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X) Réactions d'hydroamination catalysées par l'or

2) Effet de l'argent

Comme cela a été mentionné précédemment, les complexes d'or actifs sont le plus souvent cationiques et sont formés par la rupture de la liaison Au–Z (Z : halogène) réalisée en général par un sel d'argent comme par exemple AgOTf ou AgSbF6.144 Le complexe formé

est le plus souvent considéré comme un triplet ligand/Au/contre-ion, bien que l'existence de cette forme soit très discutée puisqu'aucun intermédiaire cationique "nu" n'a été isolé à ce jour.145 Cette incertitude pose à la fois le problème de l'identification de l'espèce active en catalyse mais aussi la question du rôle de l'argent dans la réaction. En effet, il est important de savoir que les sels d'Ag(I) sont des acides de Lewis et peuvent donc catalyser la réaction d'hydroamination. Même s'ils sont rares, il existe notamment des exemples concernant les alcènes et les 1,3-diènes, avec des réactivités différentes vis à vis de l'or et nécessitant une température de réaction élevée (cf. figure 76).146

Figure 76 : hydroamination catalysée par l'argent146

142

a) M. P. Munoz, J. Adrio, J. C. Carretero, A. M. Echavarren, Organometallics, 2005, 24, 1293-1300 ; b) I. Alonso, B. Trillo, F. Lopez, S. Montserrat, G. Ujaque, L. Castedo, A. Lledos, J. L. Mascarenas, J. Am. Chem. Soc.,

2009, 131, 13020-13030 ; c) S. Handa, L. M. Slaughter, Angew. Chem., Int. Ed., 2012, 51, 2912-2915 ; d) K.

Wilckens, D. Lentz, C. Czekelius, Organometallics, 2011, 30, 1287-1290.

143 a) L. Liu, F. Wang, W. Wang, M. Zhao, M. Shi, Beilstein J. Org. Chem., 2011, 7, 555-564 ; b) Y. Sun, Q. Xu, M.

Shi, Beilstein J. Org. Chem., 2013, 9, 2224-2232 ; c) H. Teller, M. Corbet, L. Mantilli, G. Gopakumar, R. Goddard, W. Thiel, A. Fürstner, J. Am. Chem. Soc., 2012, 134, 15331-15342 ; d) A. S. K. Hashmi, Nature, 2007, 449, 292- 293.

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Bien que rares, des exemples utilisant d'autres sels métalliques ont été publiés : a) W. Fang, M. Presset, A. Guérinot, C. Bour, S. Bezzenine-Lafollée, V. Gandon, Chem. Eur. J., 2014, 20, 5439-5446 ; b) A. Guérinot, W. Fang, M. Sircoglou, C. Bour, S. Bezzenine-Lafollée, V. Gandon, Angew. Chem., Int. Ed., 2013, 52, 5848-5852.

145

a) S. G. Weber, D. Zahner, F. Rominger, B. F. Straub, Chem. Commun., 2012, 48, 11325-11327 ; b) A. Homs, I. Escofet, A. M. Echavarren, Org. Lett., 2013, 15, 5782-5785.

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a) X. Giner, C. Najera, G. Kovacs, A. Lledos, G. Ujaque, Adv. Syn. Catal., 2011, 353, 3451-3466 ; b) X. Giner, C. Najera, Synlett, 2009, 3211-3213.

Ainsi, dés lors que l'argent est actif en catalyse, sa présence sous la forme AgZ ou AgX (Z, halogène ; X, contre-ion quelconque) peut nuire à l'obtention d'une stéréosélectivité élevée par concurrence avec le complexe d'Au. Néanmoins, comme nous allons le voir, l'argent et l'or peuvent aussi former des complexes hétérobimétalliques via des interactions Au–Ag. Il est alors d'autant plus difficile de comprendre le rôle de chacun des métaux durant la réaction.

Récemment, plusieurs publications ont mis en évidence l'influence des sels d'argent sur des réactions catalysées par des complexes d'or, révélant un impact sur la conversion et la sélectivité.144b,145b,147 Le groupe de Shi a notamment observé un amoindrissement significatif de la réactivité après élimination par filtration des sels d'argent AgZ ou AgX résiduel sur CéliteTM, ce qui impliquerait la disparition ou la modification d'une espèce active.147b

Plusieurs groupes de recherche ont révélé différents modes de coordination de complexes monomériques ou oligomériques d'or, de chlore et ou d'argent pour la plupart vérifiés par l'intermédiaire de structures cristallines obtenues par diffraction des rayons

X.145a,147,148 Ainsi, après synthèse d'un complexe d'Au(I) cationique, le groupe de Straub est

parvenu à identifier une structure trigonale impliquant un atome d'Au, un atome d'Ag et un atome de Cl (cf. figure 77, A).148e

Figure 77 : A. structure trigonale rapportée par le groupe Straub148e B. structure trigonale rapportée par le groupe de Laguna149

147 a) D. Weber, M. R. Gagné, Org. Lett., 2009, 11, 4962-4965 ; b) D. Wang, R. Cai, S. Sharma, J. Jirak, S. K.

Thummanapelli, N. G. Akhmedov, H. Zhang, X. Liu, J. L. Petersen, X. Shi, J. Am. Chem. Soc., 2012, 134, 9012- 9019 ; c) Y. Su, M. Lu, B. Dong, H. Chen, X. Shi, Adv. Syn. Catal., 2014, 356, 692-696.

148 a) Y. Zhu, C. S. Day, L. Zhang, K. J. Hauser, A. C. Jones, Chem. Eur. J., 2013, 19, 12264-12271 ; b) H.

Schmidbaur, A. Hamel, N. W. Mitzel, A. Schier, S. Nogal, Proc. Natl. Acad. Sci., 2002, 99, 4916-4921 ; c) A. Hamel, N. W. Mitzel, H. Schmidbaur, J. Am. Chem. Soc., 2001, 123, 5106-5107 ; d) K. Zhang, J. Prabhavathy, J. H. K. Yip, L. L. Koh, G. K. Tan, J. J. Vittal, J. Am. Chem. Soc., 2003, 125, 8452-8453 ; e) S. G. Weber, F. Rominger, B. F. Straub, Eur. J. Inorg. Chem., 2012, 2863-2867.

Bien plus tôt, Laguna et al. avaient montré l'importance des interactions Au–Ag avec une structure trigonale Au–Ag–C (cf. figure 77, B).149 L'équipe de Gagné s'est en partie inspiré de ces résultats pour expliquer ses propres observations en hydroarylation catalysée par l'Au(I), où l'analyse par spectrométrie de masse du complexe d'Au révèle la présence d'un atome d'Ag.147a

En 2003, le groupe de Yip observe une structure oligomérique impliquant des atomes d'Au, de Cl, des ligands diphosphines ainsi qu'un unique atome d'Ag (cf. figure 78).148d On peut apparenter ce type de coordination au modèle évoqué en figure 77, A.

Figure 78 : structure oligomérique publiée par l'équipe de Yip148d

En étudiant des complexes d'Au(I) à base de JohnPhos, l'équipe de Jones a obtenu une structure présentant un mode de coordination tétraédrique où interviennent deux atomes d'Au, un atome d'Ag et un atome de Cl (cf. figure 79, A).148a S'intéressant à l'élimination des sels d'Ag résiduels par une filtration sur CéliteTM, les auteurs ont en outre montré par analyse élémentaire que la précipitation du sel AgCl était un processus thermodynamiquement lent qui demandait du temps (cf. figure 79, B).

Figure 79 : A. structure tétraédrique obtenue par Jones et al.148a B. Etude du temps de contact entre le complexe (JohnPhos)AuCl et AgSbF6148a

Ainsi, un long temps de contact entre le complexe LAuCl et AgSbF6 favorise la

précipitation du sel AgCl, ensuite retiré du milieu réactionnel par filtration. Quoi qu'il en soit, malgré un changement du solvant utilisé pour l'étape de filtration, les auteurs ne sont pas parvenus à enlever la totalité des sels d'argent résiduels.

Outre ces complexes incluant des atomes d'Ag, l'étude des complexes cationiques d'Au(I) a permis de mettre en évidence d'autres types de coordination qu'un modèle linéaire, comme ont pu le montrer les groupes de Jones148a, Echavarren145b, Uson150 ou Schmidbaur148b,c (cf. figure 80).

Figure 80 : A. structure trigonale rapportée par Jones et Echavarren145b, 148a B. phénomène de dimérisation de l'espèce (LAu)2Cl+ en [(LAu)2Cl+]2148b,c,150

Les différents exemples que nous venons d'évoquer impliquant des atomes d'Au, d'Ag et de Cl montrent qu'il est difficile de garantir l'élimination complète des sels d'Ag dans le milieu réactionnel quelle que soit la technique utilisée. En outre, à la lumière de ces résultats, il apparaît que chaque exemple de complexe d'Au cationique peut inclure des atomes d'argent et/ou de chlore, cela avec un mode de coordination spécifique aux conditions de synthèse utilisées (ligand, équivalents d'Ag utilisés, etc.). La coordination des complexes d'or reste à ce jour difficile à prévoir.

Enfin, afin de trouver une alternative à l'utilisation de sels d'argent, le groupe de Gandon a cherché à remplacer ce métal par un autre, en recourant par exemple à des sels de cuivre ou d'indium.144 Cette stratégie a fait l'objet d'applications en catalyse à l'Au(I) sur des réactions variées incluant par exemple l'hydroalkylation d'alcènes, l'hydratation d'alcynes ou la cycloisomérisation d'énynes.144 Si des résultats intéressants ont été obtenus sur ces

transformations, cette stratégie s'est révélée plutôt infructueuse sur le cas spécifique de la réaction d'hydroamination.144a

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