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5. PROPOSITION ET STABILISATION D’UN SYSTEME FRANCAIS D’EVALUATION DES TGCE

5.1. Eléments généraux et de contexte

Dans le cadre de la mise en application de la DCE en France métropolitaine, du fait de certaines difficultés spécifiques dont l’absence quasi-totale de situations de référence vraie sur tout notre territoire, la mise au point d’un système d’évaluation diatomique dédié aux très grands cours d’eau (TGCE) n’a été entreprise qu’assez tardivement, une fois que les systèmes d’évaluation dédiés aux cours d’eau plus petits, plus faciles à élaborer dans le respect des recommandations des documents-guides ECOSTAT et REFCOND, étaient mis en place et avaient déjà fait l’objet d’une intercalibration européenne.

A partir de son entrée en vigueur en Octobre 2000, la DCE a établi et mis en place un nouveau cadre conceptuel qui préside à l’objectif et à la façon d’évaluer plus judicieusement les écosystèmes aquatiques. Elle considère notamment qu’un milieu aquatique doit se révéler convenable, non uniquement pour les usages sociétaux qu’il porte, mais aussi et avant tout pour les compartiments biologiques qu’il héberge, qui doivent pouvoir y boucler normalement et sans problème particulier toutes les phases de leur cycle de vie. Cette Directive place donc les compartiments biologiques au centre du dispositif d’évaluation et définit un certain nombre de maillons-clés bio-intégrateurs jugés pertinents selon le type de masse d’eau à évaluer.

Parmi un ensemble de recommandations destinées à faire décliner dans la pratique cette nouvelle philosophie, la DCE a notamment demandé d’évaluer le degré d’altération de l’état écologique des hydrosystèmes soumis à des pressions anthropiques par écart au niveau de référence adéquat.

Cette construction méthodologique impose d’une part d’avoir repéré la trame naturelle permettant de définir des zones naturelles homogènes sur lesquelles il est possible d’appliquer le même système d’évaluation (ces zones homogènes, appelées hydroécorégions ou HERs, ayant le plus souvent fait l’objet d’un zonage géographique national basé sur différentes catégories de variables abiotiques influentes sur les caractéristiques naturelles des habitats). Elle implique d’autre part que la mesure du niveau d’altération subi sur un site donné se fasse par écart avec le niveau de référence adéquat donné par la méthode nationale sur cette zone. En pratique, ce niveau de référence découle d’un calcul de moyenne établi sur un assortiment de sites de référence internes à la zone considérée et jugés représentatifs de ses conditions naturelles, hors contexte mesurable de dégradation anthropique.

Pour les hydrosystèmes de petite, moyenne et grande taille, dans la mesure où il existait des situations de référence valides pour la zone naturelle concernée ou pour d’autres zones naturelles aux caractéristiques très comparables, l’application de ce principe de construction n’a pas posé problème, ou n’a nécessité que quelques aménagements à la marge pour conduire à la définition d’un cadre d’évaluation convenable. C’est pourquoi des dispositifs nationaux d’évaluation ont pu être assez rapidement proposés, puis intercalibrés. Cependant, par rapport aux cours d’eau plus petits, l’évaluation des TGCE de France, mais aussi des autres Pays-Membres, a posé une difficulté méthodologique supplémentaire, à savoir qu’il n’existe plus ou pratiquement plus, à l’échelle au moins de toute l’Europe de l’Ouest, de sites de référence valides sur des cours d’eau de cette échelle de taille, inévitablement soumis à des pressions anthropiques plus ou moins intenses, mais de toute façon omniprésentes.

Dans un tel contexte, l’évaluation des très grands cours d’eau va donc devoir se baser sur un niveau de référence par défaut (= least disturbed condition). Cette notion un peu vague et arbitraire est difficile à travailler à l’échelle d’un simple pays, d’autant que le niveau de référence par défaut qui serait choisi par différents pays et sur différents types de cours d’eau a toutes les chances de ne pas être homogène à l’échelle de l’Europe et de pouvoir être contesté, à la hausse comme à la baisse, par d’autres pays-Membres situés dans un contexte naturel, sociétal et économique différent.

Pour ce chantier, plutôt que de se baser uniquement sur une étude nationale, dont l’utilité est bien sûr incontestable, mais ne suffit pas pour garantir l’obtention à terme d’un visa de DCE-compatibilité, il valait mieux essayer de s’inscrire, selon une opportunité de circonstance, dans la réalisation d’un exercice européen d’intercalibration nouvellement programmé (sachant qu’il en avait déjà été réalisé un en 2011-2012, coordonné par le X-GIG « Large Rivers). Une telle opportunité permet d’aborder dans un cadre collectif la fixation d’un niveau de référence par défaut, défini autant que possible sur une base consensuelle par type européen de Très Grand Cours d’Eau, mais aussi d’obtenir des repères communs avec d’autres pays-Membres pour une déclinaison en classes de qualité, permettant au final le calage d’un système national dans un cadre garantissant d’emblée une évaluation plus cohérente d’un Pays-Membre à l’autre.

Dans les faits, même si l’intention initiale était de participer dès que possible à un nouvel exercice d’intercalibration TGCE à partir du moment où une telle opportunité se présenterait, l’adhésion à une telle opportunité était programmée dans le cadre de l’actuelle Fiche-Action Irstea-AFB « Amélioration des méthodes végétales d’évaluation en cours d’eau » 2016-2018, et pas de la fiche précédente 2013-2015.

Or l’organisation de cet exercice collectif, qui constituait par ailleurs une opportunité à saisir, s’est mise en place sans anticipation (réception d’un premier message circulaire à la mi-Juin 2015, sans qu’aucune annonce préalable d’organisation n’ait été circulée par l’UE un peu à l’avance) et a demandé une réactivité sans faille, en période estivale et à marche forcée, afin de collecter, formater et envoyer dans les temps les éléments et jeux de données demandés pour pouvoir participer effectivement à l’exercice (deadline en septembre 2015). L’inscription un peu impromptue à cet exercice a de fait bousculé les priorités de travail du moment et nécessité une ré-allocation de force de travail (permanents, CDD) consacrée en toute priorité à ce chantier, s’inscrivant malheureusement en compétition avec d’autres actions prévues dans le cadre de la même fiche-action, venant en désorganiser l’avancement et retarder la fourniture de certains autres livrables prévus (retards encore en cours de résorption actuellement). En effet, pour pouvoir respecter la deadline imposée pour une participation nationale effective, il a fallu très rapidement procéder à des investigations de données et fournir un jeu de données national comportant une sélection parmi les données existantes, la contrainte étant que ce jeu de données soumis à l’intercalibration UE reste représentatif de nos très grands cours d’eau et des gradients d’altération présents au niveau de la France. Cet état de fait a nécessité un travail approfondi et une prise de recul rapide sur les référentiels nationaux, et a aussi exigé un travail important de post-traitement de données géochimiques-hydrochimiques et géographiques afin de pouvoir typifier nos hydrosystèmes par rapport à des descripteurs typologiques du GIG non-utilisés au niveau national, donc présentant des difficultés de disponibilité.

Suite à ce travail estival, un premier jeu de données-test a pu être fourni le 15 Septembre 2015, accompagné de différents tableaux requis sur les sites, les relevés diatomiques et les données abiotiques collectées, ainsi que de notes techniques en langue anglaise permettant de décrire d’une part notre méthode indicielle nationale (IBD2007) et ses performances en termes de relations pression-impact, et d’autre part notre système national

d’évaluation proposé (qui n’avait pas encore d’existence réelle à cette date). Un jeu de données national officiel consolidé (sélection de 221 relevés acquis sur 99 sites différents), accompagné d’un complément d’informations descriptives complémentaires requises, a fait l’objet d’un 2ème et dernier envoi en date du 15-12-

2015.

La progression de notre prototype de dispositif national d’évaluation TGCE, en lien étroit avec le fonctionnement de l’exercice d’intercalibration et ses résultats d’étape, s’est ensuite faite au moyen d’échanges et d’itérations successives intervenues entre septembre 2015 et la mi-Juin 2016.

Le constat de résultats n’entrant pas dans les biais requis a ainsi conduit à plusieurs évolutions-ré-adaptations du prototype national de dispositif proposé pour la France, jusqu’aux derniers ajustements nationaux soumis en date des 16 et 17 Juin 2016 (deadline imposée par les organisateurs pour la fin d’exercice), après tenue d’une visioconférence de concertation finale avec la Direction de l’EAU et l’AFB/DAST.

Au final, l’exercice, qui a été considéré comme clos et agréé UE en Février 2018, a nécessité en tout une année complète (15 Juin 2015 - 21 Juin 2016) de contacts de travail très serrés incluant propositions ou fourniture Française de divers éléments dont jeu de données national initial ou amendé (cf. changements de typologie et de niveaux d’évaluation) – tests du GIG – réactions – envoi de questions ou remarques sur le plan méthodologique - nouvelles itérations, jusqu’à la version finale de dispositif jugée adéquate au sein de l’exercice. Ces échanges nécessitant une réactivité très importante au fil de l’eau ont atteint une capacité de travail de 1,6 à 1,7 plein-temps sur un an et ont représenté sensiblement plus de 2 pleins-temps en cumulé sur la durée, dépassant largement le volume de travail initialement prévu et financé sur ce chantier et empiétant sur les moyens prévus pour d’autres types actions.

Par rapport à la proposition initiale, les différentes versions modificatives de notre dispositif national ont à chaque fois été proposées sur sollicitation du GIG, en réaction par rapport à l’observation de résultats décalés dans le cadre de l’exercice d’intercalibration UE, qui auraient conduit à une intercalibration « non OK » pour la France. Tout en essayant de tenir compte de spécificités évidentes de certains de nos TGCE de France, qui semblent avoir très peu d’équivalent en Europe, mis à part sur de grands hydrosystèmes Italiens situés juste à l’aval de massifs montagneux, elles ont visé à ramener progressivement notre dispositif national vers une vision de l’état écologique plus partagée au niveau des Etats-Membres participants.

Du fait de ce mode de fonctionnement par itérations successives sur le mode « intercomparaison UE réadaptation nationale », et sans entrer dans tous les détails de la procédure suivie, la structuration de la suite du présent chapitre relatif à la proposition et à l’évolution de de notre système national a forcément été présentée de façon un peu linéaire et descriptive, se basant sur les différentes itérations et boucles de rétro- actions successivement réalisées.

5.2. Dispositif d’évaluation en vigueur, répercussions vis-à-vis des TGCE