de 7 à 30 ans révèle qu´à l´âge de 18 ans, 69% de la population était déjà entrée dans la vie active, ce qui montre une grande intensité de travail dans cette tranche d´âge. À l´âge de 20 ans on estime qu´à peine 25% des personnes enquêtées n´étaient pas entrées dans la vie active et ceci jusqu´à 30 ans. Les estimations du modèle montrent que les hommes sont en plus grande proportion que les femmes à être entrés dans la vie active à l´âge de 18 ans : près de 78% des hommes contre 60%

des femmes au même âge. Le calendrier d´entrée dans la vie active des hommes reste plus intense que celui des femmes à tous les âges. Environ 14% des femmes n´ont pas vécu cette situation avant l´âge de 30 ans, c´est-à-dire qu´elles n´ont jamais travaillé ou ont toujours eu des “activités au foyer” ; alors que pour les hommes, ce pourcentage a été de 6%. Par rapport aux générations étudiées, la génération avancée, celle née entre 1951 et 1963, a montré une plus grande précocité : à l´âge de 18 ans, 63% des individus de cette génération étaient déjà entrés dans la vie active. Pour les personnes nées entre 1964 et 1973, la proportion était de 65%; et pour la génération la plus jeune (née entre 1974 et 1983), 70% étaient déjà entrées dans la vie active à cet âge. À partir de 18 ans, les deux générations plus jeunes (1964-1973 et 1974-1983) ont présenté les plus grandes proportions de personnes qui étaient entrées dans la vie active.

Pour comprendre les principaux facteurs qui influencent l´entrée dans la vie active, on a utilisé des modèles de régression logistique pour le risque d´entrer dans la vie active chaque année pour les âges de 7 à 30 ans. La population sujette au risque était constituée par toutes les personnes enquêtées qui n´avaient jamais connu cet événement, immigrants et non immigrants. Pour la population née à Manaus et les immigrants

arrivés à l´âge de 7 ans, cet âge est le point initial ; pour les immigrants arrivés après l´âge de 7 ans, le point de départ est l´année d´arrivée dans la ville de Manaus ; et pour toute la population, l´année de fin d´analyse est l´âge de 30 ans ou l´âge d´émigration hors de la ville. Les immigrants arrivés à Manaus sans être entrés dans la vie active et qui ont ensuite émigré à nouveau sans avoir connu cet événement ont été maintenus dans le modèle le temps qu´ils ont été sujets à cet événement à Manaus, bien que cet événement soit arrivé hors de la ville de Manaus. Il en est de même pour les immigrants nés à Manaus et qui sont ensuite repartis. Tant qu´ils sont restés dans la ville sans entrer dans la vie active, ils ont été soumis au risque dans la ville de Manaus. Étant donnée l´impossibilité d´étudier l´entrée dans la vie active en dehors de Manaus, par le fait qu´on ne saurait connaître la représentativité de la population du lieu où cela se serait produit, ces immigrants n´ont donc pas été inclus dans les données du modèle. En effet, ils n´étaient plus soumis au risque d´entrer dans la vie active puisqu´ils étaient arrivés à Manaus avec une expérience antérieure de travail. Il en a été de même pour l´entrée dans la vie active dans le secteur formel et le secteur informel. L´événement est l´arrivée du premier emploi, c´est-à-dire n´importe quel travail, indépendamment des conditions, la déclaration de l´enquêté étant suffisante s´il considérait qu´il s´agissait de son premier emploi. On a pris en considération ce que l´enquêté a déclaré à propos de son travail et de ses conditions.

On observe que la chance d´obtenir un premier emploi est plus élevée pour les groupes plus jeunes. Par exemple, pour la tranche d´âge de 16 à 18 ans, la chance d´entrer dans la vie active est trois fois celle de la tranche d´âge de référence (7-11 ans). Ensuite, la chance tombe et devient 80% inférieure à celle de la tranche d´âge de référence. Pour l´entrée dans la vie active dans le secteur formel, la chance de connaître cet événement est plus grande que celle de la tranche d´âge de référence : lorsque l´âge augmente jusqu´à la tranche de 19 à 23 ans, il y a cinq fois plus de chances que l´entrée dans la vie active se produise. Dans le secteur informel, cette même tranche d´âge a présenté 64%

moins de chances de connaître cet événement. Par rapport à l´âge, les deux modèles utilisés (avec et sans la situation migratoire comme facteur explicatif) ont présenté des résultats similaires.

Les modèles utilisés pour l´entrée dans la vie active informelle et formelle se sont montrés significatifs quant au niveau scolaire pour les groupes ayant 11 ans d´études ou plus. Par rapport au groupe de référence - personnes enquêtées ayant jusqu´à 3 années

d´études -, le groupe ayant 11 années d´études ou plus a présenté environ 2 fois plus de chances d´entrer dans la vie active, pour les modèles 1 et 2. Outre l´âge et le niveau scolaire déjà cités, un autre facteur important est celui du début de la vie conjugale.

Dans les modèles 1 et 2, on peut observer que la chance d´entrer dans la vie active est doublée pour ceux qui commencent une vie conjugale. Le modèle 2 présente la variable

« situation migratoire », décrite antérieurement, et qui s´est montrée significative pour le groupe des immigrants qui sont arrivés à Manaus après l´âge de 12 ans. Ce groupe a 64% plus de chances, chaque année, d´entrer dans la vie active par rapport à la catégorie de référence qui est celle des habitants originaires de Manaus.

Quant au risque d´entrée dans la vie active directement dans le secteur formel à Manaus, le modèle montre que hormis l´âge, la variable génération qui cherche à homogénéiser la population du point de vue du temps, supposant que les conditions contextuelles économiques propres à chaque génération aient été les mêmes, est également significative. On note que la génération la plus jeune, celle née entre 1974 et 1983, a présenté 50% plus de chances d´entrer dans la vie active directement dans le secteur formel que le groupe de référence qui est celui de la génération née entre 1951 et 1963 ; et les deux modèles ont présenté des résultats très semblables. Comme cette variable ne s´est montrée significative que dans l´étude de l´entrée dans un emploi formel, on en déduit que la formalité est en rapport avec le contexte, qu´il soit économique ou juridique (droit du travail) qui change de génération en génération.

Parmi les facteurs qui influencent l´entrée dans la vie active directement dans le secteur informel, il y a l´âge (modèles 1 et 2) dont l´augmentation diminue les chances d´occurrence de cet événement, ce que signifie que le secteur informel absorbe une grande partie des jeunes de 12 à 15 ans, qui présentent 3,8 et 3,4 fois plus de chances d´entrer dans le secteur informel que la catégorie de référence (modèles 1 et 2, respectivement). Le niveau scolaire également s´est montré significatif pour le groupe ayant 11 ans ou plus, qui a présenté un risque 3,1 et 3,4 fois plus élevé que pour la catégorie de référence (modèles 1 et 2, respectivement). En plus de ces variables, le modèle 1 a montré que la variable « début de vie conjugale » était significative, avec 2,2 fois plus de chances d´entrer dans la vie active dans le secteur informel que ceux qui n´avaient jamais vécu d´union.

Dans le modèle 2, qui inclut la situation migratoire comme variable explicative du risque d´entrer dans la vie active directement dans le secteur informel, cette variable

s´est montrée significative pour le groupe d´immigrants qui sont arrivés dans la ville de Manaus après l´âge de 12 ans. Ces derniers ont présenté 2,25 fois plus de chances d´avoir un premier emploi à Manaus dans le secteur informel que la catégorie de référence constituée par les habitants originaires de Manaus. Ainsi, le modèle 2 a montré que la chance d´entrer dans la vie active est moindre pour les personnes de plus de 19 ans, plus grande pour ceux ayant un niveau scolaire plus élevé et pour les immigrants qui sont arrivés après l´âge de 12 ans.

La dernière partie du chapitre montre l’insertion des personnes enquêtées dans la vie active. Les secteurs qui ont le plus absorbé la main d´oeuvre des jeunes à l´occasion du premier emploi ont été les services, l´alimentation, le logement et le transport, avec 32%, suivis par le secteur du commerce, avec 28,5%, et l´industrie de transformation, avec 20,5%. Selon la situation migratoire, on perçoit que parmi les trois principaux secteurs cités, seul celui de l´industrie de transformation a connu un changement significatif. Pour les immigrants, le pourcentage a été de 15,6%, bien inférieur aux 23,6% présentés par le groupe des habitants originaires de Manaus.

Quant à la position dans l´occupation, on peut constater que l´informalité prévaut à l´occasion de l´entrée dans la vie active, comme observé auparavant. Plus de 50% des personnes enquêtées ont eu leur premier emploi dans des entreprises de 1 à 15 employés. Pour les immigrants, on note que ce sont les entreprises de 2 à 5 employés qui employaient 32% des immigrants pour leur premier emploi. Les grandes entreprises ont employé 40% des personnes enquêtées à l´occasion du premier emploi. Ces proportions sont sans doute en rapport avec la question de l´informalité, car il laisse supposer que beaucoup de ceux qui sont employés dans des entreprises avec un employé sont ceux qui travaillent à leur propre compte ou bien que des petites entreprises maintiennent des employés sans Sécurité Sociale. En ce qui concerne le total d´heures travaillées, on a observé que 15% des personnes enquêtées ont déclaré travailler plus de 45 heures par semaine.

Prendre en considération les trois générations étudiées permet d´avoir une vision générale de l´insertion dans le marché du travail au cours du temps. À l´occasion de l´entrée dans la vie active, on peut observer que le secteur d´entreprises varie en fonction du groupe générationnel étudié. Le secteur des industries de transformation a employé 15,8% des personnes enquêtées de la première génération (1951 - 1963), tandis que pour la génération suivante, née entre 1964 et 1973, ce même secteur a employé

33,9% des personnes enquêtées, faisant de cette génération celle pour laquelle le secteur industriel de transformation a été le plus important. Les personnes enquêtées de la génération la plus jeune, née entre 1974 et 1983, ont été embauchées principalement dans le secteur commercial et celui de services, avec 31% et 33,3%, respectivement, de premier emploi dans ces secteurs.

La génération avec la plus grande proportion de travailleurs déclarés a été celle née entre 1964 et 1973 : 54,3%. Par contre, la génération la plus jeune a présenté le taux le plus bas, avec à peine 27,4% des personnes enquêtées qui ont été déclarées pour leur premier emploi.

En fonction de la taille de l´entreprise, on peut observer que la génération la plus jeune, née entre 1974 et 1983, a eu la plus grande proportion de personnes enquêtées embauchées dans des entreprises de deux à cinq personnes (31%) qui, additionnées aux entreprises d´une personne, atteint 46,5%, indiquant que l´insertion dans le premier emploi se produit principalement dans de petites et microentreprises, pour les personnes enquêtées de cette génération. La génération avec une grande proportion de personnes enquêtées dans des entreprises de plus de 50 employés a été la génération intermédiaire, née entre 1964 et 1973, avec 59,3% des personnes enquêtées qui ont eu leur premier emploi dans une entreprise de grande taille. Ce fait peut être en rapport avec la proportion de personnes enquêtées de cette génération qui ont eu leur emploi dans le secteur industriel de transformation, comme vu auparavant.

L´excès d´heures travaillées a été supérieur pour la génération avancée, née entre 1951 et 1963, avec 24% des personnes enquêtées de cette génération ayant déclaré travailler plus de 45 heures par semaine, à l´occasion du premier emploi. On en conclut donc que la génération intermédiaire (1964-1973), à l´occasion du premier emploi, a joui de meilleures conditions de travail, en termes d´heures travaillées et de moins d´informalité que les autres générations étudiées.

Chapitre 6 Analyse des trajectoires de travail : situations et

Documents relatifs