• Aucun résultat trouvé

Effet de l'inoculation d'une bactérie dégradante sur le devenir du 14C-phénanthrène

CHAPITRE II :E TUDE DES PHENOMENES DE STABILISATION DES HYDROCARBURES

IV. Discussion

IV.4. Effet de l'inoculation d'une bactérie dégradante sur le devenir du 14C-phénanthrène

Dans les sols, il existe le plus souvent une faible proportion de bactéries aptes à se développer après une pollution et qui peuvent devenir majoritaires en dégradant les HAP (Thompson et al., 1999). Dans les deux sols étudiés, l'incapacité de la microflore autochtone à minéraliser le phénanthrène, dans la première période d'incubation, est à relier aux conditions du milieu (température: 22°C), à l'insuffisance de nutriments et à la stabilisation du phénanthrène au sein des constituants du sol. En effet, l'augmentation de la température (28°C) et l'apport d'une solution minérale ont permis une stimulation de l'activité microbienne et de la minéralisation du phénanthrène dans le sol de Riedhof à la différence du sol de Bordeaux où aucune activité dégradante n'a été détectée. L'inoculation d'une bactérie dégradante dans les mêmes conditions a stimulée la minéralisation du phénanthrène uniquement dans le sol de Riedhof. La technique ELISA a confirmé la présence de cette bactérie parmi la microflore dégradant le phénanthrène à des fréquences élevées dans le sol de Rhiedhof en présence de la solution nutritive. En effet, la faible proportion initiale des bactéries dégradantes (< 102 bact. / g de poids sec) après contamination du sol a été stimulée après apport de nutriments, mais cette population n'était pas compétitive avec la souche inoculée qui a pu coloniser et s’installer dans le sol.

Le sol sableux acide de Bordeaux semble fixer fortement le phénanthrène en absence de communautés bactériennes dégradantes. Cette rétention est probablement devenue irréversible après quelques jours d'incubation (50 jours) sans activité bactérienne. Une faible proportion du phénanthrène reste extractible alors qu'aucune minéralisation n'a été détectée après l'inoculation bactérienne et l'apport des nutriments. Le sol de Bordeaux possède une fraction argileuse modeste (essentiellement des smectites) mais qui probablement présente une surface spécifique élevée. Stella et al. (1990) ont montrés l'effet de la surface spécifique des fractions d'agrégats sur la stabilisation et le ralentissement de la biodégradation des polluants organiques. Même si une importante pollution résiduelle est souvent détectée lors des expériences de biodégradation dans les sols dépourvus ou pauvres en matière organique et en limons (Löser et al., 1998), la forte teneur en C organique des fractions fines (A et LF) du sol de Bordeaux (tableau 2) a probablement favorisé la rétention du phénanthrène en absence d'activité microbienne.

L'association des HAP avec la matière organique dans le sol peut se dérouler selon deux processus; d'abord une adsorption rapide aux sites des macromolécules organiques ensuite,

une phase d'adsorption plus lente "vieillissement" résultant de la diffusion des HAP aux sites d'adhésion internes (Weissenfels et al., 1992). Dans ce type de sol (Bordeaux), la deuxième phase d'adsorption semble jouer un rôle important dans la bio-disponibilité du phénanthrène puisque l'inoculation d'une bactérie dégradante et mobile après 50 jours de contamination n'a pas permis une minéralisation du phénanthrène probablement piégé dans les fractions fines, alors qu'elle s'observe quand l'inoculation suit immédiatement la contamination. De fortes concentrations en HAP ont souvent été observées dans les fractions fines due à leur forte affinité aux composés aromatiques de la matière organique du sol alors que les HAP qui sont associés à la matière organique particulaire au sein des fractions grossières semblent plus disponibles (Wilcke et al., 1996 ; Amellal et al., 2001a, b).

Dans la deuxième série d'incubation, La bactérie inoculée Burkholderia sp. NAH1 s'est « installée » et maintenue dans les deux sols (BD et RD) à des densités très élevées en présence (traitement biotique) comme en absence de compétiteurs microbiens (traitement abiotique). Son inoculation directement après contamination des sols a permis une importante minéralisation du 14C-phénanthrène, particulièrement dans le sol de Bordeaux. En minéralisant rapidement le phénanthrène, la bactérie inoculée a empêché la formation d'une importante fraction résiduelle (inextractable au chloroforme). Le ralentissement de la minéralisation après 10 jours d'incubation dans les échantillons abiotiques inoculés peut s'expliquer par la biodégradation de la fraction extractible du 14C-phénanthrène qui correspond à la fraction disponible pour la minéralisation. Ceci n'étant pas observé pour les échantillons biotiques inoculés. Il pourrait y avoir un effet synergique entre microflore autochtone et microflore inoculée dans le traitement biotique ou une colonisation limitée de l'inoculum bactérien dans les traitements abiotiques. La plus faible minéralisation observée dans le sol de Riedhof stérilisé et inoculé directement après sa contamination se manifeste par une rétention plus forte du phénanthrène dans les traitements abiotiques inoculés (avec ou sans surfactant) que dans le traitement biotique inoculé. Le passage des phases inextractable- extractable du phénanthrène permettrait d'entretenir la minéralisation. Le facteur limitant serait alors la re-libération de la molécule mère ou des métabolites de dégradation (Schuttleworth et Cerniglia, 1995). La stérilisation du sol par autoclavage peut aussi changer considérablement les propriétés d'adsorption et de biodégradation de la matière organique et par conséquent la bio-disponibilité du phénanthrène (Park et al., 1990; Wild et Jones, 1993). Cet effet est plus prononcé dans le sol de Riedhof puisque la fraction résiduelle initialement très forte dans le sol stérilisé est restée pratiquement stable après inoculation bactérienne. De

plus, le 14C de la fraction extractible au chloroforme représente à la fois la molécule mère et les métabolites de dégradation, il est donc difficile de conclure si c'est le phénanthrène ou ses métabolites qui sont présents dans cette fraction. Dans le sol de Riedhof, l’effet synergique qui se manifeste entre la bactérie inoculée et la microflore autochtone en favorisant la minéralisation du phénanthrène après une phase de latence plus au moins marquée que dans les sols préalablement stérilisés peut être du à ces différences de propriétés de matières organiques due entre autre à l’autoclavage des traitements abiotiques.

Le traitement témoin stérilisé (sol contaminé et non inoculé) permet de vérifier que la dégradation est d'origine biologique et que la formation spontanée d'une quantité de résidus