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6. Compléments

7.3. Perspectives

7.3.8. Effet de la composition atmosphérique

Jusqu’à présent l’étude de la VIA de la NEP s’est uniquement intéressée à l’impact de la présence de vapeur d’eau dans l’air (via le déficit de saturation). La question de l’effet des autres composés atmosphériques (CO2, ozone, azote,…) mérite d’être posée. D’autant plus que des effets de ces composés (Fleischer et al., 2013; Proietti et al., 2016; Fernández-Martínez et al., 2017; Flechard et al., 2019) ont déjà été rapportés dans le cadre d’étude de la VIA de la NEP.

Depuis le début des mesures en août 1996, plus de 20 années ont passées, sur cette période la concentration mensuelle moyenne en CO2 dans l’atmosphère a augmenté globalement de 361 à 408 ppm en août 2018. A Vielsalm aussi on a pu observer une nette et similaire augmentation de la concentration en CO2 (de 356 à 406 ppm d’août 1996 à août 2018). Si une étude intégrant les données du site de Vielsalm (de 1997 à 2008) a montré un lien entre l’anomalie de la concentration en CO2 et l’anomalie de la NEP (Fernández-Martínez et al., 2017), cette étude intégrait peu de variables climatiques et le CO2 était le seul à avoir une tendance significative (comme la NEP). Cette tendance de la NEP observée notamment pour le site de Vielsalm entre 1997 et 2008 n’a pas été confirmée après mise à jour des procédures de traitement et élargissement de la période étudiée (voir chapitre 4). A l’échelle du site de Vielsalm, les relations obtenues avec les variables climatiques semblent indiquer que son effet est soit négligeable, soit concurrent à celui d’autres variables climatiques. De plus des études d’enrichissement de l’air en CO2 à Vielsalm ont montré que cet enrichissement n’avait aucun effet sur la photosynthèse, vraisemblablement du fait de la non limitation de celle-ci par le CO2 (Laitat et al., 1999), en accord avec les résultats obtenus dans le chapitre 4. Afin de s’en assurer une solution serait d’intégrer la variable anomalies de la concentration en CO2 à l’analyse de la VIA de la NEP.

La santé des forêts et leur productivité sont deux thématiques fortement liées. Cependant, peu de sites d’eddy covariance sont équipés pour mesurer en parallèle la pollution atmosphérique. Par conséquent, peu de publications s’intéressent aux conséquences des pollutions atmosphériques sur les flux d’eddy covariance en forêt Ils restent donc des efforts à réaliser pour mieux comprendre la réponse de l’assimilation du carbone par les écosystèmes à la pollution atmosphérique. En particulier, l’étude des conséquences des dommages causés à l’appareil photosynthétique par l’ozone sont rarement étudiées sur les sites d’eddy covariance (Proietti et al., 2016). De la même manière, le rôle joué par le stress ozone dans l’allocation du carbone (Kitao et al., 2012) mériterait d’être approfondi pour le site

de Vielsalm afin de comprendre si la relation observée avec les conditions hydriques de l’année précédente est uniquement la conséquence d’un stress hydrique ou la combinaison d’un stress hydrique et d’un stress ozone.

A posteriori, il est dommage que le site de Vielsalm sur les 20 années de son existence n’a pas été élevé au rang de « master site » du réseau LTER (« Long-Term Ecosystem Research Network »), le réseau de suivi intensif des forêts (comme cela a été le cas pour le site de Brasschaat côté flamand) alors que des mesures de qualité de l’air sont réalisées à proximité du site. Des mesures telles que la production annuelle de fruit, la concentration foliaire en nutriments, la composition de la solution du sol ont été collectées sur ces sites régulièrement et sur le long terme.

Concernant les dépôts azotés, une étude multi-site a montré que les forêts décidues étaient peu ou pas sensibles à ce paramètre, contrairement aux forêts de conifères (Fleischer et al., 2013). Cette étude a également souligné la difficulté de distinguer les effets des dépôts azotés et du climat, les deux étant fortement liés. L’étude plus approfondie des interactions entre le cycle du carbone et de l’azote est rendue difficile par le peu de données collectées au cours des années précédentes sur le cycle de l’azote parmi les sites d’eddy covariance. L’azote est essentiel à la photosynthèse vu son rôle de constituant de la chlorophylle et des membranes des chloroplastes. Comprendre la dynamique de cet élément au sein de l’écosystème forestier pourrait dès lors aider à comprendre les phénomènes observés, notamment le lien entre la capacité photosynthétique et les conditions climatiques de l’année précédente.

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8. Conclusions

Cette thèse a relevé différents défis propres à l’exploitation d’un long set de données (validité, représentativité, complétude et valorisation des données). Les travaux réalisés apportent un plus indéniable à la communauté des sites d’eddy covariance et soulèvent des questions pour l’avenir de la recherche au sein de ceux- ci. L’étude de l’évolution de la turbulence a notamment mis en évidence des différences entre secteurs de la forêt étudiée de l’efficacité du transport turbulent de la quantité de mouvement, de la chaleur sensible, de la chaleur latente, mais aussi du CO2. Ces différences empêchent la comparaison des flux turbulents provenant des différents secteurs et soulèvent la question des différences éventuellement présentes au niveau des statistiques de turbulence entre les sites d’eddy covariance.

L’étude sur 20 ans de la forêt de Vielsalm, dominée par le hêtre, a permis de mettre en évidence des mécanismes régissant le fonctionnement de ce puits de carbone et son évolution. La phénologie de la forêt est principalement contrôlée par les conditions climatiques de l’année en cours, la physiologie quant à elle est liée aux conditions de l’année précédente et la productivité nette annuelle (NEPy) est principalement contrôlée par les paramètres physiologiques. L’originalité des résultats obtenus est confortée par la confrontation à la littérature. En effet, des trois paramètres principalement évoqués dans la littérature pour expliquer la variabilité interannuelle des flux de CO2, à savoir la longueur de la période de végétation, la température et les précipitations moyennes annuelles, aucun ne permet d’expliquer la variabilité interannuelle de la NEPy observée à Vielsalm. Les résultats obtenus soutiennent la nécessité de continuer à réaliser des études de cas de la variabilité interannuelle et encourage à vérifier si l’influence des arrières-effets identifiée pour le site de Vielsalm est également observée sur d’autres sites.

Le travail est évidement loin d’être terminé : de nombreuses pistes restent à explorer pour le site de Vielsalm qu’elles s’intéressent à la méthodologie utilisée ou à la compréhension du fonctionnement de la forêt dans un contexte climatique changeant. La principale recommandation faite est d’approfondir l’étude des causes de l’allocation du carbone et de la détermination de la capacité photosynthétique de l’écosystème. En particulier le rôle du déficit de saturation de l’air est à investiguer. Les mesures complémentaires qui vont être obtenues via les protocoles du réseau ICOS, pourraient déjà permettre de répondre en partie aux questions posées.

A plus large échelle, il est indispensable de continuer à réaliser des mesures des flux de CO2 à long terme (Niu et al., 2017) en parallèle avec le suivi du climat, de la phénologie et de physiologie des forêts. En effet, le climat change et les écosystèmes aussi, il faut maintenir les outils qui sont en place et qui permettent de suivre et comprendre ces changements à long terme.

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