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Positionnement et enjeux

1.3 ENJEUX ECONOMIQUES, SOCIETAUX ET SCIENTIFIQUES

Dans cette partie, nous explicitons les enjeux économiques, sociétaux et scienti-fiques de notre recherche. Nous abordons ainsi la place des PME dans l’environ-nement économique français, les enjeux sociétaux relatifs à la transformation du travail induite par l’industrie 4.0 ainsi que les enjeux scientifiques concernant le pilotage industriel des PME.

1.3.1 ENJEUX ECONOMIQUES

Tout d’abord, les PME tiennent une place importante dans l’économie française, le Tableau 1 illustre la place que représentent les PME dans le paysage écono-mique français (Chevalier, 2014). Par exemple, les PME représentent plus de 3 500 000 emplois, et un CA cumulé supérieur à 755 milliards d’euros.

Grandes

en-treprises ETI PME

Microentre-prises

Tableau 1 : quelques chiffres concernant les PME françaises (Chevalier, 2014)

Plus de la moitié des ETI existantes aujourd’hui étaient des PME il y a 10 ans. Enfin, selon le baromètre export 2014 réalisé par Euler Hermès, 80 % des PME et ETI française avaient l’intention d’augmenter leur chiffre d’affaires à l’export en 2015.

Ainsi, les PME représentent un levier de croissance important pour la France. Ce-pendant, elles sont aussi en difficulté depuis 2009, elles accusent un taux de marge brute inférieure à 20 %, lorsque ce taux était à plus de 25 % avant la crise de 2008.

L’industrie 4.0 représente une part non négligeable de croissance. Selon la Com-mission européenne, le potentiel d’investissement annuel sur l’Union européenne serait de 91 milliards d’euros, soit 1 100 milliards d’euros d’ici 2030. Avec cette mobilisation des acteurs autour de l’industrie 4.0, les perspectives d’amélioration de la productivité sont proches de 30 % selon certaines études (Kohler and Weisz, 2015). Cependant, ces estimations sont à considérer avec prudence, car elles sont établies par des cabinets de conseil et d’experts, très optimistes sur la croissance

du numérique. La méthode utilisée pour ces calculs de prévision est tenue confi-dentielle et l’horizon de temps concerné laisse augurer quelques marges d’incer-titudes.

Cependant, même si 30 % et 1 100 milliards d’euros sont des chiffres optimistes, il n’en demeure pas moins que l’apport du numérique dans les entreprises reste un vecteur d’opportunités d’améliorations industrielles et de nouvelles proposi-tions de valeurs pour les entreprises.

1.3.2 ENJEUX SOCIETAUX

Tout comme les précédentes révolutions industrielles, les améliorations appor-tées en termes de productivité et/ou de proposition de valeur ont également leur lot de risques concernant la société. Par exemple, lors de la mécanisation des mé-tiers à tisser, le gain de productivité fut tellement important que de nombreux emplois disparurent puis se transformèrent en d’autres activités.

L’étude menée en 2013 par Frey et Osborn (2017) montre que 47 % des emplois aux États-Unis sont fortement menacés par la « digitalisation ». Pour ces auteurs, l’essentiel de l’emploi dans la production est menacé, mais aussi les fonctions ad-ministratives : acheteurs, logistiques, ventes, contrôleurs de gestion, etc. avec des conséquences importantes pour la classe moyenne. Pour arriver à ces chiffres, les auteurs considèrent que les tâches répétitives peuvent être automatisées, mais également les tâches non répétitives. Par exemple, des start-up se créées pour remplacer le métier de juriste tel que l’entreprise « ça crée pour moi », https://www.cacreepourmoi.fr/, qui permet de créer une entreprise directement en ligne. Jeremy BOWLES a appliqué la même méthode à l’Union européenne et arrive sensiblement aux mêmes chiffres, variant de 45 % à 60 % des emplois en fonction des pays (Bowles, 2014).

Autre risque important, la modification du travail en lui-même. Nous avons connu d’autres expériences traumatisantes pour les employés. Par exemple, la mise en œuvre des techniques issues du Lean Manufacturing peut avoir de grave consé-quence sur les employés lorsque ceux-ci sont mal maîtrisés par les donneurs d’ordre. Cadences imposées en écart par rapport aux possibilités réelles, techno-logies non fiabilisées avant exploitation par les employés, faire passer l’améliora-tion continue après les gains de productivité immédiats (Anact, 2013).

De même, l’industrie 4.0 risque de modifier en profondeur le travail des employés de demain dans les entreprises industrielles. Actuellement, il reste complexe de présager des modifications en question, peu d’études s’y attellent. Par exemple,

les travaux de Dombrowski et Wagner montrent qu’il y aura probablement un im-pact de l’industrie 4.0 concernant la relation entre le travailleur et le travail, ce-pendant les auteurs ne précisent pas les impacts et concluent qu’il est nécessaire de continuer à faire des recherches sur ce sujet (Dombrowski and Wagner, 2014).

L’usine sans hommes est actuellement « un épouvantail ». Plusieurs expériences ont été menées pour augmenter l’automatisation des chaînes de production (Kohler and Weisz, 2016). Par exemple, Toyota s’était fixé comme objectif de pro-duire plus de 10 millions de voitures par an, pour cela il visait à automatiser la fin de chaîne de production, là où ses principaux concurrents ne dépassaient pas 5 % d’automatisation, Toyota visait 25%. Ainsi, la responsabilité des salariés se limitait à l’approvisionnement des machines d’assemblage. Depuis 2009, Toyota a cepen-dant dû rappeler 3,8 millions de voiture pour un problème de frein et 6,4 millions de voitures pour un problème de fixation de volant et de siège. Depuis, l’entreprise fait marche arrière et réintègre l’Homme pour regagner en savoir-faire dans la fa-brication. Le numérique ne fait que renforcer le constat déjà établi qu’en impli-quant les opérateurs, ils peuvent mieux identifier les potentielles optimisations et les gisements de gains.

1.3.3 ENJEUX SCIENTIFIQUES

L’industrie 4.0 est un sujet qui concerne de plus en plus d’acteurs du monde aca-démique, comme le montre la Figure 4 qui représente le nombre de publications sur ScienceDirect répondant à la recherche « Industry 4.0 » par année. L’industrie 4.0 concerne l’implantation et l’exploitation d’un ensemble de groupes technolo-gique que nous détaillons au CHAPITRE 3 .

Figure 4 : Nombre de publications ScienceDirect répondant à "Industry 4.0"

En 1975, William J. ABERNATHY écrivait que le plus complexe se situe du côté de la diffusion et de l’exploitation des technologies innovantes plus que dans l’ingé-nierie (Abernathy and Townsend, 1975). L’un des enjeux de l’industrie 4.0 est d’ex-ploiter des technologies au sein des entreprises en adaptant les organisations et les métiers. Ce problème était déjà présent lors des précédentes implantations technologiques telles que le CIM (Vassell, 1999) et les ERP (Ahmad and Pinedo Cuenca, 2013) notamment.

Cependant, toutes ces évolutions technologiques ne signifient pas nécessairement une progression économique importante. Les coûts d’investissement dans l’indus-trie 4.0 sont importants, il est nécessaire de ne pas tomber dans le « paradoxe de la productivité » (Brynjolfsson, 1993; Skinner, 1986). Parmi les enjeux de re-cherche, il faut vérifier que les capitaux supplémentaires investis par les entre-prises sont à la mesure des retours sur investissements attendus. L’aspect économique de l’industrie 4.0 est un risque à lever et un intérêt à confirmer.

L’un des enjeux de notre recherche est de favoriser la diffusion et de transmettre l’intérêt de l’industrie 4.0 pour le pilotage industriel des PME.

Nous avons positionné ici notre travail de recherche dans le cadre du Génie indus-triel avec des liens d’intérêt pour les sciences de gestion et les sciences sociales.

Nous avons également montré les enjeux économiques, sociétaux et de recherche de notre étude.

Dans le chapitre suivant, nous détaillons les caractéristiques des PME et le pilotage industriel.

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