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Comportement des HAP durant le vieillissement de la contamination des sols

CHAPITRE I : C ARACTERISATION DU DEVENIR DES HYDROCARBURES POLYAROMATIQUES

IV. Discussions

IV.2. Sols contaminés artificiellement

IV.2.1. Comportement des HAP durant le vieillissement de la contamination des sols

Suite à cette contamination de trois sols aux propriétés différentes, les HAP sont tous extractibles 24 h après cette pollution expérimentale. Puis l'extractibilité des HAP décroît dans ces sols incubés en microcosme. Dans ces expériences, l'extractibilité minimum des HPA est observée après 6 mois de mise en incubation et elle est plus importante pour les trois sols après 1 an de contamination et de mise en incubation. Cette extractibilité de l'ensemble des HAP limitée dans les trois sols étudiés est variable selon le type de sol (tableau 14).

Tableau 14 : Extractibilité de l'ensemble des HAP par rapport au total introduit (en %) après 6 et 12 mois d'incubation.

% de HAP extractible Riedhof Bordeaux Bellefontaine

6 mois 13,9 22,3 24,2

12 mois 25,0 58,5 30,0

Cette variation de l'extractabilité en fonction de la durée de la pollution correspond au phénomène dit de vieillissement "ageing" qui actuellement est toujours mal défini. Des phénomènes de fixation des HAP sur les constituants du sol ou piégeage dans les structures micro-poreuses du sol et leur stabilisation dans les agrégats sont en cause. Ces phénomènes sont liés à plusieurs processus :

Des processus physico-chimiques et physiques tel les phénomènes d'adsorption-désorption et de diffusion qui sont sous la dépendance des alternances de dessication-humification du sol (les sols étaient réhumidifiés au cours de leur incubation)

Des processus microbiologiques à savoir : (i) la biodégradation microbienne de matières organiques qui peuvent agir comme piège des HAP ou comme stimulant de l'activité microbienne, (ii) la production de substances à propriété tensio-active par la microflore

autochtone, et (iii) les modifications des constituants du sol par l'activité microbienne entre autres.

Ces phénomènes de vieillissement modifient donc l'extractabilité, et conduit à des évaluations variables de la teneur et la biodégradation des HAP dans les sols. La connaissance de ces processus mérite d'être améliorée pour définir et mesurer plus précisément l'atténuation naturelle des HAP ou autres polluants organiques.

L'extractabilité qui est à la base de la mesure des HAP résiduels doit être interprétée avec précaution en tant qu'outil préparatif de l'évaluation de la dégradation des HAP. Dans l'état actuel de l'étude, cette "extractabilité différentielle" entre les sols étudiés ne peut pas être reliée précisément aux propriétés de ces sols : teneurs en matières organiques, teneurs en argiles, taille des agrégats majoritaires (c'est-à-dire texture et structure des sols), pH etc. Toutefois, en considérant les quantités résiduelles de HAP, on peut proposer des biodégradations plus importantes dans les sols de Riedhof (RD) et de Bellefontaine (BF) tous deux plus riches en matières organiques et à pH plus élevé (présence de carbonates). Une cinétique plus complète aiderait à préciser ces phénomènes. Des mesures devraient être faites sur des temps plus longs pour préciser les phénomènes "d'atténuation" naturelle et en utilisant des molécules marquées plus faciles à suivre.

Le rôle de la matière organique, tant pour les phénomènes de stabilisation-accumulation des HAP et leur vieillissement que pour les phénomènes de biodégradation des HAP, mérite d'être étudié et bien défini en raison de l’importance des liaisons organiques et de leur stabilité insuffisamment connues actuellement.

Ce sont les HAP à nombre limité de cycles (3 et éventuellement 4 cycles) qui sont présents en quantités moindre ou qui ne sont pas ou plus extraits de certaines fractions granulométriques ou classes d'agrégats. Ainsi, ils apparaissent bien comme les plus biodégradables en particulier le phénanthrène et l'anthracène. Le fluoranthène et le benz(a)anthracène apparaissent aussi en plus faibles quantités dans les extraits (par rapport à l'apport initial) et semblent donc aussi relativement plus biodégradables. En revanche, le chrysène, le benzo(k)fluoranthène, le dibenz(a,h)anthracène, le benzo(g,h,i)perylène paraissent peu ou pas dégradables sur les temps de contamination considérés (1 à 2 ans) et dans les conditions adoptées qui sont des conditions que l'on peut qualifier de naturelles.

Les HAP se répartissent différemment dans les différentes classes d'agrégats. Les teneurs en HAP sont le plus souvent et relativement plus élevées dans les agrégats de plus petite taille. Ainsi, les agrégats de la taille des limons fins (2-20 µm) possèdent, pour le sol de Bellefontaine (BF), voisin du sol industriel, les teneurs les plus élevées et représentent aussi la fraction qui contient relativement la plus grande partie des HAP.

Pour les autres sols, les teneurs en HAP sont les plus élevées dans les agrégats de la taille des limons fins et des argiles. Toutefois, d'un point de vue quantitatif, les plus grandes quantités de HAP sont présentes dans la fraction des limons fins pour le sol de Riedhof (RD) et dans celle des limons fins et argiles pour le sol dit de Bordeaux (BD). Dans le sol de Bordeaux, un traitement mécanique lié à l'élimination des argiles et des limons fins, qui ne représentent que de l'ordre du pourcent de la masse de sol total, éliminerait la plus grande partie (environ les trois quart) des HAP. Ce type d'intervention peut sans doute être envisagée dans certains traitements pour cette classe de sol ou des sols de caractéristiques physiques voisines.

La forte teneur en C organique dans la fraction argileuse ainsi que la nature du minéral (essentiellement des argiles de type smectites) et sa forte surface spécifique peuvent contribuer à la formation du comportement d’HAP résiduel dans ce type de sol (Stella et al., 1990 ; Richnow et al., 1999).

Les HAP semblent aussi avoir une répartition qui dépend de la nature de la molécule et du type d'agrégats. Par exemple, le benz(a)anthracène se retrouve sur les agrégats de la taille des sables qui sont des particules quartzeuses dans le sol de Bordeaux. Alors que dans le même sol le benzo(g,h,i)perylène se retrouve plus particulièrement associé aux agrégats de la taille des argiles.

Ces possibilités d'associations, en fonction de la nature des agrégats et de la nature des molécules concernées, ainsi que la formation d'associations plus stables dans certains types d'agrégats comme ceux de la taille des limons fins, méritent d'être vraiment précisées et établies pour définir le comportement de ces contaminants et proposer des voies plus précises et complémentaires de traitement. Ces voies de traitement seront aussi plus faciles à définir en ayant une bonne connaissance de la nature et du rôle des constituants des agrégats considérés