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6.C Enseignements générau

Au-delà des recommandations spécifiques des articles mentionnés ci-dessus, certaines lignes de force se dégagent des études empiriques, qui dépendent généralement de deux de paramètres-clés : la tarification automobile et la saturation dans les transports en commun.

6.C.1 Paramètre-clé n°1 : La tarification de l’automobile

Lorsque la tarification de l’automobile est insuffisante, il semble justifié de subventionner de façon élevée les transports en commun en heure de pointe. Les gains de bien-être proviennent alors essentiellement d’une réduction de la congestion (qui réduit également la pollution mais les gains de bien-être associés à la pollution sont moins élevés que ceux associés à la congestion). Dans ce cas de figure, les politiques à mener en heures creuses sont moins évidentes et dépendent des économies d’échelles de l’infrastructure et de sa capacité d’adaptation aux hausses du nombre de passagers. En revanche, si l’automobile est tarifée de façon optimale, la réduction du tarif des transports en commun semble bien moins efficace. En outre, la politique tarifaire à adopter dans un tel cas est moins évidente, au point que certaines études trouvent qu’il faudrait en augmenter les tarifs. Kraus (2012) montre ainsi théoriquement que, suite à l’introduction d’une tarification optimale de l’automobile et sous réserve que les transports en commun aient été précédemment tarifés en- dessous de leur coût marginal, il est optimal d’augmenter le prix des transports en commun et de diminuer le service (pour tirer le maximum des gains d’efficacité de l’automobile). Comme le résument Kilani et al. (2014) : “Une hypothèse cruciale dans la justification des subventions en heure

de pointe est que la voiture est tarifée en-dessous de son coût marginal social. Une fois que la tarification de la route corrige l’utilisation de la voiture en heure de pointe, les transports publics peuvent également être tarifés au coût marginal social. Quant à savoir si cela doit induire une hausse ou une baisse du prix des transports en commun, il n’y a pas d’unanimité au sein de la littérature”.

Small et Verhoef (2007, p. 160) estiment que “la faible élasticité-prix de l’utilisation du transit

(typiquement mesurée entre -0.3 et -0.4) affaiblit le premier argument avancé pour subventionner les transports en commun, à savoir les économies d’échelles. En effet, les résultats d’études portant sur des services de transports en commun privés suggèrent que des transports en commun non-

subventionnés sont déjà viables dans de nombreux marchés. Des simulations suggèrent qu’ils le seraient encore plus si la congestion et les places de parking étaient tarifées à un niveau proche de leur coût marginal social, et dans ce cas, l’autre argument pour les subventions (la diminution de la congestion routière) serait également affaibli, voire éliminé. Dès lors, la solution aux difficultés institutionnelles liées à la subvention des transports en commun pourrait être de laisser augmenter à la fois les prix des transports en commun et ceux des modes de transport alternatifs”.

6.C.2 Paramètre-clé n°2 : L’offre de transports et la saturation des transports en commun

D’une part, une hausse de l’offre de transports en commun à un niveau optimal semble réduire le besoin de les subventionner massivement. D’autre part une réduction des tarifs des transports en commun a d’autant plus de chances d’être efficace qu’elle est capable d’accueillir facilement les nouveaux passagers. Néanmoins, il est à noter que la plupart des modèles cités ci-dessus ne considèrent que de façon partielle l’impact de l’affluence dans les transports sur le bien-être total. Bien que certains de ces modèles intègrent, théoriquement, la capacité des réseaux de transport à réduire les temps d’attente des voyageurs, ou les temps de montée et de descente des wagons, la plupart ne les prennent finalement pas directement en compte au moment de l’estimation, du fait d’un manque de données. En outre, ces contributions négligent un paramètre important : la saturation au sein des transports en commun, qui augmente le coût généralisé des passagers. Haywood, Koning et Prud’homme (2017) estiment, ainsi, en étudiant les 14 lignes de métro de Paris, que, sans considérer les contraintes budgétaires des opérateurs de transports publics et sans considérer les externalités des autres modes de transport, une prise en compte appropriée de la congestion du métro (qui inclut des coûts généralisés de transports élevés pour les passagers) devrait aboutir à une tarification du métro supérieure de 72%. L’intégration explicite de tels phénomènes dans le coût généralisé des transports des modèles déjà mentionnés conduirait vraisemblablement à des niveaux de subvention optimaux plus faibles, voire à une augmentation du prix optimal des transports. 17

De Palma et al. (2017) constatent aussi que les coûts associés à la saturation des transports en commun sont élevés, singulièrement aux heures de pointe. Partant du constat qu’un certain nombre d’opérateurs pratiquent déjà des tarifs différenciés aux heures de pointe, ils en discutent les performances. La première difficulté a trait à la capacité des agents (singulièrement les travailleurs, le matin) à modifier leurs heures de départ et d’arrivée. Au-delà de cette difficulté, il semble que cette politique parvienne à réduire la saturation aux heures de pointe. L’effet d’une variation des tarifs serait d’ailleurs plus important lorsqu’ils sont augmentés aux heures de pointe que lorsqu’ils sont diminués aux heures creuses. Les deux autres mesures qu’ils discutent sont l’augmentation de la capacité de train et celle de leur fréquence. Comme cela a déjà été discuté ci-dessus, ce modèle théorique a été calibré pour la ligne A du RER parisien. Les résultats varient avec les scénarii considérés, mais il apparaît clairement que l’implémentation d’un tarif variable amène un gain de bien-être appréciable pour les utilisateurs.

17 Notons enfin que la présence de contraintes budgétaires élevées et de forts coûts d’opportunité d’utilisation

des fonds publics tend à augmenter le tarif optimal des transports en commun dans la majorité des contributions évoquées ci-dessus.