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CHAPITRE 2 REVUE DE LITT´ ERATURE

2.2 Conception de m´ ecanisme

2.2.3 Ench` eres

La th´eorie des ench`eres repr´esente un succ`es majeur dans la th´eorie de la conception des m´ecanismes, avec notamment l’incontournable m´ecanisme Vickrey [1961] - Clarke [1971] - Groves [1973] (VCG). Son principe consiste `a s´electionner une d´ecision globale qui maximise le surplus collectif. Le paiement mon´etaire d’un joueur donn´e est ensuite fix´e par le coˆut que sa pr´esence impute au surplus collectif des autres joueurs.

Par exemple, dans le cas d’une ench`ere d’un seul bien, le surplus est maximis´e lorsque ce bien est attribu´e `a l’acheteur A qui en attribue la plus grande valeur. De plus, parce qu’il est l`a, aucun autre acheteur n’a pu profiter du bien. Or, s’il n’avait pas ´et´e l`a, c’est l’acheteur B attribuant la seconde plus grande valeur au bien qui l’aurait eu. Le surplus collectif des

joueurs autres que A serait alors pass´e de z´ero `a la valuation du bien par l’acheteur B. Le coˆut que la pr´esence de A impute au surplus collectif des autres joueurs est donc ´egal `a la valuation du bien par l’acheteur B. C’est ce coˆut qui d´efinit le paiement du joueur A. Ainsi, au final, le bien ira au joueur A au prix de la valuation du bien par l’acheteur B. L’ench`ere VCG co¨ıncide alors avec l’ench`ere au prix du second acheteur d´ecrit par Vickrey [1961].

Outre l’aspect naturel selon lequel chacun doit payer le coˆut que sa pr´esence impute aux autres, l’ench`ere VCG peut se vanter des belles propri´et´es qu’elle poss`ede. Ainsi, par construction, elle a l’avantage de maximiser le surplus collectif. Mais de plus, et c’est moins ´

evident mais tout aussi important, le m´ecanisme VCG a l’avantage majeur d’ˆetre fortement honnˆete. Autrement dit, pour tout joueur, l’honnˆetet´e est une strat´egie dominante.

Si la maximisation du surplus collectif peut paraˆıtre int´eressante dans certains cas — par exemple, quand l’organisateur de l’ench`ere est l’´Etat d’un pays — elle n’est en g´en´eral pas l’objectif du vendeur. En effet, dans la plupart des cas, un vendeur cherchera davantage `a maximiser le profit qu’il tirera de l’ench`ere. Un r´esultat surprenant et fondamental prouv´e par Myerson [1981] affirme que, dans le cas d’un bien unique `a vendre, tout m´ecanisme maximisant le surplus collectif est ´equivalent en termes de revenus pour le vendeur pour des acheteurs rationnels. Ce r´esultat est connu sous le nom de th´eor`eme de l’´equivalence des revenus. Il dit que le profit d’un vendeur est le mˆeme, qu’il utilise un m´ecanisme VCG, une ench`ere au prix du premier acheteur (dit `a l’anglaise) ou encore une ench`ere o`u chacun paie ce qu’il mise, pourvu que les acheteurs jouent l’´equilibre de Bayes-Nash.

L’on pourrait alors croire que toutes ces ench`eres sont donc optimales pour un vendeur. Il n’en est rien. L’article s´eminal de Myerson [1981] met `a jour une astuce remarquable et ´

etonnante. Il prouve que, dans le cas d’un bien unique `a vendre, l’ench`ere qui maximise l’esp´erance de gains du vendeur n´ecessite de ne pas n´ecessairement vendre le bien `a celui qui le value le plus. Plus pr´ecis´ement, en fonction de sa croyance bay´esienne sur les acheteurs et des valuations r´ev´el´ees, le vendeur se doit de calculer les « valuations virtuelles » des acheteurs. L’ench`ere de Myerson [1981] consiste alors `a vendre le bien au vendeur annon¸cant la plus grande valuation virtuelle au prix correspondant `a la seconde plus grande valuation virtuelle6. Cette ench`ere a la qualit´e surprenante d’ˆetre `a ´equilibre honnˆete, et mˆeme, d’ˆetre l’ench`ere `a ´equilibre honnˆete garantissant la plus grande esp´erance de gains pour le vendeur. C’est en partie pour cette d´ecouverte que Myerson se verra d´ecern´e le prix Nobel en 2007.

L’optimalit´e de l’ench`ere de Myerson [1981] se fonde toutefois sur l’hypoth`ese de mono- tonicit´e des valuations virtuelles en fonction des valuations. Cette hypoth`ese d´epend de la nature de la croyance bay´esienne du vendeur. Il arrive donc qu’elle soit viol´ee. Pour adres-

6. Il y a une condition de plus : si la plus grande valuation virtuelle est n´egative, alors le vendeur doit ne pas vendre son bien.

ser ce cas, des techniques dites d’ironing peuvent ˆetre utilis´ees. Ces techniques consistent `a d´elimiter des intervalles tels que, en dehors de ces intervalles, les valuations virtuelles sont des fonctions croissantes. Si une valuation r´ev´el´ee tombe dans un des intervalles que l’on a identifi´e, l’ironing consiste `a tirer al´eatoirement une autre valuation dans ce mˆeme intervalle conform´ement `a la croyance bay´esienne du vendeur. C’est cette autre valuation qui est en- suite utilis´ee par le vendeur comme si elle ´etait la valuation r´ev´el´ee. Ce faisant, le vendeur peut alors s’assurer de la monotonicit´e des valuations virtuelles et d’obtenir un m´ecanisme `a ´

equilibre honnˆete (voir Parkes [2009], Hartline and Lucier [2010]). Le m´ecanisme de Myerson [1981] a ensuite ´et´e g´en´eralis´ee au cas `a plusieurs biens par Hartline et al. [2011] et Bei and Huang [2011]. Une revue plus compl`ete de la th´eorie des ench`eres est faite par Hartline [2013]. Il est int´eressant de noter que l’id´ee de l’ironing correspond a faire des modifications du m´ecanisme qui n’affectent pas n’importe comment les « formes r´eduites » du jeu bay´esien qu’elles induisent. Ces formes r´eduites correspondent en fait ni plus ni moins aux fonctions de retour associ´ees aux strat´egies honnˆetes, que nous introduirons dans le premier axe de cette th`ese. En particulier, l’ironing est une fa¸con de modifier les valeurs de fonctions de retour uniquement pour des actions qui empˆechaient les fonctions de retour honnˆetes d’ˆetre un ´equilibre de Bayes-Nash.

La belle th´eorie des ench`eres s’appuie toutefois fortement sur une hypoth`ese forte, `a savoir, l’aversion au risque des acheteurs et vendeurs. Cette hypoth`ese est appel´ee quasi-lin´earit´e, et correspond formellement `a l’´ecriture des fonctions d’utilit´e sous la forme u(x, t) = v(x) + t o`u x repr´esente les affectations des biens et t le transfert mon´etaire. S’il n’y a pas de transfert mon´etaire (comme dans le cas de la construction de quarts) ou si les joueurs ne sont pas neutres au risque (ce qui est souvent le cas en pratique), la plupart des r´esultats de cette th´eorie s’´ecroulent.

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