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CHAPITRE I : Contexte scientifique et motivations

I.3. Dynamique des zones de subduction

I.3.1. Généralité sur la subduction

La convection mantellique est un phénomène physique reconnu par la communauté qui permet à la chaleur interne de la Terre de s’évacuer. Cette convection se manifeste en surface et en profondeur par les variations du géoïde, le changement de vitesse des ondes sismiques à l’échelle du manteau, ou encore par les anomalies bathymétriques. Cette composante est essentielle puisqu’elle fait partie intégrante de la théorie de la tectonique des plaques. En ce sens, l’une des conséquences majeures de ces mouvements mantelliques est la subduction. Par définition, les zones de subduction représentent des zones de convergence entre les plaques tectoniques où l’une des deux plaques plonge vers les profondeurs du manteau (Fig. I.12a) sous l’autre. Alors que la subduction océanique se définit par des propriétés physico-chimiques différentes (e.g. densité différente) entre les deux plaques, la subduction continentale, qui met en contact des lithosphères de densité proches, engendre généralement la formation d’une chaîne de montagnes (i.e. à cause de sa forte flottabilité). Ainsi à l’échelle du globe, la convection mantellique génère des courants ascendants (i.e. panaches mantelliques) et des courants descendants dont les zones de subduction en sont les marqueurs. Ces zones denses et froides constituent des hétérogénéités les plus visibles au sein du manteau [e.g. Bijwaard, 1999].

Comme l’indique les différentes géométries des fosses en surface [Jarrard, 1986 ; Heuret & Lallemand, 2005 ; Lallemand et al., 2005 ; Schellart et al., 2007], il existe actuellement une grande diversité des zones de subduction actives à travers le monde. Ces zones se caractérisent par des longueurs variables (entre 250‒7400 km) et par des géométries variées (Fig. I.12b). Par exemple, la subduction andine est caractérisée par un slab à tendance rectiligne, alors qu’à contrario, la subduction associée à la plaque de Scotia ou les subductions méditerranéennes sont courbes. De même, une grande

diversité dans les vitesses de retrait et d’avancée des fosses est observée. En effet, dans certains cas les vitesses atteignent des valeurs de 15 cm.an-1 (e.g. retrait de la Fosse des Tonga) alors que dans d’autres cas, les vitesses sont plus faibles de l’ordre de 0.6 cm.an-1 (e.g. retrait de la Fosse des Aléoutiennes) (Fig. I.12b). Enfin, la déformation dans la plaque supérieure diffère également d’un endroit à l’autre (Fig. I.12b). Dans la plupart des zones de subduction matures, il existe une multitude de régimes tectoniques comme l’expansion océanique qui induit la création de bassin arrière-arc (régime extensif ; e.g. Mariannes, Tonga) ou comme la formation de chaînes de montagnes (régime compressif ; e.g. Amérique du Sud) (Fig. I.12b).

Figure I.12 : schéma conceptuel et répartition des zones de subduction à l’échelle mondiale. (a) schéma partiel du manteau convectif terrestre modifié d’après Kellogg et al. [1999]. Les zones de subduction sont représentées en gris foncé, et correspondent aux courants descendants qui animent le manteau. (b) carte recensant les principales zones de subduction dans le monde. Les abréviations correspondent à la figure B : Ak, Alaska; At, Aleutian; Ch, Chile; Co, Colombia; Hb, New Hebrides; Hk, Hikurangi; Iz, Izu-Bonin; Ke, Kermadec; Ku, Kuril; Jp, Japan; Me, Mexico; Mr, Mariana; Pe, Peru; Ry, Ryukyu; To, Tonga. Les vitesses des plaques tectoniques sont marquées par les flèches blanches alors que les flèches noires indiquent les vitesses de migration des fosses océaniques [Schellart et al., 2007].

En outre, la résolution croissante des modèles de tomographie sismique et des modèles numériques 2D fournit de nouveaux concepts sur la dynamique des slabs. De nombreuses études montrent que, dans certains cas, les panneaux plongeants peuvent pénétrer le manteau inférieur sur plusieurs milliers de kilomètres. A contrario, ils s’enracinent parfois au niveau de la transition manteau supérieur ‒ manteau inférieure à 670 km (Fig. I.12a). Cette discontinuité, qui est marquée par l’apparition de la perovskite, peut déformer de manière significative la géométrie du slab [e.g. Kincaid & Olson, 1987 ; Guillou-Frottier et al., 1995 ; Royden & Husson, 2009]. Même si les mécanismes contrôlant ces différentes dynamiques sont de mieux en mieux compris, le nombre croissant des modèles géodynamiques permet de formuler différentes hypothèses sur les paramètres clefs qui contrôlent la manière dont le slab s’écoule dans le manteau sur une échelle de plusieurs dizaines de millions d’années [e.g. Van der Hilst & Seno, 1993 ; Van der Lee & Nolet, 1997 ; Van der Voo et al., 1999a ; Wortel & Spakman, 2000 ; Faccenna et al., 2001a ; 2001b ; Fukao et al., 2001]. En ce sens, il y a un commun accord pour dire que les slabs agissent passivement lorsque les panneaux plongeants sont ancrés dans le manteau profond. Dans ce contexte, la déformation arrière-arc accommode le mouvement vers l’arrière ou vers l’avant de la plaque supérieure par rapport à la fosse. A l’inverse, les slabs agissent activement lorsque la force de traction est importante (Fig. I.13a). Dans ce cas, un raccourcissement de la fosse est généralement observé (e.g. la fosse des Mariannes, Fig. I.12a).

Par ailleurs, il est essentiel de noter que tous les modèles précédents (e.g. numériques et/ou analogiques) sont généralement en 2D. Or, la subduction est un processus 3D complexe qui va influencer et modifier le comportement des panneaux plongeants (i.e. retrait et éventuellement déchirure). Ainsi, en considérant l’existante de tels mouvements dans le manteau, on peut se questionner sur les effets thermiques engendrés par ces dynamiques. Comprendre les mécanismes de transfert de chaleur du manteau à la croûte dans les régions extensives arrière-arcs est un des enjeux majeurs de cette étude. Avant de présenter brièvement les différents modèles géodynamiques, il est important de rappeler les principales forces impliquées dans les zones de subduction.

I.3.2. Les principales forces impliquées

Les forces influencent à la fois la cinématique et donc la dynamique des plaques et la déformation dans une zone de subduction (Fig. I.13). Classiquement, ces forces sont divisées en deux catégories : les

forces internes correspondant à la plaque subduite et le panneau plongeant, et les forces externes qui se définissent par des interactions entre le manteau environnant et la plaque supérieure. Parmi ces différentes forces on identifie généralement :

(i) la force de traction également appelée “slab pull ”, qui se définie par un excès de masse du slab par rapport au manteau environnant (Fig. I.13a) ; cette force verticale et motrice est fonction de la différence de densité moyenne entre l’asthénosphère et le slab et du volume du slab [Heuret, 2005 ; Faccenna et al., 2012].

(ii) la force de résistance du manteau lors de l’enfouissement du slab (i.e. les mouvements d’avancés et de reculs, “anchor forces” sur la figure I.13a).

(iii) les forces associées aux couplages entre les deux plaques ; elles incluent les forces de friction et de pression à l’interface des plaques mais également les forces de pressions ainsi que les mouvements de flexion du slab (Fig. I.13a) ; ces forces de frottement sont généralement exercées le long de la zone sismogénique.

(iv) la résistance visqueuse du manteau lors de la pénétration du slab dans le manteau (Fig. I.13a).

D’autres types de forces difficiles à estimer, néanmoins importantes, agissent également lors de la dynamique de subduction. La combinaison de ces forces génère des contraintes mécaniques et thermiques dans la plaque supérieure mais également dans la plaque subduite. En conséquence, ces dernières peuvent par exemple modifier la déformation intrinsèque de la plaque plongeante. D’autres facteurs comme la présence de flux mantelliques régionaux associées à une dynamique particulière (i.e. le retrait du slab ou l’absence de slab) influent également sur la dynamique de subduction.

Figure I.13 : les principales forces à l’œuvre et les modèles géodynamiques associés. (a) les forces majeures d’une zone de subduction d’après Lallemand et al. [2005]. (b) le modèle du retrait du panneau plongeant. Vt : mouvement absolu de la fosse ; Fsp : force associée au slab pull ; Mb : flexion A : l’âge du slab modifié d’après Heuret & Lallemand [2005]. (c) et (d) le modèle contrôlé par la dynamique mantellique modifié d’après Heuret & Lallemand [2005]. Dans le premier cas, les flux poussent le panneau plongeant du côté du coin mantellique, favorisant ainsi le retrait et de l’extension arrière-arc alors que dans le second cas, les flux poussent la plaque subduite, favorisant alors l’avancée de la fosse et la compression dans la plaque supérieure. Fm : force générée par les flux mantelliques.

I.3.3. Les différents modèles géodynamiques

Même si les observations détaillées ci-dessus confirment que la dynamique de subduction est un phénomène complexe, de nombreuses études [e.g. Uyeda & Kanamori, 1979 ; Shemenda, 1994 ; Lallemand et al., 2005 ; Schellart et al. 2007]proposent des modèles conceptuels sur le comportement des slabs. Il est couramment admis par la communauté scientifique que la déformation de la plaque supérieure est directement liée à la géométrie du slab (i.e. son pendage). Alors que les subductions à faible pendage se caractérisent généralement par une déformation compressive dans la plaque supérieure [e.g. Barazangi & Isacks, 1976 ; Jordan et al., 1983 ; Ruff & Kanamori, 1980], les subductions à fort pendage sont corrélées avec une déformation extensive dans la plaque supérieure. Dans le détail, des études récentes basées sur une approche statistique [e.g. Boutelier et al., 2003 ; Lallemand et al., 2005] montrent que les « back-arcs compressifs » sont associés à des valeurs de pendage inférieure à 30°, alors qu’a contrario, les « back-arcs extensifs » se développent principalement dans les zones où le pendage est supérieur à 50°. Néanmoins, aucun consensus sur le paramètre contrôlant cette géométrie n’existe. En effet, la plupart des auteurs [e.g. Uyeda & Kanamori, 1979] supposent que le pendage du slab est principalement contrôlé par la force de traction. Cette corrélation semble se vérifier dans certains cas,

comme par exemple dans le cas de la subduction de Nankai ou des Mariannes. Cependant, il existe de nombreux contre-exemples comme celui de la subduction Hellénique dans le domaine méditerranéen. En réalisant une étude sur plus de 159 transects de zone de subduction, Lallemand et al. [2005] concluent que l’angle du slab ne peut être corrélé à la magnitude de la force de traction. Ils ne notent également aucune corrélation entre l’angle du slab et (i) l’âge la lithosphère subduite, (ii) la thermicité de la plaque plongeante, (iii) le taux de convergence et (iv) la polarité de la subduction. Cette étude confirme d’une part la complexité de la géométrie 3D des zones de subduction, qui induisent nécessairement des évolutions géodynamiques différentes se répercutant à la fois sur la dynamique crustale et mantellique. Elle montre d’autre part, que le mouvement absolu de la plaque supérieure joue un rôle déterminant sur cette dynamique, notamment lorsque le slab atteint la discontinuité à 670 km. Basé sur les relations « fosses et dynamique du slab », Heuret & Lallemand [2005] proposent une classification que nous détaillons par la suite.

I.3.3.1. Le modèle classique de la plaque supérieure

Dans ce modèle, la courbure du panneau plongeant est contrôlée par le mouvement de la plaque supérieure à travers deux types de forces : (i) les forces de friction et de pression à l’interface des plaques et par (ii) la force de résistance visqueuse du manteau lors de la pénétration du slab (Fig. I.13a). Ainsi, la déformation dans le domaine arrière-arc dépend principalement du mouvement absolu de la plaque supérieure à condition que la position de la fosse soit plus ou moins fixe dans l’espace et dans le temps [Heuret & Lallemand, 2005]. Dans ces conditions, un mouvement de retrait dans la plaque supérieure induit une extension arrière-arc alors qu’un mouvement en avancée (i.e. en direction de la fosse) implique de la compression dans cette dernière. Il existe donc de manière générale une bonne corrélation entre le mouvement de la plaque supérieure et la déformation associée (i.e. extension arrière-arc lors du retrait de la plaque supérieure et vice-versa). Cependant, il est intéressant de relever que dans plusieurs cas le mouvement absolu de la plaque supérieure ne correspond ni (i) à la déformation enregistrée dans la plaque supérieure ni (ii) aux mouvements de la fosse (e.g. Tonga, New Hebrides). Afin d’expliquer ces dynamiques particulières, la prise en compte des aspects tridimensionnels impliquant l’existence de flux mantelliques particuliers semble nécessaire. En exerçant une surpression sur l’une des bordures du slab, ces flux peuvent alors entrainer une migration vers l’avant ou vers l’arrière de la plaque supérieure par rapport à l’arc.

I.3.3.2. Le modèle du slab roll-back

De nombreuses études réalisées dans les années 1990, montrent que le couplage entre la force associée au “slab pull” et celle associée à la courbure du slab, peut générer une migration vers l’arrière du panneau plongeant (appelé également “roll-back”) [e.g. Molnar & Atwater, 1978 ; Dewey, 1980 ; Garfunkel et al., 1986]. Ce mouvement de recul engendre alors la localisation d’une déformation extensive dans la plaque supérieure (Fig. I.13b). Ces études offrent donc un aperçu de la complexité de la dynamique de subduction. Néanmoins, ces approches sont généralement réalisées en deux dimensions. En effet, pour une meilleure compréhension de cette dynamique, qui s’exprime à travers de multiples processus (e.g. migration de la fosse, déformation de la plaque supérieure…), il est nécessaire de regarder la subduction comme (i) une structure limitée spatialement (i.e. la longueur varie entre 250‒ 7400 km) et (ii) une géométrie tridimensionnelle complexe qui évolue dans le temps. Récemment, en utilisant des simulations analogiques ou numériques tridimensionnelles, Faccenna et al. [1997 ; 2001a], Funiciello et al. [2003 ; 2006], Piromallo et al. [2006] ou Schellart et al. [2007] montrent que la largeur de la subduction exerce un contrôle de premier ordre sur la courbure des slabs, et donc sur leurs tendances à reculer à travers le temps. En effet, leurs résultats indiquent d’une part que le taux de migration de la fosse est inversement lié à la largeur du slab et d’autre part, que le roll-back est facilité à proximité d’un bord latéral du slab par l’intermédiaire des flux mantelliques. Comme le montre la Figure I.14b, ces résultats sont compatibles avec les vitesses de retrait constatées à l’échelle mondiale, avec une vitesse maximale (6‒16 cm.yr-1) observée seulement près des bordures des slabs. Les zones de subductions étroites (≤ 1.500 km) sont les témoins de retraits rapides et développent une géométrie concave, orientée du côté du coin mantellique (Fig. I.14a). A contrario, les slabs (≥ 4000 km) sont presque stationnaires au centre et développent une géométrie convexe (Fig. I.14a).

I.3.3.3. Le rôle des flux mantelliques

Selon Heuret & Lallemand [2005], il existe 3 types de flux mantelliques qui peuvent agir et modifier la dynamique des slabs : à l’échelle globale, un flux venant de l’est associé à la dérive vers l’ouest de la lithosphère (Fig. I.14b) [e.g. Nelson & Temple, 1972 ; Doglioni, 1993] ; les flux régionaux comme le montre le mouvement du manteau supérieur sub-Pacifique [e.g. Garfunkel et al., 1986 ; Lallemand, 1998] ou encore le mouvement du point chaud des Afars (Fig. I.14c) [Faccenna et al., 2013] ; et enfin des flux localisés à proximité des zones de retrait et/ou des déchirures du slab (Fig. I.14d) [e.g. Alvarez, 1982 ; Russo & Silver, 1994 ; Yogodzinski et al., 2001 ; Menant et al., 2016b]. Dans ce sens, plusieurs études sismologiques et géochimiques ont démontré que le matériel du manteau s’écoule des bordures vers le coin mantellique au niveau des zones de subduction [e.g. Russo & Silver, 1994 ; Peyton et al., 2000 ; Pearce et al., 2001]. Ainsi, les flux asthénosphériques sont considérés comme des flux de

retour induits par le retrait du panneau plongeant. Il est intéressant de noter que les composantes toroïdales et poloïdales ce ces flux favorisent également son retrait [Kiraly et al., 2017]. Or il est important de souligner que dans certains cas, ces flux mantelliques peuvent être moteur ; la force additionnelle (notée Fm) peut alors engendrer une migration parallèle à la fosse (Fig. I.13d).

Par ailleurs, un certain nombre d’observations géologiques dans des contextes extensifs (e.g. comme les domaines d’arrière-arcs avec la mer Égée, la mer du Tyrrhénienne septentrionale et le domaine d’Alboran) souligne l’existence d’un fort couplage entre les flux asthénosphériques et la déformation enregistrée dans la croûte de la plaque supérieure [Jolivet et al., 2013 ; 2015 ; Sternai et al., 2014 ; Menant et al., 2016b]. Cette déformation se distribue généralement sur de larges zones, accommodées par des failles de cisaillement à faible pendage peu profondes (i.e. zone de cisaillement et détachements). Selon Jolivet et al. [soumis], ces zones d’échelle crustale sont caractérisées par une forte asymétrie traduisant une composante de cisaillement simple à l’échelle de la lithosphère. Cette dernière est favorisée principalement par un couplage visqueux entre les flux asthénosphériques sous-jacent et la croûte (e.g. traction ou compression basale), et dans une moindre mesure par les hétérogénéités dans la croûte et la lithosphère (i.e. héritage tectonique).

Figure I.14 : zones de subduction et flux mantelliques à différentes échelles. (a) Evolution progressive de deux de zones de subduction dont la largeur varie selon l’endroit modifiée d’après Schellart et al. [2007]. La figure de gauche montre l’évolution de la zone de subduction de Scotia dont la longueur est estimée à 800 km, et la droite correspond à la zone de subduction Malaisienne dont la longueur est estimée à 4400 km. (b) Modèle global des flux mantelliques à 300 km de profondeur, contraint par des observations basées sur l’anisotropie sismique d’après Conrad & Behn [2010]. Les couleurs et les flèches noires indiquent les mouvements verticaux et horizontaux dans l’asthénosphère, respectivement. Les profiles, indiqués sur la figure de gauche, montrent les anomalies de densité dans le manteau ainsi que le champ de vitesse associée, représenté par les flèches noires. (c) Figure conceptuelle indiquant les mouvements mantelliques à cinématique nord associées à la dynamique du point chaud des Afars d’après Faccenna et al. [2013]. (d) Modèle numérique montrant une vue 3D d’une zone de subduction d’après Menant et al. [2016b]. Les flux mantelliques sont représentés par les flèches rouges. Il est important de noter les composantes poloïdale et toroïdale associées à ces flux.

I.3.4. Thermicité dans les zones de subduction : évolution de la plaque supérieure

Il est important de rappeler que les bassins arrière-arcs sont généralement caractérisés par des anomalies élevées du flux de chaleur, comme l’atteste certaines températures qui atteignent localement jusqu’à 800 °C au Moho [Currie & Hyndman, 2006]. Différentes hypothèses sont proposées dans la littérature afin expliquer ces anomalies, mais aucun véritable consensus n’est établi, probablement à cause de la complexité de la dynamique de subduction. Par exemple, selon Brown [2006], les températures anormalement élevées dans les zones d’arrière-arcs sont principalement liées à une production de chaleur radioactive importante en réponse à une phase de collision continentale. Dans cette continuité, Hyndman et al. [2005] suggèrent que les anomalies thermiques présentes dans les domaines de back-arcs résultent principalement d’un flux de chaleur anormal orogénique marqué principalement par la présence de plutons syn-orogéniques et par du métamorphisme de haut grade (Fig. I.15a). A contrario, des modèles numériques simples remettent en question cette hypothèse. Prenons comme exemple l’étude de Clark et al. [2011]. En surestimant les températures dans leur modèle (à cause d’absence de mouvement latéral car le modèle ne prend en compte que des mouvements verticaux), leurs résultats montrent qu’avec une croûte épaisse (~70 km), une production de chaleur de 2 µW.m-3 dans la croûte supérieure et un taux d’érosion de 0,7 mm.y-1, il est impossible de générer des roches de ultra haute température (UHT ~800‒900 °C). Il faut donc envisager un autre mécanisme couplé au précédent pour apporter la chaleur nécessaire à la formation de ce type de métamorphisme.

Figure I.15 : flux de chaleur orogénique et anomalies thermiques. (a) Modèle conceptuel d’un back-arc considéré comme mobile d’après Hyndman et al. [2005]. (b) et (c) Influence du shear heating sur le gradient géothermique d’après Duprat-Oualid et al. [2013]. Profil vertical d’un modèle numérique 2D à un instant donné montrant une large inversion thermique pour des valeurs de viscosité de l’ordre de 1020.5 Pa.s. La figure de droite montre les profils thermiques associés. Il est important de noter que la production de chaleur par shear heating est importante le long du chevauchement, comme le témoigne les températures anormalement élevées (159 °C à 30 km de profondeur).

Il existe de nombreuses discussions sur les quantités de chaleur produites par « mécanisme de chauffage » dans la croûte. Ce mécanisme appelé “shear heating” (noté Hs) correspond au produit entre le taux de déformation ( ˙) et la contrainte de cisaillement ( ). Même s’il est évident que ce mécanisme est présent lors des phases d’épaississement (i.e. chevauchement) et d’amincissement crustal (i.e.

détachements), aucun consensus sur son influence sur le degré de métamorphisme n’est établi dans la littérature [e.g. Nabelek et al., 2010]. En effet, pour certains, sa contribution est significative et permet d’expliquer par exemple la superposition d’une unité de haut grade métamorphique sur une unité de bas grade dans les chaînes de collision (Figs. I.15b et I.15c) ou encore du métamorphisme de UHT [e.g. Nicolas et al., 1977 ; Scholz, 1980 ; Molnar & England, 1990 ; Leloup et al., 1999 ; Duprat-Oualid et al., 2013] alors que pour d’autres, elle est négligeable [Brun & Cobbold, 1980 ; Fleitout & Froidevaux, 1980]. Dans ce sens, Clark et al. [2011] suggèrent que le shear heating augmente temporairement la production de chaleur dans les premiers stades du fonctionnement de la zone de cisaillement. Cependant

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