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Echanges autour des dépenses avec les parents et les amis

A. L ES SOURCES DE REVENUS DES JEUNES

1. L’utilisation de l’argent

1.1. Les dépenses

1.1.2. Echanges autour des dépenses avec les parents et les amis

Les enquêtés interrogés disent souvent parler de leurs dépenses à des fréquences plus ou moins rares avec un entourage proche, en particulier, les parents ou les amis.

Il existe plusieurs types de discussions possibles autour de l’argent avec les parents, qui peuvent être déterminées dans un premier temps en fonction du contrôle qu’ils ont sur les dépenses de l’enquêté et en fonction de leur propre rapport à l’argent. Par exemple, Georg montre comment l’échange autour de l’argent avec ses parents est déterminé par une éducation portée sur le sens de l’économie. Ainsi, bien qu’il n’y ait pas de contrôle direct de ses dépenses, ses parents peuvent malgré tout exercer un contrôle indirect sur l’usage de l’argent chaque fois que le jeune leur demande de l’argent. Ils cherchent alors à gérer la zone d’incertitude que constituent les dépenses de Georg à ces occasions en cherchant à connaître le motif de ses réclamations:

« En principe pas sur mes dépenses en général. Non plus comment ça se divise. Bon, avec mes parents, je parle de mes dépenses monétaires bien sûr. Comme je l’ai dit, ils veulent

justement savoir, pourquoi j’ai besoin d’argent. » (Georg, 24 ans, licence de sociologie, Münich).

Marina, quant à elle, vit encore chez elle. Elle est lycéenne, âgée de 16 ans, et donc plus jeune que la moyenne des enquêtés interrogés. Les échanges autour des dépenses se présentent donc souvent sous forme de négociations avec sa mère, étant donné qu’elle est sa seule source de revenus et qu’elle doit s’arranger avec elle, en particulier pour les grosses dépenses comme les voyages en vacances :

« Oui, normalement nous partons ensemble en vacances, mais maintenant je pars avec ma soeur et une amie et donc elle nous a dit qu’on devrait payer 1000 euros chacune. Et je me suis dit que je pourrais difficilement financer toute seule mes vacances, puisque je n’ai aucune source de revenus (…). Mais je pense que quand même nous recevrons un peu d’argent en plus pour pouvoir faire du shopping là-bas. C’est toujours comme ça avec nous, quand on va quelque part... il y a presque toujours des dépenses en plus, à côté ».(Marina, 16 ans, lycéenne, Mering).

Pour d’autres enquêtés, les échanges autour de l’argent avec leurs parents pourront se faire dans le cadre d’interactions plus informelles. Par exemple, Suzanne déclare avoir des discussions avec ses parents et ses amis concernant l’usage de l’argent en général, et leur ressenti réciproque. Ainsi, cet échange s’exprime plus en terme de débat qu’en terme de contrôle des parents sur l’argent dépensé par le jeune. Par ailleurs, ces discussions se font à une fréquence plutôt rare, ce qui montre que ce n’est pas un sujet qui engendre des tensions ou des pressions particulières. Suzanne établit un parallèle entre les discussions d’argent avec ses parents, ses amis, son copain ce qui montre qu’il n’y a pas de hiérarchie particulière des uns par rapport aux autres :

« Et bien, avec mes parents. Mes amis, parfois. Et avec mon copain, parfois,(…) parce que ce sont des personnes de confiance. Et parce qu’elles savent ce que... parce que tout le monde fait une montagne de ses problème d’argent et que ce n’est pas si... en fait, c’est plus un dialogue, ce n’est pas seulement une personne qui raconte ses dépenses et ses prennent plutôt le ton de l’humour. Ainsi, au cours de ces discussions, il n’y aurait pas de pressions concernant les dépenses monétaires de Peter, puisqu’elles auraient plutôt pour thème des généralités sur les comportements d’autrui autour de l’argent, par exemple :

« Ça dépend de la fréquence avec laquelle nous nous voyons. Parce que je suis pas chez moi très souvent. Souvent, ça signifie 3, 4 fois par mois. Sûrement pas plus. Et à ces moments seulement un quart d’heure ou 20 minutes d’une façon marrante plutôt. Mais

les discussions sérieuses sur l’état de mes finances, il n’ y en a pas. » (Peter, 20 ans, compagnon de menuisier, Kissing).

Enfin, pour certains enquêtés, la question de l’argent et des dépenses ne se pose pas dans la famille, lorsque le niveau de vie est relativement élevé. Dans ces cas là, la question de l’argent demeure marginale au cours des conversations, sauf quand il en est question.

Lucio, par exemple, montre qu’il n’était pas d’usage de parler d’argent dans sa famille, il déclare que les enfants étaient plutôt laissés en dehors des questions financières d’ordre général. En revanche, elle peut exceptionnellement faire surface dans les sujets de conversations, par exemple, à l’occasion de la Confirmation de Lucio, au cours de laquelle il avait reçu une grande somme d’argent.

Les enquêtés interrogés déclarent parler moins ouvertement des dépenses avec leurs amis. En tous cas, il s’agit rarement de discussions sérieuses. Elle se font plutôt sous forme de renseignement ou d’enquête à un moment de la conversation pour savoir combien untel dépense à une fréquence très rare pour certains enquêtés :

« Avec les amis… rarement. La façon dont ça devient le thème de la conversation, c’est qu’on dit qu’on s’est acheté quelque chose, combien ça a coûté. Ou une fois ou l’autre, on s’est demandé combien on doit payer pour le loyer. Mais je dirais rarement, très rarement. Avec les amis rarement. A part ça, en fait, je dirais qu’on en parle pas. » (Georg, 24 ans, licence de sociologie, Münich).

Pour certains enquêtés, se renseigner auprès des dépenses de leurs amis ou camarades peut prendre la forme d’une véritable enquête. Par exemple, Marina sait exactement combien gagne ses copines :

« Oui pour certaines. Il y en a une qui reçoit – moi, ça fait quatre fois 8 euros, donc 32 euros– elle reçoit 40 euros par mois. Elle le reçoit au début du mois. L’autre reçoit moins que moi. Elle le reçoit sur son compte. Chez nous, ça a toujours été directement en main, parce qu’à la banque, il ne resterait pas longtemps sur le compte. » (marina, 16 ans, lycéenne, Mering).

Ce souci d’investigation peut être aussi lié à une étape du cycle de vie du jeune. En effet, en période adolescente, les jeunes auraient davantage tendance à prêter attention au pouvoir d’achat de ses amis car les apparences auraient plus de poids. Les adolescents seraient plus sensibles aux marqueurs de richesse . Ils cherchent aussi à connaître les montants exacts d’argent de poche de chacun. En revanche, lorsqu’ils deviennent plus âgés, ils font moins attention aux marqueurs de richesse, car ils sont plus confrontés aux réalités financières en devant s’assumer eux-mêmes.

Les tabous qui peuvent se faire sentir autour des discussions concernent surtout les sources de revenus et leur montant. En effet, parmi les enquêtés interrogés, la plupart déclarent ne pas chercher à connaître la situation financière de leurs amis. En effet, leur

propre expérience de l’indépendance financière et de l’instabilité qui en découle peut être une des causes de ce tabou :

« Non. J’ai mon salaire. Et quand on sort le soir, la seule chose dont on parle c’est de combien d’argent on prend sur soi et c’est tout. Sinon, rien. À part à la fin du mois, quand on veut aller faire du shopping entre amies et que je suis fauchée, on se dit: „ on y retourne dans deux semaines? J’aurais à nouveau de l’argent.“ Mais sinon, on n’en parle pas. »(Hariet, 21 ans, apprentissage d’employée dans une banque, Unterschleissheim)