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Synthèse bibliographique

1.4 Mécanismes de lésions du blast primaire

1.4.4 Effet d’une onde de choc simple

Lorsque les chercheurs se sont penchés sur l’étude de la compréhension des effets d’une onde de choc simple sur les animaux, c’est-à-dire une onde de type Friedlander, l’intérêt était d’appréhender l’influence des paramètres de l’onde (surpression, phase positive et front de choc) sur la réponse de l’animal.

1.4.4.1 Effet de la surpression et de la durée de phase positive sur les lésions

La première étude portant sur l’influence de la surpression et de la durée de phase positive sur la réponse de l’animal a été conduite par Richmond et al. en 1966 [1966]. Les expériences ont consisté à exposer le flanc des animaux placés contre une paroi à une onde de choc générée par un tube à choc ou un explosif. A l’aide des 204 chiens et 115 boucs exposés à une onde de 350kPa et de durée de phase positive comprise entre 15 ms et 400ms, ils ont pu déterminer la courbe (P, T) correspondant à 50% de survie, cette courbe étant similaire pour les deux types d’animaux testés. Un seuil lésionnel a aussi été trouvé à l’aide des 60 chiens exposés à une onde de 400ms de durée de phase positive dont la surpression variait de 60 à 250kPa. Dans le cas d’une onde de type Friedlander, la pression et la durée de phase positive, qui définissent aussi l’impulsion, semblent naturellement être des paramètres de choix liés à la survie de l’animal. Il apparaît que pour un même niveau lésionnel, une pression plus importante est nécessaire pour les courtes durées de phase positive que pour les longues. Cette tendance a aussi été observée par Vassout et al. [R117/96 1996] avec leurs travaux sur des moutons exposés à une charge explosive (durée de phase positive : 2 ms ; surpression : 100, 200, 300 et 400kPa), ainsi que par Dodd et al. [1991] avec des essais en tube à choc sur des moutons. Cela signifie que le critère de lésions est l’impulsion pour les courtes durées de phase positive et la surpression pour les durées de phase positive plus longues [Schardin 1950].

Cependant, les profils de pression générés par la détonation d’un explosif ou par un tube à choc peuvent être différents. En effet, lors d’expérimentations en tube à choc pour des longues durées de phase positive, la pression maximale reste constante sur plusieurs millisecondes, formant ainsi un plateau et ne peut donc pas être comparée à un Friedlander. De plus, lorsque les essais ont lieux dans un tube à choc clos, l’animal se trouvant

en bout de tube fait face à l’onde incidente, mais aussi aux multiples réflexions ayant lieu de part et d’autre du tube fermé, ceci peut donc conduire à des lésions plus importantes que si le tube avait été ouvert.

Richmond et al. [1968], en regroupant les différents essais (tube à choc et explosif), ont remarqué que la courbe de létalité des animaux de petite et grande taille est différente (Figure 1.22). En effet, pour une durée de phase positive de 2ms, on peut voir que 240kPa sont nécessaires pour atteindre une létalité de 50% pour les petits animaux, comme la souris, contre 1380kPa pour les grands animaux tel le mouton. Les petits animaux semblent donc avoir une tolérance plus faible face à une même menace que les grands animaux. Ces différences entre espèces peuvent être le résultat d’une différence de forme, d’organisation des organes internes et de leurs propriétés matérielles. Bass et al. [2008] rapportent que les grands animaux tendent à avoir une plèvre viscérale plus épaisse que celle des petits animaux, ce qui peut potentiellement augmenter leur tolérance pulmonaire face au blast. Ces expériences sur les grands mammifères ont ensuite été utilisées par Bowen pour extrapoler les résultats à l’homme à l’aide d’un modèle mathématique [Bowen et al. 1968], menant aux courbes bien connues de Bowen (Figure 1.23).

Figure 1.22 : Courbes de létalité à 50% pour les petits et les grands animaux exposés à un blast contre une paroi [White

1971]

D’autres études ont eu pour but d’exploiter les effets d’un paramètre d’une onde de type Friedlander sur la réponse physique du mammifère. Au lieu d’étudier la survie de l’animal, l’objectif a été d’examiner la pression interne et l’accélération thoracique. Ceci a été fait par Vassout et al. [SR 112/86 1986] sur des porcs exposés en champ libre à une onde de choc générée par un explosif dont la durée de phase positive était de 2ms et dont la surpression variait de 26kPa à 380kPa. Quelle que soit la surpression incidente, les auteurs n’ont observé aucune amplification de la pression aux interfaces paroi thoracique / parenchyme pulmonaire et parenchyme pulmonaire / cœur, ce qui est en accord avec les résultats de leur précédente étude [Vassout et al. SR 901/84 1984]. Néanmoins, cette observation semble invalider la théorie des environnements diphasiques, qui stipule une augmentation de la pression aux interfaces environnement diphasique / dense [Patz CO 204/85 1985].

Figure 1.23 : Courbes de Bowen pour différents pourcentages de létalité – Pour une personne contre une paroi. [Bowen

et al. 1968]

Dans cette même étude [Vassout et al. SR 901/84 1984], l’hypothèse de lésions pulmonaires causées par un écho du volume pulmonaire a été infirmée en vérifiant l’influence du volume pulmonaire sur les lésions pulmonaires des rats. Ces résultats sont en accord avec ceux obtenus par Jaegger et al. [1983] sur des moutons, où le protocole expérimental y était identique. Effectivement, aucun changement significatif n’a été observé sur les lésions pulmonaires dans les deux études. A partir de la mesure effectuée par les hydrophones, une augmentation du temps de montée du front de choc est visible. Plus celui-ci est placé en profondeur dans le porc, plus le temps de montée est grand [Vassout et al. SR 112/86 1986], ceci étant dû à un effet de filtrage au passage des différents tissus.

Concernant l’accélération, elle augmente avec la pression réfléchie sur la côte instrumentée, amenant à penser que le déplacement de la paroi thoracique peut être la cause des lésions pulmonaires superficielles [Vassout et al. R112/86 1986]. L’accélération a aussi été considérée dans des essais sur cochons réalisés par Cooper [1996], où les lésions pulmonaires se révélaient être proportionnelles au pic d’accélération de la paroi thoracique. Il trouva qu’au-dessus de 10000m/s², des lésions pulmonaires apparaissent. Cependant, la paroi thoracique du porc est différente de celle de l’homme d’un point de vue anatomique et donc géométrique, et les animaux étaient exposés sur le flanc. L’extrapolation à l’homme ne semble donc pas si évidente. De plus, si on analyse les enregistrements de l’accélération costale obtenus par Vassout et al. [SR 112/86 1986], une grande disparité des résultats est observée. Pour un même scénario, le pic d’accélération enregistré peut aller de 10800m/s² à 24400m/s². La reproductibilité d’un tel paramètre sur du vivant semble donc délicate et des précautions doivent être prises lors de la mise en place de ce genre d’étude.

1.4.4.2 Effet du temps de montée et du fractionnement de la surpression

La réponse biologique à une onde de choc présentant un temps de montée allant de l’ordre d’une dizaine de microsecondes à plusieurs centaines de millisecondes a été étudiée dans les années soixante [Richmond et al.

plusieurs millisecondes plutôt qu’à des pressions présentant un front de choc. Il a aussi été observé que les ondes de chocs dont la pression maximale était atteinte après plusieurs palliés sont moins mortelles chez l’animal. Cela a été observé au travers d’essais avec des explosifs sur rats en champ libre par Froböse et al. [Text 2/59

1959], où le pourcentage de survie augmente en éloignant le sujet de la paroi réflectrice. Richmond et al. [1968] observeront aussi ce résultat lors d’essais en tube à choc sur plusieurs espèces animales. Plus le temps entre les deux chocs (incident et réfléchie) est long, plus la tolérance face au blast de cette espèce augmente. Prenons l’exemple d’un scenario dans lequel un rat soumis à un blast contre une paroi n’aurait aucune chance de survie. En éloignant le sujet de la paroi de sorte à ce que l’onde réfléchie arrive 0,4ms après le choc incident, le pourcentage de mortalité passe alors de 100% à 0%. Il apparaît que l’onde incidente peut protéger l’animal de l’onde réfléchie en fournissant une pression ambiante et une pression intra-thoracique nouvelle et plus élevée. En effet, Damon et al. [1966] a montré par des essais en tube à choc qu’une augmentation de la pression ambiante apporte une meilleure protection à l’animal. Par ailleurs, si l’on analyse la courbe de mortalité en fonction du temps entre les différents chocs de l’étude de Richmond et al. [1968] il en résulte que la réponse des petits et grands animaux est différente. Pour les petits animaux, une augmentation de la durée entre les chocs induit une diminution de la mortalité tandis que pour les grands mammifères, comme le chien, la mortalité reste constante sur plusieurs millisecondes entre les chocs avant de finalement décroitre rapidement.