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CONCLUSIONS GENERALES

B- LA DYNAMIQUE DE LA SEDIMENTATION DANS LA COLONNE D’EAU

D’une manière générale, la sédimentation en environnement lacustre résulte de l’interaction de divers facteurs d’ordre biologique (production et minéralisation), chimique (pH, potentiel redox) et physique (vents, mélange des eaux...) qui agissent sur les propriétés même du réservoir.

La production phytoplanctonique, dans le lac d’Aydat, qui est principalement représentée par les diatomées, s’enregistre :

(1) minéralogiquement, par la fraction majoritaire des sédiments du lac que constitue la silice biogène de l’ensemble des squelettes siliceux du phytoplancton. Ces flux de silice biogène sont alors plus importants du mois de janvier au mois de juin, durant la phase de croissance printanière des diatomées, qu’en période estivale où les conditions du milieu ne leur sont plus aussi favorables notamment du fait d’une carence en sels nutritifs et en silice dissoute. Ces flux d’opale contrôlent, par conséquent, les flux de Si ainsi que la distribution granulométrique de la fraction de silice biogène (pop. 3 à pop. 6).

(2) "organiquement" (c’est-à-dire en ce qui concerne la matière organique), par de forts flux en carbone organique (Corg) et en sucres neutres. En effet, les flux organiques (Corg et sucres neutres) augmentent dans l’épilimnion, des mois de juin à octobre, lorsque les densités des populations algales (diatomée et cyanobactéries) y sont les plus importantes (Amblard et al., 1988).

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Cette forte production phytoplanctonique en surface du lac implique alors de forts changements chimiques (variation de pH, anoxie des eaux par minéralisation de la matière organique) au sein de la colonne d’eau qui s’enregistrent également dans la fraction solide des sédiments, par la présence de certains minéraux authigènes tels que la calcite et les oxy-hydroxydes de fer et de manganèse. La présence de calcite, qui précipite en surface du lac lors de blooms planctoniques, apparaît donc comme un bon marqueur de l’activité phytoplanctonique, tandis que la présence d’oxy-hydroxydes authigènes, dans la colonne d’eau, à certaines période de l’année, est due à l’oxydation/précipitation de Fe2+ et Mn2+, relargués des sédiments de fond à la faveur de réactions de minéralisation de la matière organique.

Le caractère périodique (annuel) de l’établissement d’un hypolimnion anoxique en période estivale, et du retournement des eaux du lac au mois de novembre, impliquent alors le recyclage interne d’éléments qui passent de la solution au solide et inversement. C’est notamment le cas des éléments sensibles aux conditions redox, comme les éléments majeurs Mn et Fe auxquels viennent s’associer des éléments mineurs tels que Co, P et V. Au total, l’ensemble de ces processus de recyclage d’éléments au sein du système lacustre résulte d’une intrication de cycles géochimiques et biochimiques. Le budget annuel des éléments chimiques du lac d’Aydat (Michard et al.., soumis) montre que les éléments alcalins et alcalino-terreux (Na, K, Rb, Mg, Ca), stables, font l’objet d’un recyclage quasi total tandis que ceux qui sont susceptibles d’exister sous des états d’oxydation différents (Fe, Mn, Co) font l’objet d’un recyclage moindre, de l’ordre de 50 % voire plus. Le couplage étroit entre Fe et P, qui favorise le recyclage du nutriment P dans la colonne d’eau, contribue ainsi à l’entretien du caractère eutrophe du lac d’Aydat. D’autres associations organo-minérales se créent également dans le lac. En effet, Fe2+ est susceptible de se combiner avec des sulfures et de précipiter, ou encore, de réagir avec des nitrates et d’être réoxydé. A l’état oxydé, le fer peut aussi réagir avec des composés organiques présents dans la colonne d’eau, comme cela se produit durant les mois de novembre et de juin où des flux importants de fer ferrique particulaire, contribuent activement à la décantation, voire à la floculation, des constituants organiques présents dans les eaux du lac.

Ainsi, la fraction authigène des sédiments du lac, qui est majoritaire, influence considérablement la sédimentation minérale et organique à travers la colonne d’eau, grâce aux forts

flux de silice biogène mais également aux forts flux organiques qui permettent et entretiennent les réactions biogéochimiques qui contrôle la chimie du milieu.

A l’ensemble de ces processus internes au lac (production, variations redox...) viennent se surimposer des phénomènes extérieurs (vents, apport détritiques...), susceptibles d’entraîner des perturbations dans le réservoir lacustre et donc dans les cycles biogéochimiques qui s’y développent. Les venues latérales de matériel détritiques dans la colonne d’eau s’expriment dans la phase solide des sédiments par des flux plus importants en certains marqueurs géochimiques d’allochtonie, tels que l’aluminium (Al) et les sucres neutres xylose et glucose cellulosique, qui caractérisent respectivement le flux minéral terrigène et le flux de matériel organique terrestre. En revanche, les coups de vents qui provoquent un mélange des eaux de surface, perturbent l’activité et la répartition des populations phytoplanctoniques, ce qui se marque alors par des variations de flux de Si et par des modifications de l’enregistrement granulométrique de la fraction de silice biogène, comme on l’a notamment observé durant le mois de mai.

C- LA DIAGENESE

La diagenèse se traduit par les transformations que subit le flux sédimentaire (minéral et organique) au cours de son transport dans la colonne d’eau et au niveau de l’interface eau-sédiment. L’étude minéralogique et géochimique des sédiments a montré que la fraction terrigène arrivant au lac ne présentait aucune transformation minéralogique significative dans les sédiments du lac d’Aydat. Cette observation s’explique très certainement par la tranche de temps trop brève que représente ce matériel étudié, i.e. au maximum d’un demi siècle. En revanche, les constituants organiques des sédiments du lac sont notablement affectés par les processus diagénétiques (décomposition microbienne de la matière organique, réduction des composés mobiles..). L’étude de ces composés organiques, menée à travers l’abondance et la nature des polysaccharides, choisis pour leur grande biodégradabilité, a ainsi permis de suivre la production de ces composés dans la colonne d’eau et leur évolution durant leur transport et leur incorporation aux sédiments de fond. La diminution des flux de glucose, sucre commun des diatomées et des cyanobactéries, et l’augmentation, des flux en rhamnose et en fucose, sucres des bactéries hétérotrophes, dans la

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colonne d’eau anoxique durant la période estivale, montrent parfaitement l’intensité de l’activité bactérienne dans les eaux du lac, tant dans la production que dans la dégradation des polysaccharides. Cette évolution s’accentue au niveau de l’interface eau-sédiment, où l’on observe une forte diminution des concentrations en sucres neutres entre les sédiments de la trappe inférieure et les sédiments de fond. Ainsi, une part importante de matériel organique qui n’est pas dégradée dans la colonne d’eau, l’est au niveau de l’interface eau-sédiment où, de manière contradictoire l’intensité de la dégradation des polysaccharides se marque par de fortes concentrations en rhamnose, sucre caractéristique des bactéries. Plus en profondeur, cette diagenèse organique se poursuit mais d’une manière plus lente puisque la majorité des composés organiques, peu résistants, ont été dégradés avant leur enfouissement.