Le
22mai
1910, à Sarnia,Sa Grandeur Monseigneur M.
F. Fallon sollicita et obtintune
entrevue avec l'HonorableW.
J.Hanna,
Ministredans
legouvernement
d'Ontario.L'Honorable
Ministre a raconté cette entrevuedans une
lettre qui a été publiéedans
touslesjournaux
du
pays,etdont
j'ailabonne
fortune de posséderletexteoriginal. Allegatum20.Dans
cette conversation qu'il eut avec le Ministre,Monseigneur
Fallon suppliait legouvernement
d'Ontario de faire disparaître l'enseignement de la langue françaisedans
—
19—
les écoles soutenues par les deniers publics : " L'intérêt des enfants, garçons et filles,
de-mande que
l'enseignement bilingue soitdésapprouvé
et prohibéNous
appartenons àune
provinceanglaise, habitantun
continent parlant l'anglais,où
tousles enfants, garçons etfilles, en sortant des écolespour
affronterlescombats de
lavie doivent êtred'abordarmés
de la langue anglaise, coûteque
coûte ; si, de plus, ils sont capables d'ajouter le français,ou
l'italien,ou
le polonais,ou
toute autre langue, fort bien ;mais
il estabsolmnent
néces-saireque
labase del'éducationsoitanglaise. J'ai faitobserveràSa Grandeur que
selon moi, dans les localitésoù
les Canadiens-Français sontnombreux
et parlent français,on
a cruque
le maître d'une telle école réussirait davantage,vu
qu'il pourraitmieux
conduire lesenfants de la languefrançaise à la langue anglaise.
A
cela il répliqueque
c'estune
erreur ;que
s'ilen
est ainsien
théorie, cela n'était jamaismis en
pratique honnêtem^ent ;que
l'ar-gument
en faveur de la nécessitédu
maître françaisdans
les localités françaises étaitl'ar-gument
de l'agitateur clérical; et secouant son gros bras et son poing versmoi
il dit :Je
m'engage
à prendre soinde
l'agitateur clérical ;mais pour
l'agitateur politique, jene
puis le contrôler si ce n'est dans la sphère politique avec l'aide des autres." Allegatum 21.Le gouvernement
protestantd'Ontario, présidé parun honnête homme,
Sir J. Whit-ney, eut quelque hésitation àcommencer une
persécution contreune
minorité aussi impo-santeque
legroupe
catholique français d'Ontario ; il lui fallutune
pousséedu
fanatisme orangiste excité et encouragé par lesmenées de Sa Grandeur Monseigneur M.
F. Fallon ;en
effet,quand on
sutque Sa Grandeur
avaitdéfendu aux
religieuses de son diocèse d'en-seigner le françaisdans
les écoles qu'elles tenaient, ce futune
explosion de joie délirantedans
les loges orangistes de la province :"Je
remercie la Providence, s'écriait leRév.
Co-burn, chapelain orangiste de la loge Ontario, de ce que la religion catholique romaine a produitun
évêque catholique telqueMonseigneur
Fallon, guia lecourage de se leveret dene pascraindre de dire qu'il est opposé à l'enseignementdu
français dans les écoles bilingues."Le gouvernement,
entraîné parune
poussé de fanatisme protestant et anti-français, céda par faiblesse et contre tous les droits publiaune
circulairedans
laquelle il proscrivaitpratiquement
l'enseignementdu
français et de plusnommait
des inspecteurs protestantspour
surveiller et visiter les inspecteurs et les écoles catholiques canadiennes-françaises.Cette fois, c'en était trop : les catholiques français, blessés
dans
leurs droits de pères de famille et de catholiques, organisèrentune
résistance toute pacifique, qui avait produit d'excellents résultatsdans
le passé.L'histoire de la province d'Ontario enseigne
que
le vaillantarchevêque
de Toronto,Monseigneur Lynch,
quigouverna
l'église deToronto
de 1860 à 1888,ne
voulut jamais souffrir laprésenced'inspecteursprotestantsdans
les écoles catholiques de langue anglaise ; écrivant à son clergé, il disait : "A
notregrande
surprise,nous
trouvonsque
les inspec-teurs desécoles publiques visitentnos écoles séparées.Nous
protestonsavec énergie contre cette intrusion contraire à l'esprit de la loi établissant les écoles séparées, etnous
serons forcés dedonner
avisaux
commissaires d'écoles séparées dene
pas tolérer ces visites;
non
pasque nous
soyons effrayé de ces inspecteurs,mais nous ne
voulons pas leur ingé-rencedans
nos écoles."L'illustre
Archevêque
deToronto
indiquaitaux
catholiques français la conduite à suivre ;comme
lui, ils ont protesté : toutes les foisque
l'inspecteurprotestant a pénétré dan? les écoles catholiquespour y
exercerune
fonction qu'il n'apasledroit de faireen
vertu—
20—
de la constitution
du
pays, qui garantit les écoles catholiques dans la province d'Ontario, les enfants, sur l'ordre des parents, sont sortis des écolespour y
entrer denouveau
après le départ de l'inspecteur protestant.Le gouvernement
d'Ontario comprit trop tard qu'il était allé trop loin etque
lefanatisme était
mauvaise
conseillère.Depuis
quelques mois, les inspecteurs protestants ontdû
renoncerau
projet de visiter des écoles catholiques. L'opinion publique,non seu-lement
chez les catholiquesmais
chez les protestants éclairés, estnettement
favorableaux
revendications des catholiques français d'Ontario :Le
Profeseeur Fryer, protestant, de l'UniversitéMcGill
de Montréal, déclareque
le règlementdu gouvernement
d'Ontario" ne peut être
défendu au
point devue pédagogique"
; le professeur Dale, protestant, de lamême
Université, déclareque
le règlement " estune
violation de l'esprit de la consti-tution" ; SirRichard
Scott, l'un des Pères de la Confédération Canadienne, comparait lesmesures
édictées par legouvernement
d'Ontario à celle de la Russie envers laPologne
;le professeur
Leacock
déclaraitfermement que
le règlementdu gouvernement
d'Ontario" viole toutes les traditions sur lesquelles la politique générale
du pays
a été fondée."Thomas O'Hagan,
Principal d'unHigh
School d'Ontario,dans une
lettre adresséeau Dr
Pyne, Ministre de l'Instruction Publique,va
jusqu'à direque
le règlement " est l'œuvre d'un fou."Bref ! le
gouvernement
d'Ontario, par sa politique mesquine, injuste, inconstitu-tionnelle, s'estmis dans une impasse
et il cherche aujourd'hui à en sortirlemieux
possible ;il craint avecraison,
aux
prochaines électionsprovinciales,un
vote adversdu groupe
catho-lique français. Ily
a, dit-on, des émissaires quivont
d'un évêché à l'autre et sollicitentune
intervention épiscopale à l'effet d'engager les catholiques français à accepter lerègle-ment
injustedu
Ministre de l'Instruction Publique ; larumeur
veutmême que
de sembla-bles instances se fassent jusqu'auprèsdu
Saint Siège.CONCLUSION
.
Les
catholiques français d'Ontario,nonobstant
tous les sacrifices,vont
maintenir leurs écoles catholiques etfrançaises,où
leurs enfants, sous l'œil maternel de l'Eglise, rece-vrontune
solide éducation chrétienne ;où
leurs enfantsapprendront
la langue française, qui fut celle desBrebeuf
et des Lallemand,dont
le sang arrosa cettemême
terre d'Ontario,il
y
adeux
siècles et demi.Continuant
de parler la langue qui futdans
le passé la sauve-garde de leur foi, ils prépareront à l'Eglisepour
l'avenir de fidèles enfants et à la patrie canadienne debons
et d'utiles citoyens.Ce
qu'ilsdemandent
aujourd'huiau
Saint Siège, à la S.Congrégation
Consistoriale, par la voix des quelques catholiquesdu
diocèse deLondon,
qui ont signé le libellus déposé en têtedu mémoire
de 1912 et celui-ci, c'est : <Que Sa Grandeur Monseigneur M.
F. Fallon, qui a déchaîné le fanatisme orangiste contre les écoles catholi(iues françaises de la province d'Ontario et a été l'agent le plus actif de la désunionparmi
les catholiques de la province, cesse de fairedu
pouvoir épis-copal (jui lui a été confiépour
le bien des âmes,un
instrument d'anglicisation ;—
21—
Que
droit des parents catholiques de faire enseigner à leurs enfants dans les écoles de leur choix la langue qu'ils parlent à leur foyer soit formellementreconnu
etque
toutes les tentatives deSa Grandeur Monseigneur
Fallon à ce sujet soient désapprouvées ;Enfin
que
la S.Congrégation
Consistoriale,prenant
en considération toutes etchacune
desdemandes
faites par les requérantsdans
lemémoire
qu'ils ont déposédevant
elle
en
avril 1912, acquiesce à leurs justesdemandes
etprenne
lesmesures
propres à réta-blir la paixdans
le diocèse deLondon.
—
22—
ALLEGATUM
1
Ford
City, Walkerville, 26 janvier 1914.Je, soussigné,
ayant
pris connaissance de la déclaration suivanteque Sa Grandeur Monseigneur M.
F. Fallon afaitedevant
le tribunal de la Rote,dans
la cause l'abbé Beau-doin vsla Curie épiscopale deLondon,
et qui setrouve à lapage
16 de la nouvelleréplique de l'avocat deSa Grandeur,
déclaration qui se litcomme
suit : " Il estcomplètement
faux et sans l'ombred'un fondement que
j'aiedéfendu
d'enseigner la langue françaiseaux
en-fants des Canadiens-Français. C'estune
calomnie etune
absurditéMa
dénégationet la
démonstration
de la fausseté de cette accusation sontdevant
la S. Congrégation Consistoriale."Je, soussigné, sous lafoi
du serment
déclare :1. -
Que
la susdite déclaration qu'aurait faiteMonseigneur M.
F. Fallon est contraire à la vérité ;2. -
Que dans
l'été de 1910,Sa Grandeur Monseigneur
Fallon adéfendu
à des reli-gieuses d'enseigner la langue françaiseaux
petits enfants des Canadiens-Français;
3. -
Que
je tiens de labouche même
deSœur
Vincent, de laCongrégation
desSœurs
de Saint-Joseph,que Sa Grandeur Monseigneur M.
F. Fallon,dans
l'été de 1910, adéfendu d'enseigner le françaisdans
l'école de Saint-Edouard.
Dans le document
La situation religieuse
(Page 22-26)