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Effet de l’exercice sur le système immunitaire

3. Le sport, passage obligé dans la lutte contre l’obésité : bienfaits corporels,

3.1 Physiologie de l’exercice

3.1.6 Effet de l’exercice sur le système immunitaire

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❖ Rappel physiologique47 :

Le système immunitaire comporte deux types de défense : l’immunité innée et l’immunité acquise ou adaptative.

L’immunité innée intervient en première ligne et s’oppose aux agents infectieux en faisant appel à des médiateurs cellulaires (polynucléaires neutrophiles, monocytes/macrophages, système réticulo-endothélial, mastocytes, certaines cellules tueuses NK, …) et humoraux (opsonines, système du complément, protéines de la cascade de la coagulation, cytokines d’origine monocytaire et chemokines, composants de la phase aiguë de l’inflammation). Les cellules impliquées sont porteuses de récepteurs spécifiques de certains motifs moléculaires communs à différents micro-organismes : ainsi les récepteurs TOLL reconnaissent des motifs appelés PAMPS.

L’immunité adaptative intervient secondairement après une phase de reconnaissance de l’antigène, de prolifération lymphoïde et de différenciation en cellules productrices d’anticorps (lymphocytes B / plasmocytes) et de cytotoxicité (lymphocytes TCD3+). Cette immunité adaptative est douée de mémoire et un deuxième contact avec l’antigène permet une réponse rapide et puissante de type secondaire.

❖ Modifications des cellules du système immunitaire après un exercice aigu : ▪ Populations circulantes :

Le nombre absolu de polynucléaires neutrophiles augmente durant et après un exercice aigu. Les lymphocytes augmentent durant les exercices et baissent après un exercice de longue durée. Les études des sous-populations lymphocytaires montrent toutes une baisse des différentes sous-populations de lymphocytes, qu’il s’agisse de TCD4+, TCD8+, BCD19+, NK CD56+ (NCAM) et NK CD16+ (FcγRIII).

Durant l’exercice le rapport CD4+/CD8+ diminue du fait de la plus grande augmentation des TCD8+. Le nombre de NK CD94+ ou NK CD94- augmente en nombre absolu bien que l’intensité de fluorescence CD94 diminue. Les lymphocytes T mémoire CD45 RO+ sont préférentiellement recrutés et les vrais T naïfs CD45 RO- CD62L augmentent durant l’exercice. L’étude des télomères des lymphocytes T suggère que l’exercice permet une redistribution des lymphocytes T activés et non une repopulation à partir des cellules nouvellement formées.

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▪ Trafic leucocytaire :

Les polynucléaires marginés dans les vaisseaux de la petite circulation sont recrutés à l’occasion de l’exercice physique. Les lymphocytes proviendraient plutôt de la rate, des ganglions et des tissus gastro-intestinaux mais pas du thymus ni de la moelle osseuse.

Avec la prolongation de l’exercice, le nombre des lymphocytes circulants baisse. Cette baisse tiendrait au fait que les cellules recrutées ne proviennent pas de la maturation des cellules précurseurs mais de cellules matures en nombre limité.

• Activité fonctionnelle des cellules immunitaires :

▪ Exercice et fonction des polynucléaires neutrophiles :

La stimulation des polynucléaires pour des épisodes d’exercice modéré augmente les fonctions de chemotaxie, phagocytose et l’explosion oxydative. L’exercice extrême réduit ces fonctions, notamment l’explosion oxydative (>-20%), à l’exception de la chemotaxie et la dégranulation qui ne sont pas affectées. L’étude des récepteurs des membranes montre une réduction de l’expression de la L sélectine dès la fin de l’effort suivie d’une augmentation durant la phase de récupération. Les molécules d’adhésion CD11b (sous unité αM d’integrine), CD62L (L- selectine) et CD54 (ICAM-1) augmentent en réponse à l’exercice contribuant à l’extravasation des polynucléaires vers les tissus musculaires lésés.

▪ Prolifération lymphocytaire T et B :

Les réponses in vitro aux mitogènes T (PHA et ConA) diminuent durant et au décours de l’exercice. Ceci est dû à l’augmentation des cellules NK et au déclin relatif en TCD4+. La prolifération aux mitogènes B (PWM et LPS) augmente ou demeure inchangée après l’exercice.

▪ Fonction Natural Killer (NK) :

Quels que soient l’exercice, sa durée et son intensité, l’activité NK augmente du fait de l’augmentation du nombre de cellules NK.

Mais rapportée à un même nombre de cellules NK, cette activité est inchangée ou diminuée selon l’intensité de l’exercice demandé. Durant l’exercice, les NK recrutées ont une réponse élevée à la stimulation par l’IL2.

Après un exercice long, la concentration en cellules NK circulantes et l’activité fonctionnelle NK diminuent au-dessous des valeurs de base. Cette baisse est maximale 2 à 4 heures après l’exercice. En valeur relative, le pourcentage de NK est soit diminué, soit inchangé.

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Par unité de cellules l’activité/cellule est plutôt augmentée après l’exercice. Cette activité augmentée est réversible sous indométacine, suggérant l’intervention des prostaglandines E1, E2 et D2.

▪ Réponse immunologique in vivo :

Les tests cutanés de type IDR, explorant l’immunité cellulaire, donnent des réponses plus basses chez les patients pratiquant le triathlon après l’épreuve que chez les patients contrôles. Les taux d’anticorps après vaccination ne sont pas modifiés. Chez les nageurs d’élite, les multi-tests cutanés (IDR) explorant l’hypersensibilité retardée médiée par les lymphocytes T ne sont pas modifiés, que ceux-ci soient pratiqués avant, pendant ou après la période des compétitions.

▪ Immunité humorale des muqueuses :

Les IgA salivaires baissent après une course de ski de fond ou chez les cyclistes pratiquant un exercice intense et de longue durée. La même baisse est observée chez les nageurs et après une période de course à pieds progressive jusqu’à épuisement. Cette diminution de la production d’IgA serait liée, non à la baisse des lymphocytes B, jamais observée, mais à l’action inhibitrice des monocytes ou de leurs cytokines.

❖ Modifications des cellules immunitaires après une série d’exercices :

Après 5 périodes d’exercice aigu modéré rapprochées, le pourcentage de NK augmente, mais de façon identique à celui observé après la première période d’exercice.

Après 2 épisodes d’exercice intense, on observe une augmentation du nombre total de leucocytes (X2), de polynucléaires (X1,9), de lymphocytes (x2,3) dès la première période et qui se répète après le deuxième épisode.

Les concentrations des polynucléaires et de leucocytes observés après le deuxième épisode sont plus élevées que 1 heure après le premier épisode.

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❖ Exercice et médiateurs de l’inflammation :

▪ Cytokines / chemokines / facteurs de croissance :

En réponse à l’exercice physique, on observe une ascension des taux plasmatiques de l’IL1 et surtout de l’IL6.

Après une course de marathon on observe également une élévation du TNFα et de l’IL1β (x2) et celle de l’IL6 (x50). Cette élévation est suivie d’une augmentation de l’IL1RA, des récepteurs solubles du TNF et de l’IL10 aux propriétés anti-inflammatoires. Les chemokines IL8, MIP1α et MIP1β s’élèvent après un marathon. Dans les urines a été constatée la présence des cytokines pro inflammatoires après un exercice (TNFα, IL1β, IL6, récepteur IL2, IFNγ).

Les résultats parfois discordants d’une étude à l’autre s’expliquent par plusieurs faits : - le type d’activité physique (intensité et durée)

- la nature et la sensibilité du test pour le dosage (tests ELISA ou tests fonctionnels…). A l’échelle transcriptionnelle, il existe une élévation très importante du mRNA codant pour l’IL6 dans les cellules musculaires soumises à un exercice avec contraction excentrique. Cette augmentation est absente dans les cellules leucocytaires circulantes où on constate une augmentation du mRNA pour l’IL1-RA après l’exercice.

A l’origine de cette augmentation des cytokines pro inflammatoires, on incrimine la libération de lipopolysaccharides bactériens (LPS) issus de la flore intestinale. Ces germes pourraient pénétrer dans la circulation à l’occasion des microtraumatismes de la barrière intestinale durant la course à pied (mais non durant le sport cycliste).

Ces constatations sont très voisines de celles observées chez les sujets victimes d’un traumatisme important. Les lésions musculaires après un exercice avec contractions excentriques conduisent à une nécrose des fibres et une réaction inflammatoire limitée (IL6 élevée mais TNFα et IL1β peu élevées). Il s’ensuit une production élevée de PGE1 par les cellules mononuclées et des douleurs musculaires. Les PGE2 auraient un rôle de rétrocontrôle négatif en freinant la production des cytokines pro-inflammatoires.

▪ Protéines de la phase aiguë de l’inflammation :

Certaines des protéines de la phase aiguë de l’inflammation interviennent dans l’immunité innée : ainsi la céruléoplasmine et la transferrine ont des fonctions antioxydantes.

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La transferrine n’augmente pas dans le plasma immédiatement et jusqu’à 2 heures après un effort intense de natation chez des athlètes entraînés, mais la ferritine diminue 5 à 6 jours après l’exercice.

Sidérophiline et taux de saturation ne varient pas. Le taux de la CRP ne varie pas au décours d’une course à pied. Mais un programme d’exercice intensif chez des sujets âgés fait monter la CRP.

▪ Molécules solubles issues de l’activation cellulaire :

L’activation cellulaire au cours de l’exercice libère divers récepteurs de surface des cellules lymphoïdes et mononuclées : ainsi le récepteur de l’IL2, le CD8, l’ICAM-1 (intercellular adhesion molecule –1), le CD23 (Fcε RIIa), le récepteur du TNFα et la néoptérine s’élèvent dans le plasma durant et après un exercice de longue durée.

▪ Complexes immuns et complément :

Une élévation prolongée des complexes immuns circulants est fréquente après un exercice physique excentrique, mais non concentrique. La concentration de récepteurs érythrocytaires du complément (CR1) ne varie pas après un exercice concentrique. Le taux du fragment C5a du complément s’élève parallèlement à celui de la myéloperoxydase originaire des polynucléaires suggérant que la polynucléose post-exercice serait en partie la conséquence de l’activation du complément.

❖ Conclusion :

La pratique du sport entraîne des modifications non négligeables de la répartition des populations cellulaires circulantes impliquées dans la réponse immunitaire innée et adaptative. Ces changements passent par une production de cytokines pro-inflammatoires et la libération des hormones du stress, conduisant à des redistributions cellulaires. La nature des interactions est complexe et passe en partie par l’expression de molécules d’adhésion, le recrutement de lymphocytes matures plus que de lymphocytes naïfs ainsi que par des altérations des phénomènes d’apoptose du potentiel mitotique. En pratique quotidienne le médecin peut recommander la pratique de l’exercice régulier en excluant les entraînements exténuants pour le muscle et le système lymphoïde d’immuno-surveillance.

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